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Citations de Juliana Léveillé-Trudel (89)


[...] la terre entière est remplie de connards qui ne pensent qu'à se remplir les poches, comment on fait pour rattraper toutes leurs conneries ?
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[...] Il se sent con, il peut ajouter une autre fille à sa collection de coeurs brisés, parce que le sien est inconsolable, il finit toujours par massacrer ceux des autres, il se dit qu'il devrait éviter les femmes pour les vingt prochaines années, 'damage control'. (...)
Il s'ouvre une bière, il se dit qu'il devrait peut-être retourner dans le Nord pour qu'on lui fiche la paix, je m'excuse mesdames mais je suis un con, je n'y peux rien, vous êtes prévenues.
(p. 177)
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J’aimerais réapprendre à ne rien faire, passer des heures à guetter des oiseaux ou des grenouilles. Inventer des routes sur les cailloux comme sur la rivière de mon enfance, quand on escaladait les rochers avec un sérieux d’alpiniste.

(La Peuplade, p.15)
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.. ils marchent depuis tellement longtemps sur la ligne à ne jamais franchir, ils narguent la mort avec tellement d'irrévérences qu'ils sont intouchables.
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Rivière Foucaud, marée basse. Un champ de roches s’étend du fjord jusqu’au creux de la toundra, entre les deux falaises qui bordent Foucaud la magnifique. Du sable blond vient lécher le fond boueux du cours d’eau temporairement asséché pendant que le soleil fait du fjord un océan d’or, brillant, brillant à s’en arracher les yeux. (...) Il y a des jours où je ferais mon nid dans la toundra, entre le fjord aveuglant et la rivière qui fend le roc de son assurance tranquille, les jours de soleil et de marée basse à la rivière Foucaud.


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Nous vivons dispersés sur cet énorme continent, dans des villes et des villages qui portent de jolis noms à faire rêver les Européens, de jolis noms qu’on s’empresse de traduire parce que nous sommes si fiers de savoir que « Québec » veut dire « là où le fleuve se rétrécit » en algonquin, que « Canada » signifie « village » en iroquois et que « Tadoussac » vient de l’innu et se traduit en français par « mamelles ». Nous avons de jolis mots dans le dictionnaire comme toboggan, kayak et caribou, il fut une époque où des hommes issus des générations de paysans de père en fils entendaient l’appel de la forêt et couraient y rejoindre les « Sauvages », il fut un temps où nous étions intimement liés, nous avons la mémoire courte, hélas.
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[...] il y a des gens qui ne viennent pas au Nord que pour faire de l'argent. Moi, j'aime ça, ici. J'aime les enfants, les gens, la langue, les chiens, le paysage, le soleil de minuit, les aurores boréales, les caribous, la toundra, les montagnes, les balades. J'aime qu'on soit douze dans une boîte de pick-up pour descendre la côte de l'aéroport au grand vent. J'aime les paquebots qui mouillent majestueusement dans la baie et tout le va-et-vient autour. J'aime le fjord peu importe sa couleur et son niveau d'agitation. J'aime cueillir les moules à marée basse et sourire intérieurement en me disant que j'ai chassé mon dîner. J'aime les dos blancs des bélugas qui viennent percer la surface de l'eau, quand j'ai été fine. J'aime les enfants qui se ramènent de la marina avec un trophée de pêche presque plus gros qu'eux, le fabuleux omble chevalier. J'aime me coucher sur les rochers, les jours de temps doux, et fixer au loin le détroit d'Hudson qui m'appelle en chuchotant. [...] J'aime ça ici.
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1er juillet. Vous fêtez le Canada, mais tu n’as pas le cœur à la fête. Tu es venu quand même. Maata a dessiné une feuille d’érable rouge sur la joue de Cecilia. Vous êtes arrivés ensemble, comme une famille. Tu as apporté de la Budweiser en canettes. Maata ne boit pas, tu bois pour deux.
Il y a tellement de gens, tu es étourdi.
La musique est forte : du country en inuttitut. Le drapeau du Canada est imprimé sur des chaises de camping. Un feu de camp où brûlent les vieilles palettes récupérées sur les chantiers. Pas d’arbres, pas de bûches.
Tu marches un peu, tu salues des cousins, des amis.
Tu ne vois pas de Qallunaat. Tu te détends légèrement. Tu n’as rien à craindre, Elijah, les Québécois du Sud n’ont pas souvent le cœur à la fête le 1er juillet, mais tu ne peux pas savoir, tu n’as jamais pensé que tu étais Québécois, tu es Canadien, comme la plupart des Inuits, tu écoutes de la musique en anglais, et des films en anglais, et des émissions de télévision en anglais.
Tu regardes Maata, tu te demandes si elle est déçue, tu cherches la réponse sur son visage, mais tu ne peux rien lire sur sa peau lisse. Tu la laisses parler avec ses copines, tu t’éloignes tranquillement de la fête.
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Comment reprocher à quelqu'un de ne pas maîtriser notre langue quand on ne peut rien dire dans la sienne.
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C'est dangereux pour les belles femmes ici. Dangereux de se faire mettre enceinte, de se faire violer, de se faire trouver jolie par le copain d'une autre. Parce que tout est toujours la faute des femmes, les filles trompées en veulent rarement à leur conjoint, en tout cas jamais autant qu'à leur rivale. Les graffitis qui poussent un peu partout ne mentent pas : "fucking bitch", "slut", la marque des femelles outrées, la signature de celles qui resteront coût que coûte aux côtés de leur homme, et qui vengeront leur peine sur la femme qui a osé toucher à leur "chum", la salope, la sorcière, le diable en personne, rien de moins.
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Aida violée elle aussi au début de l’été, je ne savais pas, je m’excuse, Aida abusée des années auparavant par son propre père et moi la dinde je te chicane pour une job lâchée, vous savez des fois j’en ai plein mon cul de ne jamais pouvoir me fâcher après qui que ce soi parce que vous avez toujours un drame démesuré pour excuser vos manquements.
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Le Nord est dur pour le coeur. Le Nord est un enfant balloté d'une famille d'accueil à une autre, le Nord ne veut pas être rejeté de nouveau, le Nord te fait la vie impossible jusqu'à ce que ton coeur n'en puisse plus et que tu le quittes avant d'exploser, et il pourra te dire voilà : je le savais, tu m'abandonnes. Parce qu'on vous abandonne tout le temps, on a fait de vous des parenthèses à l'infini, des aventures que l'on vient vivre pour un temps avant de retrouver nos vies rangées du Sud ou repartir vers de nouvelles expériences qui nous semblent maintenant plus alléchantes que votre exotisme du Nord.
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Une beauté en forme de coup de poing dans le ventre, il y a juste la toundra qui fait ça, paysage complètement démesuré et bouleversant tout seul au bout du monde avec si peu de gens pour l'admirer.
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Kingnguq
 (Ressentir le besoin de ce qui est disparu)
La question qui me revenait de plus en plus souvent en tête : existait-il une façon de renouer avec eux ? Sans leur dire quoi faire, cette fois. Plutôt en leur laissant la parole, en écoutant leurs histoires. Faire un bout de chemin pour les retrouver dans leur langue.
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Nous vivons dispersés sur cet énorme continent, dans des villes et des villages qui portent de jolis noms à faire rêver les Européens, de jolis noms qu'on s'empresse de traduire parce que nous sommes si fiers de savoir que « Québec » veut dire là où le fleuve se rétrécit en algonquin, que « Canada » signifie village en iroquois ou que « Tadoussac » vient de l'innu et se traduit en français par mamelles. Nous avons de jolis mots dans le dictionnaire comme toboggan, kayak et caribou, il fut une époque où des hommes issus de générations de paysans de père en fils entendaient l'appel de la forêt et couraient y rejoindre les Sauvages, il fut un temps où nous étions intimement liés, mais nous avons la mémoire courte, hélas. Nous ne nous souvenons plus de rien, et dans les villes où le béton cache le ciel, des gens occupés marchent sans se regarder sur les routes qui ont fendu la forêt, et parfois leurs yeux se posent sur eux. Eux, les épaves imbibées d'alcool qui ne sont plus l'ombre des fiers chasseurs qu'ils ont été, eux dont les formidables talents ne trouvent plus leur utilité dans notre assourdissante modernité, eux massacrés jusqu'à la moelle par l'une ou l'autre des merdes qui, paraît-il, viennent inévitablement avec la civilisation. Eux comme une maladie honteuse, comme un malaise énorme au bord du trottoir, comme un enfant-problème qui jette l'opprobre sur ses parents. Ils ont quitté leur réserve ou leur village, ils ont abouti n'importe comment sur le ciment de Montréal, Winnipeg ou Vancouver, ils confortent les gens occupés dans la vision qu'il sont d'eux : des ivrognes, des paresseux, des irresponsables.
Ils atterrissent brusquement dans le champ de vision de Charline, secrétaire, cinquante-quatre ans de préjugés soigneusement entretenus comme la haie de cèdre devant sa maison de Sainte-Julie, cinquante-quatre ans de mauvaises teintures, de salon de bronzage et de télé-romans, cinquante-quatre ans dans toute sa splendeur de contribuable outrée qui a mal à son gros bon sens.
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Vas-y, frappe, c'est rien à côté de ce que j'ai enduré. 
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Je me sens coupable de mon pays riche, de ma famille unie, de mon éducation, j'ai besoin d'éteindre des feux et de sauver des enfants, j'ai besoin de faire quelque chose dans ce monde pourri, j'ai besoin de courir d'une bande de laissés-pour-compte à une autre, j'ai besoin sinon je pourrais m'asseoir et pleurer ou lancer des bombes. Quand ce n'est pas la misère du Nord, c'est celle du Sud, les visages des enfants inuits me suivent jusqu'en Haïti et tout se mélange, le créole et l'inutittut, la peau chocolat et les yeux bridés, le froid et le chaud. J'emmerde le Canada et la France et les Etats-Unis et l'Espagne, tous des salauds, tous des colonisateurs, tous des esclavagistes. Et je meurs de ne pas suffire à la tâche, je ne pourrai jamais dormir, la terre entière est remplie de connards qui ne pensent qu'à se remplir les poches, comment on fait pour rattraper toutes leurs conneries ?
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Parti en fumée à vingt-deux ans, parti gonfler les chiffres épeurants de nos statistiques de détresse qui explosent sous le poids des centaines d'Autochtones qui tirent chaque année leur révérence dans un retentissant fuck off.
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Toi, Eva, tu es allée rejoindre d'autres statistiques, celles des femmes victimes de violence. Pas la violence conjugale, mais ça aurait pu, il y a de l'amour violent entre les murs de ces maisons identiques, il y a de la jalousie féroce, il y a confusion entre aimer et posséder, vous qui possédez beaucoup mais si peu de choses.
Votre maison ne vous appartient pas. Votre terrain non plus. Tout ça vous est gracieusement prêté par le gouvernement. N'est-ce pas qu'on est fins ? On vous pique votre territoire, mais on vous le prête après. Est-ce pour ça que vous avez tellement besoin de posséder ? Des motoneiges, des bateaux, des quads, des camions pour faire le tour d'un village de quatre rues. Pour vous échapper de vos maisons surpeuplées où vous vivez les uns sur les autres. Vous manquez d'espace dans votre immensité nordique. Comment ça se fait que toute cette richesse ressemble tellement au tiers-monde ?
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Tu sais les Blancs achètent leur viande dans des supermarchés, tout est propre, il n'y a pas de plumes, de poils, et surtout pas de sang, surtout rien pour rappeler que ce truc dans un emballage en styromousse courait et pialliait il y a quelques jours encore.
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