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Citations de Marcel Proust (3653)


Je n’osais pas approcher de cette cloison plus que d’un piano où ma grand-mère aurait joué et qui vibrerait encore de son toucher. Je savais que je pourrais frapper maintenant, même plus fort, que rien ne pourrait plus la réveiller, que je n’entendais aucune réponse, que ma grand-mère ne viendrait plus. Et je ne demandais rien de plus à Dieu, s’il existe un paradis, que d’y pouvoir frapper contre cette cloison les trois petits coups que ma grand-mère reconnaîtrait entre mille, et auxquels elle répondrait par ces autres coups qui voulaient dire : « Ne t’agite pas, petite souris, je comprends que tu es impatient, mais je vais venir », et qu’il me laissât rester avec elle toute l’éternité, qui ne serait pas trop longue pour nous deux.
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Peut-être pourtant, l’instinct de conservation, l’ingéniosité de l’intelligence à nous préserver de la douleur, commençant déjà à construire sur des ruines encore fumantes, à poser les premières assises de son œuvre utile et néfaste, goûtais-je trop la douceur de me rappeler tels et tels jugements de l’être chéri, de me les rappeler comme si elle eût pu les porter encore, comme si elle existait, comme si je continuais d’exister pour elle. Mais dès que je fus arrivé à m’endormir, à cette heure, plus véridique, où mes yeux se fermèrent aux choses du dehors, le monde du sommeil (sur le seuil duquel l’intelligence et la volonté momentanément paralysées ne pouvaient plus me disputer à la cruauté de mes impressions véritables) refléta, réfracta la douloureuse synthèse de la survivance et du néant, dans la profondeur organique et devenue translucide des viscères mystérieusement éclairés.
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Plus près de la mort, il allait un peu moins mal qu’au temps où il venait prendre des nouvelles de ma grand-mère. C’est que de grandes douleurs physiques lui avaient imposé un régime. La maladie est le plus écouté des médecins : à la bonté, au savoir on ne fait que promettre ; on obéit à la souffrance.
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On serait à jamais guéri du romanesque si l’on voulait, pour penser à celle qu’on aime, tâcher d’être celui qu’on sera quand on ne l’aimera plus. Le portefeuille, la bille d’agate de Gilberte, tout cela n’avait reçu jadis son importance que d’un état purement inférieur, puisque maintenant c’était pour moi un portefeuille, une bille quelconques.
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Mangeons mon pain, – Je le veux bien. – Mangeons le tien. – Je n’ai plus faim.
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D’ailleurs, ses moindres paroles m’exaspéraient. Dans l’attente, on souffre tant de l’absence de ce qu’on désire qu’on ne peut supporter une autre présence.
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C’était bien de l’inquiétude pour cette Albertine à laquelle je n’avais pas pensé trois minutes pendant la soirée Guermantes ! Mais, réveillant les sentiments d’attente jadis éprouvés à propos d’autres jeunes filles, surtout de Gilberte, quand elle tardait à venir, la privation possible d’un simple plaisir physique me causait une cruelle souffrance morale.
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Mon Dieu, cela voulait-il dire que personne ne viendrait ! J’étais tourmenté, la visite d’Albertine me semblant maintenant d’autant plus désirable qu’elle était moins certaine.
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Avant de laisser Swann, je lui dis un mot de sa santé. « Non, ça ne va pas si mal que ça, me répondit-il. D’ailleurs, comme je vous le disais, je suis assez fatigué et accepte d’avance avec résignation ce qui peut arriver. Seulement, j’avoue que ce serait bien agaçant de mourir avant la fin de l’affaire Dreyfus.
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À partir d’un certain degré d’affaiblissement, qu’il soit causé par l’âge ou par la maladie, tout plaisir pris aux dépens du sommeil, en dehors des habitudes, tout dérèglement, devient un ennui.
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Je lui demandais si ce qu’on disait de M. de Charlus était vrai, en quoi je mentais doublement, car si je ne savais pas qu’on eût jamais rien dit, en revanche je savais fort bien depuis tantôt que ce que je voulais dire était vrai.
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Les moindres efforts qu’on demande à quelqu’un qui est très malade deviennent vite pour lui un surmenage excessif. Pour peu qu’on l’expose, déjà fatigué, à la chaleur d’une soirée, sa mine se décompose et bleuit comme fait en moins d’un jour une poire trop mûre, ou du lait près de tourner.
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Tout ceci, dira le lecteur, ne nous apprend rien sur le manque de complaisance de cette dame ; mais puisque vous vous êtes si longtemps arrêté, laissez-moi, monsieur l’auteur, vous faire perdre une minute de plus pour vous dire qu’il est fâcheux que, jeune comme vous l’étiez (ou comme était votre héros s’il n’est pas vous), vous eussiez déjà si peu de mémoire, que de ne pouvoir vous rappeler le nom d’une dame que vous connaissiez fort bien. » C’est très fâcheux en effet, monsieur le lecteur. Et plus triste que vous croyez quand on y sent l’annonce du temps où les noms et les mots disparaîtront de la zone claire de la pensée, et où il faudra, pour jamais, renoncer à se nommer à soi-même ceux qu’on a le mieux connus. C’est fâcheux en effet qu’il faille ce labeur dès la jeunesse pour retrouver des noms qu’on connaît bien.
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Dans ce grand « cache-cache » qui se joue dans la mémoire quand on veut retrouver un nom, il n’y a pas une série d’approximations graduées. On ne voit rien, puis tout d’un coup apparaît le nom exact et fort différent de ce qu’on croyait deviner. Ce n’est pas lui qui est venu à nous. Non, je crois plutôt qu’au fur et à mesure que nous vivons, nous passons notre temps à nous éloigner de la zone où un nom est distinct, et c’est par un exercice de ma volonté et de mon attention, qui augmentait l’acuité de mon regard intérieur, que tout d’un coup j’avais percé la demi-obscurité et vu clair. En tout cas, s’il y a des transitions entre l’oubli et le souvenir, alors ces transitions sont inconscientes. Car les noms d’étape par lesquels nous passons, avant de trouver le nom vrai, sont, eux, faux, et ne nous rapprochent en rien de lui. Ce ne sont même pas à proprement parler des noms, mais souvent de simples consonnes et qui ne se retrouvent pas dans le nom retrouvé. D’ailleurs ce travail de l’esprit passant du néant à la réalité est si mystérieux, qu’il est possible, après tout, que ces consonnes fausses soient des perches préalables, maladroitement tendues pour nous aider à nous accrocher au nom exact.
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Les médecins (il ne s’agit pas de tous, bien entendu, et nous n’omettons pas, mentalement, d’admirables exceptions) sont en général plus mécontents, plus irrités de l’infirmation de leur verdict que joyeux de son exécution.
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contrairement à ce que je croyais dans la cour, où je venais de voir Jupien tourner autour de M. de Charlus comme l’orchidée faire des avances au bourdon, ces êtres d’exception que l’on plaint sont une foule, ainsi qu’on le verra au cours de cet ouvrage, pour une raison qui ne sera dévoilée qu’à la fin, et se plaignent eux-mêmes d’être plutôt trop nombreux que trop peu.
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Mais je craignais de faire du bruit. Du reste c’était inutile. Je n’eus même pas à regretter de n’être arrivé qu’au bout de quelques minutes dans ma boutique. Car d’après ce que j’entendis les premiers temps dans celle de Jupien et qui ne furent que des sons inarticulés, je suppose que peu de paroles furent prononcées. Il est vrai que ces sons étaient si violents que, s’ils n’avaient pas été toujours repris un octave plus haut par une plainte parallèle, j’aurais pu croire qu’une personne en égorgeait une autre à côté de moi et qu’ensuite le meurtrier et sa victime ressuscitée prenaient un bain pour effacer les traces du crime. J’en conclus plus tard qu’il y a une chose aussi bruyante que la souffrance, c’est le plaisir, surtout quand s’y ajoutent — à défaut de la peur d’avoir des enfants, ce qui ne pouvait être le cas ici, malgré l’exemple peu probant de la Légende dorée — des soucis immédiats de propreté.
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Depuis qu’il existe des chemins de fer, la nécessité de ne pas manquer le train nous a appris à tenir compte des minutes, alors que chez les anciens Romains, dont l’astronomie n’était pas seulement plus sommaire mais aussi la vie moins pressée, la notion, non pas de minutes, mais même d’heures fixes, existait à peine.
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Toute "nouvelle recrue" à qui les Verdurin ne pouvaient persuader que les soirées des gens qui n'allaient pas chez eux étaient ennuyeuses comme la pluie, se voyait immédiatement exclue. Les femmes étant à cet égard plus rebelles que les hommes à déposer toute curiosité mondaine et l'envie de se renseigner par soi-même sur l'agrément des autres salons, et les Verdurin sentant d'autre part que cet esprit d'examen et ce démon de frivolité pouvait par contagion devenir fatal à l'orthodoxie de la petite église, ils avaient été amenés à rejeter successivement tous les "fidèles" du sexe féminin.
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on n'aime plus personne dès qu'on aime
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