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Critiques de Laurent Kloetzer (128)
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Issa Elohim

Lorsque j’ai aperçu « Issa Elohim » dans une petite librairie montmartroise, j’ai immédiatement été attiré par son titre énigmatique, qui mêle Issa, le nom donné à Jesus dans le Coran et Elohim le nom donné à Dieu dans la Torah. J’avais déjà découvert la superbe collection « Une heure-Lumière » qui s’attache à publier des pépites méconnues de Science-Fiction, à travers le très beau roman de Ian McDonald, « Le temps fut », qui explore habilement le thème du voyage temporel.



« Issa Elohim » nous conduit dans un futur proche, où le dérèglement climatique, le terrorisme et les guerres de religion ont bouleversé l’ordre mondial et jeté des millions de réfugiés sur les routes qui mènent à une Europe qui a fermé ses portes. L’agence européenne « Frontex » est ainsi devenue une véritable armée chargée de veiller à l’imperméabilité des frontières européennes.



Dans ce monde menacé par le chaos, des êtres étranges, possiblement extra-terrestres, appelés les Elohim ont fait leur apparition. La secte d’Aion regroupe les croyants pour qui les Elohim sont les nouveaux élus porteurs d’un espoir de rédemption. Les Elohim sont de jeunes hommes dont l’apparition soudaine en tenue d’Adam provoque des troubles électromagnétiques de courte durée, qu’il est impossible de photographier. Ils ont la faculté de disparaître soudainement pour réapparaitre quelques minutes plus tard à quelques dizaines de mètres du lieu de leur disparition, un phénomène appelé le « swap ». Le plus célèbre d’entre eux, dénommé Noïm, a provoqué plusieurs milliers d’accidents cardiaques et au moins trois cents morts, lors d’un show gigantesque organisé à Rio au stade Maracanã.



La narratrice Valentine Ziegler est journaliste dans sa Suisse natale, aussi préservée que sécurisée. Elle entend parler de la présence potentielle d’un Elohim prénommé Issa, dans un camp de réfugiés tunisiens géré par Frontex. La jeune mère de famille, plutôt sceptique face à ce phénomène que de nombreux « croyants » qualifient de nouvelle épiphanie, entreprend le voyage jusqu’au camp où est censé se trouver Issa dans l’espoir de réaliser un reportage digne d’intérêt.



Elle va effectivement rencontrer le nouvel Elohim, dans le camp Frontex d’Araies, accompagné de Wissam, Joseph et Medhi, ses trois inséparables amis qui l’ont découvert, entièrement nu, dans une sorte de cratère au milieu du désert, tel un ange venu des étoiles. Le jeune homme au physique délicat porte la robe traditionnelle islamique, la Jubba, et semble doté d’une sensibilité exacerbée. Et il n’apparaît effectivement pas sur les photographies que tente de prendre Valentine, qui va publier « Un Elohim au camp Frontex d’Araies ? » sur son flux d’information.



Cette rencontre avec Issa va bouleverser les certitudes de la narratrice et remettre en cause sa vision du monde. Elle va également chambouler son existence lorsqu’elle décidera de tenter d’aider le jeune homme à rejoindre la « forteresse » qu’est devenue la Suisse en compagnie de ses amis.



En imaginant une Europe recroquevillée sur elle-même et veillant à rester étanche à l’afflux potentiel de milliers de migrants parqués dans des camps situés à sa périphérie, le court roman dystopique de Laurent Kloetzer questionne sans manichéisme la question migratoire.



En évoquant l’apparition inexpliquée des Elohim, l’auteur interroge la recherche de sens de notre société qui a abandonné toute transcendance, et questionne la possibilité d’une épiphanie qui viendrait bouleverser l’ordre matérialiste établi.



« Issa Elohim » est un récit métaphorique qui soulève de nombreuses questions auxquelles il ne répond que partiellement. Le surgissement d’un « Jesus » musulman évanescent, qui n’a de cesse de disparaître pour réapparaître quelques instants plus tard, garde sa part de mystère et évoque davantage un conte qu’un récit de Science-Fiction « classique ».



Si le parti de pris de ne jamais dissiper tout à fait le halo d’incertitude qui entoure Issa fait le charme du roman, il est en aussi sa limite. Qui est cet Elohim au coeur pur, qui ne semble garder aucun souvenir de sa vie antérieure ? Un extra-terrestre ? Un imposteur ? Un prophète ? Le sauveur d’un monde à la dérive ? Est-il le véritable Jesus dont l’Apocalypse annonce le retour ?



« Voici, je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi » (Apocalypse 3:20)

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Vostok

Un huis-clos en milieu glacé dans un roman de SF, le sujet de "Vostok" avait de quoi faire saliver la fan de "The thing" de Carpenter que je suis. Dans "Vostok", point d'extra-terrestre polymorphe hargneux ni d'explosion de gore mais un bon thriller d'anticipation.



J'ai passé un très bon moment avec ce roman qui m'a également permis de découvrir Laurent Kloetzer. j'avais beau avoir beaucoup entendu parler de lui, en bien, je n'avais jamais lu un de ses romans. Et cette rencontre a été très plaisante et ne sera sans doute pas la dernière.



Indéniablement, Kloetzer sait mener un récit. La mise en place est surprenante. Alors qu'on s'attend à des grands espaces blancs et froids, le récit débute en Amérique du sud, sous le soleil de Valparaiso. L'auteur prend son temps pour installer son récit, poser les enjeux, présenter ses personnages. Cette mise en place offre en plus un contraste saisissant avec la suite de l'histoire. Après le chaud, le froid, le très grand froid. Une fois arrivé à Vostok, le récit prend toute son ampleur et devient très immersif. Les conditions extrêmes sont parfaitement dépeintes. L'auteur sait mettre le lecteur sous tension. Du suspense, "Vostok" n'en manque pas. Et de rythme non plus. Tout en n'étant jamais hystérique, le récit est addictif, les pages tournent toutes seules. L'alternance entre le récit des aventures de Léo et les passages du livre de la scientifique russe est bien menée, éclairant le récit sans trop en dévoiler.



Par contre, je dois avouer que la fin m'a semblé un peu obscure, je n'ai pas tout bien saisi. Mais le voyage m'a tellement plu que la fin importait peu. Kloetzer transcrit parfaitement la magie, la beauté dangereuse de ce bout du monde à la fois mortel et sublime, tellement pur qu'on peut se demander si l'Humain y a sa place.



L'aspect anticipation du récit est léger mais très bien rendu, crédible et réaliste. On y croit complètement. J'ai aussi beaucoup aimé la touche de poésie quasi surnaturelle qu'introduit le personnage du ghost.

Et j'ai surtout aimé ce bel hommage à ces scientifiques aux allures de pionniers, ces aventuriers du savoir qui, comme autrefois les navigateurs partant vers de nouveaux mondes, vont vers le grand inconnu au nom de la connaissance.



Ajoutez à cela que les personnages sont très réussis. Je me suis beaucoup attachée à Léo, jeune fille déterminée, courageuse, intelligente, forte tout en étant sentimentale, un personnage loin de tout simplisme. Les personnages secondaires sont bien campés, ont de l'épaisseur et permettent au huis-clos de bien fonctionner.



Bref, j'ai passé un très bon moment avec "Vostok". Décidément, le club imaginaire me permet de faire de bien belles découvertes (merci à Tatooa et à tous les amis du club imaginaire).



Challenge Multi-défis 2017 - 7 (item 48 : un roman dont l'action se déroule principalement sous la neige)

Challenge ABC 2016-2017 - 13/26
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Vostok

Dans un futur proche, Leo n’a plus que son frère Juan pour seule famille. Son frère est chef du Cartel ce qui laisse peu de liberté de mouvement à Leo. Afin de pouvoir mettre la main sur un secret, Juan et son équipe vont se rendre à Vostok, l’un des endroits le plus froid de la Terre…

Un roman qui fait voyager de l’Amérique du Sud à l’Antarctique, mélangeant des technologies avancées à des apparitions de fantôme particulier (Araucan, le ghost). J’ai beaucoup aimé les descriptions des grandes étendues glacées, le froid mordant… je m’y croyais presque (faut dire qu’au moment où je lisais le livre, il faisait entre -5 et -10°C, pour moi, c’est trèèèès froid). Beaucoup aimé aussi la relation entre Leo et Araucan même si Leo m’a semblé trop mature, par moments. Ce qui m’a gêné, c’est ce début très lent, cette intrigue qui prend le temps de se mettre en place. Pourtant, j’ai beaucoup apprécié le forage de la glace, cette tension entre les différents individus présentes à Vostok. Mais inconsciemment, j’attendais plus…

Quelques reproches mais j’ai globalement aimé cette histoire glacée, à voir si un autre roman de Laurent Kloetzer me séduira plus…

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Issa Elohim

Laurent Kloetzer imagine un futur pas très lointain, une trentaine d’années dans le futur : dans ce monde, les lois et les moyens de freiner la migration se sont renforcés. Et il y a une part de mystérieux avec l’apparition de ce que l’on a nommé les Elohim, ils apparaissent et disparaissent, sont-ils des extraterrestres, des fantômes. Issa, L’un d’entre eux est repéré dans un camp de migrants en Tunisie, une journaliste s’y rend afin d’y faire un reportage, et de mener une enquête.



L’écriture est simple, elle apporte une ambiance de compassion avec le discours à la première personne du singulier par la voix de la journaliste. Le récit est tout en douceur, le merveilleux semble presque naturel, et l’aspect procédural, de répression, de lutte contre l’immigration reste en arrière plan et pourtant, c’est bien en réalité le sujet principal de l’histoire. Par les chemins détournés de la science-fiction et du fantastique, l’histoire dénonce la privatisation des moyens anti-immigrations, de la politique sécuritaire, des moyens administratifs hypocrites. Pas de militantisme outrancier, au contraire, le système mis en place semble naturel pour les protagonistes et ne pose que de très légères crises de conscience.



Le récit est totalement politique, mais ne met jamais les gros sabots, et même il parvient à faire croire que ce n’est absolument pas politique, j’adore cette manière pudique de faire prendre des vessie pour des lanternes. L’auteur semble prendre des précautions : non non, c’est une jolie petite histoire anodine, et c’est effectivement le cas si on se contente du premier degré, par contre, on risque de passer totalement à côté si on ne fait pas marcher ses méninges. Il aborde aussi d’autres thèmes, les religions en particulier, et pareil, elle reste en arrière plan, il les présente comme un passage obligé, la nature angélique des Elohims favorise une certaine mystique, ce thème soulève en réalité plusieurs questions, de mysticisme, de charité, de récupération, d’interprétation subjective…



J’ai adoré la conclusion, je ne m’y attendais pas, et je trouve ce choix particulièrement judicieux, nous laissant dans le doute, mais un doute qui donne à réfléchir, qui ouvre sur notre présent, sur notre vision du monde, en gros, ce que j’attends d’un roman de science-fiction, et celui-ci, bien que très court, est en réalité très intelligent, très riche et très complet.
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Vostok

Un techno-thriller d'anticipation (dans un avenir dystopique qui paraît tout proche) qui commence sur les chapeaux de roue en Amérique du Sud. De quoi choper un coup de chaud vu qu'on était déjà prêt à partir en région polaire, muarf !



La grande force de Laurent Kloetzer ici, ce sont ses personnages. Tous autant qu'ils sont, ils sont tellement réalistes qu'on pourrait presque les toucher. Sauf Araucan, lol, qui est bien intrigant, lui. On nage en plein fantastique et anticipation, habilement mélangés à la réalité de la guerre froide, de la course à la recherche "pour la beauté de la chose" en Antarctique, c'est formidablement tissé, il n'y a pas de doutes.



Leo, le personnage principal, Leonora de son vrai prénom est au début du roman une toute jeune fille rebelle, très bien brossée dans ses contradictions et ses valeurs. En fait c'est un roman d'initiation, d'apprentissage. Leo va évoluer à la vitesse grand V, à la fois à cause de sa situation familiale, et à cause de ce grand voyage en terre hostile, qu'elle n'a pas vraiment voulu mais auquel elle ne pouvait pas non plus se soustraire...



Du côté fantastique, les personnages comme Veronika, ou Araucan, apportent une touche étrangement surnaturelle, étrangement parce qu'à la fois c'est clairement surnaturel, mais également naturel, tant c'est bien écrit. Un style formidablement efficace, qui alterne parfois un genre littéraire, parfois beaucoup plus punchy avec des phrases courtes, sans verbe, pour l'action et les décisions à prendre, quand les événements s'accélèrent.



Quand tout ce petit monde arrive en Antarctique, tout s'apaise. Au début, ils s'organisent, tout semble "normal". Mais au fur et à mesure qu'on avance dans ce livre, on ressent une tension qui s'installe, peu à peu, qui monte en puissance. C'est vraiment très très bien écrit, très bien fait, et c'est une immersion dans l'hiver arctique à laquelle on ne peut pas trop échapper. On souffre avec eux, on se demande où ça va. Il est difficile d'écrire un avis sans rien spoiler, en fait...



Le tout est entrecoupé d'extraits du "livre du bout du monde" de Veronika, on a ici plusieurs histoires qui s'entrecroisent, et, si on ne partage pas la passion de cette dernière pour ce continent désolé, du moins arrive-t-on à la comprendre. Dans ce livre, si on sait très bien où l'on est, on ne sait jamais trop QUAND ! Passé, présent et futur donnent l'impression de tous se passer en même temps. Un vrai tour de force, assez génial, de la part de cet auteur que je ne connaissais pas, un de plus. Il utilise absolument tous les styles à sa disposition pour parvenir à ce but.



Roman d'ambiance avant tout autre chose, une fois qu'on est arrivé en Antarctique, c'est tout à la fois. Pesant, lourd, moche, ou au contraire beau et léger, avec des moments calmes, et d'autres où tout s'accélère, avec des personnages humains, plein de défauts mais aussi de qualités, capables de belles choses comme d'affreuses, ayant tous des buts différents. On passe par toutes les couleurs de l'arc-en-ciel émotionnel avec eux.



Ensuite vient la fin. Je dois dire qu'elle m'a un peu déçue. Je l'ai trouvée rapide, plutôt expédiée que travaillée. Au fur et à mesure que j'avançais je me disais bien que ce livre avait trop peu de pages pour avoir une fin telle que je l'espérais. Mais c'est l'histoire de Leo, pas celle de son monde, c'est ainsi et c'est l'auteur qui décide, pas moi, lol !

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Anthologie des Imaginales 2009 : Rois & Cap..

Je m’attaque enfin aux anthologies des Imaginales d’Épinal, régulières occasions de découvrir ou d’approfondir, par des nouvelles, les univers fantastiques imaginés par quelques-uns des meilleurs auteurs francophones en la matière. Stéphanie lance cette initiative pour les Imaginales 2009 avec le thème « Rois et capitaines », deux figures caractéristiques des récits de fantasy. Le but est ici de mettre en balance deux figures d’autorité et de commandement hiérarchique, les rois et les capitaines, et de considérer leurs interactions dans des univers de fantasy particulièrement divers au vu du sommaire proposé. La majorité des auteurs ont alors opté pour de la fantasy historique, soit comme grande inspiration soit comme véritable toile de fond pour leur nouvelle.



Jean-Philippe Jaworski, l’écrivain lorrain auréolé cette année-là du titre de « coup de cœur des Imaginales » et vainqueur du Prix Imaginales du roman francophone pour son premier roman Gagner la guerre, ouvre cette anthologie de bien belle façon en nous délivrant une nouvelle se déroulant dans le même univers que ce roman-ci et qui aurait pu également se situer dans son recueil Janua Vera. « Montefellòne » est la proie d’un siège dévastateur où se joue sûrement un moment important de la Guerre des Six-Duchés. L’issue vient amèrement conclure notre vision de la relation entre un jeune roi inconsidéré et son fidèle capitaine.

Rachel Tanner, quant à elle, tient à nous narrer l’histoire de « La Damoiselle et le roitelet », où elle s’inspire largement de la destinée de notre Pucelle nationale, Jeanne d’Arc, et de son cher roi, Charles VII, pour raconter une courte épopée guerrière pour son héroïne Catherine. C’est l’occasion pour elle de puiser dans sa connaissance historique du XVe siècle français tout en incorporant la difficile relation entre un roi faible et une capitaine courageuse.

Nous retrouvons ensuite le couple d’écrivains Claire et Robert Belmas, plus habitués à la science-fiction, misent fortement sur des inspirations celtiques pour nous plonger dans une Bretagne féérique mais violente, alors que le roi Artus est mort et que son royaume en proie aux pires tourments, tant guerriers que magiques. Par des chapitres très courts, nous suivons Florée qui, à la fleur de l’âge, fut violemment déflorée, et qui veut devenir capitanea sous l’enseignement du seigneur Bohor. Sa destinée semble alors la porter « Dans la main de l’orage ».

Maïa Mazaurette préfère tourner en ridicule la relation roi-capitaine dans « Sacre » où le très jeune roi Louis est continuellement accompagné de son capitaine Jones, alors qu’Avignon, défendue par sa mère Blanche de Castille, est assiégée par les Albigeois. Dans ce récit largement tendancieux, l’auteur nous narre la découverte du corps adolescent avec juste ce qu’il faut de pensées douteuses et de désirs inavoués. Elle maîtrise parfaitement son sujet et ses sous-entendus.

La glace qui chante, le froid qui prend aux tripes et le désespoir qui envahit esprits, Lionel Davoust opte pour un environnement hostile pour « L’impassible Armada ». Nous suivons une flotte en perdition face à des pirates tout aussi mal en point. L’amour de l’océan et de ses dangers conduit à des dérives meurtrières, mais belles avant tout, autant que le récit de Lionel Davoust.

Avec son décalage habituel, Catherine Dufour nous présente « Le Prince aux pucelles ». Atypique mais chevaleresque de temps en temps, celui-ci porte l’histoire à bout de bras, tout comme ses convictions. Que vaut la fadeur des plus belles entreprises devant la cruauté du quotidien ? C’est un petit peu le paradoxe de ce personnage censé être stéréotypé.

Thomas Day nous livre avec « La Reine sans nom » un récit mortifère, sombre et plutôt triste. L’écriture charismatique de l’auteur de L’Instinct de l’équarisseur et de Sept secondes pour devenir un aigle vaut toujours le détour évidemment, d’autant qu’il opte ici pour du concis, du « court mais probant ». C’est à la fois beau et pesant dès les premiers mots, rythmé et ciselé comme peu de novellistes savent le faire.

Armand Cabasson nous enjoint à suivre un chemin plus tortueux dans les steppes médiévales des peuples russes et ukrainiens. Devant l’assaut des Mongols, Mikhail se retrouve à battre la campagne pour rameuter des alliés, mais aussi pour se recentrer sur ses propres croyances, mises à mal par la situation dantesque et l’émergence d’un « Serpent-Bélier » bien mystérieux. Les religions locales et l’art de la guerre au Moyen Âge sont à l’honneur ici, dans cette longue nouvelle empreinte d’une violence sèche qui réduit la chute à un moment particulièrement rude mais tout aussi marquant.

Pierre Bordage, lui, nous emmène plutôt « Dans le cœur de l’Aaran » (ou plutôt Aaran, au vu de l’orthographe utilisée dans la nouvelle elle-même) au court du récit d’un vieux loup de mer au sujet d’une expédition à la recherche de « l’esgasse », créature fantastique aux pouvoirs bien étranges. Contre vents et marées, la ruée finale se veut à la fois mystérieuse et lançant la place à notre imagination.

Suivre les aventures rocambolesques de Cyrano et d’Artagnan sur la Lune, ça vous dit ? Tant mieux, car c’est du fameux Johan Héliot que nous trouvons perché « Au plus élevé Trône du monde ». Avec ses nombreuses références littéraires et historiques, il nous emmène dans un solide monde rabelaisien à tendance rostandienne. Dans ce contexte qui fleure bon le « cape et d’épée », les forts liens entre la Terre et la Lune renvoient à tellement d’idées romanesques qu’on se laisse facilement porter par cette petite histoire bien conclue. Les habitués de Johan Héliot seront servis à coup sûr.

Seul « petit nouveau » à participer à cette anthologie, Julien d’Hem s’en sort plutôt bien avec « Le Crépuscule de l’Ours ». Par un onirisme fou, nous revivons les souvenirs de ce capitaine-mercenaire, l’Ours, ayant vécu quantité de batailles ardues. Arrivé à la fin de sa carrière, il en revoit quelques-unes alors qu’il aborde un duel sanglant avec un jeune guerrier défendant sa cité.

Nous terminons cette anthologie avec une autre nouvelle pleine d’onirisme. Laurent Kloetzer parcourt pendant « L’Orage » les rêveries, rarement solitaires, de son héros fétiche, Jaël de Kherdan, déjà largement aperçu dans Mémoire vagabonde. On se perd dans son esprit tourmenté de toutes parts par ses anciennes et prochaines conquêtes, par ses précédentes et futures hantises.



La première anthologie des Imaginales comprend donc un « casting all-star » au sein de l’imaginaire français et c’est ce qui fait sa force, puisqu’en explorant des univers très variés, nous ne restons pas toujours sur la même idée de relations entre les figures du roi et du capitaine. Certains auteurs comme Pierre Bordage ou bien Armand Cabasson, et même Laurent Kloetzer, passent quand même à quelques encablures du thème « Rois et Capitaines », mais c’est finalement leur univers qui charme l’imaginaire du lecteur.



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Issa Elohim

« Cher ami, je suis désolé que vous ayez dû endurer de telles épreuves pour parvenir jusqu’ici. Notre pays n’est pas très moderne, il y existe toutes sortes de règles tout aussi difficiles à connaître qu’à éviter, et aucune ne prévoit quoi que ce soit pour les extraterrestres. Je suis si heureux de vous revoir.

– Moi aussi, Mister Boris. Votre visite est très généreuse. »



Ce pays pas très moderne, c'est la Suisse ! Et c'est un politicien nationaliste qui parle à un clandestin, peut-être d'origine extra-terrestre ou peut-être illusionniste doué. On peut aussi, si on est croyant, penser à un prophète envoyé par Dieu, Quel-qu'Iel-Soit...



La narration est menée par une journaliste free-lance, Valentine Ziegler, qui oscille entre doute et envie d'y croire.



Cette novella est ma première incursion dans l'œuvre de Laurent Kloetzer. Le récit a du rythme, de courts chapitres bien pensés. Mais je ne suis pas vraiment parvenu à m'intéresser à cette histoire, lue juste après une lecture prolongée d'un roman d'Antoine Volodine. Tout paraît fade à côté...
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La voie du cygne

Considéré par beaucoup aujourd'hui comme l'un des écrivains français majeurs des littératures de l'imaginaire, au même titre que Jean-Philippe Jaworski (« Gagner la guerre ») ou encore Stéphane Beauverger (« Le Déchronologue », Laurent Kloetzer est incontestablement un auteur atypique. Déçue par ses « Royaumes blessés », déroutée par les nouvelles de ses « Petites morts », c'est non sans une certaine appréhension que je me suis lancée dans la lecture de cette très encensée « Voie du cygne ». Allais-je encore une fois louper le coche ? Et bien non. Soulagement dès les toutes premières pages : cette fois, je suis moi aussi totalement tombée sous le charme du roman Laurent Kloetzer. Un récit à mi-chemin entre la fantasy et le polar se déroulant dans le même univers atlan que la plupart des autres ouvrages de l'auteur et mettant en scène une galerie de personnages impressionnante car particulièrement soignée. En ce qui concerne l'intrigue, Laurent Kloetzer n'hésite pas à allègrement piocher dans la mythologie grecque : des labyrinthes, un monstre, un vieux roi tyrannique et cruel, un inventeur ferru de machines volantes..., bref, vous aurez sans mal reconnu le mythe du Minotaure que l'auteur se rapproprie ici avec brio en le mélangeant à des histoires de cour et de meurtre.



Le symbolisme tient également une place de choix dans ce roman où tout est à double sens et rien jamais certain. Laurent Kloetzer dispose d'un talent indéniable pour manipuler ses lecteurs jusqu'à les rendre presque fébriles et incapables d'émerger de la toile redoutable qu'il a patiemment tissé. Ne vous fiez pas à l'apparente lenteur des premiers chapitres, car une fois les personnages présentés et le décor posé, le rythme se fait endiablé, action, révélations et rebondissements inattendus s'enchaînant de façon de plus en plus précipité et toujours aussi maîtrisée. Le talent de l'auteur réside également dans sa capacité à faire peser sur son récit une ambiance très particulière, comme si les personnages comme le lecteur oscillaient sans cesse entre rêve et réalité. Un onirisme que l'on retrouve d'ailleurs dans la plupart de ses autres romans, qu'il s'agisse du recueil « Petites morts » ou de « Mémoire vagabonde ». « La voie du cygne » m'a à ce propos beaucoup fait penser à l'excellente « Mademoiselle Belle », nouvelle du même auteur mettant en scène une soirée de fête et de jeux dans un jardin aussi merveilleux qu'inquiétant. Le principe est un peu le même ici, avec cette partie de l'oie mortelle réunissant les protagonistes. Un jeu au premier abord tout à fait banal et quelque peu ennuyeux mais que l'auteur parvient à rendre captivant et d'une subtilité insoupçonnable.



Avec « La voie du cygne », Laurent Kloetzer signe un excellant roman possédant plusieurs niveaux de lecture et proposant un dosage parfait entre action et subtilité. L'intrigue, le rythme, le décor, les personnages..., tout est maîtrisé à la perfection afin offrir au lecteur une histoire passionnante, sans aucun temps mort. Me voilà impatiente de découvrir les prochains ouvrages de l'auteur ! Merci à Arakasi pour m'avoir incitée à surmonter mes réticences et à sauter le pas grâce à son élogieuse critique.
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Issa Elohim

Encore une belle réussite de la collection Une Heure-Lumière.



Le décor est hélas devenu conventionnel pour qui souhaite anticiper le futur proche : des camps au Maghreb et au Moyen-Orient, surpeuplés de réfugiés fuyant le terrorisme des hommes et du climat, gérés par des sociétés privées et où les émeutes sont sévèrement réprimées ; une Europe qui s'est refermée sur elle-même et qui accorde des visas au compte goutte. Est-ce encore de la science fiction ?

La SF est plutôt dans l'apparition impromptue et aléatoire de ces Elohim. Sont-ils de nature divine ? Des extraterrestres ? Leur aspect est tout ce qu'il y a d'humain mais peut-être n'est-ce pour eux qu'une sorte de costume…

Certains comportements surprennent quand même… quand on y croit. Des sectes montent cela en épingle pour les adorer. Ce qui est sûr, c'est qu'ils transmettent à leur entourage tout une atmosphère d'amour presque naïf tellement agréable.



Laurent Kloetzer nous raconte la rencontre de Valentine la journaliste avec Issa l'Elohim, et de leurs entourages respectifs. Depuis le camp de réfugiés d'Araies en Tunisie jusqu'aux montagnes suisses, Issa propage sa bonté candide autour de lui, jusqu'au lecteur qui est baigné d'ondes positives. Comme Valentine, on s'attache vite à ce gamin et à ses « frères », ceux qui l'ont vu apparaître. Quel plaisir de voir ces ados qui ont vécus les camps s'éclater sur les pistes de ski.

Et comme Valentine, on est déboussolé à la fin. Une fin ouverte où si peu est résolu… comme dans la vraie vie.



Un conte moderne qui émet de bonnes ondes, cela ne se refuse pas.

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Issa Elohim

Après « L'homme qui mit fin à l'histoire », « Poumon vert » ou encore « Un pont sur la brume », je poursuis avec toujours autant de plaisir ma découverte des novellas publiées par l'excellente collection « Une Heure Lumière » du Bélial. Le principe est ici toujours le même : un texte court n'excédant pas une centaine de pages et une identité graphique particulièrement soignée confiée aux bons soins d'Aurélien Police. Après Thomas Day (qui avait ouvert le bal avec « Dragon » en 2016), Laurent Kloetzer est le deuxième auteur français à participer à cette collection qui, une fois encore, ne démérite pas. La novella met en scène une journaliste suisse, Valentine Ziegler, qui part en reportage dans un camp de réfugiés tunisien où aurait été signalée l'apparition d'un Elohim. Elohim ? Un être mystérieux d'apparence toute à fait humaine mais dont on ignore la nature (extraterrestre pour certains, divine pour d'autre) et sur lesquels une parte de la population a placé tous ses espoirs. C'est au cours de ce reportage que Valentine fait la connaissance d'Issa, le fameux Elohim, ainsi que de trois autres jeunes réfugiés qui l'ont recueilli lors de son apparition sur Terre et qui le considèrent désormais comme leur frère. Bouleversée par cette rencontre et par l'innocence et la douceur du jeune homme, la journaliste entreprend à son retour en Suisse de faire venir Issa et ses frères dans son pays, quitte à s'associer pour cela à un homme politique dont les idées sont pourtant très éloignées des siennes. Le texte s'inscrit semble-t-il dans le même univers que d'autres œuvres de Laurent Kloetzer (merci Xapur) : « Anamnèse de Lady Star » et « Vostok », deux romans qui sont depuis longtemps dans mon viseur (le second sort justement en poche chez Folio SF ce mois-ci) et que je suis d'autant plus impatiente de lire après cette lecture qui ne posera donc aucun souci de compréhension si, comme moi, vous n'êtes pas familiers avec les dernières parutions de l'auteur.



La première force du texte tient évidemment à son cadre très actuel qui permet à l'auteur d'aborder un certain nombre de sujets particulièrement sensibles. Située dans un futur proche ou alternatif, l'action prend ainsi place dans une Europe globalement similaire à la nôtre : de nombreux pays sont en crise partout dans le monde, que ce soit pour des raisons économiques, politiques ou climatiques, et leurs habitants se retrouvent forcés à migrer vers un endroit plus sûr. Dirigés ici par l'agence européenne Frontex, des camps de réfugiés font alors leurs apparitions aux frontières et posent dans l'ensemble des pays européens des questions qui continuent de faire débat parmi la population. Le cadre nous est donc familier, tout comme malheureusement les catastrophes humanitaires qu'il engendre. Par le biais des témoignages des quatre jeunes réfugiés, Laurent Kloetzer souligne notamment les conditions de vie déplorables dans lesquels ces personnes en sont réduites à vivre dans les camps de réfugiés ainsi que la violence à laquelle ils se retrouvent malgré eux confrontés. Le texte nous pousse évidemment à nous interroger sur les politiques migratoires européennes et sur leurs conséquences humanitaires. Le passage de la traversée en mer fait ainsi bien sûr échos à la situation en Méditerranée et, quant bien même le ton n'a rien de plaintif ou de larmoyant, on ne peut qu'être remué par l'angoisse et la détresse qui transparaissent dans ces pages. La noirceur de ce futur déjà présent est fort heureusement contrebalancée par les personnages eux-mêmes, à commencer par Valentine et son entourage qui, par leur solidarité et leur générosité, font naître une lueur d'espoir bienvenue. C'est cette humanité dont la journaliste fait preuve ici qui se situe justement au cœur du texte et qui fait sa plus grande force : les réfugiés ne sont plus ici qu'un « simple » sujet polémique sur lequel se dispute de manière détachée mais des hommes et femmes bien réels face auxquels les étiquettes politiques et les considérations morales ou religieuses volent en éclat.



Si l'ouvrage préfère donc se focaliser avant tout sur l'humain, et n'a par conséquent rien du pamphlet politique, il se garde également de tomber dans une dérive religieuse qui aurait été du plus mauvais goût et que l'auteur esquive ici avec habilité. Alors oui, ces Elohims sont des figures considérées comme messianiques et ont été récupérées par certains cultes ou sectes pour faire la promotion de leur dieu ou leur vision du monde, mais à aucun moment l'auteur ne prend le risque de s'embourber dans des considérations de ce type. Le lecteur comme les personnages sont ainsi totalement libres de se faire leur propre opinion concernant la nature et l'origine de ces Elohims, en fonction de leurs propres références culturelles. L'auteur s'amuse d'ailleurs à jeter un peu plus le trouble dans l'esprit du lecteur lorsque son protagoniste se met à questionner la véracité de la nature d'Issa. Était-il vraiment un Elohim ou un simple mystificateur ayant vu dans le mensonge une opportunité de se mettre à l'abri et d'échapper à sa condition de réfugié ? Car l'apparition de ces créatures mystérieuses n'a pas été sans s'accompagner au fil des années de quantité de hoax circulant sur internet et mettant en scène de faux Elohims cherchant à surfer sur le phénomène pour se faire connaître, ou tout simplement pour se sortir de la misère. Dans sa position, Issa aurait ainsi tout à fait pu être tenté par cette idée et, avec la complicité de ses camarades, monter une mascarade visant à le faire sortir du pays (la preuve le plus probante de la nature des Elohims vient du fait qu'ils disparaissent régulièrement l'espace de quelques minutes avant de réapparaître près du lieu de leur évaporation : une « ruse » compliquée à mettre en scène mais techniquement possible dans certaines circonstances). Les indices allant dans le sens d'une mystification comme dans celui d'une véritable apparition se succèdent au fil des pages, et, là encore, c'est au lecteur de choisir la version qui lui convient le mieux, l'auteur se gardant bien de nous donner une réponse définitive.



Laurent Kloetzer signe avec « Isssa Elohim » un texte court mais percutant consacré à un sujet actuel particulièrement sensible et traité avec beaucoup de délicatesse. La force de l'ouvrage tient d'ailleurs au fait que l'auteur ne nous donne jamais de réponse toute faite mais cherche au contraire à nous pousser à nous interroger, à la manière de ses personnages qui bouleversent avant tout par leur humanité. Une très belle découverte.
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Issa Elohim

Un extra-terrestre ou un prophète, est-ce la même chose ?

Et dans ce cas, qu'est-ce qui les différencient vraiment des humains "normaux" ?

Voilà la question que pose ce court roman.

Nous allons suivre une journaliste qui enquête sur la présence éventuelle d'un Elohim, un être venu de l'espace, qui se trouverait dans un camp de réfugiés en Tunisie.

Un roman étrange qui permet de s'interroger sur ce qui fait de nous des humains, des êtres doués de sensibilité et de compassion ou pas.

A mi chemin de la science-fiction et de la religion, ce roman m'a tenu en haleine et j'ai été très touchée par Issa, le héros, et par le destin de tous ceux qui sont loin de chez eux qu'elle qu'en soit la raison.

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Vostok

Vostok est un roman assez étonnant, à la croisée des genres entre aventure, science, mystère et survie.



Le récit est très détaillé en descriptions scientifiques en rapport au forage de la glace, ou encore les détails de la survie par moins 40°.

L'histoire en elle même est assez simple, nous suivons notre jeune héroïne de 15 ans, son fantôme (un être un peu flou dans le récit), son frère (caïd d'un cartel de Valparaiso ayant des origines d'indien Mapuche et des dons de chamanisme) et ses gardes du corps, sans oublier un scientifique Russe et ses deux collègues.

Ils se retrouvent tous en Antarctique à devoir survivre sur la base Russe de Vostok (abandonnée depuis bien longtemps) suite à leur recherche d'un artefact (dont je ne dirais rien), servant de clé pour atteindre les serveurs réseaux du cartel concurrent, le séjour va durer plus longtemps que prévu.



Léo (Léonora) notre héroïne est agréable, bien que tout de même presque trop parfaite, gentille, serviable, pardonnante, arrangeante,en avançant dans l'histoire elle va tout de même changer et s'affirmer (ce qui n'est pas plus mal car sinon ce serait bien ennuyeux).

Après lecture vous me direz ce que vous en pensez mais personnellement j'ai vraiment eu du mal à comprendre les subtilités du fantôme qui suis Léo, heureusement qu'il n'est pas un personnage trop présent, personnellement c'est le plus gros reproche que je pourrais faire à ce récit.

Les décors eux sont magnifique, Valparaiso dans un futur assez proche (oui ici comme Dragon de Thomas Day, l'anticipation de courte durée est aussi un des seuls points de science-fiction à proprement parlé, peut-être aussi les réseaux internet qui on évolués et sont très développés mais c'est tout) où il fait bon vivre si on a la protection des cartels locaux, et ensuite bien-sûr l'Antarctique avec ses dangers et les fantasmes de conquêtes que peu donner un lieu si peu exploré, mais aussi les danger qui vont avec.



Pour conclure je dirais que Vostok est une belle aventure scientifico-survivaliste avec un brin de fantastique et de SF, j'en attendais tout autre chose, et malgré cela j'ai bien apprécié car le rythme, l'intrigue et l'écriture m'ont fait oublier que le côté SF était minime.



Voir la chronique sur mon blog :
Lien : http://unbouquinsinonrien.bl..
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Mémoire vagabonde

Jaël est un de ces hommes à qui tout semble toujours sourire. Fin bretteur, séducteur, libertin à ses heures, ils sont rares, ceux qui résistent aux charmes de l'écrivain. Et pourtant, Jaël ressent parfois cet étrange sentiment que cette vie n'est pas vraiment la sienne, que des pièces manquent au puzzle et que sa mémoire lui joue des tours. Serait-ce que le personnage de ses romans dont il partage le nom, Jaël de Kherdan, en serait venu à prendre vie en lui ? Impossible ! Et pourtant... Premier roman de Laurent Kloetzer longtemps introuvable et aujourd'hui réédité par les éditions Mnémos, « Mémoire vagabonde » est de ces récits envoûtants que vous ne lâcherez pas une fois immergé dans la lecture, et qui vous hantera encore longtemps une fois la dernière page refermée. On y découvre un univers à la fois foisonnant et intriguant dont l'auteur se servira également pour ses romans suivants, qu'il s'agisse des « Royaumes blessés » ou plus particulièrement de l'excellent « La voie du cygne ». L'essentiel de l'intrigue se déroule dans la ville de Dvern, une cité d'une beauté à couper le souffle mais recelant en son sein de sombres secrets et peuplée de personnages tous plus mystérieux les uns que les autres.



Autant l'avouer dès à présent, je serais bien en peine de trouver un quelconque défaut à cet ouvrage qui m'aura captivée du début à la fin. Laurent Kloetzer tisse les fils d'une intrigue complexe mais qu'il maîtrise à la perfection, jouant avec son lecteur comme son personnage avec une virtuosité remarquable. Jaël est pour sa part un protagoniste d'une grande complexité au sort duquel on ne peut que compatir, et il en va de même pour la plupart des autres personnages du roman. En ce qui concerne le style, Laurent Kloetzer joue là aussi dans la cour des grands, maniant les mots avec un sens de la poésie que je n'avais jusqu'à présent que rarement rencontré. Difficile de ne pas se laisser envoûter, à la fois par la quête du personnage et par les mots de l'auteur qui nous entraîne toujours plus loin encore dans le fantastique, dans le rêve. Et toujours cette mélodie qui résonne encore et encore jusqu'à prendre peu à peu sens au fil du roman : « Jaël est allongé, tournant les pages. Le verre du miroir lui renvoie son image. Il y a sept mers à traverser encore. Et une pendaison à réussir d'abord. Tu dormais Jaël, ou étais-tu éveillé ? Penses-tu quitter la vie sans t'en aller. Si ton corps se balance, verras-tu plus loin. Où est-ce de l'Amance dont tu as besoin ? (les amateurs de musique auront sans doute reconnu une variante des paroles de « Joey » de Noir Désir, un titre que je vous recommande d'ailleurs chaudement d'écouter lors de votre lecture.)



Vous l'aurez compris, me voilà irrémédiablement sous le charme de ce roman comme de son auteur dont je constate avec plaisir que l'excellente réputation n'était pas usurpée. Si vous vous êtes vous aussi laissé séduire par le personnage de Jaël, sachez qu'un recueil de nouvelles intitulé « Petites morts » lui a également été consacré, bien que le ton soit ici légèrement différent que dans « Mémoire vagabonde ». Voilà en tout cas un roman envoûtant à la lecture duquel vous ne sortirez pas indemne. Un très grand merci à Babélio et aux éditions Mnémos pour cette découverte.
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Le royaume blessé

"Écoutez ! Ma parole est vérité ! Voici l'histoire d'Eylir Ap'Callaghan !"



Laurent Kloetzer l’une des plus belles plumes de la SFFF francophone frappe encore :

- un immense empire atlante qui entre dans la modernité

- une Europe encore divisée en peuples et en tribus barbares

- une Méditerranée et un Moyen-Orient partagés entre petits royaumes et grandes Cités-États



Les 100 premières pages nous content l'ascension et la chute d'un Alexandre le Grand celtique (Allander = Alexander) et la suite du roman est un magnifique chassé-croisé entre Eylir à la poursuite de la gloire de son frère aîné et Kyle à la poursuite du héros dont il conte les aventures.



Dans tous les chapitres, quels que soient lieux traversés par les personnages, on est plongé dans une ambiance incroyable où soufflent toutes les formes des vents de l'aventure ! Après 730 pages je me suis dit : C'est déjà fini ? Mais j'en veux encore et encore moi !"



Mais il y a quand quelques trucs chiffonnants, qui pourraient rebuter une partie de ses lecteurs :

- la thématique des 3 rois (blanc = paix, rouge = guerre, noir = mort) n'est pas explicitée jusqu'à son terme

- les chapitres quezako : les passages où Eylir et Kyle voyagent jusqu'aux frontières de la folie (qu'ils franchissent plus ou loin allègrement d'ailleurs) sont assez confus et nébuleux pour moi (oui je sais c'est fait exprès, mais à lire c'est bizarre quand même)

- le destin d'Eylir, roi de la loose particulièrement scoumouneux

("tomber 7 fois, se relever 8" : avec Eylir, je ne sais pas si on doit parler d'abnégation, de fatalisme ou de stupidité)

- l’auteur se perd encore quelques fois pour sa fascination parfois malsaine pour les jeunes filles en fleurs

- le basculement dans le fantastique nous offre de magnifiques moments mais aussi une fin à la limite du WTF



Et puis j'ai adoré les hommages aux grands auteurs :

- le Picte Mak Morn et l'Harmoréen, aventurier la longue chevelure noire et à la musculature puissante qui se déplace tel une panthère

- le titre et le contenu du chapitre "l'arbre du malheur" qui rappelle fortement une scène d’un film en 1981



Toutefois le roman est si dense et si intense, qu’une fois passé l’amère fin on ne peut (veut ?) pas replonger dedans. Qualité d'écriture et esprit d'aventure ne sont pas incompatibles : merci à LK de le prouver une nouvelle fois.

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Issa Elohim

Quoique très bien écrit, ce court récit à propos d'un Elohim, un de ces êtres réputés divins qui surgissent tout à coup d'on ne sait où, m'a un peu laissée sur ma faim.

La novella se lit bien et montre la vie dans les camps de réfugiés et migrants. Si Issa Elohim se passe dans un futur quelconque, cet aspect renvoie à une actualité présente et prégnante. Le périple de Issa et de ses trois amis humains pour traverser frontières et les sentiers alpins jusqu'en Suisse rend compte de ce que vivent chaque jour des centaines de personnes.



Si j'ai bien compris, cette novella ferait partie d'un tout plus ample comprenant L'anamnèse de Lady Star et Vostok. Peut-être la lecture de ces romans m'apportera plus de précisions sur la situation du monde tel qu'elle est définie par Laurent Kloetzler. J'aurais notamment aimé mieux comprendre les tenants de la nouvelle église qui semble se diffuser très largement. De même, la quatrième de couverture annonce des bouleversements climatiques; or l'auteur n'y fait pas référence dans le corps du texte.



A voir donc avec ces deux autres livres. Car pris individuellement, cet Issa Elohim me laisse sur un avis assez mitigé. En revanche, une fois de plus, l'illustration de couverture est absolument magnifique.
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Issa Elohim

Prophète.



Nous sommes quelques décennies dans le futur. De nombreux bouleversements ont accentué les flux de réfugiés. Par ailleurs, des êtres mystérieux apparaissent. Ils sont appelés Elohim.



J'ai trouvé cette novella émouvante. Nous suivons une journaliste qui fait une enquête sur ces apparitions. Ses investigations la mènent vers un camp de réfugié géré par Frontex. Un Elohim s'y trouverait.



L'auteur parle ici, sous le prétexte de la science-fiction, de la crise des réfugiés. Il y est question des camps où survivent ces derniers, de leur (très) relative sécurité. Mais également des stratagèmes des réfugiés pour atteindre l'Europe.



La spiritualité occupe également une grande place dans cette novella. Dans ce futur proche, où les nations se calfeutrent face à l'étranger, les Elohim font office de prophètes des temps modernes. Ceux-ci transcendent les religions, les idéologies, les peuples pour apporter un nouvel espoir. Véritable espoir ou terrible désillusion ?



Bref, cette novella est un véritable coup de cœur.
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Issa Elohim

J'ai acheté ce livre sur un coup de tête, histoire de faire une pause SF avec un texte court, et un français, ce qui ne gâchait rien a priori. Et puis j'avais lu la voie du cygne du même auteur il y a quelques années. A défaut d'en avoir un souvenir précis, et donc impérissable, mon appréciation n'était probablement pas si mauvaise...Mais là...Pouh...que dire ?!



Que j'ai failli abandonner ce petit format de 100 pages ! Tellement je me suis ennuyé et tellement tout est flou, flou, flou...



Le synopsis nous dit qu'on est en Europe, dans un proche avenir, que les déréglements climatiques, le terrorisme et les guerres ont généré des millions de refugiés, autant dire une atmosphère de fin du monde...qu'on ne ressent pas véritablement tant l'auteur ne s'attarde pas sur ce sujet.

Et puis il y a les Elohim, des êtres extra-terrestre au physique d'humains, dont on ne sait pas trop au départ s'ils existent vraiment, dont le principal talent serait de "swaper" (bien joué le terme anglais ça fait toujours son effet, bien que je préfère les swap comme outils de couverture des risques sur les marchés financiers). En gros, ils disparaissent sans prévenir, et réapparaissent on ne sait où quelques minutes plus tard. Pourquoi et à quoi ça sert, on n'en saura rien.

Alors quand on soupçonne la présence d'Elohim dans un camp de réfugiés Frontex, une journaliste suisse, Valentine Ziegler, s'y rend. Elle va prendre sous son aile les Elohim Wissam, Mehdi, Joseph, et son chouchou Issa, avec la bienveillance mesurée d'un politique de son pays, Boris Derivaz, ainsi que de son mari Edward et de ses enfants.

Après...il ne se passe strictement rien, si ce n'est qu'un beau jour, Issa va disparaître définitivement à l'issue d'un swap.



A part les qualifier d'êtres de lumière, souligner l'espoir qu'ils apportent et envisager une Epiphanie (c'est vrai qu'on pense aux Rois Mages avec ces hurluberlus, même si le compte n'est pas bon), on ne voit vraiment pas où l'écrivain veut en venir avec ses sornettes pseudo-religieuses (c'est effectivement vaguement mystique, les personnages font état plusieurs fois d'un Noïm, sorte de Messie des Elohim, mais existe-t-il vraiment ?).



Finalement, je n'ai jamais compris s'il s'agissait de parler des migrants de méditerranée ou des extra-terrestres. Et finalement, je crois que l'auteur ne le sait pas non plus...Enfin, les E.T, si on peut dire, eux qui semblent être venus...de l'intérieur même de la Terre (ce qui est glissé en une ligne, c'est vrai il ne vaut mieux pas trop insister sur cette énormité). S'il s'agissait de traiter du sort des migrants, ce n'est pas convaincant non plus, le focus est mis sur nos Elohim vite exfiltrés. A croire que l'auteur a trouvé dans l'actualité de quoi puiser sans forcer...



Heureusement, nous avons échappé, sûrement de justesse, à l'histoire d'amour impossible entre Valentine, tout chose, et Issa, mais l'auteur n'a pas osé aller jusque-là.



Non, décidément, au risque d'être très dur, je ne sauve pas grand-chose dans ce livre (hormis la qualité d'écriture honorable), tant je n'ai jamais accroché. Pour moi il est complètement raté.

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Vostok

Vostok est le nom d'une véritable station de recherche établie en Antarctique. Installée par les Russes dans les années 1950, la base est réputée pour être la plus difficile d'accès du Pôle sud : située à plus de mille kilomètres de la côte la plus proche et à plus de 3800 mètres d'altitude, elle est balayée en permanence par des vents violents et enregistre des températures records pouvant aller jusqu'à -90°C en hiver. C'est cet endroit du monde, où la nature se fait la plus hostile pour l'homme, que Laurent Kloetzer a choisi comme décor de ce roman époustouflant paru en 2016 chez Denoël et réédité cette année en version poche chez Folio SF. La première partie n'a pourtant, au premier abord, pas grand chose à voir avec les vastes étendues glacées de l'Antarctique. Nous sommes au Chili, dans un futur semble-t-il relativement proche, et nous faisons la connaissance de Léo, une jeune fille menant sa petite bande dépenaillée dans les quartiers pauvres et les navires abandonnés du port de Valparaiso. Son enfance vole toutefois en éclat lorsque son frère, Juan, parvient à se hisser parmi les membres les plus éminents du Cartel, un important gang local tentant depuis des années de percer les défenses de leurs principaux adversaires, bien plus puissants et bien mieux équipés, les Andins. Cette hégémonie, elle leur est assurée grâce à une sorte d'interface, le Vault, qui leur permet de contrôler des technologies novatrices, et qui, évidemment, est réputée impossible à cracker. Mais Juan est ambitieux et tout bascule lorsqu'il entreprend de kidnapper l'une des rares personnes ayant les droits d'accès à l'interface, une vieille femme enseignant à l'université de Valparaiso et ancienne glaciologue. Seulement les choses ne se passent pas comme prévues... Par un malheureux concours de circonstances, le dernier espoir qui demeure pour le Cartel de pénétrer dans le Vault consiste à monter une expédition jusqu'à Vostok où se situerait la mystérieuse clé cachée par la scientifique et permettant d'entrer dans l'interface. Le roman démarre sur les chapeaux de roue et parvient, de manière remarquable, à maintenir cette intensité tout au long de ses cinq cent pages.



Si la première partie se déroulant à Valparaiso et servant à poser le contexte présente énormément d'intérêt, ce n'est qu'une fois notre petite troupe arrivée à Vostok que les choses sérieuses se mettent véritablement en place. Le roman se fait alors huis-clos, et ce malgré l'immensité blanche qui s'étend à perte de vue autour de la base et qui constitue un péril mortel pour les rares humains ayant osé s'aventurer dans les parages. Coincés dans les locaux exigus de la station, les huit membres de l'expédition (dont évidemment Léo et son frère) vont donc devoir non seulement s'acclimater physiquement à des conditions de vie extrêmes (froid, problèmes d'oxygénation...) mais surtout mettre de côté leurs inimitiés pour survivre ensemble à l'expérience et découvrir le secret de Vostok. La fascination exercée par le roman tient évidemment énormément à son décor, ces paysages glacés dont Laurent Kloetzer nous dépeint avec force de détails les dangers mais aussi la beauté. L'immersion est totale pour le lecteur qui ne tarde pas à se laisser envelopper à son tour par toutes les expériences sensorielles auxquelles se retrouvent confrontés les personnages. Il y a d'abord le froid, bien sûr, qui les oblige à superposer des couches et des couches de protection à chaque sortie et qui menace constamment de les emporter. Et puis il y a l'angoisse, une peur presque incontrôlable née du fait de se retrouver à la merci d'un espace si immense et si hostile, qui croît au fil des jours dans le cœur de l'ensemble des membres du groupe jusqu'à faire perdre l'esprit aux plus fragiles d'entre eux. Juan, Léo, Vassili, Jaz, Irvin... : chaque personnage réagit différemment à l'épreuve et tous bénéficient d'un traitement extrêmement soigné de la part de Laurent Kloetzer, attentif à mettre en scène des protagonistes qui sonnent vrais et justes. En dépit de ce décor restreint, l'auteur parvient donc à maintenir le lecteur constamment en haleine, multipliant les rebondissements inattendus qui, chaque fois, viennent rebattre les cartes de manière fort habile.



Le contexte singulier lié à l'Antarctique est évidemment souvent exploité afin de servir de ressort à l'intrigue (contretemps liés au froid, problèmes causés par l'isolement de la base, tensions entre les membres de l'expédition due à l'absence d'intimité...), mais l'auteur n'oublie pas pour autant d'exploiter les particularités de son univers. En dépit de leur isolement, Léo et ses compagnons ne sont en effet pas tout à fait coupés du monde extérieur dont on apprend la situation par bribe et dont les événements vont avoir un impact non négligeable pour la station et ses occupants. On comprend rapidement que le futur dans lequel se déroule l'action ici est le même que celui dépeint dans « Anamnèse de Lady Star » (que je n'ai pas encore eu l'occasion de lire mais qui passe désormais en tête de mes priorités) ainsi que dans le plus récent « Issa Elohim » (publié cette fois chez Le Bélial dans leur collection Une Heure Lumière). Le contexte mondial tel que dépeint ici est en effet globalement similaire puisqu'on retrouve des populations confrontées à une pollution généralisée, un terrorisme qui gangrène l'Europe, et des tensions qui couvent sur l'ensemble des continents. C'est le cas notamment en Amérique du sud où la guerre opposant de gros gangs comme ceux du Cartel et les Andins fait rage. Le principal fil rouge entre ces différents ouvrages me semble également être cette catastrophe inédite (dont je ne dirai rien pour ne pas gâcher la surprise) qui est évoquée dans les trois textes et dont les répercussions sont immenses et dramatiques. Outre sa description de l'évolution de notre contexte mondial, l'aspect futuriste du roman tient à l'hyper connectivité de la société dépeinte par l'auteur, grâce à l'essor de nouvelles technologiques bien plus performants que les nôtres (mais pas détaillées outre mesure, chose que j'ai beaucoup apprécié). Le récit comprend également une importante dimension écologique évoquée lorsqu'il est question des Andins (qui ont, semble-t-il, réussi à s'arroger le contrôle du climat), mais aussi et surtout lorsque l'auteur mentionne les données réunies par les scientifiques travaillant en Antarctique concernant le réchauffement climatique.



Quant bien même le contexte futuriste dépeint ici inscrit sans aucun doute le roman dans la science-fiction, celui-ci comprend pourtant aussi une petite touche de fantastique que l'auteur exploite, là encore, avec finesse. J'ai ainsi pour ma part été particulièrement sensible à ce « petit fantôme » et à sa relation avec Léo que j'ai trouvé très touchante. Le roman entretient également un lien étroit avec notre propre histoire, puisque les chapitres mettant en scène Léo sont parfois entrecoupés de brefs passages consacrés à une autre figure emblématique : Veronika Lipenkova, personnage fictif mais dont le parcours tel que dépeint ici permet de rendre un très bel hommage à toute la communauté scientifique qui a travaillé (et travaille encore) en milieu polaire. En parallèle à l'histoire de Léo et de son frère, le lecteur découvre donc l'histoire de Vostok : la création de la station, les premières missions, les menaces qui ont pesé sur son existence (la base a été fermée temporairement dans les années 1990)... L'auteur nous dépeint également en détail les opérations de forage successives et les difficultés rencontrées, mais aussi le matériel utilisé, ou encore les méthodes d'étude des calottes glaciaires et les informations précieuses qu'elles nous ont livré. La précision dont fait preuve ici Laurent Kloetzer témoigne d'une importante documentation qui repose essentiellement sur les travaux de recherche du glaciologue Jean-Robert Petit, qui a lui-même résidé à Vostok (il a d'ailleurs écris un livre sur le sujet : « Vostok, le dernier secret de l'Antarctique » ainsi que quantité d'articles dont certains sont disponibles sur internet). A travers le récit fictif de cette femme passionnée par l'Antarctique, on réalise le caractère colossal du travail effectué par les chercheurs, résultat de décennies d'efforts, d'affinage de techniques et surtout de coopérations internationales (la compétition entre les Russes et les Américains dans le contexte de la Guerre froide est notamment très bien exposée, de même que la mutualisation des connaissances entre les scientifiques issus de différentes nations). C'est tout simplement passionnant !



Laurent Kloetzer signe avec « Vostok » un roman splendide et remarquable aussi bien par la qualité de ses personnages que de son intrigue ou encore de son univers. L'Antarctique occupe évidemment une place centrale dans le récit qui, grâce à une documentation minutieuse, nous fait découvrir le travail incroyable réalisé sur place par des scientifiques du monde entier, leur rendant pour l'occasion un très bel hommage. Un gros coup de cœur, à lire absolument !



NB : Si vous voulez vous frotter à d'autres récits se déroulant en milieu polaire, je vous conseille « Terreur » de Dan Simmons (un chef d’œuvre consacré à l'échec de l'expédition Franklin en Arctique) ainsi que le roman graphique d'Emmanuel Lepage « La lune est blanche » dans lequel le dessinateur raconte son propre voyage au sein d'une expédition scientifique en Antarctique (ouvrage également illustré de photographies splendides réalisées sur place par le frère de l'artiste).
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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Vostok

Vostok est un texte passionnant, mêlant avec habileté science, anticipation, aventure et fantastique.

A travers l'histoire de la très jeune Leonora le récit nous emmène des collines de Valparaiso au Chili jusqu'à la base de Vostok en Antarctique.

L'univers décrit est riche et l'écriture est vraiment immersive.

Les détails scientifiques parsemés tout au long du livre sont toujours pertinents et renforcent la sensation d'immersion.

J'émets quelques réserves cependant sur l'aspect fantastique du livre qui m'a semblé un peu brouillon, quant à la fin elle est malheureusement peu claire et expédiée trop rapidement.

Une lecture plaisante tout de même qui me donne envie de lire d'autres livres de l'auteur.
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Issa Elohim

Si ce texte n’est pas inintéressant, j’ai trouvé qu’il manquait un peu de matière pour être mémorable. Pourtant, l’idée d’êtres aux pouvoirs étranges, correspondant à des croyances humaines, est prometteuse, posant la question de l’impact de ses individus dans un monde en crise. Laurent Kloetzer nous présente une Europe fermée, partagée entre des camps de réfugiés du sud tandis que les riches peuvent encore partir au ski dans des hôtels de luxe. Cet aspect a quelque chose de percutant, et est amené sans lourdeur par l’auteur. Le roman n’apporte pas vraiment de réponse, ce qui fait partie de l’intérêt, mais m’a donné aussi l’impression diffuse de survoler certaines problématiques.
Lien : https://lageekosophe.com/202..
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