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Citations de Mireille Disdero (91)


Dans l'intimité, les manies qu'on ne partage qu'avec soi sont notre univers, la sphère ultra privée où personne ne peut pénétrer sans y être invité. Un bol ébréché, un vieux T-shirt dans lequel on se sent bien, avec lequel on se sent soi. Quand un autre nous dérange au moment où on vibre de ce besoin d'être seul avec son polo miteux préféré, la gêne s'installe et notre image en prend un coup.
Clément, mon voisin de palier, n'est plus un ado. A vingt-cinq ans, souriant et toujours habillé classe, il fait rêver les filles. Pourtant, un soir, j'ai failli ne pas le reconnaître. Au lieu de rentrer tôt, après le lycée, j'étais allée au ciné avec Claire, ses parents m'avaient raccompagnée ; et en me glissant dans l'ascenseur, juste avant minuit, j'avais croisé Clément en mode hiver nucléaire. Jogging usé, rasé à l'arrache, armé d'une bouteille d'eau et serviette-éponge autour du cou, il a fui mon regard. Malgré son 1,80 mètre, il s'est fait tout petit alors que nous grimpions vers les étages supérieurs, l'air d'avoir été pris en flagrant délit d'intimité. Il visait la salle de fitness en haut de l'immeuble, croyant qu'à cette heure personne ne le surprendrait en tenue débraillée. Mais je suis arrivée et il était genre clownesque, avec comme une fraise à la place du nez. Cet homme est vraiment un séducteur, d'habitude. Même maman l'a repéré, sans parler de Claire qui délire dès qu'elle détecte sa présence à moins de cent mètres.
En le croisant au moment où il pensait être seul, j'ai poussé une porte interdite, pénétré son intimité, sa solitude absolue. Là, sans le vouloir, j'ai brisé son image et il le sait.

Quant à la mienne, elle a connu des hauts et des bas. J'ai même cru l'avoir saccagée et perdue, ces dernières années. Aujourd'hui, j'entre en terminale, j'ai dix-sept ans et j'assume celle que je suis sans fuir mon image. Pourtant, avant d'y arriver, à partir de la quatrième, j'ai dû moi aussi traverser un sale hiver nucléaire jonché de coups de semonce, d'attaques et de désillusion.

Si ça intéresse quelqu'un de savoir comment tout s'est passé, voici mon histoire.
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Ce matin, au bas de l'immeuble, un chien nous a suivis. Il fouillait dans les poubelles, sans collier. Dès qu'il nous a vus avec nos sacs, en direction du bus pour le lycée, il a foncé vers nous en remuant la queue. Je me suis accroupie à sa hauteur et j'ai pris son museau dans mes mains. Je l'ai caressé. Il avait de la douceur sur son pelage, quelque chose de tendre qui ne devait pas disparaître. [...]
Le chien nous suit partout, et personne n'a pensé à nous le réclamer. Personne n'est venu le pleurer.
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Lorsque j'arrive dans la rue, essoufflée, anéantie, ils ne m'ont pas rattrapée. Je crois entendre les sirènes de la police approcher, je décampe vers mon immeuble en pensant à Enzo. J'ai un goût sale dans la bouche. Et je cours, les mains sur les yeux. La lumière, trop forte, les grignote peu à peu, et je me rends compte maintenant que je n'arrive plus à fixer la mer. Elle est quelque part derrière mes paupières, et je sais que, si je la regarde encore, elle va me dévorer les yeux.
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J'étais du vent, un gribouillage ou rien du tout ; celle qu'on ne calcule pas, l'exemptée de drague. Paradoxe d'une fille invisible, inexistante, alors qu'elle prend trop de place.
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Quant à papa, comme par hasard, il est DRH d'une boîte qui fabrique de la pâtisserie pour les restaurants. Maman, elle, est prof d'arts plastiques, d'où son atelier et mon prénom [Saskia] - celui de la première femme de Rembrandt. S'ils avaient été visionnaires, mes parents m'auraient plutôt appelée Cecilia, comme la première épouse de Fernando Botero, le peintre qui voit le monde en gros.

[Après vérification sur Wikipédia, il y a effectivement du choix pour les prénoms, Botero ayant épousé Gloria, Cecilia, Sophia ... mais aucune Saskia ...]
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La chaleur et la poussière font un shampooing mixte à la ville en contrebas. On dirait qu'une haleine chaude sort de la terre, des rues et des habitations. Mais, là où je suis, on sent l'air passer sur la peau, pour calmer. J'ai presque l'impression d'être à l'abri, dans le nid du vent. Ce doit être ça, la famille. Un endroit où je me sens protégée et vivante. C'est si beau que je m'arrête un moment, dans cette rue qui pue l'urine sous la lumière crue de l'été à midi. Je suis dévorée par une joie trop forte pour moi, à laquelle je n'ai pas droit. C'est ce que je crois. Ce que je croyais... Ma ville rétrécie par la distance et la mer à ses pieds, je les prends en plein dans les yeux, sans filtre, destination le coeur...du moins ce qu'il en reste.
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...c'est trop tard. Je ne saurai jamais ce que c'est de vivre une première fois avec celui qu'on a choisi. Avoir le choix, être libre de soi, de son corps...Je suis une fille violée. Plus rien d'autre. Pas de marche arrière possible...
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J'aimerais à cet instant prendre mon cœur à bout de bras et le lui jeter au visage, sanglant, palpitant. L'obliger à me voir pour de vrai, la forcer à comprendre que j'existe, que je suis de la même chair qu'elle - vivante, sa fille, sa vie -, que quoi qu'elle fasse et dise je l'aimerai quand même, je l'aimerai. Avec toute ma haine aussi. Et ma blessure qu'elle entretient ouverte, à vif. Mais je ne peux pas. C'est au-dessus de mes forces.
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Tout m'est venu d'un bloc et sans préavis, se plantant dans ma vie comme une lame pour tout détruire. Son et images. Absolument tout, un roc de béton projeté sur moi. Une fois de plus, je me accrochée aux barreaux de mon lit, oppressée, tremblante... et j'ai tout pris dans la tête, détails compris et désespoir avec. Avant, surtout depuis mes cauchemars, je savais qu'il m'était arrivé quelque chose. J'en souffrais. Mais je n'en voulais pas... Alors je parvenais à le refouler momentanément dans mes mauvais rêves. Et puis tout était fragmenté, comme moi, dans une bulle de protection... Mais cette nuit, il n'était plus possible d'occulter. La réalité se pointait, totale, nue, les options monstruosités comprises. J'étais forcée de tout prendre dans les dents sans trier.
Forcée.
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J'ai senti le silence s'installer en moi. Je me suis mise à tanguer comme si j'allais m'effondrer puis mes bottes se sont enfoncées dans le sable et mon mal de mer s'est transformé en autre chose. Dans la nuit, à genoux sur la dune, j'ai vomi cette amitié qui n'en était pas une.
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Nos parents ne nous appartiennent pas
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Absente de ma vie pendant des années, maman prend la peine de me faire passer de quoi vivre, mais pas celle de me serrer dans ses bras, ni celle de me dire qu'elle m'aime et qu'elle ne m'oublie pas. Le courage de me revoir, celui d'affronter mon regard, elle ne l'a pas. Dix ans qu'elle vit quelque part ici, peut-être même à Bangkok, et je ne sais pas où. Si ça se trouve, je l'ai déjà croisée sans le savoir.
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Sinoun n'a rien dit et ne se confiera peut-être jamais à moi, à cause de la honte qui engendre un silence de béton armé chez nous. On n'a pas appris à gémir, à dire le mal qu'on nous fait, surtout pas aux proches qu'on risquerait de salir avec. Et Sinoun et moi étions les plus proches de l'univers avant son départ.
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Je l'aimais et je venais de le lui apprendre. Aimer, c'est beaucoup plus qu'être amoureux. Aimer, c'est embarquer aussi avec la part d'ombre de l'autre et l'accepter comme ça, en entier.
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Des brumes de chaleur remontent du lac et envahissent les rizières. Je vacille sur mes jambes. Nous enfuir ? Tout de suite ? Et il va signer ? Après le choc de ce que Sinoun a vécu, vient la trahison du père...
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Je recueillerai les images, les mots, les silences, comme on récupère l’eau de pluie, avec l’attention de la soif toujours possible. Mais mon témoignage de vie restera sans papiers. L’important n’est pas écrit.
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Au début, mon corps a répondu à mes efforts et j’ai maigri. Mais, après six kilos perdus, la balance ne voulait plus bouger, et j’ai paniqué. Le docteur m’a prescrit des analyses complémentaires et là, quelque chose clochait, du côté de la thyroïde. Violent, ce mot – je parie que la moitié de la classe n’en a jamais entendu parler. Bref, moi oui, maintenant. On m’a dirigée vers le cabinet d’un endocrinologue (encore un mot brutal). Le test sanguin a révélé une hypothyroïdie. Pour simplifier, il s’agit d’un problème d’hormones mal réglées ou paresseuses, le genre de détail qui gère le métabolisme, le poids et le reste… Difficile à guérir dans mon cas.
C’était la tuile mais aussi la raison pour laquelle mes parents n’étaient pas responsables.
La nature m’avait faite ronde, ronde comme la lune.
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Le problème, avec ceux qui nous aiment, c’est la guimauve. Ils nous trouvent des circonstances atténuantes, refusent de nous faire du mal nous protègent de la vie mais celle-ci est bien là, entière et cruelle, avec ses coups. Résultat ? leur affection ne nous aide pas.
Enfin, pas toujours.
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J’avais pris l’habitude de dévorer des pages et des pages ; on n’est jamais seul, avec un livre. On ressent un vrai réconfort, entre les lignes.
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Les gens ne voient rien, ils ne lèvent pas les yeux vers le ciel, car ils les font plutôt glisser vers leurs chaussures et le trottoir.
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