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Critiques de Michel Leiris (42)
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Le ruban au cou d'Olympia



Manet a beau l’appeler Olympia, son modèle n’a rien d’une déesse sortie de l’Olympe. Elle n’a rien à voir avec la Vénus du Titien. C’est une femme réelle, vivante, et les critiques d’art ne se sont pas trompés en criant au scandale.

Pour Michel Leiris, elle incarne cette « jeune femme parfaitement actuelle et qui, des plus terrestres, pourrait fort bien être l’une de ces créatures dont on rêve la nuit parce qu’on les as croisées le jour. »

Fille vénale sans aucun doute, elle s’offre sans aucun sentiment apparent, le regard vide, avec pour contre point « l’aimable négresse » qu’escorte un beau chat noir. Seule sa main recouvre son sexe, (en cela Manet respecte les interdits de l’époque de peindre les poils, interdit outrepassé par Courbet dans son « Origine du monde ») ses parures sont « le petit ruban noir autour du cou, un gros nœud rose aux cheveux, boucles d’oreille, bracelet et mules ».

 Ce n’est donc pas un nu intégral. 

Et pourtant, remarque Leiris, ce sont justement les détails extérieurs, le noir de la servante apportant des fleurs, le chat noir au poil hérissé, et queue ondulée comme un autre ruban noir ainsi que le minuscule ruban noir avec une perle suspendue, qui font ressortir la nudité absolue (et donc scandaleuse). 

Ce ruban noué comme autour d’un cadeau, le paquet de fleurs offertes par l’africaine, dont Leiris attend qu’elles soient renversées sur le corps d’Olympia, la fleur rose apposée derrière l’oreille symbolisant le sexe pas entrevu, mais deviné : voilà les raisons de l’esclandre provoqué par Manet.

Ce noir du minuscule ruban sur le blanc, celui du corps d’Olympia et des draps blancs d’un autre blanc, invite Leiris à une méditation sur l’écriture, noire sur papier blanc. Pourquoi écrire ? En tout cas pas comme confession ou souvenirs vécus, (même si c’est ce qu’il a fait dans l’Afrique fantôme.)

Écrit à ses quatre-vingt ans, l’auteur évoque aussi la vieillesse, malaise poignant au moment du réveil – vieillir, bientôt mourir -

Revenant subtilement à Manet, il se voit fumant une cigarette en prenant son thé, et désirant au même moment fumer : le désir n’étant donc jamais exhaussé, et lorsqu’il l’est en surface, une faille se manifeste, plus profonde, un inassouvissement perpétuel.

Leiris en cela reprend Platon, tout en le contredisant : dans le Banquet « l’éros », le désir nait de la constante insatisfaction de l’homme à quoi s’oppose un amour plus désintéressé et bien plus grand. Or c’est au fond même de l’accomplissement du désir que le manque se fait jour pour Michel Leiris.

Il faut lire ces pages aussi bien écrites que du Proust, réflexions et anecdotes entrecoupées de ses remarques sur l’Olympia.

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L'âge d'homme

« L’âge d’homme », une œuvre autobiographique si l’on en croit l’ensemble de la critique ; certes, une œuvre ou Michel Leiris parle de lui, exclusivement de lui. Autobiographique, donc … mais mieux que ça : une œuvre autobiographique originale dans la mesure où, faisant fi de la chronologie, l’auteur se livre par thème.



Huit thèmes, et un ouvrage qui prend fin au moment où Michel Leiris prétend avoir atteint « l'âge d'homme » ; en fait, celui qui correspond, nous dit-il, à la naissance de sa vocation d'écrivain.



Publié en 1939, à la suite d’une expérience psychanalytique, « L’âge d’homme » en garde quelques scories ; un texte introspectif, parfois un peu jargonneux mais non dépourvu d’humour et d’autodérision écrit dans un style « classique » remarquable ; avec en filigrane ses personnages quasi-obsessionnels de Judith (la putain criminelle) et Lucrèce (la chaste suicidaire). Un texte brillant où Michel Leiris nous expose finalement la difficulté de s’accepter et de vivre avec soi-même.

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L'Afrique fantôme

Rebondissement dans l'affaire Griaule.

Dans « Dieu d'eau », Marcel Griaule ne parle pas à la première personne, il se met en scène : l'étranger, Le Blanc, l'Européen. Et a recours à un interprète. De là à présenter une vision personnelle faussée, il n'y a qu'un pas et on lui a reproché sa vulgarisation : Griaule a voulu donner une image concernant tous les aspects de la culture dogon, dépouillé du langage scientifique, et bien que sa fille Jacqueline Calame-Griaule atteste de son honnêteté, beaucoup ont dénoncé son côté égocentrique plus que scientifique.

Dans ces entretiens avec un sage aveugle, il mêle anthropologie et littérature, ce qui a fait son succès et a fait connaitre la culture dogon, mais, par ailleurs, a suscité de nombreuses critiques.

La plupart des ethnologues porte un regard critique sur Dieu d'eau, en France comme à l'étranger. Ils reprochent à son auteur d'avoir occulté l'histoire, le politique, la réalité sociale, le contexte de l'enquête et la diversité des discours pour construire, à partir d'un simple dialogue, une cosmogonie ou un système de pensée figé et homogène qui serviraient de référence à l'ensemble de la société dogon.

D'être parti en roue libre.

On peut aussi lui reprocher ce que Michel Leiris note au cours de leur Mission commune de 1931 à1934, de Dakar à Djibouti, lorsqu'il en est le « secrétaire-archiviste » : les vols, répétés, nocturnes, d'objets souvent religieux.

Un arrêté émanant du Ministère des colonies avait bien accordé « un permis de capture scientifique, valable pendant toute la durée de son voyage pour l'ensemble des Colonies de l'Afrique Occidentale Française à M. Marcel Griaule, chargé de mission”, ce qui revient à légaliser les pillages.



Cependant, cette « capture » se monte à 3 600 objets, plus de 300 amulettes et manuscrits éthiopiens, et Leiris dans « l'Afrique fantôme » note :

“On pille des Nègres, sous prétexte d'apprendre aux gens à les connaître et les aimer ».

Griaule décide, en plus de ses privilèges, de voler pendant la nuit, et utilise les menaces, les extorsions et la corruption pour enrichir son butin.

“Nous partons en hâte, au milieu de l'ébahissement général et parés d'une auréole de démons ou de salauds particulièrement puissants et osés. […] nous déballons notre butin : c'est un énorme masque à forme vaguement animale, malheureusement détérioré, mais entièrement recouvert d'une croûte de sang coagulé, qui lui confère la majesté que le sang confère à toutes choses”, raconte Leiris.

Bien évidemment, la parution du journal de bord de l'expédition, sous le nom suggéré par Malraux : L'Afrique fantôme, est fort mal vu par Griaule, qui n'a pas, on le comprend, envie de se faire traiter de voleur.

Il faut lire au moins l'introduction dans laquelle Michel Leiris, avec un phrasé proustien, met de plus en question son action même et ses illusions de Blanc voulant pénétrer dans l'âme noire, et la notion même d'ethnologie :

« Il n'y a pas d'ethnographie ni d'exotisme qui tiennent devant la gravité des questions posées, sur le plan social, par l'aménagement du monde moderne et que, si le contact entre hommes nés sous des climats très différents n'est pas un mythe, c'est dans l'exacte mesure où il peut se réaliser par le travail en commun contre ceux qui, dans la société capitaliste de notre XX siècle, sont les représentants de l'ancien esclavagisme. (Et toc, prends ça, Griaule)

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Fissures

C’est en fouillant les rayons poésie de ma médiathèque que je suis tombée sur cette pépite de beauté sobre : « Fissures ».

Ecrivain, poète, ethnologue et critique d'art, Michel Leiris était un personnage discret.

Les poèmes de ce recueil ont été écrits pour illustrer des œuvres du peintre Joan Miró, treize eaux-fortes exactement. Le livre a été publié en 1969 et, dans cette version plus récente de 1992, j’ai regretté que les treize illustrations n’y figurent pas, à l’exception de deux dessins au trait noir. J’ai pu tout de même apprécier l’écriture du poète, concise, sobre et dense. Sur chaque page blanche, un poème très court, fragments déliés que l’on suit comme un fil. L’auteur fouille les traces, les empreintes, les rides à la recherche d’une vie, qui se résume, peut-être, à pas grand-chose. Car le rien est très présent

« … un rien / ça n’est pas rien »

Après avoir suivi ce « fil tordu », ce fil d’Ariane qui nous a entrainé parfois en dehors du temps, tout se termine par un questionnement

« …faudra-t-il tout à coup

Jouer le tout pour le tout

Si rien n’existe qui ne tienne à un fil ? »



La poésie, intemporelle, toujours nous accompagne et c’est un bonheur.

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Langage, tangage ou Ce que les mots me disent

Suite au quiz de mon ami LaFaro, j'ai ressorti Leiris des rayons (là où les livres sont rayés) obscurs de ma bibliothèque et le sourire (le rire enfoui en nous) est revenu (me mettant à nu).

Leiris a su cultiver (adoration de l'hiver) ce champ en friche entre la réflexion pure et les brèves de comptoir jaillissant à l'heure de l'apéro.

La parole et la vérité sort de la bouche des mots eux-mêmes lorsqu'ils ne sont pas pris en ôtage par la Nomenklatura (sorte de clou tapissier particulièrement pointu, à tête carrée et souvent chauve)

Comment ai-je pû oublier Leiris et ma jeunesse et la jeunesse déconnante de Leiris. Que le Bon Dieu (celui des lecteurs) me pardonne.

Je me suis confessé à mon miroir qui a parlé :

"Sur Babelio tu posteras, 26 citations de l'abécédaire de Leiris"

A savourer pour ne pas mourir confit né.
Lien : https://camalonga.wordpress...
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Ondes - Images de marque

Découvert un jour en bibliothèque, ce court recueil de poèmes m'a frappée par surprise.



J'avais étudié quelque temps auparavant un court passage de l'autobiographie de Michel Leiris. Intriguée par le bonhomme, je l'ai gardé dans un coin de ma tête. Puis, un jour que je flânais sans grande conviction dans le rayon poésie, j'ai vu son nom sur la couverture d'un mince bouquin. Je l'ouvre, tombe sur un poème aphoristique de toute beauté, il me saisi, je l'embarque.

Les courts poèmes aphoristiques me rappellent les haïkus japonais.

J'en retiens quelques pépites :



"ARC-EN-CIEL

Errer du zénith au nadir

et, faisant flèche de tout bois,

parcourir l'entière gamme des couleurs

pour qu'une joie pointe

hors de l'eau noire."



Œuvre méconnu de l'auteur (qui est lui-même plutôt tombé dans l'oubli), ce recueil jusque là inédit a vu le jour grâce à la toute confidentielle maison d'édition indépendante Le Temps qu'il fait.

Maison qui se présente ainsi :

"Balançant, depuis leurs débuts, entre la figure (passablement péremptoire) de l'«éditeur d'honneur» et celle (trop réservée) de l'«éditeur introuvable», elles ont publié au cours de ces 30 années d'artisanat obstiné près de 600 titres dans lesquels on devine leur passion sans exclusive pour la langue et leur intérêt non moins ouvert pour les images."



Si je tombe à nouveau par hasard sur l'une de leurs publication, il y a des chances pour que je me laisse tenter.
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La règle du jeu

Autobiographie littéraire de Michel Leiris, cette œuvre monumentale suit mot à mot (et maux à maux) la vie et le parcours littéraire et psychologique de l'auteur.

A partir de petits et grands faits de la vie quotidienne, tout comme des événements historiques majeurs qui ont jalonné son existence, Leiris peint sans pudeur ni censure son autoportrait qui est aussi celui d'une époque.

Mais l’œuvre de Leiris est aussi universelle et intemporelle. Elle parle au lecteur d'aujourd'hui comme elle ne manquera de le faire à celui de demain. C'est qu'elle réveille les souvenirs d'enfance, ranime les craintes et les angoisses, sans pour autant bouder les plaisirs de l'existence.

Et du plaisir elle en procure au détour de chaque phrase, de chaque idée.

Les phrases de Leiris sont autant de formules magiques !

Par son style très proustien, la Règle du Jeu ne peut manquer de séduire les lecteurs passionnés à la recherche de leur temps perdu ...

A lire et à relire absolument !

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L'âge d'homme

Ce livre qui interroge notre maturité — sous réserve que les hommes y parviennent – expose à une lecture grotesque. Après Augustin d'Hippone, Montaigne, Rousseau et quelques autres, Leiris annonce dans sa trop longue préface « De la littérature considérée comme une tauromachie » qu'il va produire une confession sincère, où il s'exposera comme le matador menacé par la corne qui n'a d'autre choix que de mourir ou de donner la mort. L'excès romanesque est doublé d'une obsession adolescente pour le nu académique que le jeune Leiris guette dans le Nouveau Larousse Illustré, dans les musées, puis dans une mauvaise reproduction de Cranach. Ce peintre prolifique représente toujours la même femme : déhanchement, torsion du cou, seins de fillette, demi-sourire ambigu, paupière lourde, oeil bridé et regard de dangereuse victime. Dans l'image qui obsède Leiris, Lucrèce et Judith dénudées portent un symbole phallique, le glaive, instrument du suicide de Lucrèce et de la décollation/castration d'Holopherne pour Judith. Cranach a peint les deux femmes à de multiples reprises ; Leiris s'et enflammé sur la mauvaise reproduction d'originaux perdus ; Gallimard « corrige » dans l'édition de poche par une image de Judith et sa servante richement vêtues. Enfant gâté puis jeune dandy, il rapporte par le menu ses flirts malheureux, ses cuites et ses virées au bordel, suivies de hontes qui l'entrainent au suicide ou à l'émasculation (mais il cherche le cyanure et le rasoir chez des amis qui vont le dissuader). Plus tard, voyageur en Afrique (il deviendra ethnologue), il ne rapporte à son lecteur que la crasse et l'image d'une femme dominante, excisée, doublée d'une esclave.



« Si je pense à l'amour absolu — cette conjonction, non de deux êtres (ou d'un être et du monde), mais bien plutôt de deux grands mots — il me semble qu'il ne saurait s'acquérir que moyennant une expiation, pareille à celle de Prométhée puni d'avoir volé le feu. Châtiment qu'on s'inflige afin d'avoir le droit de s'aimer trop soi-même, telle apparaît donc, en dernière analyse, la signification du suicide. Et si l'on considère maintenant Cléopâtre non plus seulement en tant que femme à la vie déréglée (en tant que femme bafouant ses amants) mais en qualité de créature se supprimant, l'on s'aperçoit qu'elle résume ces deux aspects de l'éternel féminin, ma Lucrèce et ma Judith, avers et revers d'une même médaille » (p 141). L'amour absolu, Prométhée, Cléopâtre, l'éternel féminin, ma Lucrèce, ma Judith : on n'y croit guère, ou, dans la position bienveillante du thérapeute, on s'agace de la verbosité.



Pourtant la panoplie surréaliste-analytique est surpassée par de grandes pages sur le rêve, la lassitude, la satiété, la convoitise, le sacré, qui méritent lecture, relecture et méditation (voir p 174-5), particulièrement le dernier chapitre, « Le Radeau de la Méduse », où Leiris acquiert la maturité de l'âge d'homme : « Je mesure mes actes et mes goûts à leur juste valeur, je ne me livre plus guère à ces burlesques incartades, mais tout se passe exactement comme si les constructions fallacieuses sur lesquelles je vivais avaient été sapées à la base sans que rien m'eût été donné qui puisse les remplacer. Il en résulte que j'agis, certes avec plus de sagacité, mais que le vide dans lequel je me meus en est d'autant plus accusé. Avec une amertume que je ne soupçonnais pas autrefois, j'en viens à m'apercevoir qu'il n'y aurait pour me sauver qu'une certaine ferveur mais que, décidément, ce monde manque d'une chose POUR QUOI JE SERAIS CAPABLE DE MOURIR » (p 200).

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L'âge d'homme

Michel Leiris aborde ici l'autobiographie sous un genre nouveau. L'auteur ne se borne pas à décrire sa vie de façon linéaire. Il y inclut en quelque sorte une auto-psychanalyse dans laquelle in n'hésite pas à nous révéler son côté sombre en nous avouant pas exemple ses obsessions, qu'elles soient morbides ou sexuelles avec une lucidité assez déconcertante. Utilisant néanmoins le procédé de l'autodérision. L'auteur a voulu tenir le pari de dire absolument «toute la vérité et rien que la vérité» et l'on peut dire que c'est pari gagné.

Ouvrage parfois un peu difficile d'accès puisque l'auteur emploie parfois des termes de psychanalyse afin de décrire certains de ses comportements mais qui au final, est un livre plus vrai que vrai, qui nous rassure parfois et permettre au lecteur d'accepter certaines réalités, qui sont différentes pour chacun d'entre nous mais qui font néanmoins partie de la condition humaine et qui sont des étapes normales de la vie pour permettre à tout être humain de mûrir et d'accéder au stade de «l'âge d'homme. À découvrir !
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L'âge d'homme

J’étais un peu sur la défensive au moment d’ouvrir cette œuvre autobiographique. Je crains, en effet, les romans trop psychanalytiques. Mais toutes mes réticences se sont dissipées dès les premières lignes du roman.

D’une part à cause de son originalité dans la structure formelle. Michel Leiris organise son récit selon plusieurs thématiques ce qui change des romans chronologiques. Ces thèmes sont principalement les mythes classiques, notamment ceux – je les découvrais au passage – de Judith et de Lucrèce. Je ne vais pas vous les présenter maintenant, lisez le roman, Michel Leiris prend le temps de nous éclairer sur ces modèles. Il est vrai que l’éducation bourgeoise de ce dernier est extrêmement prégnante, car il bénéficia d’une culture classique très riche, lui offrant ainsi la possibilité de se construire en tant qu’homme et d’élaborer une pensée cohérente et structurante à partir de ces références.

D’autre part à cause de son intégrité dans sa manière d’assumer son point de vue. Michel Leiris parle de lui, essentiellement de lui. Il ne s’appesantit donc pas, ni sur de quelconques descriptions de son environnement, ni sur les portraits de ses proches. Tout se concentre sur les réflexions de l’auteur, ses souvenirs intérieurs, ses rêves, ses phantasmes ou ses angoisses.

Michel Leiris n’hésite pas également à s’exposer en tant qu’écrivain. Les récits de ses souvenirs sont comme enchâssés dans un cadre plus large où l’auteur nous fait part de ses principes, de ses doutes et de ses hésitations. L’exigence formelle de cette oeuvre rend sa lecture passionnante, d’autant plus qu’elle se fait rare dans le tout venant de la littérature contemporaine.

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L'âge d'homme

Ami de jeunesse. Leiris fabrique des vertiges avec presque rien: la découverte des règles du langage, l'écho infini du son des mots et de leur sens, les questions abyssales de l'enfance, la difficulté de vivre avec soi-même. On peut lui reprocher sa méticulosité , son jusqu'au-boutisme exacerbé et parfois agaçant. C'est quand même son regard lucide sur soi , les thèmes essentiels abordés: la sexualité, la mort, portés par son écriture classique et si personnelle, qui font de cet ouvrage un vade mecum pour ce roman d'apprentissage qu'est toute vie humaine.
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L'âge d'homme

L’âge d’homme est un récit autobiographique axé très largement sur le rapport de l’auteur aux femmes, à la sexualité et plus généralement à la difficulté de vivre.



Remarquable est le soucis de franchise et d’authenticité, de marcher sur la corde raide de la confession en ne transigeant pas (cf De la littérature considérée comme une tauromachie) : Michel Leiris n’élude pas l’aveu de ces insuffisances, travers et autres actes manqués. Bien au contraire, il y trouve la justification de sa démarche.



La prose de Leiris est d’une précision peu commune, le style en est sûr et captivant, et le propos est servi par une bonne dose d'autodérision. Un bonheur de lecture anobli d’une érudition discrète.
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La règle du jeu



L’itinéraire de Michel Leiris (1901-1990) nous semble exemplaire d’un rapport à l’écriture qui se veut « acte», celle d’un ethnologue et écrivain qui a oscillé tout au long de sa vie entre l’écriture ethnographique et une grande entreprise autobiographique, qui va de L’âge d’homme à La règle du jeu, écrite à partir de fiches et commencée en 1940. Il y apparaît « une complexité de tressage », pour reprendre les propos de Philippe Lejeune… Leiris a en effet privilégié une pratique d’écriture d’où l’on peut dégager un savoir-faire afin de mettre au jour des lignes d’illusion et tendre à approcher un réel qui se fracasse sans cesse sur les fantasmes, les souvenirs, les rêves, le temps du présent de l’observation de l’ethnologue. On ne saurait réduire l’œuvre autobiographique de Leiris à un déroulement linéaire de présentation de soi. Elle ne cesse d’inventer des formes et ses messages heurtés mobilisent également des ressources poétiques et esthétiques.

Extrait de Michel Leiris : écrire les formes de l'asservissement de Martine Hovanessioan dans Tumulte 2011/1 nº36
Lien : https://www.cairn.info/revue..
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L'âge d'homme

Franchement, je n'ai pas capté grand chose de ce livre, aucun plaisir, et peu voire même pas du tout de souvenirs laissés. Lu il y a quelques années déjà, je n'ai toujours pas envie de redonner chance à Michel Leiris, bien qu'on me l'ai parfois loué.
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L'Afrique fantôme

Michel Leiris, est invité en 1931 à participer avec l'ethnologue Marcel Griaule à la mission Dakar Djibouti , deux ans de tour d'Afrique pour y comprendre la vie, les moeurs et la richesse artistique. Il est supposé y tenir le carnet de route du voyage, mais ses écrits se transforment petit à petit en journal, avec ses propres sentiments et interprétations sur le sujet.

Extrait du roman "Colin Maillard au bord de la Falaise":

"Quand on part au Mali, surtout si l’on veut être un peu dans le coup, il faut savoir qui sont Marcel Griaule et Michel Leiris. Marcel Griaule, pionnier de la recherche française de terrain en Afrique, est parti de mai 1931 à février 1933 avec Michel Leiris son secrétaire archiviste, pour la plus grande expédition française d’ethnographie du XXe siècle : la mission Dakar Djibouti. L’aventure, pour le coup. Ceci dit, Leiris était empêtré dans ses perpétuelles crises de la maturité, qu’il a trimballé toute sa vie entre deux tentatives de suicide. C’est là où nos histoires convergent. La quête de la sérénité ! Griaule, ethnologue, interviewait le grand sage Ogotemmêli qui ouvrait pour la première fois à un blanc les secrets complexes de la cosmogonie Dogon. Le premier n’a jamais acquis la voie de la raison et le deuxième a cherché toute sa propre vie à comprendre la sagesse africaine. Cela aurait du me mettre la puce à l’oreille : guérir sa crise de la quarantaine en quinze jour de Mali : carrément utopique!! Bien sûr, moi je n’ai rien vu venir... "
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Glossaire j'y serre mes gloses, suivi de Ba..

En bon héritier du surréalisme, Leiris subvertit la forme "objective", sérieuse, du dictionnaire pour jouer avec les mots et leur faire exprimer d'autres significations. On retrouvera là aussi le surréalisme, subversion des formes, et banalité convenue de l'idéologie libertaire.
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L'âge d'homme

Michel Leiris, écrivain et ethnologue, se livre ici à un exercice de psychanalyse et de philosophie sur son enfance et son adolescence.



Il se confesse, parle de sa passion pour l'opéra, la tauromachie et les femmes qui ont marqué sa vie.



Les diverses anecdotes s'appuient sur des références issues des légendes gréco-romaines, des extraits de classiques littéraires.



Le début m'a intéressé mais ma lecture s'est rapidement révélée longue et ennuyeuse. Leiris peine à passionner son lectorat et je me force presque à terminer ce livre en n'ayant qu'une envie, passer à autre chose.



Je regrette un style d'écriture assez lourd avec un vocabulaire complexe et un récit parfois confus, surtout vers la fin.



L'évocation de sa vie sexuelle renforce le caractère intime de ce récit, rebutant autant que fascinant.
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Glossaire j'y serre mes gloses, suivi de Ba..

D'une apparente neutralité, les entrées du glossaire jouent sur les sons, l'esprit, la reconstitution. La fragmentation du langage, illustrée par des toiles de divers peintres modernes, est d'une beauté remarquable. Lire, relire, voilà le but !
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L'âge d'homme

Si vous aimez les affabulations prétentieuses et les reconstructions à la sauce psychanalyse de comptoir, foncez. Vous pourrez vous abstenir dans le cas contraire.



On pourrait être averti dès la préface, où l'auteur n'hésite pas à se comparer à un toréador risquant sa vie en dévoilant ses petites tracasseries sexuelles et ses anxiétés sur la vie, mais quelque chose nous interdit de nous arrêter devant ce frontispice ridicule d'orgueil, et l'on avance dans ce livre "à lire". En réalité, l'auteur ne se contente pas de livrer ses états d'âme ô combien ennuyeuses, il les enduit d'un vernis littéraire et psychologique qui se veut à la fois naturel et subversif.

Dès lors, la machine est lancée : faire des phrases pour des phrases, multiplier les images et les références sans raison, quitte à les alimenter a posteriori pour leur donner un peu de tenue, et gonfler le tout du souffle vide du littérateur.



Une risible tentative de créer un météore à partir de poussière amassée dans quelque chambre estudiantine, voilà ce que nous avons entre les mains.
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Glossaire j'y serre mes gloses, suivi de Ba..

Ce recueil regroupe deux oeuvres poétiques de Michel Leiris: "Glossaire j'y serre mes gloses" et "Bagatelles végétales". Chacune est illustrée, par André Masson pour la première, par Joan Miro pour la seconde (mention spéciale pour ces dernières, qui croisent des figures étranges à la fois idéogrammes, symboles et signes sur des fonds froids et mélancoliques).

Chacune aussi s'organise à la manière d'un dictionnaire. Leiris accumule des sortes de définitions qui chercheraient à dévoiler des sens nouveaux où cachés à partir de leurs enchaînements phonétiques. Fenêtre donne par exemple: "fait naître un air neuf". Si c'est souvent drôle, on sent que Leiris ne recherchait pas forcément à faire rire, mais surtout à travailler la matière même des mots, casser les formats de lecture traditionnels, afin de toucher leurs essences secrètes.
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