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Critiques de Matt Wagner (76)
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Batman, tome 2 : Année un

Il faut savoir que Batman est de loin le personnage le plus populaire de DC. Urban Comics ne s'y est pas trompé en proposant une collection constituée du meilleur de Batman.



Batman – année un est sans doute le récit de Batman le plus marquant par Frank Miller qui propose une réécriture des origines de notre héros masqué. Il revient après un long voyage initiatique dans sa ville natale bien décidé à la nettoyer au karcher.



Il faut dire que la pègre est partout et que les autorités de la ville ont été gangrené dans la corruption. Fort heureusement, il existe encore des flics intègre comme le lieutenant James Gordon avec qui l’homme chauve-souris va faire une alliance.



Bref, ce titre se concentre sur la première année d'activité du Chevalier Noir et cela ne sera pas triste. C'est parfait pour commencer l’univers Batman pour les néophytes !



A noter une mise en scène ainsi qu'un découpage qui font merveille. L'univers devient réaliste dans son austérité. Mazzuchelli rend les personnages humains et expressifs. Le dessin est véritablement soigné. On observera également une mise en page superbe.



C’est un récit mythique sur le Chevalier Noir, qui inspire encore aujourd’hui des œuvres cinématographique, comme encore récemment avec « The Batman » de Matt Reeves dans le genre thriller psychologique noir et haletant.



Ce titre est à la fois un classique et un incontournable de la saga des Batman. C'est en tous les cas le récit fondateur de l’ère moderne de Batman qui servira de base à tous les supports qui suivront. Un consensus de lecteurs semble dire que ce serait un des meilleurs albums de Batman. C'est l'album à découvrir !

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Batman, tome 2 : Année un

Enfant, j'ai lu beaucoup de comics, Spideman, Dardevil et les X-men, en faite tout ce que Marvel produisaient.

En revanche, les productions DC comics me laissaient de marbre et je les fuyaient comme la peste.

Quand ont est minot, ont cherche du fun, des héros infaillible auquel ont peut s'identifier avec une touche d'humour.....



Ma première rencontre avec Batman date de 1989, à la sortie du film de Tim Burton avec l'excellent Jacques Nicholson mais il a fallu la sortie de la trilogie de Nolan pour que je m'intéresse vraiment à l'homme chauve-souris.

Finalement en vieillissant, je réalise que la frivolité et la superficialité de Marvel me gave, alors que le côté plus mâture de DC m'attire....

Les thématiques développées dans Batman, la vengeance, la corruption, les fragilités psychologique, faire sa propre justice....

Sont des thèmes que je trouve bien riche, après part où commencer quand ont veut lire des récits sur un héros qui a presque 100 ans??



Après m'être renseigné, ont m'a conseillé de lire ce Batman année un , par le légendaire et génial Franck Millier.

Le film the Batman qui est actuellement sur les écrans c'est d'ailleurs beaucoup inspiré de ce comics.



Ont suit l'arrivée du lieutenant Gordon à Gotham city, sa découverte de cette ville gangrenée par le vice et la corruption, en parallèle nous suivons également Bruce Wayne qui rentre à Gotham avec un projet en tête, combattre le crime.



Comics sombre et crépusculaire, l'origine story de notre ténébreux justiciers, vos vraiment le coup d'œil, Bruce est au tout début de sa vocation, il se trompe, se blesse et surtout et sans pitié.

Récit finalement très réaliste, pas de méchant avec super pouvoirs, juste des criminelles qui ce retrouvent face à un justicier autoprclamé qui se met en danger...





Ce comics est considéré comme un chef-d'œuvre dans sont genre, je ne peux que souscrire à ce constat, il amène une vraie profondeur à notre enquêteur masqué et pause la base à une vision plus moderne et adulte du super-héros.

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Batman, tome 2 : Année un

Ce 2eme volet nous retrace les premiers pas de Brucf Wayne en tant que Batman et sa relation pleine de compromis avec Jim Gordon seul réel soutien du Chevalier Noir au sein des autorités de Gotham...

On découvre ensuite l'un des premiers grands méchants de Gotham en la personne du savant fou, le professeur Hugo Strange...

Beaucoup de rythme pour ces 2 somptueuses histoires

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Mage - The Hero Defined, tome 4

La magie n'est pas une couleur : elle est la couleur.

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Ce tome fait suite à Mage - The Hero Discovered, tome 3 (épisodes 1 à 8) qu'il faut avoir lu avant. Il regroupe les épisodes 9 à 15, initialement parus en 1998/1999, écrits, dessinés et encrés par Matt Wagner, mis en couleurs par Jeromy Cox, avec un lettrage de Sean Konot.



Dans un appartement de Montréal, Kevin Matchstikc, Joe Phat et Wally Ut sont en train de regarder les trois sœurs sorcières en train d'accomplir un rituel en lévitant au-dessus de leur chaise disposée autour de la table du salon. Ut se moque des deux autres qui sont hypnotisés par la scène, car lui en a vu d'autres. Il les prévient de se boucher les oreilles car ils risquent d'être ensorcelés par leur chant de sirène. Ut est obligé de taper sur la tête de Kevin pour le sortir de sa transe, et il lui demande de le suivre à la cuisine. Là il prend une bière et dit à Kevin que les pas qu'il s'apprête à réaliser vont changer sa vie pour toujours. Isis Hunter, Ish et Magda ont terminé leur réunion et redescendent sur terre. La première indique à Kevin qu'elles ont senti l'appel alors qu'elles ne sont pas des avatars. La dernière interpelle Kevin : il faut qu'ils parlent. Il lui propose de monter à l'étage et ils passent dans sa chambre, pour sortir sur la terrasse. En bas, Joe demande à Ish de lui raconter une histoire de sort qui a mal tourné, pendant que Wally déclare sur un ton péremptoire que les projections d'Isis sont erronées. Elle s'énerve et le prend de haut, puis se dit que ce n'est pas la peine de se mettre à élever le ton. Elle finit par se demander où sont passés les deux autres. Magda et Kevin sont en train de s'embrasser : ça ne fait pas des étincelles, mais des étoiles, les laissant à bout de souffle l'un et l'autre, sous l'effet de l'intensité de l'intimité de cette étreinte.



Dans une autre dimension, Emile perd patience avec Sigmund, Maximillian et Ignatz : il a encore perdu toute trace de sa cible, alors qu'un instant plus tôt le scintillement d'une énergie l'a tiré de sa stupeur. Il indique à Sigmund que le temps est bientôt venu pour le guerrier d'être lâché. Dans l'appartement, Isis se sert de la télévision pour contacter son époux Bartholomew Gretch pour savoir s'il s'occupe bien de son chat Blackball. Il le rassure. Puis le temps est venu pour les trois sœurs de partir. Restés seuls, Wally Ut recommence à houspiller les deux héros, et surtout Kevin. Celui-ci lui indique qu'ils doivent sortir pour aller à la recherche d'une nouvelle piste de monstre. Wally indique qu'il les accompagne, mais Kevin lui observer qu'il n'a pas son couvre-chef. Du coup, il sort uniquement avec Joe. Ils vont au distributeur automatique de billets, et cette fois-ci, pour la première fois, il n'y a pas de petite prédiction avec. Les deux amis papotent et alors qu'il parle de Magda, Kevin perd sa concentration. Joe lui file une claque sur la joue gauche, ce qui le ramène à la réalité. Il espère ne pas perdre ainsi sa concentration en plein combat. Ils sont arrivés au mont du parc public avec la grande croix. Kevin sort sa batte et fait de grands moulinets avec. Puis il ramasse un caillou par terre, le jette en l'air et l'envoie voler dans les airs d'un ample coup de batte. Le caillou décrit une trajectoire, comme une étoile filante dans le ciel.



Certes, c'est une intrigue dont l'issue ne fait pas grand doute : le bien contre le mal, Kevin Matchstick et ses amis contre Emile et ses trois sous-fifres, et le bien triomphe à la fin. Entretemps, il y aura quelques monstres et des situations périlleuses, vraisemblablement même des conséquences, comme dans la première partie de la trilogie. D'un autre côté, en quoi le héros va-t-il en sortir mieux défini comme le promet le titre ? Le mage sera-t-il bien présent, vu que c'est lui qui donne son titre à la série ? Quoi qu'il en soit, le lecteur sent le divertissement opérer dès la première séquence : de la magie, un méchant uniquement animé par l'intention de nuire au héros, une romance inattendue, une deuxième romance mais toxique celle-ci, et l'aventure au coin de la rue ou peu s'en faut. Sans oublier des pointes d'humour : Wally Ut qui fait office de bouffon, l'intervention d'un autre héros John Strider vraiment très assuré, la magie pouvant prendre une forme très anodine comme une lampe torche, et Kevin Matchstick qui continue à souffrir de l'angoisse des hauteurs.



Comme pour les premiers épisodes, il est visible que l'artiste prend plaisir à raconter son histoire. Le lecteur sourit en découvrant des scènes de nature différentes : les trois sorcières en train de léviter en se touchant par la paume des mains, l'intensité du baiser entre Magda et Kevin, Isis perdant patience face à Wally, Kevin gesticulant avec sa batte fluorescente, le méchant adoptant des postures théâtrales, Magda laissant la marque de sa bouche au rouge à lèvre sur le teeshirt de Kevin, Kirby Hero soulevant un énorme rocher tous ses muscles bandés dans l'effort, etc. La narration visuelle s'avère très efficace, droit au but avec une forme de bonhommie qui empêche les effets mélodramatiques bon marché. Pour autant, le dessinateur sait très bien montrer la souffrance ou la douleur. Le lecteur ne voudrait pas être à la place de Joe Phat sous l'emprise d'une Leanhaun Sidhe. Il est visible qu'il l'a dans la peau et qu'elle aspire son énergie vitale, son état allant en s'aggravant progressivement. Wagner s'amuse tout autant avec les scènes de combat : les grands coups de batte dans la tronche, les coups de poing assénés avec une force débridée, l'attaque du géant, les esquives des trois frères Sigmund, Maximillian, Ignatz, sur leur planche volante, etc. En même temps, chaque affrontement se déroule suivant un plan de prise de vue rigoureux, avec une cohérence dans l'enchaînement des mouvements, dans l'utilisation des pouvoirs. La tonalité est bien celle du plaisir, sans condescendance ou moquerie.



Le lecteur revient également pour l'utilisation de la mythologie, avec une solide connaissance de la part de l'auteur, une mise à profit raisonnée, et une mise en scène personnelle. C'est un vrai plaisir que de retrouver les trois frères farfadets avec leur attitude d'adolescent fainéant, et de découvrir d'autres créatures comme ce rat anthropoïde, ces gnomes de glace, ce cyclope à la peau verte, ou encore ce géant avec un casque à corne. Dès la première partie, la série baigne dans les contes et légendes, avec des emprunts à des mythologies existantes comme les Bonnets Rouges (de créatures malveillantes issues du folklore britannique), ou retravaillée pour l'occasion sous une nouvelle forme, comme le taureau crétois de Minos. Il comprend que l'auteur se serve de ces héros et de ces monstres à la longévité éprouvée, devenue des archétypes dans les récits de Fantasy, que ce soit le petit peuple ou la légende arthurienne. Il affiche ses références de manière transparente, conscient de ne pas pouvoir créer un mythe plus durable, tout en y apportant une touche personnelle. Il n'hésite pas à entremêler plusieurs mythologies différentes, par exemple un héros du panthéon des dieux grecs et le premier héros sumérien. Cela donne une dimension tragique à ses protagonistes, des individus dont la vie est condamnée à suivre le destin des archétypes qu'ils incarnent.



Le lecteur suit Kevin Matchstick dans ses épreuves, à la fois un destin tout tracé de meneur d'hommes et de héros, un amour au contour déjà connu, à la fois une aventure agréable avec un enjeu relatif puisque les dessins dédramatisent pour partie les épreuves. La ressemblance physique entre le héros et l'auteur est visible dans chaque case. Le lecteur sourit quand, à la suite d'une épreuve, Matchstick se retrouve avec une calvitie précoce, exactement comme Matt Wagner. Il sourit également à l'amour fou entre lui et Magda, supposant qu'il a dû entre de même entre l'auteur et son épouse, et qu'il devait alors avoir du mal à se concentrer, c’est-à-dire à travailler, à réaliser ses bandes dessinées. Ce parallèle évident incite le lecteur à s'interroger sur d'autres passages. Matchstick apparaît comme un meneur d'hommes naturel, comme un individu pourfendant les monstres. Pas évident de trouver l'équivalent dans le monde réel pour Wagner. Dans la fin de ce tome, le héros est confronté à un individu qui lui fait voir sa vie et ses actions sous un autre jour, beaucoup moins glorieux. Alors que Kevin Matchstick estime qu'il a failli à sa vocation de héros, son interlocuteur lui fait observer que c'est une façon bien simpliste de considérer sa vie, d'estimer qu'il s'agit de combattre le mal s'incarnant sous la forme de monstre. Cette remarque résonne étrangement : l'auteur indique qu'il ne faut pas prendre ce combat du héros contre des monstres au pied de la lettre. De fait, le héros ne doit pas se laisser aller à l'auto-apitoiement égocentrique. Le lecteur peut alors voir dans l'ennemi une forme de dépression, ou plutôt de se laisser gagner par une langueur et de baisser les bras parce que les choses ne se passent pas comme on aimerait, parce que ça ne nous renvoie pas l'image de celui qu'on voudrait être. Vu sous cet angle, les aventures de Kevin Matchstick deviennent plus qu'un aimable divertissement du bien contre le mal, pour être une métaphore de l'apprentissage de la vie, d'une ouverture à autre chose que son seul ressenti, son seul point de vue.



Dans cette seconde moitié, il se produit le même phénomène que dans la première partie de la trilogie. L'aventure est toujours au rendez-vous, toujours aussi agréable dans sa mise à profit de la mythologie, dans la fluidité de la narration visuelle, dans son inventivité, même si c'est sous la forme d'une dichotomie du bien contre le mal. En même temps, il apparaît que ces aventures peuvent également être considérées comme la progression intérieure du personnage principal qui commence à percevoir la vie autrement qu'en termes de bien contre le mal, à se percevoir autrement que comme un héros réalisant des hauts faits, et incarnant un exemple pour ceux qui le côtoient. Une très belle fable pour adulte.
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Mage - The Hero Discovered, tome 3

En pleine possession de ses moyens

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Ce tome fait suite à Mage Book One: The Hero Discovered Volume 2 (épisodes 9 à 15) qu'il vaut mieux avoir lu avant, ainsi que le premier tome. Celui-ci regroupe les épisodes 0 à 8 de la deuxième partie de la trilogie, initialement parus en 1997/1998, écrits, dessinés et encrés par Matt Wagner, avec une mise en couleurs réalisée par Jeromy Cox.



Quelque part dans le grand Canyon, Kevin Matchstick est à la recherche de traces du monstre qu'il est venu pour occire. Il trouve un crâne. Alors qu'il l'examine, il a la surprise d'être interpellé. Il se retourne et découvre un jeune afro-américain avec un éclair à l'horizontale sur son teeshirt : Joe Phat. Il explique qu'il est venu pour la même raison que son interlocuteur. Le monstre finit par se montrer et il s'en suit un affrontement mouvementé qui se termine par sa destruction totale. Quelque temps plus tard, Kevin & Joe arrivent dans une ville de moyenne importance avec leur voiture Ford, modèle Edsel. Ils en sortent et Joe se met humer l'air : une grimace apparaît vite sur son visage. Il y a un monstre puant dans les parages. Il perçoit également des fumets d'eau, d'acier et de pierre. Matchstick conclut à sa place : un troll sous un pont. Ils font un petit détour par une épicerie avant. Une vielle clocharde pousse son caddie devant elle sur un pont. Un crochet au bout d'une chaîne vient prendre le chariot et l'envoyer valdinguer. Le troll est là et il s'attaque à la vieille dame : celle-ci semble disparaître dans un éclair bleu, laissant ses habits derrière elle.



Le troll regard bizarrement la robe et le postiche au bout de son crochet. Il relève la tête et découvre Kevin Matchstick et Joe Phat devant lui. Kevin sort sa batte de baseball luminescente et il se lance à l'attaque. Le troll prend un coup dans la tronche mais parvient à s'éloigner en bondissant puis il repasse à l'attaque. Il est vite neutralisé par le duo de héros. Phat confirme à Kevin que la tanière du troll se trouve sous le tablier du pont. Il remonte le long de la chaîne, sans remarquer une créature en forme d'insecte sortir de l'orbite du crâne d'un des victimes. Ils se rendent ensuite à un distributeur ou Matchstick introduit sa carte magique et perçoit de l'argent, avec une prédiction : un troll gît maintenant encore fumant à cause des horribles blagues. Il ne faisait pas le poids face au tonnerre et à l'éclair. Faites maintenant attention aux dames, raptors fétides d'Hadès, mais avant amusez-vous bien avec l'argent. En réponse à la question de Joe, Kevin indique que cette carte bancaire magique lui a été remise par un vieux pote : Myrddin Auerelius Ambrosius, un puissant magicien. Quant aux prophéties, c'est lui qui les a implantées dans le système. Ils vont prendre une chambre dans un motel et s'arrêtent en route pour acheter une grande pizza : c'est Kevin qui paye bien sûr. Joe regarde un feuilleton à la télévision, et il demande à Kevin s'il a déjà rencontré d'autres guerriers comme eux. Quelques-uns répond-il.



À l'issue de la première partie de la trilogie de cette série, le lecteur avait l'impression de se retrouver le bec dans l'eau. L'auteur avait clairement annoncé les deux parties suivantes, leur donnant même un titre : après le héros découvert (paru en 1984-1986), allaient venir le héros défini, et le héros nié. Mais les années passent et rien ne vient, si ce n'est la faillite de son éditeur initial (Comico), des difficultés pour récupérer l'intégralité des droits de propriété intellectuelle. Enfin, onze ans plus tard, la deuxième partie pointe le bout de son nez chez Image Comics. Le rythme de parution n'est pas tout à fait régulier, 16 numéros en 28 mois, mais l'auteur mène son projet à son terme. Le lecteur est ravi de retrouver Kevin Matchstick, et, par la force des choses, de découvrir de nouveaux compagnons d'aventures. Comme il est de coutume à l'époque, la saison commence avec un numéro zéro de faible pagination (12 pages) et à prix attractif. Le lecteur retrouve le ton de la première série : des bons (Matchstick et ses deux compagnons) contre des créatures surnaturelles malfaisantes qu'il faut occire, et un méchant qui tire les ficelles dans l'ombre. Il découvre que l'histoire se situe plusieurs années après la première partie. Il retrouve le caractère particulier de Matchstick : assez détendu, toujours avec une pointe d'incrédulité quant à son identité réelle, et du genre très sérieux quand il bosse, c’est-à-dire quand il pourfend des monstres. Il a gagné en assurance, acceptant de jouer le rôle du grand frère vis-à-vis de héros avec moins d'expérience, ou qui reconnaissent en lui une autorité légitime.



Le lecteur observe également que le trait Matt Wagner a évolué : des contours moins lissés, un usage plus naturel des exagérations comiques, une narration visuelle plus naturelle, moins amateur. L'artiste gère beaucoup mieux la densité d'informations dans ses cases, et avec des camaïeux simples à base de dégradé, Jeromy Cox parvient à habiller les cases et parfois les pages sans arrière-plan. Wagner fait montre d'une assurance étonnante en simplifiant les visages, parfois avec de simples points noirs pour les yeux, ou de gros traits pour les cheveux de Matchstick qui commencent à se clairsemer, des traits épais pour sa barbe, des personnages en ombre chinoise où il joue avec la taille des yeux, des expressions franchement comique (comme le regard que le douanier jette à la batte de baseball de Matchstick). S'il est familier du microcosme des auteurs de comics de l'époque, le lecteur se rend compte que le personnage principal ressemble à l'auteur, que Joe Phat ressemble à Joe Matt, Kirby Hero a des expressions de Bernie Mireault. Il sourit en découvrant Isis qui est le portrait craché de Diana Schutz, une éditrice emblématique de Dark Horse Comics, dont Wagner a épousé la sœur. Il rit de bon cœur en découvrant Dragonslayer : le portrait craché, jusqu'aux mimiques et l'arrivée en limousine, de Dave Sim le créateur et l'auteur de Cerebus.



L'histoire s'ouvre un prologue au cours duquel le héros (Matchstick) croise un autre héros (Joe Phat / Coyote) au cours de la traque qu'un monstre, et du combat qui s'en suit : une séquence d'aventure, des bons contre un méchant, un combat spectaculaire, une ou deux touches d'humour, et un beau paysage. Tout du long de ce tome, l'auteur reste sur ce dosage : des combats contre des monstres qu'il convient de faire cesser de nuire en les tuant, des héros valeureux un peu décontractés (pour Phat et Hero, moins pour Matchstick), quelques notes d'humour bon enfant, avec en particulier Wally Ut le clochard qui prétend être un mage, des monstres inventifs en connexion directe avec la mythologie, un ennemi mal intentionné qui tire les ficelles dans l'ombre, et une batte de baseball luminescente. Il est visible que l'artiste prend grand plaisir à raconter son histoire : les expressions de visage, quelques poses avantageuses des héros passant à l'action, des environnements de nature réalistes bien consistants quand ils sont représentés, et des protagonistes à la forte personnalité graphique, visiblement chers à l'auteur. Matt Wagner semble beaucoup plus à l'aise dans sa narration graphique par rapport à la première partie de la trilogie, avec des contours avec une apparence plus spontanée, un langage corporel plus naturel, une verve épatante pour faire ressortir le surnaturel dans le monde réel. Le lecteur se souvient longtemps de l'air ahuri du troll contemplant le postiche, de l'illusion enregistrée par la caméra de surveillance quand Kevin retire de l'argent au distributeur automatique de billets, de l'assurance de Kirby Hero secouant un tonneau métallique rempli de caillasses au-dessus de sa tête, du lancer de batte, de l'autorité dont fait preuve Isis et de l'obéissance de Bartholomew Gretch, de Wally Ut sur son vélo, etc.



De fait, ces aventures procurent une lecture rapide, sympathique, divertissante, amusante, avec plusieurs moments de connivence entre l'auteur et le lecteur. Par exemple, quand le lecteur reconnaît la personne dont Wagner s'est inspiré pour un de ses personnages, ou, beaucoup plus accessible, un mythe, un conte où une légende qui l'a inspiré pour un monstre ou un pouvoir. Il est aussi gratifiant de retrouver un élément de la première partie, que ce soit la peur des hauteurs de Matchstick, ou son amour pour les Ford modèle Edsel. En outre, le titre annonce que le héros a atteint un certain degré de maturité, ses années de pleine possession de ses moyens, que ce soit dans le maniement de la batte de baseball enchantée, ou en temps que chef naturel, meneur d'hommes né. Le lecteur voit l'exemple positif d'adulte qui prend ses responsabilités, qui devient même un modèle pour certains, à qui d'autres font confiance. Il comprend pourquoi l'auteur a préféré avoir lui-même atteint cette phase de l'existence pour pouvoir en parler sous cette forme. D'un autre côté, il reste cette opposition basique entre le bien et le mal, les ennemis qu'il convient de tuer : une façon de voir le monde comme une opposition entre le bien et le moral, avec une démarcation simple entre les deux. Pourtant, le fond du récit recèle des remarques pas si simplistes que ça. Pour commencer, Matchstick et ses amis ne sont pas les seuls chasseurs de monstres, et les autres voient cette activité plutôt comme une compétition à marquer des points pour leur gloire personnelle, chaque fois qu'ils en tuent un, que comme une action à mener dans un effort concerté et collectif. Ils ne savent pas prendre le recul nécessaire pour voir l'intérêt général. En y repensant, le lecteur se dit que le grand méchant derrière tout ça se livre effectivement à un acte impardonnable : il siphonne l'énergie magique de Matchstick quand il l'utilise. En ayant à l'esprit que ce personnage est pour partie un avatar de l'auteur, le lecteur se dit que cet acte de siphonnage s'apparente à une forme d'absorption de l'énergie créatrice du créateur, un individu qui profite de sa créativité comme un parasite.



Ça valait le coup d'attendre durant plusieurs années écoulées entre la première partie de cette trilogie (Discovered, Defined, Denied) et la deuxième : Matt Wagner est de retour en très grande forme, à la fois sur le plan graphique et dans son intrigue, direct et efficace, très facile d'accès, un plaisir de lecture immédiat. Progressivement, le lecteur prend conscience que cette lutte du bien contre le mal menée par des héros recèle d'autres niveaux de lecture, sur la notion de réalisation d'un individu, de développement de son importance dans son entourage, de modalités relationnelles avec autrui.
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The Shadow: The Death of Margo Lane

Ce tome contient une histoire complète qui ne nécessite pas de connaissance préalable du personnage. Il comprend les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2016, écrits, dessinés et encrés par Matt Wagner, avec une mise en couleurs réalisée par Brennan Wagner. Il se termine avec une histoire de 8 pages initialement parue dans l'épisode 100 de la série du Shadow, réalisée par la même équipe sous forme d'un texte de 2 ou 3 paragraphes par page, apposé sur une illustration en pleine page comprenant 2 ou 3 situations différentes.



Margo Lane se souvient des années où elle fut l'agent et la confidente du Shadow dans les années 1930, et en particulier d'une des affaires les plus mémorables : celle de l'impératrice Rouge (Red Empress). Cette affaire prend sa source dans les activités criminelles des tongs de Chinatown. L'Impératrice Rouge se montrait tout aussi insaisissable et mortelle que son prédécesseur Shiwan Khan. Afin de mener son enquête Shadow décide de remonter la piste jusqu'en Chine, en passant pas l'Indonésie, la Thaïlande et le Bengladesh, jusqu'à retrouver l'un des sages mandarins auprès desquels il avait étudié. Il le met mis en garde sur le fait que la cible réelle de l'Impératrice Rouge pourrait bien être le Shadow lui-même. Avec Margo Lane, il décide de revenir en paquebot. À bord de celui-ci, ils se font attaquer par 2 agresseurs qui en veulent au Shadow lui-même ce qui lui fait dire qu'ils connaissent son identité secrète, à savoir Lamont Cranston. Alors qu'ils sont de retour à New York, la presse fait ses gros titres sur l'enlèvement de la riche et jeune héritière Gloria Sullivan. Lamont Cranston s'arrange pour croiser l'inspecteur Joe Cardona, pour lui soutirer des informations.



Le soir même, Shadow rencontre son agent Clyde Burke qui lui remet une enveloppe avec les résultats de son enquête sur cette disparition. De retour dans son manoir, il indique à Margo Lane les résultats de l'enquête : Gloria Sullivan a été enlevée dans un nightclub où le tong Hip Sing donne souvent rendez-vous. La trace de ce tong le conduit jusqu'à un entrepôt où il se rend dans une voiture conduite par Moe Shrevnitz, en compagnie de Margo Lane. Il leur indique qu'il va pénétrer seul dans le bâtiment, en ayant conscience qu'il s'agit sûrement d'un piège tendu à son attention. Il leur demande de rester à l'extérieur, Shrevnitz prêt à partir, Lane, prête à s'occuper de la prisonnière. Effectivement à l'intérieur, plusieurs pièges l'attendent, et Gloria Sullivan se trouve ligotée dans une grande pièce servant à entreposer diverses marchandises.



C'est la troisième fois que Matt Wagner réalise une histoire du Shadow, après The Shadow: Year One (2013/2014) avec Wilfredo Torres et Grendel vs. The Shadow (2014). Le lecteur sait déjà que Matt Wagner maîtrise bien les codes des pulps de cette époque, ainsi que les caractéristiques du personnage. Le Shadow porte bien son feutre mou à large rebord, son écharpe rouge, sa pierre girasol montée sur une bague, ses 2 pistolets automatiques, et son rire maniaque. Il voit également passer plusieurs agents habituels du Shadow : Moe Shrevnitz, Clyde Burke, Harry Vincent, Burbank. L'auteur fait également apparaitre d'autres agents moins connus : Jericho Druke, Myra Reldon, Rupert Sayre. Chacun de ces agents dispose d'une apparence spécifique, ainsi que de quelques répliques, mais Matt Wagner ne s'attarde pas sur eux, et ils restent à l'état de personnages très secondaires, attestant de l'existence de l'organisation du Shadow, ainsi que de leur loyauté. Margo Lane a droit à plus d'égard, le lecteur ayant accès à quelques-unes des entrées de son journal. Comme les autres agents, elle ne lutte pas à arme égale avec le Shadow, mais reste à son service en fonction de ses moyens. Par contre, elle ne contente pas de jouer les potiches faire-valoir et participe à l'action. Malgré toutes ses bonnes intentions, Wagner ne peut pas s'empêcher de lui faire jouer le rôle de l'otage pendant quelques pages. D'un autre côté, le déroulement de cette séquence aurait été le même s'il s'était agi d'un agent masculin, et la scène participe de manière indispensable à l'intrigue.



En cohérence avec l'époque à laquelle se déroule l'histoire, Matt Wagner a choisi d'opposer le Shadow aux gangs d'asiatiques de New York, faisant écho à la survivance du péril jaune. Il va jusqu'à montrer que les asiatiques peuvent également se montrer coupable de racisme envers les afro-américains, comme le premier blanc venu à cette époque. D'un autre côté, il ne force pas le trait, se tient à l'écart de l'asiatique à la cruauté raffinée, ne faisant finalement qu'évoquer la réalité des quartiers ethniques, et la présence de criminels dans chacun d'eux. L'intrigue se focalise sur l'existence supposée d'une cheffe tirant les ficelles dans l'ombre, et s'étant lancée dans des manœuvres complexes pour atteindre le Shadow. Ce dernier est fidèle à ses caractéristiques, à la fois par son apparence, à la fois par sa façon d'opérer. Il n'hésite pas à se servir de ses pistolets automatiques, y compris pour abattre ses opposants. Il a recours à 2 ou 3 reprises à sa capacité à manipuler les esprits, à les obscurcir. Là encore, Matt Wagner ne ressort pas toute la panoplie du personnage, se contentant des fondamentaux retranscrits au premier degré, sans ironie ou moquerie, jusqu'à sa célèbre phrase : la mauvaise herbe du crime porte des fruits amers.



Au début du récit, le lecteur se demande si l'intrigue est à prendre au premier degré, ou s'il doit se prêter au jeu de soupçonner un coup monté, de supputer que ce qui lui est montré a été volontairement biaisé pour masquer une révélation choc à venir, ou un retournement de situation classique. Même s'il conserve ce soupçon en arrière-pensée, il prend vite goût au récit au premier degré. Matt Wagner détoure les formes de manière descriptive, avec un trait un peu gras, et un peu régulier, apportant une consistance certaine, à la fois aux décors et aux personnages. Le récit se déroulant dans les années 1930, l'horizon d'attente du lecteur comprend une forme de reconstitution historique. Elle est bien là : les modèles de voitures, les modèles d'avion, le paquebot du retour d'Asie, les façades d'immeuble et le pavage des rues, les décorations boisées de la riche demeure de Lamont Cranston, l'intérieur feutré du Club Cobalt, les souterrains suintants du nightclub Shanghai Café, et le décor orientalisant de pacotille du dernier lieu. Le lecteur constate qu'il peut se projeter dans chaque lieu. Il se rend compte avec surprise qu'il éprouve la sensation de voir un endroit tout d'une scène durant, même quand Wagner ne dessine plus les arrière-plans, la mise en couleurs perpétrant l'ambiance avec naturel et élégance. L'évocation de l'époque passe également par les tenues vestimentaires, que ce soit les complets veston de ces messieurs, ou les robes de ces dames dont celles élégantes de Margo Lane, ou même son imperméable mastic lorsqu'elle est en mission avec Shadow.



Bien sûr Matt Wagner reprend l'apparence classique du Shadow et il soigne ses apparitions avec des postures classiques, s'inspirant des couvertures de ses romans, réalisées par Jim Steranko. Le lecteur retrouve donc le Shadow de profil en train de tirer avec un automatique dans chaque main, des gros plans sur sa tête avec l'écharpe couvrant sa bouche jusqu'au nez, le Shadow s'élançant en avant en courant et son long manteau flottant au vent découvrant ses 2 étuis sous les aisselles, le Shadow levant ses 2 automatiques encore fumant, etc. Sur ce plan-là, l'artiste remplit son contrat : il donne des poses iconiques à son lecteur qui comptait bien dessus. Il réussit également à montrer le Shadow en action et en mouvement sans qu'il n'apparaisse ridicule, malgré sa tenue peu propice aux acrobaties. L'artiste représente les visages avec des traits de contour également un peu épais, un peu rugueux, et des expressions de visage un peu exagérée, avec la bouche souvent ouverte. Le lecteur n'y voit pas une forme de caricature, mais plus un choix esthétique cohérent avec la nature du récit qui montre un individu qui règle ses problèmes à coup de balle dans ses adversaires, sans arrière-pensée de donner la mort. Mise à part la cage simpliste à la fin de l'épisode 1, les scènes d'action sont réussies : spectaculaires en respectant les matériaux et les technologies de l'époque.



Au fur et à mesure du récit, le lecteur se rend effectivement compte que l'intrigue est à prendre au premier degré, dans toute sa simplicité et sa linéarité, sans coup fourré narratif ou retournement de situation préparé longtemps à l'avance. Matt Wagner a choisi de se conformer à la narration droit au but et directe des romans de Walter Gibson, laissant le lecteur apprécier cette aventure pour ce qu'elle est. Cela ne l'empêche pas de tenir également la promesse implicite contenue dans le titre, c’est-à-dire de donner un beau rôle à Margo Lane. Il nourrit donc la relation existant entre elle et le Shadow, à la fois par le biais du journal intime de Margo qui donne son point de vue, à la fois par la modification du comportement du Shadow après sa disparition. Il trouve un juste milieu entre l'admiration que les agents du Shadow lui portent (Margo Lane comme les autres), et ce que la personnalité de Margo Lane apporte au Shadow. Il sait rendre plausible cette relation avec ce qu'elle comporte d'amour platonique, ou tout du moins d'amitié ambigüe.



Cette troisième histoire du Shadow écrite (et ici dessinée) par Matt Wagner tient ses promesses : une aventure directe et simple, le Shadow mystérieux et impitoyable, les agents aidant le Shadow, un ennemi exotique et cruel sans verser dans le ridicule, des dessins nourrissant une reconstitution historique, et des moments spectaculaires faisant honneur à ce vigilant.
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The Tower Chronicles: Geisthawk 1

En 2000, Thomas Tull crée la société de production de films "Legendary Pictures". En 2010, cette entreprise a annoncé la création d'une branche comics, sous la responsabilité de Bob Shreck. Le premier comics édité par Legendary fut Holy Terror de Frank Miller, en 2011. Le présent tome est le deuxième. Il s'agit de la première partie d'une histoire prévue en 4 tomes. Le concept de départ a été élaboré par Thomas Tull et Matt Wagner, le scénario est de Matt Wagner, les dessins de Simon Bisley, l'encrage de Rodney Ramos, et la mise en couleurs de Ryan Brown. Ce premier tome bénéficie d'une couverture de Jim Lee, encré par Scott Williams et mise en couleurs par Alex Sinclair.



Une femme s'enfuit en courant dans les rues d'une ville américaine. Elle porte une jupe et des talons hauts, son visage est déformé par la peur, le poursuivant reste invisible, mais ses pensées permettent de comprendre qu'il se réjouit de cette peur. Après les 12 pages de cette course-poursuite, l'histoire commence pour de bon : Dimitri Solokov (un parrain de la pègre russe installée à New York) se rend à un rendez-vous avec Romulus Barnes dans une boîte de striptease. Barnes sert d'intermédiaire pour louer les services d'un tueur à gages très onéreux que l'on ne peut contacter que par le biais du site internet GeistHawk : John Tower. Solokov souhaite que Tower lui apporte la preuve de la mort d'Isaac Kessler, un individu en charge du blanchiment d'argent dans son organisation qui a détourné des fonds conséquents. Puis Tower enquête sur une série de meurtres dans une région rurale du sud de l'Iowa, à la demande d'Alicia Hardwicke, agent spécial du FBI.



Au vu du montage évoqué dans le premier paragraphe, il apparaît qu'il s'agit d'une commande : Thomas Tull (le big boss de Legendary) a demandé à Bob Shreck (responsable éditorial de Legendary Comics) de contacter Matt Wagner (grâce à une amitié établie de longue date entre Shreck et Wagner) pour étoffer le concept de départ. Le lecteur comprend rapidement que John Tower est un chasseur de proies particulières. Il dispose d'une jolie lame avec une option haute technologie. Il s'agit d'un individu de race blanche qui a l'air à l'aise financièrement. Il évolue dans un monde contemporain réaliste (à part les proies en question). Et il porte un costume ridicule qui évoque celui d'un superhéros, en un peu moins exagéré (on a échappé à la cape, mais pas à la capuche, pardon au hoodie). Matt Wagner accomplit un travail tout à fait honorable en apportant de la chair sur le squelette du concept de départ. La scène d'ouverture constitue une belle course-poursuite qui permet d'établir les capacités du personnage principal et la nature de l'ennemi. La première enquête permet d'en découvrir un peu sur les lois surnaturelles, et la troisième enquête présente au lecteur l'ennemi récurrent, ainsi que vraisemblablement un personnage secondaire récurent, à savoir Alicia Hardwicke. Les scènes d'action impriment un rythme rapide à la lecture, et elles comportent leur lot de surprises qui les font sortir de l'ordinaire. Wagner prend soin d'inclure des séquences qui permettent d'étoffer John Tower, de montrer qu'il n'est pas simplement un tueur d'ennemis générique de plus. À ce titre, le passage où il s'assoit par terre dans une bibliothèque pour se mettre à lire en plein milieu de son exploration des lieux est très réussi. Si le recours à un site internet pour contacter Tower n'est pas très innovant, ce dispositif est utilisé à bon escient pour donner une logique d'organisation dans ses missions.



Cette histoire bénéficie des dessins de Simon Bisley, un artiste connu pour sa capacité à transcrire l'exagération, la bestialité, et pour inclure une forme de dérision très savoureuse. C'est lui par exemple qui a popularisé le Bad Guy démesuré qu'est Lobo, avec Keith Giffen dans Portrait of a Bastich. Ici il réalise des illustrations plus mesurées, tout en restant savoureuses. L'encrage de Ramos gomme les aspérités des contours, pour une esthétique plus jolie. Bisley utilise une mise en page qui oscille entre 3 à 5 cases par page, avec quelques cases en forme de trapèze, plutôt que rectangulaires pour accentuer un mouvement de temps à autre. La scène d'ouverture permet de constater que Bisley n'a rien perdu de son sens de l'humour, dès que la proie commence à révéler sa véritable apparence. En particulier, le visage déformé avec les yeux exorbités, et le corps à la musculature soudain plus marquée, plus dure sont aussi bruts que délectables. Les 4 cases consacrées à la transformation prennent toute leur valeur du fait de l'exagération de Bisley, ce qui n'aurait sinon été qu'une transformation stéréotypée de plus. Il faut souligner le travail discret de Ryan Brown, dont les couleurs complètent les dessins en leur donnant du volume, et en renforçant l'ambiance. Le savoir faire de Bisley ressort pour chaque monstre, ou expression exagérée. Il se révèle également un décorateur inventif, avec tout un tas de gadgets dans le laboratoire du savant fou, qui donnent à la fois une identité spécifique à la pièce tout en jouant sur les stéréotypes propres à ce genre de pièce. Il est également visible que Bisley se fait plaisir avec la première page de la scène se déroulant dans le club de striptease, et qu'il s'est bien amusé à trouver des faciès marqués pour les différents personnages. Il s'arrange pour que la tenue de Tower soit à mi-chemin entre un costume sobre de superhéros et une forme d'armure légère. Par contre, les mouvements de capuche (un coup je la baisse, un coup je la remets) ont du mal à être crédibles.



Au final ce premier épisode de 64 pages constitue une introduction un peu pépère pour le personnage. Bisley canalise un peu ses débordements graphiques pour des planches où l'humour transparaît toujours, où les monstres sont répugnants ; mais il a déjà été beaucoup plus déchaîné. Matt Wagner pose les bases du personnage dans un scénario soigneusement calibré pour contenir tout le nécessaire, sans sortir assez des chemins bien balisés de ce genre d'histoire. Il manque encore des éléments qui sortent vraiment de l'ordinaire ou une intensité plus forte pour que John Tower devienne plus qu'un gugusse costumé parmi tant d'autres. Le deuxième épisode permettra de confirmer ou d'infirmer cette sensation de trop peu.
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Batman, tome 2 : Année un

Année un est un comics de Frank Miller (scénario) et David Mazzucchelli (dessin) publié en 1987 aux États-Unis. Il retrace la première année du super-héros, la métamorphose progressive de Bruce Wayne en Batman et sa relation privilégiée avec le lieutenant James Gordon. Un arc majeur dans l'histoire de Batman.

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Autobiographix

Ce tome est une anthologie regroupant 14 récits courts autobiographiques en noir & blanc, initialement parues en 2003. Le projet a été supervisé par Diana Schutz qui a rédigé une postface d'une page.



Le jour où j'ai rencontré Richard Nixon, par Sergio Aragonés, 8 pages. De passage dans les bureaux de Warner Publishing, Sergio remarque la queue des employés attendant que Nixon signe son livre. Le jour où je suis devenu un professionnel, par Will Eisner, 4 pages. Le jeune Will vient présenter son portfolio a un responsable éditorial. Des règles de vie, par Jason Lutes, 6 pages. Jason déménage dans une ville inconnue et réfléchit à l'influence qu'un lieu peut avoir sur la personnalité d'un individu. L'immeuble qui n'a pas explosé, par Paul Chadwick, 7 pages. Paul se souvient du groupe d'appartements où il habitait quand il était étudiant, des autres locataires, et de la gérante. Les yeux, par William Stout, 3 pages. Employé à Disneyland, Will réalise des portraits de visiteurs, dont celui d'un enfant à qui il manque un œil. Ma vie en chauve-souris, par Bill Morrisson, 6 pages. Enfant, Bill était fan de Batman et de la série télévisée et il avait réussi à se faire offrir un beau déguisement de son héros. Mardi soir au club de jazz, écrit par Diana Schutz, dessiné par Arnold Pander, 3 pages. Attablée, Diana regarde Leroy, un contrebassiste, jouer sur scène.



Comic Book Chef, par Matt Wagner, 6 pages. Matt raconte comment préparer du poulet au parmesan. J'ai perdu mon sens de l'humour, par Eddie Campbell, 4 pages. Eddie explique comment il s'est aperçu qu'il avait perdu son sens de l'humour. Qu'est-ce que c'est ?, par Fábio Moon & Gabriel Bá, 8 pages. Le 26 avril 1999, Fábio & Gabriel prennent le métro parisien pour rentrer à leur hôtel, mais ils sont pris à parti par un groupe de jeunes et les autres passagers de la rame ne réagissent pas. France, par Stan Sakai, 6 pages. Stan et son épouse séjourne à Angoulême où il a été invité, puis à Paris où ils vont déguster un repas gastronomique dans un grand restaurant. Une histoire de voyageur, par Metaphrog, 6 pages. Richard voyage en bus en France et le conducteur a une drôle d'attitude, avec un humour noir inquiétant. L'arbre, écrit par Richard Drutt, dessiné par Farel Dalrymple, 6 pages. Richard raconte à petite fille une histoire de quand il était jardinier dans un vieux cimetière à côté d'une église, et qu'il avait sympathisé avec une vieille femme qi lui avait demandé un jour de l'aider à planter un arbre. De ça on en est sûr, de Paul Hornschemeier, 8 pages. Paul se lève, accomplit cahin-caha les gestes routiniers du matin, et commence à paniquer. Il s'assoit sur son siège, prend son pinceau et se met à dessiner. Par où commencer ?



Dans la postface, Diana Schutz explique que Will Eisner fixe l'entrée dans l'âge adulte pour les comics avec les premiers récits autobiographiques réalisés dans les années 1960. Elle est d'accord avec ce marqueur temporel car les histoires biographiques permettent d'établir un contact plus étroit entre les auteurs et les lecteurs. Ce contact est rendu encore plus palpable par le noir & blanc qui permet de contempler sans filtre les traits tracés par l'artiste. Pour cette anthologie, elle a demandé à des raconteurs de réaliser un court récit autobiographique, la plupart n'en ayant pas produit dans leur carrière. Au fil de ces récits, le lecteur constate qu'ils ont tous joué le jeu : d'une anecdote qui sort de l'ordinaire (discuter avec Richard Nixon) à des moments essentiellement banals (prendre le métro, réaliser un dessin à Disneyland, se déguiser en Batman, se mettre à sa table de travail). Dans le même temps, aucun récit ne ressemble à un autre, et chaque artiste fait entendre sa voix d'auteur, ou au minimum sa voix personnelle. Chaque histoire se lit rapidement, même celle d'Eddie Campbell à la forme peu séduisante (de petites cases avec des dessins s'apparentant à des esquisses, et un texte copieux avec une graphie irrégulière). La preuve d'un excellent travail de l'éditrice.



Toutes les histoires sont réalisées par un unique créateur, à la fois scénariste et dessinateur, à l'exception de deux, celle de Schutz et celle de Drutt, ce qui assure une cohérence entre la personne qui a vécu l'anecdote, et la manière de la raconter visuellement. S'il est familier d'une partie de ces créateurs, le lecteur retrouve toute la faconde généreuse de Sergio Aragonés créateur de Groo le barbare (avec Mark Evanier) et contributeur du magazine MAD, le naturalisme élégant de Wil Eisner, la minutie précise de Paul Chadwick (Concrete), la force des dessins à l'encrage épais de Matt Wagner (Grendel, Mage), le caractère un peu névrotique des dessins d'Eddie Campbell (From Hell), les dessins gentils et souriants de Stan Sakai (créateur d'Usagi Yojimbo). Au-delà de la banalité de la plupart des anecdotes, chaque artiste la raconte avec une personnalité graphique unique apportant une saveur particulière. La minutie et la propreté de Jason Lutes, le réalisme et l'expressivité de William Stout, les dessins pour enfants de Bill Morrison, l'âpreté des dessins de Jacob Pander, les textures des dessins de Moon et Bá, l'encrage tirant vers l'expressionnisme de Metaphrog, la nostalgie des dessins de Farel Dalrymple, l'étrangeté expressionniste des dessins de Paul Hornschemeier qui a laissé quelques traits de construction. Chaque artiste fait passer une sensibilité propre, différente, personnelle.



Du coup, en fonction du récit, le lecteur ressent une tonalité différente, induisant un état d'esprit particulier : le sourire aux lèvres face à l'entrain de Sergio, l'émotion générée par la comédie humaine d'Eisner, le calme posé et réfléchi de Lutes, la tension dans le visage de Stout, la surcharge cognitive dans la boîte de jazz, la totale assurance de Wagner, etc. En outre, ces artistes l'emmènent dans des lieux très variés : un bureau d'éditeur dans les années 1970, un bureau d'éditeur dans les années 1940, une petite ville aux États-Unis, une banlieue pavillonnaire, une vision de Notre Dame encore intacte en 1999, une table de dédicace lors du festival international de la bande dessinée à Angoulême, une forêt hantée par les spectres des soldats britanniques de la première guerre mondiale, un cimetière, un studio d'artiste avec sa table à dessiner. De même, le lecteur côtoie des personnages d'origines diverses : surtout des artistes par la force des choses, mais aussi un président des États-Unis, des dames dans le métro newyorkais, des parents très protecteurs de leur enfant, l'épouse de Matt Wagner, un conducteur de bus très inquiétant, une vieille grenouille de bénitier. En outre, les thèmes développés par les uns et par les autres conduisent à des cases totalement inattendues : une dédicace sous forme d'Alfred la mascotte du magazine MAD, un polygraphe, un adulte déguisé en Batman pour Halloween, un marteau à viande, l'excentrique John Mytton (1796-1834) à cheval, un décès dans un restaurant huppé, une représentation de l'oreille interne.



Outre l'admiration qu'il peut avoir pour la majeure partie de ces créateurs, le lecteur découvre qu'il peut y avoir une chute dans certaines histoires, ou un développement philosophique inattendu. Il se rappelle rapidement que le propre d'un narrateur est de devoir choisir ce qu'il va raconter et comment il va le faire, intégrant par la force des choses son point de vue, mais aussi un ordonnancement, ce qui induit une forme d'explication ou de sens à l'anecdote, même si la forme narrative n'est pas explicative. En fonction de sa sensibilité, le lecteur peut trouver amusant, ironique ou dramatique certaines situations. Difficile ne pas sourire devant le trublion qui obtient une dédicace de Nixon alors que ceux qui faisaient la queue en ont été privés parce qu'il a passé trop de temps avec Sergio. Il s'interroge sur le concept de synchronicité et de perception primaire (ou biocommunication), pas très sûr du degré de conviction de l'auteur qui les met en scène. Il sourit devant un souvenir d'enfance, tout en pensant à quel point cette période façonne l'individu pour le reste de sa vie. Il constate toute la distance qui sépare le spectateur du musicien expérimenté, faisant l'expérience d'une altérité paradoxale car le musicien et le spectateur vibrent à l'unisson par la musique. Il sourit en suivant la recette racontée sur le ton d'une formidable épopée tout en se disant que la bande dessinée peut tout raconter. Il ressent pleinement l'inquiétude du voyageur ne sachant pas comment se conduire dans une situation qu'il ressent comme étant menaçante, faute de connaître les codes de la société dans laquelle il se retrouve, de pouvoir se dire si c’est normal ou pas. Il prend un recul épatant en envisageant le temps qui s'écoule pour qu'un arbre atteigne une taille adulte. Il fait l'expérience de la perte d'équilibre de manière sensorielle, alors qu'il ne s'agit que de traits et de zones noircies sur une page de papier.



La postface de l'éditrice exprime très bien la richesse de l'expérience que constitue la lecture de cette anthologie. Il s'agit à la fois d'histoire sur des moments banals de la vie, à la fois d'une expérience unique permettant de prendre le point de vue de l'auteur sur cet événement, de le percevoir avec sa personnalité, de l'envisager avec la conscience d'un autre être humain. Ce changement de point de vue s'opère grâce à de simples traits et zones noirs sur du papier, un acte de création et de communication presque magique en opérant ainsi un tel changement dans la personnalité du lecteur, en permettant un tel degré de communication d'un être humain à un autre sans qu'il ne soit besoin qu'ils se rencontrent.
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Batman, tome 2 : Année un

Enfin un truc qui se laisse lire !! Mais y a mieux. C'est l'histoire de Jim Gordon comme dans la série Gotham. L'origine story n'est pas cool. Chauve-souris, qui, venant de nulle part, pète une fenêtre. Père qui veut que Bruce soit Bat. Très vieille histoire, on a connu tellement mieux depuis.
Lien : https://vella.blog/
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Will Eisner's The Spirit : Returns

Ce tome comprend une histoire compète qui ne nécessite pas de connaissance préalable du personnage pour pouvoir être appréciée. Il regroupe les 12 épisodes, initialement parus en 2015/2016, écrits par Matt Wagner, dessinés et encrés par Dan Schkade, avec une mise en couleurs réalisée par Brennan Wagner. Les couvertures originales ont été réalisées par Eric Powell. Il comprend également une introduction de 2 pages écrites par Wagner expliquant sa motivation à écrire une histoire ce personnage, une postface de 2 pages écrites par Paul Levitz louant le travail des auteurs. Il contient aussi des couvertures variantes réalisées par Matt Wagner, John Cassaday, Alex Ross, Paul Pope, Dennis Calero, Francesco Francavilla, Jenny Frison, Stephen Mooney, et 15 pages d'études graphiques du dessinateur.



Cela fait près de deux ans que Spirit a disparu de Central City, sans raison connue, peut-être est-il mort ? Ce jour-là, le commissaire Eustace Dolan donne ses ordres pour un déploiement des forces de l'ordre dans le sud-est de la ville. Il est interpellé le journaliste Treadwell Stubbs qui lui indique qu'il fait un article récapitulatif sur la disparition de Spirit. Le commissaire répond qu'il n'en sait pas plus, ni sur l'identité de Spirit, ni sur ce qu'il en est advenu. Le journaliste insiste en évoquant les rumeurs d'une relation entre l'homme masqué et Ellen Dolan, la fille du commissaire. Avant que ce dernier ne trouve quoi répondre, il est pris à parti par le conseiller municipal Weatherby Palmer qui lui demande des comptes sur le nombre d'heures supplémentaires qu'il a autorisées. Dolan règle la question en confiant Palmer à Stubbs. Il arrive à son bureau où un policier lui dit que le journaliste a des questions plutôt pertinentes. Dolan se souvient très bien de sa collaboration avec un détective intrépide Denny Colt qui s'est retrouvé douché par une solution de produits chimiques du docteur Cobra et qui s'en est mystérieusement remis, tout en se faisant passer pour mort et en adoptant l'identité de Spirit. Au temps présent, la conseillère municipale Ellen Dolan entre dans le bureau de son père, accompagnée de son fiancé Archibald Shale. Elle aussi ressent toujours la perte de Spirit il y a deux ans.



Dans un quartier plus populaire de la ville, Sammy Strunk écoute la retransmission d'un match de baseball à la radio, pendant que son associé Aloysius White répond à un coup de fil qui n'a rien à voir avec un client pour leur agence de détectives privés. White coupe le son de la radio et rappelle à son partenaire qu'ils doivent aider Teddy Dupree à se libérer de l'emprise de deux margoulins Bilkins & Flynn. Pendant le trajet, Strunk demande son vrai prénom à son collègue et White finit par lâcher le morceau, ce qui provoque un grand rire de Strunk du fait de son incongruité. Dans une autre partie du quartier populaire, Teddy est en train de se faire embringuer par les deux aigrefins pour aller jouer sa paye dans un tripot. Ils s'arrêtent quand ils voient que Strunk et White leur barrer la route. Bilkins & Flynn se moquent de leur petite taille et de leur manque d'arme. Ils commencent à secouer physiquement White, mais ils sont obligés de s'arrêter quand un autre individu en prend un à la gorge. Mais où est Spirit ?



Spirit est un personnage qui a été créé par Will Eisner en 1940, dont les aventures ont perduré pendant plusieurs décennies au cours desquelles son créateur a fini par se contenter de superviser les histoires confiant les scénarios et les dessins à d'autres, avant qu'il n'y mette fin pour se consacrer à des romans graphiques. D'une certaine manière, c'est un personnage très superficiel, juste un homme habillé en costume bleu, avec une chemise blanche, une cravate rouge, un feutre mou, un loup bleu, et des gants assortis. Il défait des malfaiteurs le sourire aux lèvres, et essaye de ne pas succomber à la tentation de femmes fatales. Au fil des années, le véritable intérêt de ses aventures devient la manière dont Will Eisner les raconte, avec un trait délié et souple, un jeu sur la forme, et un humanisme chaleureux et inconditionnel. Du coup, il est toujours étonnant qu'un éditeur cherche à tout prix à publier de nouvelles aventures du personnage tant son intérêt réside principalement dans l'art de conteur de son créateur.



D'un autre côté, Matt Wagner n'est pas le premier venu, avec deux créations mémorables : Mage, Grendel. Il a également réalisé plusieurs histoires de Batman, ainsi que des histoires complètes sur des personnages DC aussi comme Dr Mid-Nite, The Demon, ou aussi pour Zorro. Dès les premières pages, il est visible qu'il maîtrise bien le personnage de Spirit, que ce soit pour son origine secrète racontée en 3 pages, pour les personnages secondaires (Eustace Dolan et sa fille Ellen, Aloysius White) et ses ennemis (Mister Carrion, Sand Saref, P'Gell, Octopus). S'il est déjà familier du personnage, le lecteur est en terrain connu et apprécie le retour de ces ennemis et surtout de ces femmes fatales le temps d'un épisode ou deux. S'il ne le connaît pas, il découvre des criminels irrécupérables, mais aussi des criminelles terriblement séduisantes qui ne laissent pas le héros insensible sans pour autant parvenir à le corrompre. L'intrigue se divise en deux époques : dans les 6 premiers épisodes, le lecteur assiste au retour progressif du héros, et dans la deuxième moitié il s'agit de savoir ce qui lui est arrivé, qui est derrière sa disparition et comment neutraliser ce nouvel ennemi. Le scénariste écrit des aventures sympathiques avec une bonne tension dramatique, des affrontements physiques, et un parfum pulp inimitable. Les dessins montrent que l'histoire se déroule à la fin des années 1940, après la seconde guerre mondiale. Le récit s'inscrit dans un registre tout public, opposant des bons contre des méchants, le lecteur appréciant l'entrain des deux jeunes détectives privés, l'expérience et le bon sens du commissaire Dolan, l'implication d'Ellen Dolan dans son métier. Il prend tout de suite en grippe le conseiller Palmer qui souhaite donner des leçons à Eustace Dolan, et il sourit en voyant les criminels et leur théâtralité.



Dans l'introduction, le scénariste explique qu'il n'aurait jamais consenti à reprendre la création de Will Eisner s'il n'avait pas été possible de trouver un artiste qui soit une perle rare. Le lecteur s'attend donc à une narration visuelle d'exception. À l'évidence, Schkade n'est pas Will Eisner, ne dessine pas comme lui. Certes il fait l'effort d'intégrer les lettres S, P, I, R, I, T dans le dessin de chaque page de titre, comme le faisait Eisner, mais la ressemblance s'arrête là. Il ne dispose pas de son coup de crayon inimitable pour faire naître et animer des personnages de quelques traits, et il n'essaye pas non plus de jouer avec la mise en page pour une progression du personnage au travers de la page. Cela ne l'empêche pas de sortir du cadre de temps à autre : une une de journal sur les trois quarts de la page, une case en trapèze, des cases sans bordure alors que Ellen se souvient du Spirit, une descente d'escalier en sous-sol dans le noir avec seulement le plat des marches de représenté, un travelling avant sur les barreaux d'une cellule, etc.



Cela n'empêche pas la narration visuelle d'être très agréable. Le récit est tout public, et l'artiste réalise des dessins également tout public. Les traits de contours sont souples et d'épaisseur variable apportant une réelle vitalité aux personnages, et une réelle consistance aux décors et aux accessoires. Le lecteur ressent ce qu'a pu voir Matt Wagner dans les dessins de Schkade : une filiation avec l'état d'esprit des dessins de Will Eisner, même si la forme est un peu différente, et sans le génie du maître. L'artiste sait utiliser de la simplification et de l'exagération pour montrer des visages très expressifs, ainsi que de postures très parlantes. Il utilise avec élégance la dramatisation par les angles de vue et les plans de prise de vue pour ajouter du mouvement, de l'allant, de l'impact, de la tension. C'est un vrai plaisir visuel que de suivre les tribulations des personnages lors des scènes d'action allègres, et des discussions animées. Le dessinateur incorpore une légère touche humoristique dans les réactions des personnages, dans la bonne humeur de Spirit, ce qui souligne qu'il s'agit d'aventures à ne pas prendre trop au sérieux, et d'une histoire bon enfant, y compris lors des rencontres avec des femmes fatales à la séduction vénéneuse.



Le lecteur se détend et apprécie le spectacle. Il remarque les éléments d'aventures d'une époque révolue : bagarre de rue, habitation souterraine très spacieuse sous le cimetière, croix gammée, bâtons de dynamite attachés à un minuteur, piège diabolique comme deux individus suspendus au-dessus d'une citerne cylindrique remplie d'un métal en fusion, prison secrète sur une île tropicale, souk cosmopolite, ennemis avec des tenues qui en imposent, etc. Le scénariste trouve le bon dosage entre aventures spectaculaires, et interaction entre les personnages entre comédie légère et polar sans gravité, avec quelques touches discrètes d'humour. Ça se lit tout seul. En outre, il ne se contente pas de ressasser les situations et de recycler les personnages de Will Eisner, développant deux nouveaux personnages. Par contre, la fin semble un peu rapide : elle aurait permis encore deux épisodes pour développer pleinement l'affrontement final, plutôt que de consacrer le tiers du dernier épisode à l'origine secrète de sachet Spice.
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Batman et les Monstres

Ce tome regroupe les 2 miniséries écrites et dessinées par Matt Wagner.



Batman et les monstres (2006) - Matt Wagner est un familier de Batman : il l'a déjà mis en scène, entre autres, dans Batman: Faces,Batman/Grendel et Trinity (3 ouvrages hautement recommandables). Il revient au personnage pour développer l'une de ses premières aventures qui se situe 1 an après la première apparition de l'homme chauve-souris. Dans ce tome, il affronte les machinations d'Hugo Strange. Dès la première page, la maîtrise de Matt Wagner (ici au scénario et aux dessins) éclate et le lecteur est immédiatement en immersion grâce à une référence à un fait bien connu du mythe. Un personnage sirote son café en lisant son journal qui fait sa une sur la disparition de Red Hood (futur Joker). L'histoire est campée à la fois au début du Btaman, et à la fois elle a sa place dans la perspective de ce qu'il deviendra.



Matt Wagner mêle adroitement les aspects très ordinaires, mondains de la vie Bruce Wayne, ses rendez-vous amoureux manqués, ses échanges sarcastiques avec Alfred et ses acrobaties en tant que Batman. Il a choisi de situer son histoire au tout début du mythe ce qui lui permet de nous faire découvrir le métier de Batman en même temps que son personnage principal, et d'inclure des erreurs de débutant qui lui donne plus crédibilité et d'humanité. Ce point de vue procure une fraîcheur bienvenue à l'histoire et la naïveté de Bruce Wayne confronté à ses premiers véritables monstres fait surgir, par contraste, des instants poétiques inattendus.



Je ne saurais trop vous recommander cette histoire qui sait nous faire redécouvrir un personnage que l'on croyait connaître. De plus Matt Wagner est un professionnel chevronné qui donne un ton unique à sa narration à la fois par le point de vue de débutant qu'il fait adopter à Batman, et à la fois par des dessins d'une précision exquise où chaque trait est nécessaire, où il n'y a pas de place pour le superflu ou l'esbroufe gratuite. Tout est parfaitement maîtrisé.



Batman et le moine fou (2006/2007) - On retrouve le graphisme si maîtrisé de Matt Wagner qui va à l'essentiel tout en donnant à chaque personnage et chaque élément de décors une identité propre. Comme à son habitude, il a choisi un style épuré en ne traçant que les lignes significatives et chaque dessin possède une immédiateté et une efficacité rare. La mise en couleur de Dave Stewart repose sur une palette chromatique limitée pour renforcer les atmosphères des différentes scènes qui complète à merveille les dessins.



Comme pour le premier tome, l'action se situe dans la deuxième année d'activité du Batman. Et de ce fait le héros n'est pas encore complètement blasé et cynique, il commet même parfois des erreurs tactiques. Cette faillibilité rend Batman beaucoup plus humain et plus accessible, l'empathie que l'on éprouve pour le héros s'en trouve accentuée. Batman doit découvrir ce qui se cache derrière une série de cadavres exsangues et les exactions de la famille Maroni.



Ce tome est une fois de plus un coup de maître pour Matt Wagner qui maîtrise son Batman comme pas deux et qui nous livre une histoire prenante et attachante reposant sur de belles planches. Il ne reste plus qu'au lecteur à savourer et à déguster... et à tenter les autres œuvres de ce créateur avec Batman (Batman/Grendel, Trinity,Batman: Faces) ou sur ses propres créations (Mage the Hero Defined et Grendel: Devil by the Deed).
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Sandman : Midnight Theatre

Il s'agit d'une histoire complète en 1 tome qui requiert de connaître la série Sandman de Neil Gaiman, ainsi que la série Sandman Mystery Theatre de Matt Wagner. Cette histoire a été rééditée dans Neil Gaiman's Midnight Days et Absolute Sandman 5.



L'histoire se déroule en 1939. Quelque part en Angleterre une entité est prisonnière. Elle observe régulièrement le maître de céans s'approcher de sa prison pour tenir des propos plus ou moins cohérents. L'entité attend patiemment, elle est emprisonnée depuis 1916 par Roderick Burgess. Loin de là, aux États-Unis, à New York, Wesley Dodds rend une visite de courtoisie à Linus Benchley, un diplomate, qui était un ami de son père. La visite est raccourcie par l'arrivée d'une missive qui met Benchley mal à l'aise. Dodds revient observer à la dérobée ce qui se passe (sous son déguisement de Sandman). Il assiste impuissant au suicide de Benchley. Il finit part pénétrer dans la demeure et trouve 2 indices. La lettre venait de Londres et elle portait un sigle composé de 3 initiales O, A et M. Dodds prend le parti de se rendre à Londres pour enquêter. Il y retrouve Dian Belmont qui avait tout fait pour s'éloigner de lui. Il rencontre également Annabel Forbes-Whitten qui effectue du bénévolat avec Dian dans un quartier défavorisé de Londres. L'enquête de Dodds et Belmont culmine lors d'une réception donnée par Burgess dans sa demeure.



Quand cette histoire paraît en 1995, Neil Gaiman raconte les évolutions de Morpheus depuis 6 ans et la série "Sandman" approche de la fin ; et cela fait déjà 2 ans que Matt Wagner raconte les aventures de Wesley Dodds dans la série "Sandman mystery theatre". La page de garde indique que cette histoire a été imaginée conjointement par Gaiman et Wagner, découpée en séquences par Wagner et que les dialogues ont été écrits par Gaiman. Il s'agit donc d'une proche collaboration, ce qui se reflète dans l'intrigue. Si vous n'avez jamais lu les aventures de ces 2 Sandman, le récit vous paraîtra difficile à suivre. En 1939, Morpheus est emprisonné et connaît de brefs épisodes de conscience qui ressemble plus à des rêves qu'à un état de veille. Wesley Dodds est un brillant inventeur, un chimiste de haut niveau, et un détective amateur confirmé. Il est le sujet de rêves prémonitoires cryptiques qu'il déchiffre pour lutter contre des criminels sadiques. Il utilise des cartouches de gaz soporifiques pour endormir ses adversaires, c'est la raison pour laquelle il porte un masque à gaz.



Ce récit suit Wesley Dodds dans son enquête, ainsi que Dian Belmont qui vient en aide à Annabel Forbes-Whitten qui est victime d'un chantage. Le scénario s'apparente donc à une histoire de Wesley Doods et s'inscrit dans la continuité de sa série mensuelle en apportant 2 éléments majeurs (les retrouvailles avec Dian et l'explicitation du lien qui unit Dodds à Morpheus). L'écriture de Gaiman permet l'utilisation officielle de Morpheus, de montrer sa captivité de son point de vue et d'apporter un ton littéraire à la réception chez Burgess.



Matt Wagner propose une histoire de chantage bien ficelée dans la haute société, tout en plongeant les personnages dans les quartiers défavorisés de Londres en 1939. Neil Gaiman propose une reconstitution de l'influence des occultistes dans la politique londonienne de cette époque. À l'aide de textes capturant le flux de pensées de Dodds dans quelques scènes, le lecteur dispose d'un point de vue d'initié qui mélange la fibre morale du personnage avec sa soumission à ces rêves déstabilisants. La relation complexe entre Wesley et Dian révèle des nuances romanesques savoureuses. Bien sûr, la présence de Morpheus est palpable tout du long, mais en arrière plan.



Teddy Christiansen réalise des illustrations à la gouache, ou peut-être à la peinture à l'huile dans des tons gris et vert qui transcrivent l'atmosphère de catastrophe imminente liée à l'approche de la guerre. Les illustrations portent avec force le scénario, aussi bien dans les scènes silencieuses que dans les scènes de dialogue. Dans la première catégorie, il y a par exemple le suicide de Benchley, nu dans sa salle de bain, avec Sandman impuissant derrière la fenêtre. Simplement avec les expressions du visage et le langage corporel, le lecteur observe les hésitations de Benchley, ses revirements d'humeur, jusqu'à la fin. Dans la deuxième catégorie, Christiansen a la lourde responsabilité de mettre en scène la réception de Burgess. Chaque convive dispose d'un style vestimentaire qui lui est propre et qui est cohérent avec l'époque, les visages sont tous différents et les attitudes en disent long sur cette parade sociale. La pleine page consacrée au bref face à face entre les 2 Sandman expose la relation qui les lie, sans besoin d'aucun mot.



La couverture est de Dave McKean, l'illustrateur attitré de la série écrite par Neil Gaiman (ses couvertures ont été regroupées dans Dust Covers). Elle est moins réussie que d'habitude.



Cette rencontre entre Morpheus et Wesley Dodds n'a rien d'un travail d'équipe de superhéros (team-up), mais tout d'une histoire singulière qui s'apparente à une enquête sur un chantage, avec une saveur onirique, servie par des illustrations sophistiquées.
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Green Hornet - Year One, tome 1

Ce tome contient la première moitié de la maxisérie en 12 épisodes, qui ne nécessite aucune connaissance préalable du personnage. Les 12 épisodes ont été réédités dans Green Hornet: Year One Omnibus. Le présent tome contient les épisodes 1 à 6, initialement publiés en 2010, écrits par Mat Wagner, dessinés et encrés par Aaron Campbell, avec une mise en couleurs réalisée par Francesco Francavilla. Les couvertures originales ont été réalisées par Alex Ross (épisode 1), John Cassaday (épisodes 1 à 5), Francesco Francavilla (épisodes 2 à 6), Matt Wagner (épisode 6).



En 1921, à Chicago, Daniel Reid est en train de donner des instructions pour la une de son journal le Daily Sentinel, pendant que son fils regarde sa collection entomologique d'insectes. Son père commente la dangerosité du frelon vert parmi les insectes épinglés. La même année, à Osaka, un père entraîne son fils Hayashi Kato à l'art du sabre (kendo) en lui rappelant les 7 principes du Bushido : l'intégrité, le courage, la charité, le respect, l'honnêteté, l'honneur et la loyauté. En 1938 à Chicago, à la gare de triage ferroviaire, de nuit, pour le compte de Vincent Caruso (Skid), Johnny Batter et 5 hommes de main s'apprêtent à casser les genoux de 2 syndicalistes un peu trop revendicatifs. Ils sont apostrophés par un individu tout de vert vêtu, masqué, assisté par un autre en tenue de chauffeur avec un loup sur le visage. En 1926, Daniel Reid fait visiter le local de l'imprimerie du journal à son fils Britt, tout en félicitant Rusty pour avoir dépanné l'énorme rotative. Une fois parvenu dans son bureau, le père exhorte le fils à s'améliorer dans ses études, avec dans l'idée qu'il pourra reprendre le journal. À Osaka, le père emmène son enfant au marché et ils voient passer un groupe de soldats recruteurs. Il explique à son fils que ce fut un honneur de servir l'empereur Taisho, mais qu'il n'y a pas d'honneur à servir l'empereur Hirohito.



En 1936, Green Hornet & Kato ont tôt fait de neutraliser la moitié des hommes de main. Puis Green Hornet utilise un pistolet émettant une décharge électrique. Enfin, ils laissent le dernier homme conscient s'enfuir pour qu'il aille apporter la nouvelle à ses chefs. Ils se retournent alors vers les syndicalistes. Ces derniers prennent également leur jambe à leur cou, pensant que Green Hornet & Kato sont les 2 hommes à tout faire d'un autre gang venu pour prendre des parts de marché à Skid Caruso. En 1931 à Chicago, Britt Reid apporte à son père le journal de son lycée, publié sous sa responsabilité. En 1931 à Osaka, Kato s'approche furtivement de son père, puis lui fait la preuve de ses progrès dans l'apprentissage de l'anglais. En 1934, Britt explique à son père qu'il souhaite faire le tour du monde avant de s'établir. De son côté, Kato explique à son père qu'il s'est engagé dans l'armée pour servir son pays.



Tout commence le premier janvier 1936 quand Green Hornet apparaît pour la première fois dans un feuilleton radiophonique, sur la station WXYZ. Il s'agit d'un personnage créé par George W. Trendle et Fran Striker. Par la suite, il va être adapté dans plusieurs serials (films à petit budget pour le grand écran). Néanmoins la postérité retiendra surtout sa version télévisée Le frelon vert de 1966/1967 créée par William Dozier, avec 26 épisodes de 26 minutes. Cette série est passée à la postérité parce que c'est la première fois que Bruce Lee (1940-1973) joue un rôle, celui de Kato, aux côtés de Van Williams qui interprète Green Hornet. La série n'est pas un succès, mais la carrière de Bruce Lee est lancée. Ces circonstances vont également profiter au personnage, ce qui lui vaut de faire des retours périodiques, soit au cinéma (le film de 2011 The Green Hornet de Michel Gondry), ou des adaptations en comics. C'est ainsi que Dynamite Comics rachète la licence et se lance dans la production de plusieurs séries, la première écrite par Kevin Smith et dessinée par Jonathan Lau. Quand vient le temps d'écrire les origines du personnage et de son assistant, les responsables éditoriaux font appel à un spécialiste du genre, celui des vigilants du début du vingtième siècle : Matt Wagner, également créateur et auteur de ses propres séries Grendel et Mage. Les responsables éditoriaux de Dynamite lui ont également confié les débuts d'un autre personnage issu des pulps The Shadow: Year One, avec Wilfredo Torres, ou encore plus loin dans le passé Zorro Year One avec Francesco Francavilla, d'après le roman d'Isabel Allende.



La trame du récit est donc courue d'avance, surtout si le lecteur a déjà une connaissance préalable du personnage. Le défi pour Matt Wagner est de pouvoir raconter cette histoire d'une manière assez originale pour la rendre intéressante, et avec assez de conviction. C'est la raison pour laquelle il opte pour une narration entremêlant plusieurs lignes temporelles. Cela lui permet de montrer Kato & Green Hornet en action dès la page 8, sans attendre que Kato et Britt Reid aient terminé leur parcours initiatique les menant à endosser ces identités secrètes. Le lecteur découvre donc progressivement la jeunesse des 2 héros, en même temps qu'il découvre leurs premières interventions contre la pègre, et en particulier les affaires illégales du parrain Vincent Caruso. L'histoire est ainsi construite qu'il s'installe un suspense quant aux événements qui ont pu inciter les 2 amis à adopter un tel mode opératoire, et un autre au fur et à mesure que Caruso prend conscience de la pression qui pèse sur ses trafics, le lecteur acquérant la conviction que sa réponse va se faire sentir.



Le lecteur peut compter sur Matt Wagner pour faire le nécessaire afin d'inscrire son récit dans l'Histoire, avec des références concrètes comme la Prohibition (1919-1933) aux États-Unis, le massacre de Nankin à partir du 13 décembre 1937 pendant 6 semaines (également référencé dans The Shadow Volume 1: The Fire of Creation, 2012, par Garth Ennis & Aaron Campbell), ou encore la politique expansionniste de l'empereur Hirohito (Shōwa Tennō, 1901-1989). De son côté, Aaron Campbell réalise des dessins dans un registre descriptif et réaliste, en prenant soin de la reconstitution historique. Bien évidemment, il reproduit l'apparence des costumes de Kato & Green Hornet, mais il a aussi fait les recherches nécessaires sur les tenues vestimentaires d'époque, qu'il s'agisse des costumes masculins (il n'y a presqu'aucune femme, y compris dans les figurants) civils ou militaires, aux États-Unis ou au Japon. Il investit également de l'énergie pour représenter plusieurs décors d'époque : l'ameublement du bureau de Daniel Reid, les peintures dans la salle d'entraînement du kendo, la gare de triage, le marché à Osaka, le massacre sur une place de Nankin, un speakeasy, un bowling, ou encore les façades en brique de Chicago.



Aaron Campbell a l'art et la manière pour doser ses cases, donnant l'impression qu'il y a toujours une bonne densité d'informations visuelles, sans avoir à représenter les décors régulièrement. Il est bien aidé par la mise en couleurs conceptuelle de Francesco Francavilla, artiste complet par ailleurs. Il établit une unité narrative par l'emploi régulier de teintes orangées qui lient les séquences entre elles dans une impression similaire. Il s'astreint à respecter les contours délimités par les traits encrés, et il joue sur les nuances d'une même couleur pour ajouter du relief en fonction des ombres portées. Néanmoins, il ne s'agit pas d'une mise en couleurs naturaliste, une scène pouvant baigner dans un rouge intense (le massacre de Nankin), ou dans un brun acajou ou tabac pour l'ambiance feutrée du bureau du parrain. De son côté, Campbell sait conférer une réelle présence à ses personnages, avec un encrage parfois appuyé à l'intérieur des formes détourées, ou par des petits traits secs. Il se tient à l'écart des musculatures exagérées des superhéros, ainsi que des costumes moulants. Il sait chorégraphier un combat, de telle sorte à ce que la suite des coups se déroule de manière logique, à la fois par les emplacements successifs des personnages, à la fois par leur interaction avec les éléments du décor. Sans essayer de rendre hommage à Bruce Lee, il montre les coups portés par Kato, avec une efficacité et une précision redoutables. Il construit un plan de prises de vue bien rythmé et clair pour la lutte de Britt Reid contre une milice dans la jungle du Kenya en 1936. Il réussit à insuffler une réelle tension dans la course-poursuite et le duel sur le toit d'un métro, pourtant un stéréotype bien usé des scènes d'action.



Grâce à la narration visuelle bien pensée, les activités de Britt Reid et Kato apparaissent plausibles aux yeux du lecteur qui du coup s'intéresse également à leur histoire personnelle. Effectivement Matt Wagner réussit à présenter leur parcours de telle sorte à ce qu'il aboutisse à leur identité secrète, mais aussi en contournant les clichés à la fois du contexte historique de la création du personnage, à la fois des histoires d'origine des superhéros. Ainsi Kato ne rejoint pas Britt Reid parce qu'il était américain et que la démocratie américaine supplante toute les autres en termes d'idéal. Il ne devient pas non plus son assistant servile et inférieur, sans que le scénariste ne joue non plus sur le ressort comique utilisé par Michel Gondry dans son film. En ce qui concerne l'identité costumée, il ne s'agit pas de la solution évidente pour combattre le crime, mais d'un dernier recours parce que Britt Reid a d'abord essayé des méthodes plus normales pour lui. Cette narration habile fait que le lecteur prend un vrai plaisir à voir surgir les éléments attendus comme la première utilisation des nunchakus par Kato, ou l'apparition de Mike Axford. Il ne manque que Lenore Case à l'appel.



A priori le lecteur peut ne pas être très enthousiaste à l'idée de découvrir une nouvelle histoire d'origine pour un superhéros ou un vigilant assez secondaire, et devant sa renommée à Bruce Lee, subodorant l'utilisation d'un nom connu (Green Hornet), uniquement à des fins mercantiles. Rapidement, il se rend compte qu'il apprécie l'atmosphère qui se dégage des dessins, à la fois pour la mise en scène des affrontements, à la fois pour la présence des personnages, à la fois pour l'ambiance prenante établie par une mise en couleurs personnelle. Il se rend compte que Matt Wagner s'est fortement investi dans son scénario, à la fois avec une construction instaurant un réel suspense, à la fois avec des personnages crédibles, tout en respectant les éléments intangibles du personnage.
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Batman/Grendel

Ce tome se compose de 2 histoires distinctes : la première publiée en 1993 et la seconde en 1996.



Dans la première, Hunter Rose (Grendel) se rend à Gotham pour finaliser des transactions et pour réaliser un casse spectaculaire. Il se trouve qu'il fréquente les mêmes cercles pour personnes fortunées que Bruce Wayne. Et de son coté, Batman ne voit pas d'un bon oeil l'arrivée de Grendel sur son territoire. Leurs relations se compliquent lorsqu'il s'avère que Wayne et Rose sont chacun liés à 2 jeunes femmes qui sont colocataires. Bruce Wayne essaye de cerner les motifs de Grendel et de le devancer dans ses manigances. Pendant que Grendel se fraye un chemin sanglant et immoral vers son but. Chaque individu n'est qu'un pion sur son échiquier et tant pis pour les états d'âme des unes et des autres.



Cette histoire est un véritable joyau tant pour son scénario que pour ses illustrations. Matt Wagner en est le scénariste, le dessinateur et l'encreur. Il a confié la mise en couleurs à Joe Matt (un incroyable créateur de comics tels que Spent, mais c'est une autre histoire). Seul maître à bord, Matt Wagner entremêle de manière exemplaire le scénario, aux mises en page inventives, aux extraits de journaux intimes des uns et des autres, aux différentes permutations entre les couples, à un casse impossible à réussir que Batman doit déjouer. Chaque rebondissement s'intègre parfaitement à la logique des personnages. Chaque individu a sa personnalité propre et les monologues intérieurs permettent de faire jouer le contraste entre Batman et Grendel et entre les 2 dames. Les combats entre les 2 sortent des habituels échanges d'horions grâce aux commentaires mais aussi aux dessins : à ce titre le dernier affrontement est présenté en une page comportant 30 cases dessinant un ballet de toute beauté. La mise en couleurs (à l'ancienne, sans ordinateur) complète parfaitement la richesse du récit tant par les contrastes que par les motifs (ah, les tapis magnifiques !). N'hésitez pas à utiliser la fonction "cliquez pour feuilleter" pour avoir un aperçu de ces pages.



Que vous soyez fan de Batman ou de Grendel, cette histoire est indispensable car Matt Wagner est au sommet de son art. Si vous êtes un connaisseur des 2, leur rencontre prend une dimension encore plus exceptionnelle. Et j'ai déjà relu plusieurs fois cette histoire, toujours avec le même plaisir.



Dans la deuxième histoire, Grendel-Prime revient dans le passé à Gotham pour récupérer une relique liée au Grendel historique, à savoir Hunter Rose. Cette fois encore, Batman va être sur son chemin pour s'opposer à cette machine de destruction. Cette histoire est plus linéaire et repose sur plusieurs confrontations entre Batman et le cyborg Grendel. Par rapport à la production habituelle des histoires de Batman, celle-ci se classe dans le haut du panier mais elle mérite 4 étoiles et non 5. De même, Wagner a simplifié sa mise en page pour plus d'efficacité, mais moins de sophistication. Il ne faut pas bouder son plaisir, mais cette histoire est nettement dans la catégorie en dessous de la première. Batman reste grand, fort et ténébreux. Ses gadgets font toujours baver d'envie le petit garçon qui sommeille en moi. Par contre Grendel-Prime apparaît comme une variation crédible mais peu originale du premier Terminator. La mise en couleurs est d'un bon niveau mais elle n'égale pas l'élégance de celle de Joe Matt.



Que vous soyez fan de Batman ou de Grendel (Hunter Rose), vous devez absolument lire la première histoire de ce tome qui est magistrale de bout en bout et qui fait honneur à ces 2 personnages, ainsi qu'à leur alter ego.
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Batman et le Moine Fou

Il y a vraiment des Batman qui sortent du lot et ce titre en fait partie. Je me rends compte que chaque auteur donne sa vision du Batman qui peut être très différente. Cela convient ou pas… Ici, on a droit à une histoire riche et dense avec une narration maîtrisée et jamais ennuyeuse.



C’est vrai également qu’il y a une interconnexion entre différentes intrigues. On voit au début Catwoman mais elle ne croise plus la route de Batman par la suite dans le récit. Le procureur Harvey Dent fait également une petite apparition. L’adversaire de Batman est un moine fou qui sacrifie ses victimes lors de messes noires façon vampirisation. Il est dommage que ce duel tant attendu finisse aussi abruptement.



Batman a également une petite amie très attachée à son père, un riche homme d’affaire complètement déboussolé depuis l’apparition d’une certaine chauve-souris. Oui, il y a incontestablement une véritable richesse de l’histoire et de la psychologie de chaque personnage.



Pour autant, on a l’impression que ce récit n’est qu’un épisode d’une grande aventure dont on attendrait la suite. En tout cas, je vais retenir le nom de cet auteur qui a mon sens, restitue à merveille l’univers de Batman. C’est l’un des meilleurs titres de la série malgré quelques défaillances.
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Green Hornet - Year One, tome 2 : The Bigge..

Ce tome fait suite à Green Hornet: Year One Volume 1 (épisodes 1 à 6) qu'il faut avoir lu avant, car les 2 tomes forment une saison complète. Celui-ci comprend les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2010/2011, écrits par Matt Wagner, dessinés et encrés par Aaron Campbell, avec une mise en couleurs réalisée par Carlos Lopez, avec des couvertures réalisées par Matt Wagner, et des couvertures alternatives réalisées par Francesco Francavilla.



Britt Reid tient une réunion de rédaction pour son journal le Daily Sentinel. Il souhaite que ses journalistes se mettent sur le cas de Green Hornet et découvrent son identité. Ed Lowery demande si c'est bien utile, du fait qu'il n'y ait pas de preuve que cet individu masqué ait vraiment commis des crimes. Reid insiste, justifiant sa demande par son intuition journalistique. De son côté, le caïd Vincent Caruso (Skid) réfléchit avec son bras droit Tony Salize, quant à l'employeur potentiel de Green Hornet qui s'attaque de manière systématique à ses opérations criminelles. En cherchant à qui profitent ces sabotages, il en déduit qu'il ne peut s'agir que du gang des irlandais. Cinq mois auparavant, Rusty Schmidt disait à Kato et Britt Reid, ce qu'il pensait de la demeure des Reid en tant que base d'opération : impossible à aménager pour répondre aux spécifications. Dans le même temps, il donnait une leçon de café américain à Kato.



En 1938 à Chicago, deux hommes de main sont en train de prendre en charge un camion pour livrer de la marchandise de contrebande. Ils sont interrompus par l'irruption de Green Hornet et Kato. Ils essayent de les attaquer, mais Kato a vite fait de les neutraliser. Puis Green Hornet les tient en joue avec son pistolet à décharge électrique. Une fois encore, une opération de Skid a été tuée dans l'œuf. Cinq mois auparavant, Rusty Schmidt présentait un entrepôt désaffecté à Reid et Kato, en leur en faisant visiter le sous-sol, et en leur faisant remarquer que l'immeuble d'habitation de haut standing de l'autre côté du trottoir est également à vendre. De fait, les caractéristiques de l'entrepôt répondent exactement aux besoins d'une base d'opération. Au temps présent, Vincent Caruso découvre l'étendue des dégâts occasionnés par son rival sur sa flotte de camions : tous les moteurs sont cuits. Il donne l'ordre d'organiser une réunion avec Ryan, Kelly et O'Shaunessy, les patrons du gang des irlandais.



Matt Wagner et Aaron Campbell ayant réalisé une première moitié prenante pour cette première année de Green Hornet, le lecteur revient pour voir les pièces du puzzle s'assembler, à la fois voir apparaître les derniers éléments manquants de la légende, à la fois voir aboutir l'affrontement contre Skid. Il commence par remarquer que Francesco Francavilla a cédé la place à Carlos Lopez qui réalise une mise en couleurs un peu moins expressionniste. Pour les séquences en civil, il rend compte des couleurs naturelles de chaque élément. Pour les séquences nocturnes ou d'affrontement, il se calque sur l'approche plus monochromatique de Francavilla, mais sans être aussi radical. Le lecteur retrouve donc les bruns et les oranges de la première partie, mais appliqués à des surfaces délimitées par les traits de contour, et dans des teintes moins vives. La narration perd un peu en intensité émotionnelle et même parfois en consistance. En effet cette approche plus naturaliste a pour effet secondaire de plus faire remarquer les cases ou parfois les pages dans lesquelles le dessinateur ne représente pas les décors.



Aaron Campbell continue à s'investir pour donner corps à la reconstitution historique. Le lecteur commence par apprécier les représentations de Chicago : la case en ouverture d'un building, la façade en brique de l'immeuble abritant les appartements de Vincent Caruso, celle de la demeure familiale de Reid, puis celle à demi aveugle de l'entrepôt, ou encore les escaliers de secours métalliques. Il prend plaisir à observer les différents types d'intérieur : la salle de réunion du journal avec sa longue table et ses hautes fenêtres laissant pénétrer une chaude lumière, le salon dans la pénombre de Skid, les grandes pièces de la demeure des Reid, les tunnels en brique sous l'entrepôt, le riche mobilier du nouvel appartement de Reid, ou encore l'atelier de travail de Rusty Schmidt. Il est un peu déçu par le dépouillement impersonnel de la salle dans laquelle opère Salvatore Lombardi pour torturer son prisonnier. Même s'il y a moins de civils que dans la première partie, l'artiste continue de porter une attention particulière aux costumes des hommes, aux uniformes des policiers, et aux robes des 2 personnages féminins.



Comme dans la première partie, Matt Wagner a conçu quelques scènes dont la narration est essentiellement portée par les dessins. Comme il se doit, Campbell fait poser Kato et Green Hornet à chaque apparition pour qu'ils impressionnent leurs ennemis. La première scène d'action montre l'efficacité de Kato en 2 cases de la largeur de la page. L'artiste conçoit un plan de prises de vue qui montre la rapidité de la progression du duo dans l'une des places fortes de Caruso où transitent de grosses sommes d'argent. Le lecteur voit la facilité avec laquelle les 2 héros neutralisent tout le monde, leur coordination impeccable et leur supériorité en combat. Il réussit à mettre en page une course-poursuite en voiture dans les rues de Chicago, à la fois avec un rythme rapide, à la fois avec un déroulement qui comprend des éléments visuels attendus, à la fois avec un déroulement original. Le lecteur constate de visu que les interventions de Green Hornet & Kato se déroulent de manière très rapide en 3 ou 4 pages, ajoutant encore à la sensation d'efficacité et de supériorité du duo. Les auteurs retiennent le même principe de rapidité quand ils se retrouvent finalement face à un ennemi capable de les neutraliser.



Matt Wagner respecte donc le principe de mise en avant des héros. Il intègre les 2 éléments manquants de la mythologie : Black Beauty et Lenore Case. La première se fait attendre, le scénariste s'amusant à faire patienter le lecteur en montrant l'impatience de Britt Reid à chaque fois que Rusty Schmidt lui indique qu'elle n'est pas encore prête. La seconde bénéficie d'une présentation par sa tante Kathy Welton. Elle devient donc la secrétaire particulière de Britt Reid et se montre à la hauteur de responsabilités bien au-delà de sa position professionnelle, et certainement de sa fiche de paie. Le lecteur reste un peu sur faim et se dit que son rôle devrait gagner en ampleur dans les aventures suivantes (mais pas dans cette année un). Il remarque aussi un petit clin d'œil au film de Michel Gondry quand Rusty et Kato sont d'accord pour dire que si l'un des deux aura besoin d'être sauvé, ce sera Britt Reid, avec un superbe regard de connivence bien rendu dans la case. Le récit prend également le temps de montrer comment Rusty Schmidt a pu concevoir le pistolet électrique à gaz de Green Hornet. Il tient donc la promesse du titre : montrer tout le travail préparatoire qui a conduit à la première année d'activité du héros.



L'histoire continue donc de se développer sur 2 lignes temporelles différentes : celle se déroulant quelques mois auparavant, et celle se déroulant au temps présent de 1938, le dernier épisode se déroulant uniquement dans cette deuxième ligne temporelle. La première permet donc de découvrir toutes les étapes menant à la première apparition du duo masqué. Dans la seconde, Matt Wagner montre les différentes attaques de Green Hornet & Kato contre le caïd en place. Ils augmentent progressivement la pression sur ses affaires, neutralisant une flotte de camions utilisés pour des trafics de tout genre, commençant à s'en prendre à ses recettes. Dans le même temps, ils élargissent leur champ d'action en rendant des visites pas courtoises aux membres corrompus en position de pouvoir dans la société. Matt Wagner tire le meilleur parti du fait que Green Hornet & Kato prétendent être des criminels en concurrence avec la pègre locale, en montrant qu'ils s'en servent pour intimider une partie de leurs victimes, mais aussi en évoquant d'autres aspects du crime organisé, comme le gang des irlandais, et le racisme affiché entre les différentes communautés. Matt Wagner brosse aussi un portrait attachant des 2 personnages principaux, au travers de leurs actions, et au travers de leurs convictions.



Prise pour elle-même, cette deuxième moitié de l'année un de Green Hornet produit un effet un peu moindre que la première. L'ambiance de chaque scène a diminué d'un degré d'intensité du fait du changement de metteur en couleurs, même si le travail de Carlos Lopez est d'un bon niveau. D'une certaine manière, il y a moins de surprises que dans le premier tome car le lecteur a déjà une bonne idée des éléments qu'il reste à intégrer dans la mythologie de la série. La progression de Green Hornet & Kato contre le crime organisé semble tellement inéluctable et rapide que l'affrontement contre le Fléau (Scourge) ne fait pas un pli. Dun autre côté, Aaron Campbell continue de savoir donner de la consistance à la reconstitution historique, aux personnages, et sa mise en scène reste plusieurs niveaux au-dessus de l'enfilade de clichés visuels. Matt Wagner prend le temps de donner du sens à chaque élément, plutôt que de se reposer sur des révélations faciles. Pris au global, cette première année du Green Hornet impressionne pour sa narration visuelle cohérente avec la série télévisuelle, et qui ne se contente pas d'enfiler des clichés. Elle impressionne également par la sensibilité du scénariste qui sait intégrer les moments attendus, tout en insufflant de la personnalité aux personnages, des motivations crédibles, et des choix plausibles. 4 étoiles pour cette deuxième partie, mais 5 étoiles pour l'année 1.
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Mage - The Hero Discovered, tome 2

Ce tome fait suite à Mage Book One: The hero discovered Volume 1 qu'il faut impérativement avoir lu avant car ce sont les 2 moitiés d'une unique histoire. Il comprend les épisodes 9 à 15, initialement parus en 1985/1986, écrits et dessinés par Matt Wagner, avec un encrage réalisé par Sam Kieth. Cette édition reprend la nouvelle colorisation effectuée par Jeromy Cox & James Rochelle, pour la réédition de 1998/1999 par Image Comics. Ce tome comprend aussi l'histoire courte intitulée Interlude, initialement parue à la fin des épisodes 16 à 19 de la série Grendel, écrits, dessinés et peints par Matt Wagner. L'histoire se poursuit ensuite dans Mage Book Two: The Hero Defined Volume 3 qui contient la première moitié de la deuxième saison.



Dans une rue de New York, un SDF est en train d'attendre l'aumône, assis sur le trottoir et adossé à un mur, avec ses 2 sacs à ses côtés. Il se lève pour aller s'installer dans la ruelle attenante. Il se fait agresser par 2 individus à la peau grise, sans trait de visage, et avec des pointes au niveau des coudes : Lazlo et Radu Grackleflint. Ils sont accompagnés par un Bonnet-Rouge (Red Cap). Le SDF contre-attaque immédiatement, enlève son imperméable révélant son identité : Kevin Matchstick. Il réussit à neutraliser les 2 Grackleflint, et le Bonnet-Rouge est estourbi par Edsel maniant sa batte de baseball verte. Malgré tout, les 2 Grackleflint parviennent à s'enfuir. Dans le gratte-ciel du Styx, Emil Grackleflint informe son père Umbra Sprite de ce qui vient de se passer. Ce dernier lui confirme qu'il n'a toujours pas réussi à localiser Mirth (le mage) qui a dû se réfugier dans une autre dimension. Il indique que 5 mois se sont écoulés depuis sa dernière apparition. Emil Gracklflint lui rappelle qu'il doit effectuer un discours à la fête organisée le soir même.



Kevin Matchstick et Edsel sont retournés à l'appartement de Sean Knight (un spectre) qu'ils ont retrouvé sur place. Knight remet de nouveaux teeshirts à Matchstick, et il leur indique qu'il n'arrive pas à se défaire de l'impression que quelqu'un suit ses déplacements, alors qu'il n'a vu personne. Alors qu'ils se demandent que faire ensuite, Sean Knight trouve un récépissé de teinturier dans le pantalon du Bonnet-Rouge qu'il a laissé derrière lui. Il décide de s'y rendre pour utiliser ses pouvoirs afin d'obtenir des informations sur la personne ayant déposé ledit pantalon. Après avoir impressionné le préposé et obtenu le renseignement désiré, il revient à l'appartement avec une tenue de soirée. Sean Knight et Kevin Matchstick ont revêtu un smoking, et Edsel une robe de soirée. Ils ont décidé d'effectuer une reconnaissance le soir même à l'adresse donnée par le teinturier, dans un immeuble appelé Styx, à l'occasion de la fête qui y est organisée. Une fois à l'intérieur, ils décident de se séparer pour chacun se mêler à la foule dans une salle de jeux différente.



Cette deuxième partie commence donc 5 mois après, ce qui permet à Matt Wagner de montrer son héros ayant acquis la base de la maîtrise de ses capacités. Comme dans la première moitié, ce récit est avant toute chose un récit d'aventures, avec de l'action et des affrontements physiques contre des créatures magiques. Le lecteur retrouve les frères Grackleflint, ainsi qu'une armada de Bonnet-Rouge (créatures malveillantes issues du folklore britannique), ainsi qu'une autre grosse surprise liée à l'Umbra Sprite. Comme dans le tome précédent, Matt Wagner adapte sa narration au format de parution en épisode mensuel, en intégrant un combat par épisode. Le lecteur observe également que pour ces affrontements, l'auteur s'attache à réaliser une narration allégée en phylactères, voire qui en est dépourvue, de manière à rendre la lecture plus fluide. À chaque fois, il change la forme des cases, pour s'adapter à la nature du combat. Il peut aussi bien utiliser des cases de petite taille, que des cases de la largeur de la page, allant même jusqu'à réaliser un dessin sur 3 pages, le lecteur devant ouvrir une page qui se déplie. Enfin, il termine chaque épisode, par un dessin en pleine page, sur un moment plein de suspense pour être le plus incitatif possible, afin que le lecteur revienne le mois suivant.



Le lecteur plonge donc dans un récit rapide, rempli de hauts faits, et d'affrontements physiques spectaculaires, avec un réel sens de la mise en scène, qui dépasse l'enfilade de cases uniquement pour faire joli, mais sans plan de prise de vue d'ensemble. Comme dans le tome précédent, il observe que Matt Wagner n'est que moyennement intéressé par les environnements dans lesquels se déroulent les scènes. Le niveau de détail varie de plusieurs accessoires et meubles dans l'appartement de Sean Knight, à des murs rouges et lisses de pièces nues dans le gratte-ciel du Styx. Si l'artiste ne s'attarde pas sur les détails, par contre, il s'attache à rendre compte de la volumétrie de chaque endroit. Le lecteur remarque à nouveau qu'il y a peu de figurants dans ce récit, les scènes se concentrant sur les personnages principaux, les bons (Kevin Matchstick, Edsel, Sean Knight, Mage) et les méchants (les frères Grackleflint, Umbra Sprite et les Bonnets-Rouges). Wagner s'investit beaucoup plus dans le jeu des acteurs et dans les expressions des visages, pour des postures naturelles, et des visages parlants, sans aller jusqu'à l'exagération. La génération d'empathie fonctionne bien et le lecteur peut percevoir leurs états d'esprit et leurs émotions.



Pris au premier degré, ce récit constitue une histoire d'action, avec une intrigue assez linéaire dans laquelle les héros se confrontent aux méchants, à 2 reprises, la première en subissant des pertes, et la seconde en gagnant avec une relative facilité, c’est-à-dire en continuant de taper plus fort jusqu'à la victoire. Pris ainsi, cela constitue une lecture divertissante avec les points de passage attendue dans la progression du héros, les épreuves à surmonter, des décors un peu pauvres et une mise en scène inventive et canalisée. Comme pour la première moitié de cette saison, le ressenti du lecteur s'étoffe par le plaisir de voir Kevin Matchstick prendre de l'assurance petit à petit, et par le retour du personnage dont la série porte le nom. La présence minimale de personnages secondaires et de figurants produit le même effet : celui d'un récit centré sur le personnage principal, sans beaucoup d'importance accordée aux autres. C'est donc finalement l'histoire de Kevin Matchstick et de son évolution. Le lecteur peut alors prendre le récit au second degré et voir l'absence d'autres personnages comme le signe d'une métaphore. Ce n'est pas tant qu'il n'y ait pas d'autres habitants à New York, ou que Matchstick évolue dans un New York en carton-pâte, c'est plutôt que cette histoire peut s'apparenter à une fable, à une métaphore d'une phase de la vie de ce personnage.



Le titre donne une première indication en ce sens : la découverte du héros. Dans le premier tome, Matchstick s'apitoyait sur son sort, sans idée de quoi faire de sa vie, sans ami et sans famille. Matt Wagner lui fait traverser des épreuves hautes en couleurs à affronter des créatures surnaturelles, exigeant du héros des sacrifices, et des pertes. Dans le même temps, pour surmonter ces épreuves, il doit accepter de mettre la pédale douce sur l'auto-apitoiement, et d'écouter ce que lui disent Myrth et Edsel. Le lecteur le voit renâcler à l'idée d'accepter que ce qu'ils lui révèlent progressivement corresponde à la réalité telle qu'elle est. La révélation de la véritable nature de Kevin Matchstick l'inscrit dans un cycle de réincarnation d'un personnage mythologique, le contraignant à une destinée déjà écrite, à accepter un rôle dont il ne veut pas particulièrement, le privant de liberté. Edsel et Myrth jouent le rôle de mère et père pour lui, l'une se sacrifiant pour qu'il puisse atteindre son plein potentiel, l'autre lui expliquant petit à petit ce qu'il est vraiment. Avec ce point de vue, le lecteur peut voir Kevin Matchstick contraint de se confronter au fait qu'il provient d'une certaine mythologie qui conditionne son devenir, comme chaque personne provient d'un milieu culturel et social qui prédétermine ce qu'il pourra être par la suite. Il ne lui reste plus qu'à devenir ce qu'il est, à accepter sa condition et à assumer ses responsabilités. De fil en aiguille, le lecteur vient à se dire que ce parcours s'applique également à l'auteur, alors débutant dans son métier, et apprenant par la pratique ce quel genre de créateur il est.



Le tome se termine avec une histoire de 16 pages entièrement réalisée par Matt Wagner, mettant en scène Kevin Matchstick et sa batte de baseball luminescente, sauvant une pauvre jeune femme agressée par un Kelpie (une créature surnaturelle issue du folklore irlandais et écossais). Cette histoire est parue dans la série Grendel, en pages de fin, en 1988, soit, 2 ans après la fin de la première saison de Mage. C'était pour le lecteur l'occasion de voir le retour du héros, et d'apprécier les progrès qu'il avait effectués depuis, donc aussi ceux de l'auteur. Comme son titre l'indique, il s'agit d'un interlude, rapidement raconté, avec une belle efficacité, une narration visuelle toujours aussi épatante, accomplissant l'objectif de montrer le niveau atteint par Kevin Matchstick, en attendant la saison 2.



Ce premier tome se déroule comme le premier : une histoire d'aventures opposant un héros avec des capacités extraordinaires et ses 3 compagnons, à des créatures surnaturelles malveillantes. En soit l'intrigue n'est pas très originale, mais elle est bien racontée, avec un rythme régulier sans être épileptique. Sous réserve que le lecteur y soit sensible, il découvre également une métaphore du passage à l'âge adulte, ainsi qu'une réflexion de l'auteur sur son propre avenir.
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The Tower Chronicles - DreadStalker, tome 1

Ce tome fait suite à Geisthawk. Il comprend les épisodes 1 à 6, initialement parus en 2014, écrits par Matt Wagner, dessinés et encrés par Simon Bisley, avec une mise en couleurs de Ryan Brown. Ce tome commence avec un paragraphe résumant le premier tome.



Quelque part dans le nord de l'Ontario, un couple de jeunes gens amoureux se retrouve nez à nez avec un Wendigo pas commode. Heureusement cette grosse bébête était pourchassée par John Tower, secondé par Alicia Hardwicke (une agente du FBI). L'affaire est vite réglée.



Alicia Hardwicke est obsédée par les mystères entourant John Tower, au point d'en négliger son travail et de se faire rappeler à l'ordre par son chef. John Tower souhaite accélérer sa récupération d'artefacts magiques, pour une raison qui demeure inconnue. Le responsable de la Confrérie de la Rose est passablement agacé par l'échec d'Anton Bel Geddes et Bridgette Mason.



Le premier tome (paru initialement sous la forme de 4 minces tomes, à commencer par The Tower chronicles: Geisthawk 1) avait laissé un goût de trop peu, au regard de la qualité des créateurs. Matt Wagner a marqué les esprits pour l'incroyable saga de Grendel (à commencer par Hunter Rose), pour sa création Mage, the hero discovered, et pour quelques histoires de Batman (par exemple Batman and the mad monk). Simon Bisley est entré dans le panthéon des dessinateurs de légende grâce à Slaine, the horned god et Lobo, portrait of a bastich. Pourtant "Geisthawk" était fade et plat, avec quelques rares scènes mémorables.



Ce deuxième tome commence et se déroule sur le même ton. Matt Wagner reconduit sa structure basée sur des combats contre des gros monstres qui s'en prennent à d'innocents humains (pas forcément futés). Le Wendigo est assez classique, Matagot est plus original. Ces affrontements manquent cruellement de suspense car le lecteur a bien compris que John Tower occira chaque monstre, sans réelle difficulté. Du coup le lecteur recherche d'autres éléments dans la narration pour capter son attention.



Le récit dévoile également une partie de l'histoire personnelle de John Tower (ou plutôt Jean La Tour). Ainsi le lecteur découvre son époque de naissance, l'amour de sa vie, et sa véritable motivation à occire des monstres. Matt Wagner a bien effectué ses recherches historiques sur les templiers, mais le lecteur reste à l'extérieur du récit. Il a du mal à éprouver les émotions du personnage principal, ou simplement à éprouver de la sympathie envers lui. Il voit Jean La Tour un peu fier et sûr de ses convictions, que la réalité finit par rattraper de manière dramatique.



Certes, Wagner raconte une situation historique compliquée, en parlant de religion, de mariage mixte, sans tomber dans les clichés ou les stéréotypes. Mais il le fait en restant à la surface, en privilégiant l'action et l'aventure, pour une histoire qui finit par être superficielle. Certes les dessins de Simon Bisley sont également personnels et évitent les stéréotypes visuels. Cet artiste représente es visages qui sortent de l'ordinaire sans être exagérés. Il porte une attention particulière aux vêtements, et aux arrières-plans.



Chose importante, Bisley donne sa propre version des monstres qui dépassent le ramassis de clichés, ou d'apparences prêtes à l'emploi. Pourtant, le lecteur a du mal à prendre ces représentations au sérieux. Par exemple la bébête pleine de dents (Matagot) qui sort de la bouche du chat est aussi dérangeante (du fait du regard empli de douleur du chat), que risible du fait de sa morphologie idiote. Pourtant, il s'agit bien d'un passage dramatique où se joue la vie d'une petite fille. Lorsque John Tower réalise l'ascension d'une paroi rocheuse, le lecteur peut contempler son équipement, conforme à la réalité. Mais quelques pages plus loin, le personnage a de nouveau revêtu son costume de pourfendeur de démons, avec hoodie et masque de superhéros inutiles.



Ainsi les dessins portent à la fois la marque d'une approche graphique adulte et personnelle, et à la fois la marque de clichés d'aventure, déplacés dans ce récit. Lorsque l'histoire effectue un retour dans le temps en 1119 à Jérusalem, les dessins de Bisley retrouvent leur originalité et perdent leur dimension parodique (plus ou moins consciente). Par contre, la narration de Matt Wagner replonge dans une tonalité factuelle, dépourvue d'affect, ne déclenchant aucune sympathie chez le lecteur.



Cette alternance de chaud et froid apparaît également dans le traitement des personnages secondaires. Dans l'aventure précédente, Anton Bel Geddes et Bridgette Mason servaient plus de respiration comique, que de véritables antagonistes. Dans la seule scène où ils apparaissent, ils sont traités au premier degré, alors même que les remontrances du chef de la Confrérie des Roses appartiendraient plus à un registre d'exagération comique un peu lourdaude.



D'un côté, il y a donc cette narration dépassionnée, détachée ; de l'autre il y a des séquences qui enrichissent le concept et les personnages. Ainsi le lecteur en apprend plus le passé de John de John Tower, et sur les liens qui l'unissent à Romulus Barnes (son représentant légal) et Rafael Takahashi (l'individu qui lui conçoit et fournit des armes uniques en leur genre). Il constate l'intérêt qu'Alicia Hardwicke lui porte, même si là encore la narration reste assez gauche. Le lecteur voit une femme tomber amoureuse de ce beau héros viril, blanc et mystérieux, même si elle reste capable de se battre et même si elle cherche à en savoir plus sur lui.



Cette deuxième histoire (à suivre) consacrée à John Tower reste aussi frustrante que la première. Le lecteur voit que le scénariste et le dessinateur disposent de capacités qui leur permettraient de raconter une histoire originale et passionnante. Dans le même temps, la narration assez plate empêche tout investissement émotionnel dans ces personnages et leurs péripéties.
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Madame Xanadu Vol. 4: Extra Sensory

Ce tome fait suite à Broken House of Cards ; c'est le dernier de la série et il peut être lu indépendamment des autres. Il contient les épisodes 24 à 29 qui sont autant d'histoires.



Chacun des 5 premiers épisodes s'articule autour de l'un des 5 sens. En 1963, une jeune fille noire de Harlem souffre de troubles de la vision qui lui font voir des blessures graves sur certains individus. Rosalyne Mays a arrêté les études après le lycée pour travailler comme vendeuse dans un magasin de chaussures pour blanches. Son salaire permet à sa mère de joindre les 2 bouts et d'élever sa plus jeune fille. Malheureusement les troubles de la vision sont tellement intenses que Rosalyne n'est plus en mesure de travailler correctement. Cet épisode sur la vue est illustré par Marley Zarcone.



En 1963, Spencer Wilkins est un publiciste remarquable qui est en passe de devenir un associé dans l'agence qui l'emploie. Mais il se met à entendre des propos délirants en provenance des gens qui l'entourent, que ce soient des clients, son patron, des inconnus dans les transports, ou même son épouse modèle. Cet épisode sur l'ouïe est illustré par Laurenn McCubbin.



À une époque indéterminée au vingtième siècle, Sammy est un petit garçon qui dégage une odeur pestilentielle et qui erre abandonné à New York en vivant d'expédients, et en s'abritant dans une cave abandonnée éclairée par un soupirail. Une dame étrange et menaçante hante ses rêves. Cet épisode sur l'odorat est illustré par Chrissie Zullo.



En 1964, un créateur de mode, écrivain, et artiste accompli bénéficie d'une énigmatique égérie dénommée Blue. Elle est un mannequin exceptionnelle mais elle refuse que qui que ce soit la touche. Cet épisode sur le toucher est illustré par Celia Calle.



En 1966, Carly effectue des études de médecine et entretient un copain qui a arrêté les siennes et qui zone en profitant de la libération des moeurs et du relâchement du contrôle des produits psychotropes. Carly teste un acide ce qui a des conséquences catastrophiques sur son sens du goût (un effet qui évoque fortement la cibopathie de Tony Chew). Cet épisode sur le goût est illustré par Marian Churchland.



Le tome se conclut avec un épisode illustré par Amy Reeder dans lequel Madame Xanadu recrute une apprentie.



Ce tome reflète la volonté de Matt Wagner de collaborer avec des illustratrices différentes pour chaque histoire. Pour chacune de ces dames, il a conçu une histoire indépendante évoquant l'un des 5 sens avec des problématiques différentes et des résolutions qui passent à chaque fois par l'intervention de Nimue (Madame Xanadu). Parmi elles, l'histoire sur le toucher sort du lot. Les illustrations empruntent à la fois à l'esthétique des mangas et aux codes de la mode pour une évocation libre d'Andy Warhol et de Nico. Celia Calle emmène le lecteur dans les milieux branchés peuplés de mannequins filiformes et de codes vestimentaires tendances. La véritable nature de Blue se laisse deviner rapidement, mais sa personnification par le scénario et les flux de pensée est convaincante et envoutante.



Pour les autres épisodes, le pot aux roses se devine plus rapidement et le suspense est assez ténu. Matt Wagner sait faire de chacun des personnages des individus attachant fermement ancrés dans l'époque correspondante. Le trip à l'acide est irrésistible. Coté illustrations, chaque dessinatrice a son propre style. Marley Zarcone utilise un style assez réaliste avec des traits simples et limités pour un résultat efficace et léger. Laurenn McCubbin utilise un style très prononcé à base de trame et de silhouettes qui semblent collées sur le décor, pour un résultat original mais un peu fade. Chrissie Zullo développe un style digne d'illustrations d'un conte pour enfants assez noir, pour un résultat singulier qui fait habilement ressortir la situation anormale de Sammy. Marian Churchland a un style qui évoque celui de Guy Davis, un peu plus léger en encrage et un peu plus plaisant à l'oeil, pour un résultat très féminin.



Amy Reeder illustre le dernier épisode et c'est un vrai plaisir de la retrouver et de constater l'évolution de ses illustrations depuis le premier épisode. Cette histoire est magnifique de bout en bout.



Ce tome clôt la série de "Madame Xanadu" par une brochette d'histoires dont 2 sont exceptionnelles (le toucher, et le dernier), et les autres ont le mérite de tenter autre chose que l'ordinaire des comics pour un pouvoir de divertissement satisfaisant. J'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir l'histoire de Nimue, même si tous les récits n'étaient pas exceptionnels. Il s'agit d'une série Vertigo, trop étrange pour pouvoir figurer dans l'univers partagé traditionnel de DC, mais peut être un peu trop sage pour la branche Vertigo.
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