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Critiques de Lance Weller (197)
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Les marches de l'Amérique

De beaux billets, des lecteurs conquis, des parallèles avec Lonesome Dove, je partais avec une grande attente.

Trois personnages qui ne m’ont pas fait vibrer, je ne les ai pas « vus » ni compris et leur errance m’a perdue.

Un contexte historique fort, l’émergence d’une nation mais il me manque trop de prérequis en histoire américaine.

De longues descriptions qui m’ont lassée.

Bref, au milieu du gué, j’ai commencé à lire en diagonale.

Il m’a manqué une envie, un plaisir de retrouver les personnages, un je ne sais quoi qui donne le sourire quand on sait qu’on va retrouver son bouquin, son fauteuil et sa tasse de thé.

Un rendez-vous manqué.



« Ce n’était encore rien d’autre que des marches frontières, rien d’autre qu’un territoire sauvage situé entre deux pays, où les hommes pouvaient aller mais où la loi ne les suivait pas. Il leur dit que c’était par le fer, le feu et le sang, qu’on ferait de ce pays autre chose que des marches sauvages, mais qu’on pouvait compter sur les hommes pour cela, parce que c’était ce qu’ils faisaient toujours : partout où ils allaient, les hommes apportaient avec eux le fer, le feu et le sang. »

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Le cercueil de Job

L’une cherche au ciel, dans sa fuite éperdue, la constellation du Cercueil de Job tant de fois évoquée par son père et l’autre convoque avec fatalisme sa mauvaise étoile, celle sous laquelle il est né, causant du même coup la mort de sa mère et la haine de son père. Bell Hood, une esclave de seize ans et Jeremiah Hoke, un soldat confédéré, se sont connus autrefois sur la plantation de Locust Hall dans le Mississippi, mais pas du même côté de la clôture. La Guerre de Sécession, dans toute son horreur et sa cruauté, viendra sceller leur sort au plus fort d’une bataille sanglante, celle de la prise du fort Pillow le 12 avril 1864.

Un roman de chair et de sang qui en dit long sur la grande déchirure des États-Unis survenue au XIXe siècle avec la question de l’abolition de l’esclavage. Lance Weller décrit avec une impitoyable exactitude le lancinant chemin de croix parcouru par celles et ceux qui osaient secouer leurs chaînes, en plus de décrire au plus près de la réalité, les atrocités d’une guerre civile sans pitié. L’auteur a su intégrer cependant quelques îlots de bonté humaine dans un récit dur et intolérable par moments. Nul doute que ce titre ira se loger une place de choix dans ma liste Grande Noirceur.



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Le cercueil de Job

Pour le thème "Girl power" du mois de mars, thème qu'on adore, je pars à la découverte de Bell Hood avec Le cercueil de Job. Déjà je tiens à souligner que cette couverture est incroyable, encore une fois Gallmeister tape fort 😍.



Malgré le fait que les chapitres font entre 50 et 70 pages, un détail qui m'énerve un peu, ce récit est très beau et très cruel aussi. Beau car poétique parfois et pourtant si cruel avec certaines scènes décrites qui donnent mal au cœur.



On est en pleine guerre de sécession, donc vous pouvez imaginer les scènes d'horreur qui se déroulent. Bell Hood est une jeune esclave noire en fuite en compagnie de Dexter qu'elle a rencontré sur son chemin. La jeune fille a le visage marqué au fer rouge et une dent trouée en forme d'étoile, une cruauté représentée qui nous frappe directement. En parallèle, on rencontre Joe Hoke, enrôlé dans l'armée des confédérés qui finira gravement blessé après la bataille de Shiloh.



Les chapitres alternent entre Bell Hood qui cherche à aller vers le Nord avec l'aide des étoiles et qui croisera des horreurs mais aussi l'espoir sur son chemin. Et Joe Hook qui va errer en quête de rédemption et rencontrer pas mal de gens.



Deux destins incroyables liés dans un récit pleins d'émotions, un récit profond avec beaucoup d'horreur mais aussi cet espoir qui ne quittera jamais la courageuse Bell Hood.
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Les marches de l'Amérique

« Tom prit la parole et leur dit que ce n’était encore rien d’autre que des marches frontières, rien d’autre qu’un territoire sauvage situé entre deux pays, où les hommes pouvaient aller mais où la loi ne suivait pas. Il leur dit que c’était par le fer, le feu et le sang, qu’on ferait de ce pays autre chose que des marches sauvages, mais qu’on pouvait compter sur les hommes pour cela, parce que c’était ce qu’ils faisaient toujours : partout où ils allaient, les hommes apportaient avec eux le fer, le feu et le sang. »



Dynamitage en règle du mythe de la Conquête de l’Ouest et de la croyance en une « Destinée Manifeste ».

Lance Weller ne fait clairement pas dans la dentelle et c’est avec application et méthode qu’il va exploser un à un les clichés héroïques et romanesques du mythe dans ce roman intense, brutal et âpre.

Âmes sensibles d’abstenir !



La construction du récit est originale et intelligente. Des allers-retours entre différentes époques permettent de comprendre l’histoire personnelle de chacun des trois personnages et les circonstances dans lesquelles ils se sont rencontrés. De manière plus surprenante, Lance Weller fait le choix de régulièrement court-circuiter le suspense de son récit en annonçant en avance certains évènements. Une manière de focaliser le lecteur sur le sujet central du roman : le constat amer et désolant d’une conquête de l’ouest qui s’est fait dans la violence et dans le sang.



Et en matière de violence rien ne sera épargné au lecteur : massacres, viols, tortures, mutilations. Lance Weller ne fait pas dans l’ellipse pour décrire toutes ces scènes, c’est au contraire brut, direct, sans concession, nous permettant de prendre la mesure du monde sans foi ni loi qu’était l’Amérique en ce milieu du XIXe siècle. On sort de cette lecture avec le sentiment effroyable qu’une vie humaine n’avait finalement que peu de valeur face aux désirs de gloire et de réussite que promettait le Nouveau Monde.



Ce qui est aussi frappant dans le roman, c’est cette impression constance que la nature elle-même, comme contaminée par la violence des hommes, devient elle aussi hostile et effrayante. Cela renforce le sentiment d’oppression qui imprègne le récit et donne encore plus de force et d’impact à l’histoire.



« Le pays était détrempé et désolé, et s’il existait encore du vert dans ce monde, c’était ailleurs, car ici, tout était brun. De la boue et des arbres nus et de la boue et la route défoncée et de la boue. Le gris des cieux, inexorable, le bringuebalement du chariot, interminable, le martèlement chuintant des sabots, qui n’était plus maintenant un bruit aussi agréable à entendre. La pluie tombait, semblant parfois saturer l’air lui-même de telle manière que Flora absorbait les gouttes, si bien qu’il pleuvait à l’intérieur d’elle. »



Tom, Pigsmeat et Flora n’en paraissent que plus esseulés au milieu de toute cette barbarie, contraints parfois eux-mêmes de devoir tuer pour rester en vie et c’est avec résignation et très peu d’espoir qu’on suit leur périple sanglant pour rejoindre le Mexique.



Un roman puissant, saisissant, donc la lecture a été parfois difficile pour moi tant il est marqué au fer rouge par la violence.
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Le cercueil de Job

Mars 1864.

Dexter et Bell Hood, deux  esclaves en fuite pendant la guerre de sécession. Bell Hood a été marquée au fer rouge sur le visage lorsqu'elle était toute petite, pour punir son père qui était un fugitif récidiviste.

Alors qu'elle est pleine de l'envie de marcher la tête haute et de ne plus jamais courber l'échine, Dexter vit dans sa peur de l'homme blanc, instillée en lui depuis son premier jour, et ploie constamment sous le poids de sa couardise. Puis apparaît June, esclave en fuite comme eux.

Au contact de ces trois personnages on découvre peu à peu l'horreur qu'ils ont subi de la part de l'homme blanc.

On ignore l'âge de Bell Hood mais on se rend compte rapidement qu'elle est beaucoup plus mûre que les seize ans qu'elle prétend avoir.

Son repère pour atteindre la liberté est le cercueil de Job, un groupe d'étoiles sur la sphère céleste.



Avril 1862.

Jeremiah Hoke, fait d'une enfance douloureuse, de souvenirs amers et de remords obsédants, soldat sudiste, juste avant, pendant et après la bataille de Shiloh, cette immonde boucherie au cours de laquelle il restera mutilé.



On comprend que les routes de Bell Hood et de Jeremiah Hoke vont converger et se télescoper, qu'ils sont destinés à se trouver.

Avant cela, d'autres personnages traversent ce roman, tous avec un passé terrible, martyrisés, une vie de douleur dans leur sillage, le coeur plein de cicatrices, la tête emplie de cauchemars. On lit avec effroi le pouvoir de nuisance de beaucoup d'êtres humains.

L'auteur alterne les chapitres entre les protagonistes et les années 1864 et 1862 pendant lesquelles on découvre ce qu'ont été leurs vies, jusqu'à arriver tout doucement au point de rencontre. C'est une histoire qui se passe en deux temps, et personnellement j'adore ça.



Tout le long, ce récit pose la question du respect et du droit qu'on s'est inventé pour légitimer l'asservissement d'une partie de l'humanité. En quoi l'esclavage est-il pertinent et digne, comment des gens qui se revendiquent croyants peuvent-ils perpétrer une abomination pareille !?... Ce sont les questions en filigrane de ce roman, mais il y  a bien d'autres sujets, notamment l'absurdité de la guerre, le désir de rédemption, le prix à payer pour ses lâchetés, le poids des remords. Il y a pourtant de l'espérance. Malgré la noirceur ambiante, il y a de la bienveillance parfois qui vient mettre un peu de baume au coeur. Cependant, Lance Weller pousse le réalisme jusqu'à évoquer les bruits et les odeurs infectes de crasse et de matières organiques émanant de tous les orifices, y compris pendant l'agonie, on s'y croirait. C'est répugnant mais tellement immersif.



La construction de l'Amérique, thème de prédilection de Lance Weller, avec tout ce qu'elle a entraîné de désolation et de cruautés nous est racontée une nouvelle fois avec son immense talent. Il nous communique la douleur des personnages ainsi que cet effarant sentiment d'horreur et de malheur qui accompagnaient le commun des mortels en ces temps difficiles. Et toujours avec une écriture qui confine au sublime. J'ai pourtant un peu moins aimé que ses deux précédents romans, comme s'il m'avait manqué un petit quelque chose pour m'attraper totalement par le coeur. Alors qu'il y a tant de vrais beaux personnages.
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Le cercueil de Job

Mais qu’est-ce donc que ce « Cercueil de Job » ? Titre bien peu engageant, mais on se laisse séduire au moins un peu par la couverture de l’édition Totem, y compris en ligne - c'est celle-là même qui était présentée au catalogue de Lirtuel (bibliothèque belge francophone gratuite en ligne) ; pour moi qui suis sensible à cela, eh oui !, cette couverture a un côté indéniablement interpelant, presque envoûtant, et on se rendra compte au fil de la lecture à quel point elle est appropriée.

Cela dit, rassurez-vous : on a dès les toutes premières pages du livre, une évocation de ce qu’est ce fameux Cercueil, à travers les mots de l’héroïne même ; je vous laisse la surprise si vous décidez de lire ce livre, si ce n’est déjà fait. Cependant, un tel titre reste un peu trop impressionnant à mon goût, si bien que j’ai voulu quand même creuser davantage. Ce n’est pas divulgâcher que de dire ce que plusieurs commentaires antérieurs au mien ont déjà révélé : il s’agit d’un astérisme (mot bien savant qui, selon Wiki, est simplement une « figure remarquable dessinée par des étoiles particulièrement brillantes. »), faisant partie de la Constellation du Dauphin, petite constellation de l’hémisphère nord nous dit toujours le même Wiki : un nom que j’avais déjà entendu mais que je serais bien incapable de situer dans un ciel nocturne !



Or, le père de Bell Hood, notre héroïne principale, très jeune esclave (noire, évidemment) en fuite vers le Nord, était parfaitement capable de reconnaître les étoiles, et avait initié sa fille à faire de même, pour qu’elle puisse goûter un jour à cette liberté qu’il n’avait cessé de chercher. Cela n’a pas empêché la jeune fille d’être marquée au fer rouge sur les joues, en « punition » contre son père repris après une énième fuite, et une de ses dents est percée d'un trou en forme d'étoile, pour les mêmes raisons. Le livre commence alors que Bell Hood est en route vers cet improbable Nord, et d’emblée on reconnaît une femme (aussi jeune qu’elle soit) forte et volontaire, forçant une certaine admiration. Tout au long de sa route, elle croisera divers personnages, certains attachants, d’autres beaucoup moins, mais toujours elle restera « debout », envers et contre tout.

En parallèle au chemin de Bell Hood, guidée par ses seules étoiles d’une manière qui peut parfois paraître aléatoire, on suit le cheminement d’un certain Jeremiah Hoke, qui n’est jamais appelé que par son nom. C’est avec lui qu’on entre de plain-pied dans le contexte dur de la guerre de Sécession qui fait alors rage. Il fait partie de l’armée des Confédérés, sans réelle conviction, lui qui vivait alors dans un État pourtant partagé (le Tennessee) entre les deux camps. Gravement mutilé aux mains lors de la tristement célèbre bataille de Shiloh, il est sauvé de façon inattendue alors que tous autour de lui sont morts ou mourants, ce qui fait de lui un pas-tout-à-fait déserteur qui, à partir de là, va entamer une errance sans but, dans une vague recherche de rédemption, lui qui a de plus en plus conscience que l’esclavage n’est pas une bonne chose, mais n’est pas capable d’assumer entièrement ce qui aurait pu être une véritable conviction.

Ces deux destins parallèles finiront bien par se rencontrer tôt ou tard, on le devine dès qu’on a compris que les deux vont nous guider à travers tout le livre, mais c’est loin d’être l’objet principal de l’histoire – et j’ajouterai : heureusement ! car ladite rencontre ne m’a guère convaincue…



C’est ainsi qu’on suit, disais-je donc, les deux personnages principaux à travers des (très longs) chapitres alternatifs entre les deux, avec chaque fois en « appel », soit une retranscription de témoignages oraux d’anciens esclaves, recueillis dans les années 1930 (quand il s’agit de Bell Hood) ; soit de divers documents de / relatifs à la guerre de Sécession (pour Hoke).

Il est certes impossible de vérifier facilement l’authenticité de ces documents : les références qu’en donne l’auteur sont plus que minimales, si bien qu’ils sont introuvables lors d’une recherche « basique » sur Internet. Cependant, on sait que plus d’un témoignage sur des événements durs, et certainement sur les guerres ou sur l’esclavagisme, ont fait l’objet d’interviews retranscrites d’une façon ou d’une autre, formant ainsi, effectivement, une « collection d’histoire orale » comme mentionné ici. De même, on sait qu’il y a eu de nombreux échanges de courriers entre officiers lors de la guerre de Sécession, des lettres de soldats, des notes ici et là, des articles de journaux etc. Ainsi, qu’ils soient authentiques ou juste suggérés (ne serait-ce que par pudeur envers les personnes réelles qui auraient vécu des situations similaires), tous ces passages précédant chaque chapitre n’en donnent pas moins un cachet terriblement réaliste, un caractère encore plus dramatique, à cette terrible (double) page de l’histoire des Etats-Unis.



Je dois ajouter à tout cela que la guerre de Sécession est un événement qui m’a toujours intéressée, peut-être parce que j’ai été bercée (drôle de mot vu le contexte, mais c’est le premier qui me vient à l’esprit !) par la série « Nord et Sud », qui est sortie alors que j’étais encore ado, à la fin des années 1980 – avec le beau Patrick Swayze en personnage principal, côté Sud hélas ! mais ça a sans aucun doute contribué à mon attrait pour cette série. Peu après, d’ailleurs, j’ai lu au moins les deux premiers tomes de la série éponyme, de l’auteur John Jakes, publiés à la même époque chez France Loisirs dont mes parents étaient membres – je le souligne, car bien évidemment, ce sont les personnages principaux de la série télévisée que l’on trouvait en couverture ! Si les livres en question ont disparu depuis longtemps de ma bibliothèque, au fil des différents déménagements de mes parents, j’en garde un souvenir un peu ému – non plus de l’histoire précise des personnages de ces livres, que j’ai même complètement oubliés, mais du sentiment général que ces lectures avaient provoqué en moi.

Partant de là, je me suis donc assez bien intéressée au sujet, que ce soit la guerre même, mais aussi cette ségrégation constante aux Etats-Unis, jusqu’au mouvement des droits civiques, sans pour autant chercher particulièrement des livres qui en parlent, mais ceux sur lesquels je suis tombée au hasard de mes lectures, m’ont toujours beaucoup touchée. Je ne vais pas faire une liste exhaustive ici, mais je peux citer parmi ceux qui m’ont le plus marquée, dans des genres très différents : « Brasier noir » de Greg Iles, « Alabama 1963 » de Ludovic Manchette et Christian Niemiec, « Carnaval » de Ray Celestin, « Le temps où nous chantions » de Richard Powers, ou encore le très réaliste malgré une touche fantastique « Je suis fille de rage » de Jean-Laurent Del Socorro.



Tout ça pour dire que ce livre-ci ne m’a rien appris de bien nouveau sur la guerre de Sécession et/ou sur les traitements réservés aux esclaves noirs à cette époque, et pire encore s’ils osaient revendiquer leur liberté de quelque façon que ce soit. Il n’a pas non plus l’apanage de la violence qui peut être faite à autrui, juste parce que cet autre a une couleur de peau qui le rendrait soi-disant « inférieur » - il y a certes quelques scènes très dures, ici, mais elles rappellent alors certains autres passages insoutenables, relevant de la pure torture, dans le « Brasier noir » précité, par exemple, et le tout vient me hanter… Enfin, je n’ai pas non plus été surprise de lire ici ce qu’on oublie trop souvent : même les soldats de l’Union, les prétendus « bons », n’étaient pas forcément en faveur d’une abolition de l’esclavage, au contraire, certains restant incapables de considérer les Noirs comme des égaux, comme des êtres humains tout simplement – et inutile de rappeler combien l’histoire récente des Etats-Unis prouve que, pour un certain nombre de citoyens, ce n’est toujours pas acquis… La ségrégation même non officielle a encore de beaux jours devant elle !



Alors, pourquoi ce livre-ci m’a-t-il malgré tout paru marquant ?

Outre les appels des chapitres qui donnent ce cachet véridique que j’expliquais plus haut, je pense que c’est lié au développement des personnages. Bell Hood tient bien entendu le haut du pavé, car elle n’est pas seulement désireuse d’atteindre le Nord et de devenir libre, non, elle est déjà libre dans sa tête, dans ses actions, dans sa façon de voir le monde et de « mener » les quelques compagnons de voyage qu’elle se fera au cours de son périple – et ça, vu les circonstances de l’époque, c’est tout simplement remarquable. On a là une Rosa Parks avant l’heure, à une époque où le geste de Rosa Parks n’était absolument pas imaginable ; c’est une héroïne inoubliable (si elle a existé, et même dans le cas contraire, son personnage de fiction a quelque chose de réconfortant) : femme, Noire et libre. À elle seule, elle donne un véritable souffle à ce roman pourtant long, et on aurait eu envie d’en savoir davantage après le dernier chapitre du livre…

À côté d’elle, le personnage de Hoke m’a paru très peu intéressant, voire méprisable. Marqué certes par une enfance malheureuse, qui peut peut-être expliquer certaines choses, il est là à errer dans sa propre vie, du début à la fin de ce livre. Or, même si la bataille de Shiloh semble avoir été déterminante pour lui, elle ne lui donnera pour autant pas les c* d’affirmer ses idées qui s’éloignaient pourtant tellement de celles des Confédérés, à qui il reste attaché d’une façon tout à fait imbécile, malgré son approximative recherche de rédemption.

Ce sont paradoxalement les personnages secondaires qui gravitent autour de lui, qui m’ont semblé les plus attachants : le couple Groff, aussi bien madame qui s’asseoit fermement sur ses idées anti-esclavagistes, que monsieur qui est lui-même à la recherche de sa propre rédemption, après des actes pourtant « humanitaires ». Ou bien le daguerréotypiste Henry Liddell, qui avec son esclave June, « acquis » sur un malentendu et qu’il ne considérera jamais comme un esclave, justement, ouvre tout un monde en couleurs, celui du début de la photographie, mais aussi celui du choix du mot juste pour désigner toute chose, lui qui était si attentif aux détails ; mais encore, et c’est là le plus beau sans doute, il marque l'espoir de la tolérance, d’une certaine fraternité indépendamment de toute considération de race ou d’appartenance.



Ainsi, je peux conclure en disant que ce livre n’est pas forcément indispensable (comme j’ai lu çà et là) pour appréhender cette page de l’histoire américaine, car il en existe pléthore d’autres sur le sujet, et certains sont au moins aussi bons, même si c’est parfois dans des genres différents. Il n’en reste pas moins marquant, essentiellement grâce à son souci d’authenticité, invérifiable mais pour le moins très vraisemblable, et à travers quelques personnages secondaires touchants, et surtout sa personnage principale inoubliable, une femme forte, Noire et libre (au moins dans sa tête, ses actions, sa façon de penser) avant l’heure décidée par d’autres.

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Les marches de l'Amérique

Voilà bien longtemps que ce livre patientait dans ma PAL, et c’est la chronique d’un pote lecteur qui m’a poussé à le sortir enfin.

Je ne sais pas si je dois me réjouir de cette lecture ou en être écœurée. Les 2 sans doute car les pires des exactions sont décrites avec tant de poésie que je n’ai pu qu’en être touchée, parfois émerveillée avec quand même en arrière plan un certain dégoût de cette humanité lancée à la conquête d’un territoire volé .



Le rêve américain ? Pas au 19eme siècle non. Je parlerai plutôt de cauchemar.

J’ai suivi les pérégrinations d’un trio pour le moins hétéroclite, Tom, Pigsmeat et Flora . Les 2 premiers étaient voisins dans leur jeunesse et Flora une esclave qui s’est libérée suite à la mort de son maître.

C’est une sorte de fuite en avant pour ces 3 là, qui errent comme tant d’autres au milieu des étendues sauvages dans cette Amérique en construction. Tous les 3 ont une bien piètre opinion d’eux même. Tom se croit mauvais, Pigsmeat insignifiant et même si Flora dégage une force née de ses humiliations, son humanité en a pris un sacré coup. Ces 3 êtres se sont trouvés et reconnus.



Lance Weller nous décrit la saleté, la pauvreté, la violence de ces « Américains »donc les rêves se sont heurtés à la réalité d’un pays aux étendues infinies, magnifiques et très dur parfois.

Une puissance narrative époustouflante, merveilleuse et triste. Le rêve américain est moche et cette histoire n’a fait que confirmer ce que je savais déjà. Les américains n’ont pas de quoi être fiers car leur passé est jonché d’horreurs où trop d’humains ont payé le prix du sang. Ils se croyaient là plus grande nation au monde, ils ne sont que l’héritage de voleurs et d’esclavagistes.



Une lecture qui ne laisse pas indifférent, marquante même à bien des égards.
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Le cercueil de Job

Au cœur de la guerre de Sécession, Bell Hood, jeune esclave s’enfuit avec l’espoir de trouver des jours meilleurs sous le Cercueil de Job, nom au présage effrayant donné à un astérisme de la constellation du Dauphin.

En parallèle, Jeremiah Hoke, soldat malgré lui servant la Cause, est blessé aux mains lors de l’abominable bataille de Shiloh.

Bell Hood et Jeremiah errent dans le Tennessee, en quête de liberté pour l’une et d’une forme de rédemption en fuyant les champs de bataille pour le second alors que la violence est à son paroxysme.



D’une plume très immersive, cinématographique même, Lance Weller nous entraîne à côté d’eux et au plus près du champ de bataille dans un récit saisissant. Il y a Shiloh, en avril 1862 et Fort Pillow deux ans plus tard. On est dedans, c’est violent, sauvage et sans concession. L’auteur ne nous épargne rien et nous fait affronter des corps déchiquetés, des hommes brisés, la souffrance et la peur. J’ai ressenti l’intensité des combats, le bruit et la fureur, mais pas seulement…

Parce qu’à la barbarie des combats et la cruauté dont l’homme peut faire preuve, Lance Weller oppose, comme par petites touches de lumière, des envolées poétiques, d’une beauté folle qui contrastent avec le réalisme cru de la guerre, comme autant de moments d’espoir volés ça et là.

Il s’appuie pour cela sur une galerie de personnages secondaires extrêmement bien croqués, parfois complexes, toujours émouvants. Ils croisent Bell Hood et Hoke sur un bout de leur chemin et, en les accompagnant et en faisant preuve d’humanité envers eux, touchent à la grâce et illuminent un récit bien sombre.



Je suis sortie de ce tumulte sonnée comme cela m’est rarement arrivée avec l’impression d’avoir vécu un morceau d’histoire.

En résumé, Le Cercueil de Job est un roman épique extrêmement puissant, profondément marquant.

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Le cercueil de Job

Je ferai partie de ceux et celles qui n'ont pas été emporté(e)s par le dernier roman de Lance Weller malgré son indéniable talent.

J'ai gardé un souvenir impérissable de son premier roman, Willderness, j'ai beaucoup apprécié le second, Les marches de l'Amérique, et peut-être en attendais-je trop du dernier, le Cercueil de Job, ou du moins autre chose qu'un autre roman plus axé sur l'éternel tourment dont doivent s'affliger les Sudistes pour avoir utilisé des hommes et des femmes contre leur gré dans leurs plantations que sur la Guerre de Sécession, ses ravages humains et ses conséquences financières.



Cela remonte au 19ème siècle, depuis l'eau à coulé sous les ponts et les américains ont élu un homme noir à la Présidence, ce qui n'est pas encore arrivé en Europe. Ni ailleurs...

J'ai tourné en rond avec ce livre qui ne m'a rien appris et ne m'a pas vraiment fait passer un bon moment.

Je recommande plus volontiers Autant en emporte le vent de Margaret Mitchell, le Sucre de Elizabeth Abbott en non fiction et pour tenter d'appréhender l'Amérique en amont les livres de Russell Banks et de Gilles Havard.

Tout un programme.

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Le cercueil de Job

J' ai beaucoup aimé ce roman à deux voix.

Les chapitres de Belles m'ont particulièrement touchée, ils sont forts, d' une grande poésie, d' une grande beauté. C'est une héroïne attachante différemment des autres héros attachants car en un sens, elle n' a besoin de personne, elle a sa lumière intérieure qui la guide. Elle est très grande, très simple, très mûre aussi.

Quant aux chapitres de Jeremiah, c'est un autre univers. Déjà, j' ai dû m'accrocher car plusieurs termes désignent un même camps, et comme ceux du Nord semblent, finalement, aussi racistes et mauvais que ceux du Sud, ça m'a parfois un peu perdue je dois l'avouer. Un petit lexique ou une note explicative de ce conflit m'aurait bien aidée. Quant au personnage en lui-même, il est touchant aussi, mais de façon plus classique. Il évolue, passant du camps des Sudistes au camp de ceux qui pensent, et son cheminement est intéressant.

Donc un roman très fort, très beau, à lire après révision de la guerre de Sécession
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Le cercueil de Job

Lire « Le cercueil de Job », c’est être pris dans un souffle épique qui ne vous lâche pas. C’est assister de l’intérieur aux maux qui ont ravagé (et le font d’ailleurs encore) les États-Unis : ceux de la traite des Noirs et de ce racisme ancré dans les mœurs, de la guerre de Sécession, avec son lot d’horreurs et d’incompréhension. C’est savoir que le monde peut être très laid, mais être tout de même traversé par quelques lumières qui vous font encore espérer que tout n’est pas fichu. Lire « Le Cercueil de Job », c’est lire un grand livre, un de ceux qui appartiennent à la Littérature avec un grand L, un de ceux qui vous marquent durablement par leur solennité, leur beauté dure.



Le Cercueil de Job, c’est cet astérisme en forme de losange de la constellation du Dauphin, qui est le point de repère, de salut, de la jeune Bell Hood depuis que son père lui a expliqué que « quelque part, là-bas, juste en dessous du Cercueil de Job, il y a un pays où tout existe dans l’Heure bleue tout au long de la journée. Quelque part, là-bas, de l’autre côté du fleuve, ou plus loin, en aval, il est là, et un jour, tu le trouveras. » Cette fuite en direction d’un supposé pays de Cocagne, qui l’éloigne toujours plus de Locust Hall, le lieu sinistre de son esclavage, Bell Hood y croit, ou plutôt elle le sait, avec cette conviction sereine qui lui est naturelle, et elle s’y dirige résolument, en dépit de toutes les difficultés, de tous les dangers, en premier lieu celui de se faire reprendre, qui se trouvent sur son chemin.



Les étoiles sont ainsi la figure tutélaire de ce roman, que leur influence soit positive, en ce qu’elles guident Bell Hood, Dexter et January June, deux hommes également en fuite qui l’accompagneront un temps dans son périple vers le Jubilé (l’émancipation d’un esclave), ou qu’elle le soit moins, à l’instar du trou en forme d’étoile qui a été percé sur l’une des incisives de Bell, rappel à vie des traumatismes que la petite fille a subis dans son enfance. Ceux-ci n’auront toutefois pas réussi à entamer sa personnalité lumineuse, le pétillement qui saisit son visage quand elle sourit, sa force qui impressionne tous ceux qui la croisent et qui les pousse à vouloir lui plaire, afin de se sentir moins petits face à elle, pensée masculine qui sera d’ailleurs un motif récurrent : « […] quelque chose en elle – la forme de ses yeux, ou la façon dont les ombres jouaient sur ses cicatrices, ou tout simplement sa façon d’être – le poussait à vouloir essayer d’être un homme meilleur que celui qu’il était en train de devenir ».



Car si « Le Cercueil de Job » est avant tout le récit d’une fuite vers la liberté, c’est aussi celui d’une hypothétique rédemption pour celui qui ne sait pas trouver le cercueil de Job dans le ciel malgré tous ses efforts, Jeremiah Hoke. Sudiste par malchance, puisqu’il ne partage pas les conceptions esclavagistes de ses congénères, il s’enrôlera quand même, par désespoir sûrement, dans les rangs de l’armée sécessioniste et participera à la sanglante bataille de Shiloh, avant de partir dans une errance sans destination, poursuivi par les drames et les crimes dont il a été le témoin passif. La passivité est d’ailleurs le trait particulier de cette étoile noire, qui étouffe dans la dépression profonde qui l’empêche de se réaliser et de mener une vie normale, alors qu’une chance lui était offerte.



Ce roman présente ainsi différents personnages qui ne se connaissent pas, ou du moins pas tous, mais qui sont reliés les uns aux autres, par un parcours parallèle jalonné par des détails qui semblent posés là par hasard ; on n’y fait pas forcément toujours attention mais on découvre avec stupeur qu’ils prennent leur sens par la suite : un gant donné par un personnage A est trouvé par un personnage B sur un lieu abandonné, une photo d’un personnage C est vue par un personnage D… Ces indices d’un jeu de piste au hasard feint, puisqu’orchestré avec maîtrise par Lance Weller, constituent ainsi les repères de destins liés par une même fatalité, celle de personnages prisonniers de leur situation, qu’ils soient esclaves de naissance ou du fait de leur traumatismes, et qui s’enfuient tous pour trouver leur Jubilé : la liberté.



« Le Cercueil de Job » est un grand roman, âpre et violent autant que poétique, marqué par les odeurs, par les images, qui se vit. J’ai marché de nuit dans la peur et le froid avec Bell Hood, Dexter et January Jones, j’ai souffert avec Jeremiah Hoke ; mais je chercherai désormais toujours avec émotion ce losange étoilé dans la nuit noire. Lisez ce roman !

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Le cercueil de Job

Pendant la guerre de Sécession, Bell Hood, jeune esclave, a pris la fuite et essaie de se diriger vers le nord, en se repérant aux étoiles. Elle suit en particulier les étoiles formant "Le cercueil de Job" dans la constellation du Dauphin. Un nom qui pourrait faire peur ou être perçu comme un mauvais présage.



On suit aussi le parcours de Jeremiah Joe Hoke qui est dans l'armée des Confédérés, participe à la terrible bataille de Shiloh, en ressort mutilé, et déserte l'armée.



L'auteur, Lance Weller, alterne le récit entre le parcours de ces deux personnages principaux. Ils sont parfois accompagnés de personnages secondaires attachants. Lance Weller nous plonge tête première au coeur de la guerre de Sécession, de ses terribles batailles, la bataille de Shiloh et le massacre de Fort Pillow. Avec son écriture nette, précise, intense et sans fioritures, il fait ressortir l'horreur de cette guerre qui a divisé le pays et qui a fait énormément de morts et de blessés. On a l'impression, grâce à son écriture et aux nombreux rebondissements, d'être en immersion au coeur des batailles, de la lutte de Bell Hood pour essayer de s'échapper et aux tourments de Jeremiah Hoke.



J'ai lu ce livre peu de temps après avoir visité le cimetière de Shiloh dans le Tennessee, le site de la bataille et Pittsburgh Landing. Nous sommes aussi passés par la ville de Corinth dans le Mississippi, ville citée dans le livre, où on peut voir les Crossroads, l'intersection des lignes de chemin de fer. La lecture de "Le cercueil de Job" a donc été encore plus percutante pour moi. Une très belle histoire, marquante et poignante. Un très grand merci aux Éditions Gallmeister pour cette lecture qui m'a permis de découvrir la plume de Lance Weller. 😊



J'ai partagé sur la page Instagram du blog quelques photos de Shiloh et Corinth (novembre 2023).
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Les marches de l'Amérique

Et si je faisais bref, pour une fois ? Si j'arrêtais de me triturer lamentablement les méninges pour essayer d'en extraire des phrases à rallonge truffées d'épithètes inutiles, de propositions oiseuses et de compléments d'objets superflus ? Et si je faisais enfin l'impasse sur ce genre d'énumération lourdingue ?

(bon sang, v'là que ça me reprend...)



Reprenons et faisons clair, net, concis : c'était génial !

Génial dès la scène d'ouverture, où une famille de pionniers perdue en plein désert croise la route d'un étrange chariot brinquebalant, mené par deux mules éreintées et trois curieux individus.

Géniale cette construction de l'intrigue qui navigue - dans le désordre - entre 1815 et 1846 pour dresser les portraits des trois occupants (vivants...) dudit véhicule, à savoir Tom le taciturne, pistolero à la gâchette facile et aux migraines épouvantables, Pigsmeat l'ancien soldat jamais vraiment remis des horreurs de la guerre ni de la mort de son épouse, et Flora la belle esclave revenue de l'enfer.

Géniaux ces trois personnages, leurs caractères bien trempés, leurs vices et leurs vertus, leur courage et leur acharnement à survivre dans le monde hostile, âpre et rugueux que nous dépeint superbement l'excellent Lance Weller.

Son style est impeccable et la façon qu'il a de prendre son temps, d'articuler patiemment son récit autour d'une poignée de scènes très fortes entrecoupées de passages plus descriptifs, propices à la contemplation de paysages grandioses et à l'introspection de nos trois voyageurs, est tout à fait remarquable.



Un ciel immense, de la poussière et du vent, des campements de fortune le long de pistes caillouteuses, et sur ces pistes trois vagabonds lancés à la poursuite d'un avenir meilleur, trois êtres qui se débattent et luttent avec leurs démons : indiscutablement, et même si je ne saurais trop comment l'expliquer, son texte a "du grain", du relief, de la profondeur.

Plus qu'un simple western, j'ai d'abord pris plaisir à lire un formidable roman sur l'errance, la fatalité, la quête de liberté et la soif de conquête qui animait, en ce début du XIXème siècle, les hommes de passage dans ces rudes contrées frontalières, zones tampons agitées d'escarmouches fréquentes entre tribus indiennes, autochtones mexicains et pionniers américains.

J'ai même découvert à l'occasion de cette lecture l'acception historique et géographique du mot "marche" (zone de confins entre deux dominations, province située en bordure d’un pays étranger) : c'est bien là que nous conduit Lance Weller, en plein cœur de ce "territoire sauvage [...] où les hommes peuvent aller mais où la loi ne les suit pas".

Quelle aventure !



Après Wilderness, Lance Weller signe là un deuxième "sans faute".

Il me tarde à présent de me plonger (façon de parler !) dans Le Cercueil de Job !

Jamais deux sans trois ?
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Wilderness

J'ai lu il y a quelques temps, "Les marchés de l'Amérique", du même auteur, que j'avais adoré !

Je retrouve ici la plume qui m'avait séduite.

Nous allons suivre Abel, sur deux époques. 1864, Abel est un soldat, il va survivre à la bataille de la Wilderness. Et 1899, il est devenu un vieil homme et vit seul avec son chien.

Mais outre l'histoire captivante de notre protagoniste, c'est l'écriture tonitruante de Lance Weller qui me bouleverse. Il est à la fois capable de décrire les scènes de combat si fidèlement qu'on a l'impression de sentir l'odeur du sang des Hommes qui tombent, et à la fois décrire l'amour qui uni Abel à une petite fille de 7 ans sauvée du froid. La haine de l'ennemi, face à la force de l'amitié de ses frères de combat.

C'est une histoire de destins croisés, de remise en question des hommes et de l'homme, un voyage à travers des paysages à couper le souffle, un récit simple mais suffisamment rempli de détail pour qu'il tienne le lecteur par les tripes tout du long.

Bref, c'est encore une très bonne lecture, publiée chez @editions_gallmeister .

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Les marches de l'Amérique

Alors que l’Amérique poursuit sa marche vers l’ouest, que chaque jour est un combat, que les territoires se gagnent et se perdent, trois âmes cabossées errent sur ces grands espaces arides. Tom, Pigsmeat et Flora n’avaient pas grand chose en commun et pourtant leur rencontre va changer leur destin.



Ouvrir un roman publié chez Totem est souvent gage d’un voyage à couper le souffle. Pari gagné avec Les marches de l’Amérique de Lance Weller… Nous voilà embarqués avec Tom et Pigsmeat aux confins des terres bientôt américaines, aux frontières du Mexique. Le climat est rude, les violences sont quotidiennes et les hommes ont la gâchette facile. Chacun d’entre eux se croit le plus fort, le plus méritant et partage peu.



Et puis parfois, au milieu de tout ça, une amitié naissante devient une raison de vivre. Tom et Pigsmeat se portent l’un l’autre, ils se soutiennent, s’écoutent et avancent ensemble. Ils tuent aussi, se battent et boivent jusqu’à l’ivresse. Pour oublier, effacer, abandonner derrière eux ces idées noires et ces blessures.



Flora, cette jeune femme aussi belle qu’intelligente, force le respect par son courage. A sa manière, avec ses mots, ses gestes tendres, elle va les sauver. Même si la violence et les coups ne sont jamais loin, une vie moins sombre leur ouvre les bras…



Lance Weller a un véritable don de conteur. Au-delà de l’histoire qu’il nous raconte, de ses personnages authentiques, il a son univers, ses mots et son rythme. La chronologie chamboulée du roman est un vrai plaisir de lecture.



Alors n’hésitez plus… mettez un peu d’ombres à vos jours, un chapeau de cowboy à vos nuits et partez au cœur des grands espaces, sur le dos d’une mule ou le chaos d’un charriot. Partez à la rencontre de ces trois âmes blessées et réchauffez vous de leur histoire…
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Les marches de l'Amérique

Si je dois avouer que j'ai eu du mal à rentrer dedans au début, après une cinquantaine de pages, j'ai dévoré ce roman. Quel récit ! Un western captivant comme je les aime et attention avec l'écriture de Lance Weller qui est tellement réaliste on a l'impression d'y être. Et ça n'a rien de joli, entre la chaleur étouffante et la puanteur, la sueur et l'haleine remplie d'alcool, on est servi ! Un duo particulier, Tom le gars mystérieux et Pigsmeat, le gars laid mais sympathique. Ils se retrouvent sur le chemin de Flora, une jeune femme noire à la beauté incroyable qui n'a connu qu'une vie d'esclave sexuelle. Tous les trois perdus, ne sachant qui ils sont, vont se retrouver à marcher vers l'ouest, vers la frontière pour y découvrir quelque chose ou se découvrir eux-mêmes. La plume de Lance Weller mélange violence et horreur avec la beauté des lieux décrits et je crois que c'est ce que j'aime le plus. Une très belle découverte que je vous conseille.

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Le cercueil de Job

Après Les marches de l’Amérique et Wilderness Lance WELLER continue d’immerger son lecteur dans l’Histoire des États- Unis. Dans Le cercueil de Job il nous emmène en plein cœur de la guerre de sécession qu’il va nous montrer sous toutes ses facettes.



Nous rencontrons dans un premier temps Bell Hood et Dexter deux jeunes esclaves en fuite qui se sont rencontrés sur le chemin qu’ils espèrent être celui de la liberté. La rencontre avec ces deux âmes à qui on a arraché l’innocence de l’enfance très tôt est un moment de grâce. Dès les premiers instants le lecteur ressent une profonde empathie pour ces enfants.



Puis nous faisons la rencontre de Hocke, un combattant rebelle, plus par hasard que par conviction. Il ne défend pas une idéologie. C’est un pauvre gosse paumé à qui on a mis une arme entre les mains et qu’on a envoyé à la boucherie. Une histoire intemporelle et universelle. Ce personnage et son regard sur le carnage des champs de bataille fait écho au personnage d’Abel dans Wilderness.



Nous rencontrerons aussi le personnage de June, un esclave lui aussi en fuite qui a eu une vie surprenante et qui porte un regard différent sur le monde. Il se questionne notamment sur le poids des mots. Toute chose porte un nom et cela lui semble important de nommer les choses correctement. Mais la maîtrise des mots n’est pas pour les esclaves. Encore une barrière pour les garder serviles. Les mots sont chargés de pouvoir et pourtant parfois ils sont vains.



Petit à petit, chemin faisant, WELLER va nous dévoiler l’histoire de ces différents personnages avec beaucoup de talent et de subtilité. Une situation, une parole, un regard, … amenant un souvenir. Une phrase ou une situation faisant écho à un autre évènement et donnant ainsi au lecteur le sentiment que tous sont intiment liés par le destin. Un destin symbolisé par les étoiles dont il est très souvent question dans ce livre. Quand on y pense le chemin de fer fictif qui guidait les esclaves vers la liberté se basait entre autre sur les étoiles. Là encore cette référence à fait écho à ma lecture de Wilderness et au personnage d’Abel qui garde le souvenir vivace d’une pluie d’étoiles admirée dans son enfance.



Sous la plume de WELLER la cruauté de la vie apparaît douloureusement belle. C’est un poète de la douleur ; de la dignité dans le désespoir. Il peint des personnages aux âmes pures que toute une vie de violence n’a pas su briser. C’est abrupt, râpeux, violent et doux à la fois. L’espoir est ténu mais tenace et virulent.

Les descriptions de la nature sont belles et poétiques. Des sons, des odeurs, des couleurs. Une beauté qui tranche avec la boucherie des champs de bataille et la cruauté humaine.



D’un point de vue historique ce livre est aussi très intéressant. WELLER nous montre clairement que si le nerf de la guerre semble être l’abolition de l’esclavage c’est loin d’être le cas. Beaucoup de combattants considéraient plutôt cette question comme secondaire. Les combattants de l’Union défendaient l’unicité du pays et les rebelles sudistes voulaient leur indépendance. Cela n’empêchait pas certains confédérés d’être esclavagistes et certains rebelles de ne pas l’être. Je me suis alors fait la réflexion qu’au même moment (1861/1865) les guerres indiennes étaient en cours et que le sang coulait partout. Après avoir fait quelques recherches j’ai appris que certains indiens (ceux des 5 tribus dites civilisées) avaient pris part à la guerre dans les deux camps et que certains d’entre eux possédaient même des esclaves ! Aberrant et complètement incompréhensible!



Une nation qui s’est bâtie sur le sang donc, mais n’oublions pas qu’au même moment la France bâtissait son empire commercial et sa puissance économique grâce à l’esclavage outre mer et que de grandes familles françaises étaient des négriers. On pourrait aussi parler du roi Belge qui faisait couper les membres des enfants des esclaves au Congo qui n’avaient pas été assez productifs. Mais là je m’égare…



Un livre qui m’a donc amené à cogiter mais qui est avant tout d’une grande beauté et surtout très bien écrit. J’aurais pu trouver une citation à chaque page tellement la plume est belle. Mais comme le dit une de mes babel-copine qui se reconnaîtra « La citation est à la littérature ce que la rondelle est au saucisson » et pour ce livre je la rejoins. Les mots de WELLER sortis de leur contexte perdent de leur force et de leur poésie mais lus dans leur intégralité ils ont une âme et le pouvoir de vous étreindre la gorge et vous enserrer le cœur.



Une petite rondelle de saucisson pour vous mettre en appétit : « Et de temps en temps, les étoiles apparaissaient le soir, isolément ou en groupes, comme s’il y avait quelqu’un là haut qui les allumait avec une bougie d’où coulait la cire de la Voie lactée à travers le firmament ».
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Les marches de l'Amérique

LES MARCHES DE L’ AMÉRIQUE de LANCE WELLER

Il naquit le 10 avril 1815 à Plymouth, ses parents le nommèrent Thomas, tout le monde l’appellera Tom. Celle qui aida à l’accoucher mourut dans la semaine, un présage. Peu après la famille migra vers l’Ouest, en Illinois, sa mère pleurait beaucoup, son père lui fredonnait des chansons, Tom se taisait. Autour de leur baraque ils débroussaillent le Bois de la Haine, brûlent des branches et derrière la fumée découvrent quatre indiens qui, interloqués par l’attitude de Tom diront qu’il n’est pas humain, un fantôme. Leurs plus proches voisins sont Zack Spence et son fils Pigsmeat qui deviendra ami avec Tom. En 1846, tous les deux sont partis plus à l’Ouest ensemble, ils sont devenus ce qu’ils portaient dans leur cœur et les cadavres s’amoncellent dans leur sillage, pas toujours de leur faute mais quand Tom est submergé par ses maux de tête il est incontrôlable. Ils sont dans une errance sans fin hérissée occasionnellement de taudis abandonnés. En retournant vers le Missouri, ils découvrent un camp indien brûlé et Tom prend une flèche dans la cuisse qui le mènera au seuil de la mort. Dépenaillés, démoralisés, il ne savent plus où aller, Texas, Mexique, quand ils découvrent à bout de ressources, un camp de pionniers avec des tentes et au milieu des prostituées, une particulièrement, Flora, qui est une superbe esclave appartenant à Gouverneur. Quand ce dernier tombera gravement malade, Flora entraînera Tom et Pigsmeat dans une incroyable épopée dans une Amérique encore incertaine spécialement cette région frontalière du Mexique dont personne n’a le contrôle.

Il y a du Cormac McCarthy chez Lance WELLER, on retrouve cet univers sombre et désespérant aux confins du Mexique et du Texas, ni indépendant ni rattaché où le règne du plus fort est la loi. Je vous conseille vivement ce livre magnifique qui conjugue poésie et réalisme, nature Writing et aventure avec des héros inoubliables.
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Le cercueil de Job

Les horreurs de la Guerre de Sécession à hauteur d’homme et de femme, qu’ils soient rebelles ou esclaves. Rien n’est tout gris ni tout bleu, mais très noir. On se remémore que même les délocrates de Lincoln étaient partagés sur le sort des Noirs. On voit le sort des esclaves en fuite, lorsqu’ils sont rattrapés, et toute la haine des esclavagistes, marchands d’ébène qui se sont mué en généraux, sans autre talent qu’une haine décuplée. Un très beau style, poétique.
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Les marches de l'Amérique

Les Marches de l’Amérique / Lance Weller

L’histoire débute à l’aube du XIX é siècle : nous sommes en 1815 aux confins de l’Amérique ; John Hawkins, sa femme Rachel et leur fils Tom avancent avec leur chariot vers l’Ouest. Ailleurs marchent aussi Zeke Spence et son fils Pigsmeat.

Et plus tard au milieu du siècle, alors que règnent des troubles incessants entre Mexicains et Américains, on fait connaissance avec l’esclave Flora victime de viols à répétition de la part de Boss son patron.

Et plus tard encore on retrouve Tom qui est devenu un homme et a rencontré et fait route avec Pigsmeat Spence. Deux hommes attachants mais violents, capables du meilleur comme du pire et qui tuent facilement. Tous ces être marchent attirés vers l’Ouest : ils connaissent la faim, la maladie, les intempéries, les Indiens, les brigands. Pour eux le pistolet et le couteau sont aussi nécessaires que l’eau pour survivre.

« Si tu veux essayer de vivre comme un homme là-bas, dans ces territoires au-delà de la frontière où le monde est encore sauvage…eh ben, tu vas rencontrer d’autres types sur ton chemin, et il y aura des fois où la seule question à se poser sera lequel va rester en vie. Toi ou lui. Ça sera aussi simple que ça, faudra pas en chercher la raison, parce qu’il n’y aura pas de raison ; Ce sera juste toi ou lui… » Se côtoient tout au long du récit les pionniers, les vagabonds, les brigands hors la loi …parfois au milieu d’une cohue dantesque.

« Le bruit des sabots martelant le sol sans interruption tandis que les chevaux, les bœufs et les ânes chargés de paniers de bât remplis à ras bord tiraient des chariots hors de la ville, en partance pour l’ouest, et gagnaient les grandes plaines herbues, s’enfonçant dans l’or, en direction de la prairie et tout ce qu’elle pouvait recéler, en route pour un monde étincelant, le monde de rêve, de soleil, de ciel bleu et de terre fertile qui s’étendait au-delà de cette prairie. »

La conjonction de trois destinées parallèles qui vont faire équipe crée la trame de ce roman avec un Tom Hawkins beau garçon à la lame et la gâchette faciles, Flora la belle esclave métis forcée à la prostitution par son patron puis par son fils, amoureuse de lectures et assoiffée de connaissance, et Pigsmeat un humble et timide personnage au cœur tendre, un peu répugnant. Tom et Pigsmeat se veulent des justiciers.

Alternent dans ce récit épique barbarie et humanité, horreur et émotion, dans le décor grandiose des états du centre et de l’ouest avec des personnages inoubliables. Il est indéniable que ce roman possède un grand intérêt historique et le travail de recherche documentaire historique de Lance Weller est remarquable.

Lance Weller confirme avec cet ouvrage le talent qu’il a montré dans Wilderness : il est un grand écrivain.

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