Un glacier est un fleuve de glace qui coule lentement. Comme son lit n'est jamais creusé régulièrement, là où la pente s'accentue (là où l'eau d'un torrent bouillonnerait) se constituent des fissures - ou crevasses ordinaires - qui sont perpendiculaires à la direction générale du glacier.
Pour attirer les lecteurs, il faut faire des romans. Pour les perdre, il suffit de bien écrire.
En ce début d'été, de bon matin, au coeur des Alpes, à l'intersection de deux vallées, sur des chaises en fer vertes, à la terrasse d'un café encore endormi, deux hommes sont assis ; à leur allure et à leur équipement, on reconnaît sans peine des alpinistes (épais vêtements de laine et chapeaux de feutre, sacs à dos, une corde enroulée sur l'un d'eux, longs piolets et lourdes chaussures cloutées -l'histoire se passe dans les années vingt de ce siècle).
Atteindre un sommet solitaire, tant qu’on peut en redescendre, c’est une expérience fort excitante. Mais lorsqu’on séjourne là-haut pour la vie, et lorsqu’aucun autre sommet ne nous fait signe, on finit par se croire sur une étendue morne et plate, on pénètre dans une zone de souffrance déserte, pareille à tous les déserts ; on oublie l’altitude conquise.
L’éternité, l’épouvantable éternité, l’éternité implacable, terrible, cruelle de pareil après-midi qui se déroule inéluctablement minute après minute, -qui pourrait la mesurer, la comprendre ? Même lui, après des jours réconfortants, des jours plus heureux, n’auraient plus de vraie compréhension pour ces interminables heures de torture ; il le sait.
On fit le tour de la bourse, on passa devant de tapageuses affiches politiques ; les unes en appelaient à la violence pour venir en aide aux misérables, aux opprimés, aux travailleurs. Qu’en dis-tu, pauvre créature abandonnée, sans cesse au travail, toi qui passes là, désespérée, qui t’achemines avec peine vers la lointaine écurie ? -Les derniers des derniers ne crient pas, ne parlent pas. Ils ne font que regarder avec des yeux de mort, graves et insondables.
La nuit en montagne rend toute chose plus inquiétante qu'elle n'est, grossit à l'infini le contour et la présence obscure du massif, semblable en vérité à ces créatures démoniaques des rêves qui, dans le demi-sommeil de ces nuits, angoissent parfois même de vieux alpinistes, si sûrs d'eux pendant le jour.
Il approchait déjà le grand surplomb quand - debout sur une sorte de petite plate-forme, il tirait la corde à lui pour la plier - la chose arriva, inconcevable. Lui ne tomba pas mais le piolet tomba. Et c'était presque comme si son compagnon, le dernier compagnon qui lui restait, l'avait abandonné.
"Pourquoi faites-vous l'ascension des montagnes ?"
........ " Pour m'échapper de prison " Et puis ?
Alder est très intelligent, mais rationnel et sans talent particulier .Cet homme moyen n’est pas complètement un homme moyen dans la mesure où il souffre de ne pas être autrement .Mais cette souffrance n’est jamais grande, sinon il ne serait pas un homme moyen.