Citations de Kimi Cunningham Grant (91)
Elle ne respecte personne, la guerre. Même quand elle ne touche pas au corps, elle abîme l’âme.
Dehors, il fait toujours noir, le soleil ne va plus tarder, les bois sont gris, peuplés d'arbres aux formes menaçantes : sentinelles sombres, soldats.
Je prends le temps de sortir le petit miroir du premier tiroir de la commode. C'est la première fois depuis des années que j'étudie vraiment mon reflet, et je déconseille cette expérience: se voir brusquement dans un miroir après être resté longtemps sans le faire. On se forme une idée fausse de l'apparence qu'on a et, forcément, on a changé. Autant dire que l'effet produit est assez désagréable.
Je n'avais aucune limite parce que j'avais déjà franchi toutes celles qu'on peut imaginer.
Finch me tend la main, et je la fais disparaître dans mon immense paume. Des jours, des jours et encore des jours. C'est ce que je pensais ne plus avoir, et maintenant ils sont de retour.
On vous dit : c’est la guerre, c’est différent. Mais ça ne l’est pas, en réalité. On vous dit ça pour que vous puissiez tenter de vivre avec vous-même. L’ennui, c’est que vous savez ce que vous avez fait, ce que vous avez pris et ce que vous avez perdu, et ça devient votre existence, une part de vous, que ça vous plaise ou non. Et vous ne pouvez jamais complètement vous en dissocier.
Nous marchons lentement, Finch et moi, nous retraversons le bosquet de pins. Au moment où nous allons atteindre la clairière, elle s'arrête, retient son souffle. Elle pointe son doigt devant, sur notre clairière, et me montre Marie, sur les marches du perron, bras grands ouverts, qui appelle doucement un oiseau noir avec un fil rouge à la patte, qui tourne dans les airs et semble envisager de se poser. Un corbeau.
La profusion absolue: trop, beaucoup trop de tout. L'absence totale de modération, de retenue.
A l'instant où je pénètre dans le supermarché, je sens monter une vague de panique, elle s'agrippe à moi comme un nageur qui se noierait au sauveteur le plus proche.
Et le principe de la grâce, c'est qu'on ne la mérite pas.
On doit seulement l'accepter. Où pas.
J’ai toujours été convaincu que si une chose était écrite, et qu’elle n’advenait pas la première fois, alors on avait une seconde chance. Mais je n’ai jamais eu l’audace de croire à la possibilité d’une troisième ou même d’une quatrième chance. D’imaginer que le monde pourrait vous offrir un peu de bonheur après vous avoir, toute votre vie, accablé de peines, comme s’il avait changé de position sur celui que vous êtes et sur ce que vous méritez. Appelez ça comme vous voulez : chance, karma ou, peut-être davantage, grâce.
Le passé n'est jamais mort. Il n'est jamais le passé.
Un jour elle ne s'en contentera plus, évidemment. Elle voudra non seulement entendre parler du monde mais aussi le voir de ses propres yeux. Connaître son goût, le sentir. En faire l'expérience. Impossible de le lui reprocher. Et elle y aura droit, mais pas tout de suite. Car je ne lui ai pas encore raconté la longue et terrible histoire qui explique notre présence ici, les détails de ce que j'ai dû faire pour la récupérer. Elle n'a pas besoin de savoir, enfin pas encore. Elle a huit ans, elle pense que je suis quelqu'un de bien, et je ne cherche pas à la détromper.
C'est ce qui est bien avec les livres. On peut faire l'expérience de différentes existences et de différents endroits à travers eux.
Et le principe de la grâce, c’est qu’on ne la mérite pas. On ne peut rien faire pour l’obtenir. On doit seulement l’accepter.
Je n'ai pas aimé cette expression, "attaque de panique", parce que ça ressemblait bien à un nom inventé par un snobinard en blouse blanche. Et à dire vrai, pourtant, elle était juste. J'avais l'impression de subir une attaque, que le monde s'effondrait sur moi et me prenait au piège. Et puis, s'il y a bien une chose que j'ai apprise au cours de mon existence, c'est que l'esprit est la plus cruelle des armes.
C'est un poème que je recopierai de mon écriture maladroite et que je laisserai à ma fille avant de monter dans ma voiture et de rouler vers la fin de moi-même.
Les gens qu'on a aimés continuent à occuper une petite place dans notre coeur, une place qu'on ne peut jamais vraiment récupérer.
Church Hollywood, l’Eglise du vallon. Le nom était bien trouvé. De gros rochers se dressaient au sommet de la colline et sur ses pentes, si bien que quand on se tenait au fond de la dépression et qu’on levait les yeux, on pouvait avoir l’impression d’être dans une ancienne cathédrale. (…) Il baissa son bonnet sur ses oreilles et porta son regard en direction des arbres. Frêne noir, Fraxina infra. Chêne rouge d’Amerique, quercus rubra. Il avait appris ces noms dans son enfance.
Parce que quand on devient parent, il y a cette chose en vous qui s'épanouit et grandit. On aime comme on a jamais aimé auparavant.
J’étais prêt à n’importe quoi. Je n’avais aucune limite parce que j’avais déjà franchi toutes celles qu’on peut imaginer. Le truc, c’est qu’une fois qu’on est passé de l’autre côté, une fois qu’on a fait presque tout ce qu’on s’était juré de ne jamais faire, on perd aussi une forme de confiance, l’assurance qu’on ne recommencera pas.