Milton Erickson

Chacun sait comment nouer un noeud de lacet jusqu'à ce que vous demandiez à une personne comme elle l'a fait ; et, à ce moment-là; cette personne ne semble pas en savoir beaucoup sur ce sujet. Et pratiquement tout homme sait nouer son noeud papillon sur lui-même jusqu'à ce que vous lui demandiez : "Maintenant, laquelle des deux mains se déplace la première " Et, bien sûr, vous connaissez ce délicieux poème d'Ogden Nash que j'aime citer en le déformant ; il y a un mille-pattes qui se porte sans problème jusqu'à ce que quelqu'un lui demande : "Quel pied vient après l'autre ?", et maintenant ce pauvre mille-pattes est couché dans le fossé !

Erickson et les autres
Une des manières que peut avoir un thérapeute de considérer avec humour sa propre pratique, ou, peut-être, celle des autres, est de poser la question suivante : "Vous avez une ampoule à changer au plafond, comment allez vous faire ?"
Selon l'appartenance à telle ou telle école, la réponse sera évidemment différente. Un analyste transactionnel poserait d'abord la question à l'ampoule, un disciple de Freud se demanderait pourquoi cette ampoule pose un tel problème..., mais un éricksonien ?
Eh bien, il lui suffit de trouver comment Erickson aurait fait.
[Dr J.-A. Malarewicz]

La réalité, la sécurité et définir les limites des frontières constituent d'importantes notions dans le développement de la compréhension pendant l'enfance... Quand on est petit, faible et intelligent, vivant dans un monde indéfini de fluctuations intellectuelles et émotionnelles, on cherche à apprendre ce qui va procurer l'assurance, la sécurité et la force.

Avec une autre patiente, Linda, [...] Erickson avait demandé qu'elle gravisse le Pic de la Squaw. Au début, elle a résisté à suivre cette directive, puis, un jour, au milieu d'une séance où Erickson se trouvait avec une dizaine d'étudiants, elle frappa à la porte. Elle raconta qu'elle avait escaladé le Pic de la Squaw, comme il le lui avait demandé. Et comme il le lui avait demandé, elle était venue lui en faite le compte rendu. Il la renvoya simplement sans commentaire.
Après qu'elle ait quitté la salle, le groupe se demanda pourquoi Erickson lui avait demandé d'escalader le Pic de la Squaw. Voulait-il qu'elle "analyse de près ses propres impressions" ? Voulait-il qu'elle accomplisse une tâche avec succès ? La réponse, étonnante, fut : "Eh bien, je voulais qu'elle m'obéisse." Erickson souligne souvent combien il est important que le thérapeute dirige le traitement. S'il ne peut obtenir l'obéissance dans au moins un domaine précis, il doit sentir qu'il ne peut pas continuer le traitement.

Soit il [Erickson] "reflète" le comportement indésirable du patient, soit il le lui fait reproduire, sous ses ordres, en "prescrivant le symptôme". Il n'a jamais eu recours au sarcasme à l'irritation ou à l'hostilité. La meilleure description que l'on peut faire de son attitude est celle de "l'interrogation" : "Je me demande bien ce qui va se passer si je demande à Douglas de claquer la porte ?"
Erickson a conservé lui-même cette attitude d'interrogation propre à l'enfance, l'attitude du véritable homme de science, jusqu'à la dernière minute.

Il y a toutes sortes d'expériences et le rêve en est une. Erickson souligne [...] que même lorsque l'hypnose ne marche pas, la thérapie fait son oeuvre ; le patient rentre chez lui et complète le travail par un rêve. Après avoir écouté cette histoire, un patient intellectualisant rentrera peut-être chez lui et rêvera qu'il est en transe.

Je crois qu'il est très important de prendre le patient au sérieux, et de prendre en compte ses désirs ; de ne pas juger durement et froidement. Et de reconnaître que les gens ont besoin d'apprendre certaines choses, et que vous n'êtes pas toujours compétent pour leur enseigner ce dont ils ont besoin. Qu'ils peuvent apprendre par eux-mêmes. [...] En général, ils sont d'une correction merveilleuse lorsqu'ils sont en transe.

Chaque problème comprend un passé et un futur. Ce qu'Erickson voit clairement, c'est qu'en éliminant le passé et en modifiant le futur, on a déjà changé les deux tiers du problème. Par conséquent, si l'on prend chaque trou [d'un parcours de golf] comme étant le premier, il n'y a plus l'inquiétude du passé. On a éliminé le passé et on peut alors changer le futur, parce que le futur ne peut être qu'une espérance positive.

En changeant le point de convergence des préoccupations d'une personne pour traiter des problèmes de peau, Erickson illustre la maxime exposée au quinzième siècle par Parcelse : "Tel que l'homme s'imagine être il sera, et il est ce qu'il imagine." Il y a effectivement des effets corporels associés à des images mentales. Ces effets se font sentir aussi à l'intérieur du corps, mais sont plus manifestes sur la peau. Les exemples les plus évidents sont le rougissement lorsqu'on pense à une situation embarrassante, ou une érection à l'évocation d'images érotiques. Un individu qui se voit comme quelqu'un de digne se tient droit, et évolue avec détermination et assurance. Est-il surprenant que son squelette, son tonus musculaire et son expression faciale se présentent assez différemment de ceux d'une personne qui se voit insignifiante.

Avec des patients qui présentent des difficultés à entrer en transe, je cite souvent des recherches récentes indiquant que les sujets qui simulent une transe hypnotique, atteignent les mêmes résultats que ceux qui sont "effectivement" en transe. [...] on peut simuler une transe légère ou profonde. Erickson donne des indications en faisant la description des phénomènes rencontrés lors d'une transe profonde - comme des "hallucinations négatives" (ne pas pouvoir voir le bureau, le reste de son corps ou le fauteuil).

... vous pouvez donc suggérer, pendant une transe, qu'un rêve peut se transformer en sensation de réalité hypnotique. La transe permet seulement de disposer de tout ce qu'on a déjà appris. Et on néglige souvent ce qu'on sait déjà.

Il faut d'abord repérer un projet intéressant dans les réponses et les symptômes du patient ; puis choisir un conte ou des contes qui fournissent un équivalent des projets du patient, puis un meilleur projet. Ou bien, comme Erickson l'expliquait à sa belle-fille "Cookie" : "Tu modèles d'abord le monde du patient ; ensuite tu modèles le rôle du patient dans son monde."

L'aspect le plus efficace de toute suggestion réside dans ce qui incite les propres associations et processus mentaux de l'écoutant à entrer automatiquement en action. C'est cette activité autonome qui crée l'expérience hypnotique.

Tout comme avec les suggestions à réponse ouverte, les doubles dissociations à double lien permettent dans une certaine mesure le libre choix, ce qui permet à la personnalité d'un patient de s'exprimer de façon surprenante même pour le sujet lui-même. Les doubles dissociations à double lien ont tendance à rendre la pensée consciente du sujet confuse et par conséquent à neutraliser les modèles de pensée habituels, leurs biais et leurs limites apprises. Dans ces circonstances, de l'espace est dégagé pour que d'éventuels processus créatifs s'expriment de façon plus autonome et inconsciente.

Cela n'est vraiment pas important pour moi de spécifier à quel moment 'j'utilise l'hypnose et il n'est pas nécessaire pour moi de spécifier à quel moment je ne l'utilise pas. Je ne viens pas vous dire à quel moment j'utilise un mot polysyllabique et à quel moment j'utilise un mit de deux syllabes. Ce n'est pas nécessaire pour autant simplement que vous me comprenez.

... vous devez faire d'une habitude un inconvénient pour le patient.

Q. - Au cours de la régression des patients par la technique de confusion, ne les aidez-vous pas également à organiser un bon nombre de souvenirs subconscients qu'ils ont dans ces intervalles ?
E.- A chaque niveau, à chaque date, je les laisse se remémorer certains apprentissages, certains souvenirs ; je les amène à penser de plus en plus aux événements du passé et aux apprentissages du passé de leur vie. Et ils les organisent, et ils accordent de moins en moins d'attention aux événements du passé.

L'insomniaque est allongé sur son lit et dit : "Maintenant, il faut que je m'endorme - Il faut que je m'endorme - Il faut que je me repose - Il faut que je m'endorme - Il faut que je m'endorme - IL FAUT QUE JE ME REPOSE - J'AI BESOIN DE REPOS !" Et que se passe-t-il ? Il reste tout à fait éveillé. Il reste tout à fait éveillé car il se diot constamment à lui-même ce qu'il doit faire. Mais la personne habile qui veut une bonne nuit de sommeil, dit : "Bien, je suis ici au lit et je vais me réveiller demain matin." elle laisse simplement le sommeil survenir pour elle. Et sûrement, le sommeil va survenir.

Quand on arrive à l'autohypnose, vous devez rendre vos patients conscients du fait qu'ils ne peuvent pas faire consciemment quelque chose qui devrait être fait inconsciemment.

[Concernant la profondeur de la transe]
Mon sentiment est que les patients ne devraient pas entrer plus profondément en transe que ce qui leur est utile.