La fille qui ne voulait pas d'un prince charmant

"la fille qui ne voulait pas d'un prince charmant".
Voici une pensée un peu désabusée pour une adolescente. Ne plus "attendre le prince charmant". Pour une personnalité adulte, c'est au contraire la marque d'une maturité, forgée à force de mauvaises rencontres pourtant, en général, comme un mal nécessaire pour enfin tomber sur le bon.
Ne serait-ce pas un peu trop tôt pour notre jeune Nina, de ne plus croire en une belle histoire, avec ce doux soupçon d'innocence et de naïveté des jeunes premiers?

Nina est en classe de Terminale dans un lycée français à Bangkok. Elle est née d'une double culture. Nous verrons au fil de la lecture si ce détail aura son importance pour l'intérêt de l'aventure.
En lisant Nina, le lecteur aura juste la sensation familière de côtoyer une ado comme une autre, de se retrouver peut-être un peu aussi en elle.
C'est Nina qui racontera surtout, il y aura peu de dialogues, elles nous décrira les choses et nous rapportera des conversations. L'angle pris sera intime.
Nous comprendrons pourquoi Nina n'aura pas beaucoup confiance en la gente masculine, l'auteure Mireille Disdero commencera d'ailleurs par ça, l'abandon, un père qui incendiera la maison familiale lorsqu'elle aura sept ans et une mère absente. C'est sa tante qui l'élèvera.

Nina aura un caractère affirmée sans être un personnage trop butée.
Elle semblera avoir déja des principes en voulant se montrer autonome assez tôt, prenant quelques petits boulots à côté de sa Terminale, tandis que les ados expatriés de son établissement ont une vie un peu plus privilégiée.
Il n'y aura de jugement de valeurs en emporte-pièces de la part de l'auteure, cela nous permettra simplement de mieux comprendre Nina qui tout de même les fréquentera et y trouvera aussi ses meilleurs amis.

Nous comprendrons bien que la Terminale est un tournant qui commencera à la brasser de l'intérieur, c'est à quelques pas de l'âge adulte.
Avec la Terminale s'arrêtera l'insouciance de la scolarité protégée, chacun décidera de son chemin, partira vers d'autres villes. Nous connaitrons déja les projets de ses amis.
Quels seront ceux de Nina?
L'auteure nous promettra une amourette avec l'un de ses meilleurs amis. Cette dimension ado semblera plus simple et légère que les histoires d'adultes dont sa tante a tenté de la préserver.
Mais il sera pourtant temps.
Il est temps de tout savoir, tout comprendre et nous allons nous aussi vivre son basculement.
Sa mère est là, quelque part et elle finance une partie de ses frais depuis que Nina habite chez sa tante.
Alors? Doit-elle être complètement déçu par les adultes?

Côté ado, le choix de coeur de Nina se portera sur son ami Alex, qui aura une vie complètement à l'opposée de la sienne.
Ce personnage nous permettra aussi d'étendre le titre à un souhait de partenaire plus général car sans doute qu'Alex aura lui aussi envie de décider quel genre d'homme il aura envie d'être.
La vie de  petit" prince" privilégié impulsé par l'éducation de sa mère sera une voie qu'il ne souhaitera pas suivre. Il sera lui aussi à un tournant, pesant le pour et le contre de faveurs familiales qui auront autant de défauts que de qualités.

Alex comme Nina feront preuve d'écoute et c'est ce qui fera que les choses vont fonctionner entre eux sans forcer.
Les petits amis seront aussi de très bons amis finalement, la relation amoureuse, c'est aussi ça.
Alex se montrera un personnage intéressant car très psychologue, grâce à une culture et sensibilité cinématographique qu'il aura digéré et dont il aura tiré des leçons de vie.
Le cinéma, ce n'est pas la vraie mais il s'inspire des maux et des plaisirs de la vie.
Le jeune garçon va permettre à Nina d'adopter de la hauteur sur ces problèmes identitaires et son secret de famille, de grandir doucement et de ne pas traverser cette épreuve seule.
Curieusement, il se rapprochera tout de même d'un profil de "princes charmants", plus réaliste et mâture que son âge, ceux qui seront précieux pour la vraie vie des grands.
Sûr que l'ado Nina voudra bien de celui là.

La double-culture aura sa petite importance en fond puisqu'elle différenciera un ado du crû thaïlandais d'un autre francophone issu de l'école de Nina, respectant les us et coutumes des deux cultures, française et thaïlandaise. On réalisera que ces grands ados nous ressembleront beaucoup trop pour cette bonne raison.
Sans doute que nous aurions chercher pour certains un peu plus de dépaysement en identifiant du départ cette destination en Asie.
Mais le fond de paysage ne sera pas le sujet, c'est un thème familier à l'auteure surtout, on le devinera.
Ce roman est intéressant pour la psychologie de ses personnages ados et cela se lit très bien.
C'est à découvrir.

Elevée par sa tante, Nina a toujours pensé avoir perdu ses deux parents dans l'incendie de leur maison. Quand la vérité éclate, c'est une vraie souffrance d'apprendre que, non seulement sa mère est vivante et l'a donc abandonnée, mais qu'en plus sa tante gardait le secret et lui a donc menti pendant des années. Une double trahison que la jeune fille ne semble pas pouvoir accepter, en particulier celle de cette mère qui n'a jamais donné de nouvelles ou les raisons de cet abandon. C'est grâce au soutien sans failles de son petit ami que Nina va entamer des recherches, ainsi qu'un long chemin vers le pardon.

Si on ne connait pas le résumé de l'histoire, le titre du livre peut paraitre assez trompeur puisqu'il ne s'agira pas d'un roman d'amour à proprement parlé. Je dirai même qu'Alex a plutôt tout du prince charmant, au contraire. C'est lui qui va porter Nina durant toute sa quête d'identité, lui qui a aussi ses secrets sur sa propre famille, et l'incitera à chercher à comprendre plutôt qu'à condamner. Tout comme Nina, j'ai trouvé son personnage réaliste et vraiment attachant !

Un roman fort sur les choix et secrets de famille et leurs conséquences, avec pour toile de fond la ville de Bangkok et ses deux visages.
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