Avec un sujet « en or », celui de la disparition des abeilles, Maja Lunde ne parvient à offrir qu’un roman certes honnête, mais très prévisible et quelque peu tâcheron. On lui préfèrera de très loin, sur le même thème, celui de Johanna Sinisalo.
Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2023/07/07/note-de-lecture-une-histoire-des-abeilles-maja-lunde/
En 2098, Tao, jeune mère de famille chinoise, se consacre exclusivement, comme l’immense majorité de la population rurale du pays, à la pollinisation manuelle des arbres fruitiers et des cultures vivrières. Depuis la disparition des abeilles, la lutte pour la survie est essentielle et rude.
En 1851, William est un Britannique dans la force de l’âge, jadis apprenti savant naturaliste mais désormais englué dans une vie familiale envahissante, jusqu’à ce que le mépris de son mentor et l’amour de l’une de ses filles le poussent à se remettre aux études, et à décortiquer la vie des abeilles comme cela n’avait que partiellement été fait jusque là par d’autres savants.
En 2007, George est apiculteur dans l’Ohio. Travailleur acharné, encore et toujours méfiant vis-à-vis des méthodes d’élevage les plus « industrielles » adoptées par tant de ses confrères, il se désespère de voir son fils se détourner de la reprise de l’exploitation familiale, et des rumeurs croissantes faisant état de mystérieuses disparitions de ruches entières, dans tout le pays.
Publié en 2015, traduit en 2017 aux Presses de la Cité par Loup-Maëlle Besançon, « Une histoire des abeilles » est le premier roman adulte proposé par la Norvégienne Maja Lunde, opérant avant tout dans le roman jeunesse. Les trois récits entrelacés de Tao, de William et de George proposent une lecture pédagogique du passé, du présent et du futur des abeilles, en tant que principaux vecteurs de pollinisation des cultures, et en tant que victimes depuis déjà quelques années du syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles. Mélange d’enquête historique, de récit contemporain et de projection science-fictive, ce texte au succès mondial aurait certainement pu être un grand roman, avec un pareil « sujet ».
Hélas, entre manque flagrant d’imagination narrative, déroulement particulièrement « pépère », péripéties ultra-prévisibles et sentiments tenaces de « déjà vu ailleurs » (plus la présence de quelques solides clichés un peu partout, présence qui n’atteint pas celle du désastreux « La frontière » (2017) de sa compatriote Erika Fatland, mais qui est tout de même parfois inquiétante), on ne parvient pas ici à s’élever au-dessus du travail honnête, un peu tâcheron, qui peine à tirer réellement parti de son sujet. Mais que la lectrice ou le lecteur se rassurent : sur la disparition des abeilles, en plus du très bon roman policier de Serge Quadruppani (« La disparition soudaine des ouvrières », 2011), le chef d’œuvre que nous méritons existe déjà, puisqu’il s’agit de l’excellent « Le Sang des fleurs » (2011) de la Finlandaise Johanna Sinisalo.
Lien :
https://charybde2.wordpress...