Citations de Matthieu Ricard (832)
L'amplitude des zoocides que les humains perpétuent à longueur d'année nous interdit de continuer à faire comme si de rien n'était. " Le système industriel, écrit Jocelyne Porcher, est une entreprise de déconstruction de l'animal et de construction de la chose. Mais cette entreprise est vouée à l'échec. Les animaux résistent et persistent à être des animaux et non des choses. En revanche, nous perdons notre sensibilité et notre humanité. " La perpétuation de la tuerie en masse des animaux pose donc un défi majeur à l'intégrité et à la cohérence éthique des sociétés humaines.
Dans la bulle de l'ego, la moindre contrariété prend des proportions démesurées. L'étroitesse de notre monde intérieur fait qu'en rebondissant sans cesse sur les parois de cette bulle, nos états d'esprit et nos émotions s'amplifient de manière disproportionnée et envahissante. La moindre joie devient euphorie, le succès nourrit la vanité, l'affection se fige en attachement, l'échec nous plonge dans la dépression, le déplaisir nous irrite et nous rend agressifs. Nous manquons des ressources intérieures nécessaires pour gérer les hauts et les bas de l'existence. Ce monde de l'ego est comme un petit verre d'eau : quelques pincées de sel suffisent à le rendre imbuvable. A l'inverse, celui qui a fait éclater la bulle de l'ego est comparable à un grand lac : une poignée de sel ne change rien à sa saveur.
Du point de vue chronologique, si l'on réduit à une année les quinze milliards d'années que l'on attribue à notre univers, l'homme civilisé, Homo sapiens, ne fait son apparition que le 31 décembre à 23h59. Celui qui se prend pour le "centre de l'univers" est donc un arrivant de dernière minute.
Dans une democratie, les lois protègent les citoyens contre la violence de leurs semblables. Pourquoi ne pas inclure les autres êtres? La democratie se dit garante de la liberté. Mais faute de prendre en compte l'ensemble des êtres, il s'agit d'une curieuse liberté que celle qui use du droit du plus fort pour se nourrir de la mort des autres et faire de nos estomacs leur cimetière.
Le bonheur ne se décrète pas, ne se convoque pas, mais se cultive et se construit peu à peu dans la durée. Le bonheur est une manière d'être, or les manières s'apprennent.
D'après Olivier Grenouilleau, auteur de nombreux ouvrages sur l'esclavage, quatre éléments principaux permettent de définir : 1) l'esclave est un "autre"; 2) l'esclave est un homme possédé par un autre; 3) l'esclave est toujours "utile" à son maître; 4) l'esclave est un homme en sursis. Remplacez le mot "homme" par "animal d'élevage", et il n'est pas difficile de faire le rapprochement, sans pour autant "offenser le genre humain". En effet, l'animal que l'on instrumentalise pour son labeur, sa chair, sa peau, ses os et autres parties de son corps, est une "autre" espèce; il est lui aussi détenu par un propriétaire (lequel n'est plus, aujourd'hui, qu'un système industriel aux multiples visages anonymes); il doit rester "utile", sinon il est "réformé" (euphémisme pour désigner sa mise à mort); et il est en "sursis", non pas dans l'attente d'une libération, mais d'une mort prématurée et programmée.
Le sourire, c'est la porte du cœur qui s'ouvre à l'autre.
Accorder une immense valeur à la vie humaine ne doit pas nous amener à réduire à néant la valeur de la vie des animaux.
Contemplons simplement la douleur. Même si sa présence est lancinante, demandons-nous quelle est sa couleur, sa forme ou toute autre caractéristique immuable. On s'aperçoit que ses contours s'estompent à mesure qu'on tente de la cerner. En fin de compte, on reconnaît qu'il y a, derrière la douleur, une présence consciente, celle-là même qui se trouve à la source de toute sensation et de toute pensée. Détendons notre esprit et essayons de laisser la douleur reposer dans la pleine conscience, libre de toute construction mentale. Cette attitude nous permettra de ne plus en être la victime passive, mais, peu à peu, de faire face et de remédier à la dévastation qu'elle provoque dans notre esprit.
Il nous incombe à tous de continuer à favoriser l'avènement d'une justice et d'une compassion impartiales envers l'ensemble des êtres sensibles. La bonté n'est pas une obligation : elle est la plus noble expression de la nature humaine.
Qu'on en juge au vu de ces quelques chiffres :
- l'élevage contribue à 14,5% des émissions de gaz à effet de serre liées aux activités humaines, en deuxième position après les bâtiments et avant les transports.
- Pour produire 1kg de viande, il faut utiliser 10 kg d'aliments qui pourraient nourrir les populations des pays pauvres qui les produisent.
- 60 % des terres disponibles dans le monde sont consacrées à l'élevage.
- L'élevage à lui seul consomme 45 % de toute l'eau destinée à la production d'aliments.
- En réduisant la consommation de viande, on pourrait éviter 14% des décès humains dans le monde.
Tolstoï et toute sa famille étaient strictement végétariens. Sa fille raconte qu'une tante carnivore, invitée à déjeuner, avait prévenu qu'elle tenait absolument à manger de la viande. En arrivant à table, elle avait trouvé un poulet vivant attaché à sa chaise et un couteau effilé près de son assiette ! il a été montré que la majeure partie des humains éprouvent une profonde répugnance à tuer l'un de leur semblables. Mais tuer un animal est aussi un acte troublant.
Les chewong de Malaisie, rapporte l'éthologue Dominique Lestel, ne divisent pas le monde en humains et non-humains. Ils considèrent que les représentants de chaque espèce ont un regard sur le monde qui leur est propre. Ainsi, leur perception du monde s'organise selon une "voie du tigre", une "voie de l'ours" et une "voie de l'homme. Ce que perçoit chaque espèce, est pour elle, aussi vrai que ce que perçoit l'être humain.
Qu'y a-t-il donc de si inavouable à dissimuler derrière les murs des abattoirs et sous les hangars des élevages industriels ? Ce qui est est exposé dans ce chapitre est choquant. Faudrait-il le faire précéder de l'avertissement "âmes sensibles s'abstenir" ? Vous pourriez être tenté de tourner les pages pour passer à la suite. Mais pour se sentir concerné par le sort d'autrui et, dans la mesure du possible, agir pour remédier à ses souffrances, ne faut-il pas en prendre la mesure ? L'histoire a montré que détourner le regard a toujours laissé libre cours aux pires atrocités et a retardé les interventions nécessaires à les enrayer. A quoi bon édulcorer la réalité ? Ne Vaut-il pas mieux la regarder en face et y puiser le courage de la compassion ?
Toutefois, se préoccuper du sort des quelque 1,6 million d’autres espèces qui peuplent la planète n'est ni irréaliste ni déplacé, car, la plupart du temps, il n'est pas nécessaire de choisir entre le bien-être des humains et celui des animaux. Nous vivons dans un monde essentiellement interdépendant, où le sort de chaque être, quel qu’il soit, est intimement lié à celui des autres. Il ne s'agit donc pas de ne s'occuper que des animaux, mais de s'occuper aussi des animaux.
D'abord ils vous ignorent, puis ils rient de vous, puis ils vous combattent, puis vous gagnez.
- Ghandi
Enseigner, ce n'est pas remplir un vase, c'est allumer un feu.
Aristophane
La seule voie qui offre quelque espoir d'un avenir meilleur pour toute l'humanité est celle de la coopération et du partenariat.
Kofi Annan
L'utopie ne signifie pas l'irréalisable, mais l'irréalisé.
L'utopie d'hier peut devenir la réalité d'aujourd'hui.
Théodore Monod
L'égoïsme psychologique montre sa faiblesse lorsqu'il prétend expliquer à lui seul tous les comportements humains. Il est égoïste de refuser une prune à un enfant (vous voulez la garder pour vous) et il est égoïste de la lui donner (vous faites cela pour avoir bonne conscience ou pour mettre fin aux demandes insistantes de l'enfant, qui vous exaspèrent). Sans vérifier expérimentalement la motivation véritable de la personne, on pourrait avancer tout aussi arbitrairement l'hypothèse inverse : il aussi altruiste de donner une prune à un enfant (vous savez qu'il aime les prunes) que de la lui refuser (vous savez que les prunes lui font mal au ventre)