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Citations de Mouloud Akkouche (20)


Mouloud Akkouche
" Chacun a sa question sans réponse. Dans sa famille ou ailleurs. Et souvent, cette quête devient un fantôme inquiétant. Un point d'interrogation en six milliards d'exemplaires. Personne n'échappe donc à cette absence de réponse.
Voilà pourquoi j'ai eu envie de confronter des personnages issus de milieux différents mais évoluant dans un même quartier. Frotter leurs troubles et doutes. Rien de tel que la fiction pour franchir les frontières. Surtout les frontières invisibles. Et essayer d'apprivoiser son fantôme. "
[à propos de son roman "Balle perdue"]
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Impossible de me débarrasser de ma gueule de bois. J'avais picolé toute la nuit, seule. La bouteille de whisky m'avait aidée à anesthésier cette nuit que je ne sentais pas trop : elle s'apprêtait à écraser la ville et je savais que je passerais aussi sous le rouleau compresseur. L'alcool est un airbag pour amortir les chocs avec la réalité, disait je ne sais plus quel mec. Encore un qui dilue son alcoolisme dans des bons mots. Ce matin-là, le réveil postanesthésie était particulièrement douloureux, avec son cortège de culpabilités. Le seul avantage de boire seule est de ne pas se demander quelles conneries on a dit aux autres. Parce que dès que j'ai un coup dans le nez, mon moulin à paroles se met en branle sans possibilité de le diriger. Avec combien de gens je me suis grillée à cause de lui !
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“J'essaie d’être leur famille.”
La phrase écrite à la première page du cahier.
Tous les naufragés sont répertoriés dans un registre. À chaque arrivée, il indiquait la date et le lieu d’échouage. Avec leur nouvelle identité. Celle qu’il leur attribuait. .
Une famille de 47 membres. p. 70
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ça sert à rien les montres maintenant avec les mobiles
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Elle le fouille du regard. Comme elle, excellent produit des grandes écoles, il est devenu un bon petit soldat d'en haut. Comme elle, il écoute Mozart et les Beatles, a collé sa progéniture dans des boîtes privées, lit des hebdos et des romans conseillés par les mêmes hebdos, s'apitoie sur la misère du monde et des banlieues, pèse chaque mot avant de parler.
Comme elle, foutre trois mille personnes sur le carreau ne l'empêchera pas de dormir. Ni de se réveiller.
Et comme elle : se sent-il vide?
"Pas de temps à perdre, lâche-t-elle pour couper court à ses interrogations. C'est à vous."
S'appuyant sur des courbes et statistiques, il décline le projet de plan social. Une démonstration très brillante, imparable.
Mais elle ne l'écoute pas, son regard sans cesse aimanté par l'écran. p.18
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P. 98 : "J'ai toujours dit et écrit que le mot est la patrie du déraciné, le mot-berceau, le mot-tombeau…"
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Pierrot n'était plus qu'un bout de chair dénué d'histoire et rangé dans un tiroir. J'essayais d'imaginer le quartier sans lui, la ville sans lui... Le monde sans lui. Peut-être qu'un infime coup de patin avait ralenti la rotation de la terre, un léger retard pour saluer le départ de Pierrot. Pourquoi l'avait-on descendu dans le camion qu'il squattait depuis 14 ans ? Ce vieil utopiste inconnu et équipé d'un cœur plus gros que le cerveau. Pas le genre de type à avoir son nom sur une plaque officielle... J'avais beau me dire que c'était la vie, qu'il était vieux et que des gosses à peine nés y passaient ; rien n'empêchait l'ébullition sous mon crâne. Et encore une bonne raison pour ne pas partir en vacances !
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L’enfance est vraiment cette semelle invisible qui reste même quand on change de chaussures, philosophai-je en songeant à ma relation avec Bénédicte. De l’école primaire à la fac, je n’avais cessé de la côtoyer. Du premier cycle au septième ciel, nous avions expérimenté énormément de choses ensemble. Et j’étais particulièrement heureux qu’elle ait gardé à l’abri du temps cet enthousiasme et cette naïveté largement émoussés chez moi.
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Pas ceux avec le plus de mots en stock qui sont forcément les plus intelligents.
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Sa peur panique du début avait disparu.Elle avait compris qu'il ne s'agissait pas de voyous.Seul David,la boule de nerfs du trio,pouvait basculer.
Commettre l'irréparable.
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L’oiseau et le vent n’ont pas besoin de preuves de leur passage.
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Ce jour maussade de juin, je prenais la flotte pour une bonne cause: une copine de lycée avait déposé un paquet de neurones dans une maternité des beaux quartiers.
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Même mettre au monde un gamin était déjà assimilé à du travail. Quand un prof de fac m'avait expliqué la racine du mot travail (du latin populaire tripalium : instrument de torture) j'avais immédiatement choisi mon camp.
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Elle [la caissière] hausse les épaules.
"Cette carte est... elle est spéciale, vous avez le droit qu'aux produits de consommation courante. Vous pouvez pas prendre de livres, de CD et DVD."
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Pendant une semaine, elle est restée dans un état semi-comateux. Jamais sûr de la retrouver vivante le lendemain. Tous les matins, dès qu'il a franchi le seuil de la chambre, elle s’agite sur le lit, pressée d'être emmenée à la salle de bains. Dépendante.
Depuis deux jours, elle s’habille et se nourrit sans aide. Même s’il ne se tient jamais loin en cas de chute. Mais elle est incapable de se déplacer. Ses jambes se tordent dès qu'elle tente de faire un pas. Que cette partie du corps qui ne répond toujours pas.
Une intimité en accéléré. p. 52
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Ce que la longue nuit de l’hiver, la Mâchoire, les pires années de misère, l'épidémie de variole ayant ravagé la population jusqu’à la réduire quasiment de moitié, nétaient pas parvenues à réaliser, quelques usines, occupant la haute mer, avaient réussi à le faire: vider l’île de la cinquantaine de ses derniers natifs.
Même les plus réticents mirent en vente leur toit et leurs maigres parcelles de terre, bouclèrent leurs valises. Une sorte d'exode maritime des dernières familles. Tenter de survivre mieux ailleurs.
Les nouveaux Vaurélycois se retrouvèrent entre eux, quelques mois par an. Une île en copropriété. Certains réalisant que leur joie, les rires, le silence loin du bruit des villes, tout leur plaisir, se récoltaient sur un espace dont les habitants avaient été condamnés à l'exil. Belle conscience passagère? p. 28-29
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(Les premières pages du livre)
Elle est arrivée sans son histoire. Avec un sac à main pour bagage. D’où vient-elle? Quel est son nom?
Personne ne le sait. Son passé est comme enfermé dans une doublure.
Inaccessible.
À l’intérieur du sac? Rien pour l’identifier, retracer sa trajectoire, ou la localiser. Elle a fini ici, sans le savoir. Détachée de tous les ailleurs.
Une silhouette dans le jour naissant.

Un homme la fouille des yeux. Depuis qu’il l’a repérée, plus qu’elle dans son viseur, de la tête aux pieds.
Le régisseur est le seul témoin de l’arrivée. Son chantier du jour sera perturbé ; le temps de se mettre à l’œuvre, avec des gestes rodés. Le corps de cette inconnue est devenu sa priorité.
Il s’arrête sur le labyrinthe de figures géométriques.
Le front plissé, il examine les rectangles, les ronds, les triangles, les chiffres, les lettres d’une langue qu’il ne connaît pas, comme s’ils pouvaient lui donner plus que les contours de la silhouette, dévoiler une part de la trajectoire d’une femme. Le tatouage sur la nuque ne révèle rien de plus.
Les goélands. Toujours les premiers, grommelle-t-il en repliant les jumelles longue distance. Pressé de boucler la tâche qui vient de se rajouter, retrouver le cours de sa journée. En sortant de la cuisine, un coup d’œil à l’horloge murale.
06h15.

La vitre est couverte de buée. Il l’efface du revers
de la main. Les masses sombres des falaises se dessinent. Dehors emballé de papier brume.
Sa chambre, contrairement aux autres pièces, n’a pas changé. Excepté quelques objets, le premier habitant de la maison aurait pu retrouver ses marques, reprendre le déroulé du quotidien où il l’avait laissé.
En suspens depuis deux siècles.
Plus de temps à perdre, se secoue le régisseur. La course contre les coups de becs a débuté. Les charognards sont déjà sur place.
Il ôte les vêtements de chantier.
Le colosse en slip semble avoir rétréci d’un coup.
Debout, les épaules basses, la face penaude d’un gosse, devant l’armoire qu’il vient d’ouvrir.
La bonne tenue?
Il baisse la tête. Les regards de ses parents, d’autres membres de la famille, de voisins, pèsent sur lui. Un poids de retour à des moments précis, lors d’événements hors de l’ordinaire, comme celui du jour. Des regards fermés à jamais.
Une chemise et un pantalon. Ses gros doigts peinent sur les boutons. Il lisse l’étoffe. Les plis résistent à la pression de ses mains. Il abandonne le combat et rajuste le col. Engoncé devant le miroir.
Dans ses habits de cérémonie.

Sud se lève d’un bond à l’ouverture de la porte. Les yeux en attente. Sa queue cogne contre la pierre de seuil. Il se met à sautiller.
Nord se lève lentement.
Le régisseur ferme derrière lui, se penche, soulève une pierre, et glisse dessous la clef. Un vieux réflexe.
Après un énième époussetage de sa veste, il fait un pas et s’arrête. Le menton dans une main, la tête levée.
Quelle température au cul du ciel ?
Une question que son père, son grand-père, ses
oncles, s’étaient posée, à cette même place. Lui aussi une quinzaine d’années, avant de…
Les marins pêcheurs reniflaient l’air, les jours de
sortie en haute mer. Tous assujettis à l’humeur du ciel.
Il continue de l’interroger.
Parfois, une ombre apparaît sur le fil de l’horizon.
Il interrompt alors toute activité. Souffle retenu. Elle passe sans s’arrêter.

Il la suit des yeux. Elle s’efface. Dissoute au loin.
Il sait qu’elle reviendra. Traversant le regard d’un
homme impuissant.
Une ombre à la main tendue.
Les chiens s’impatientent. Surtout Sud qui tourne sur lui-même.
— On y va! ordonne le régisseur en claquant des
doigts.
Les deux frères dévalent la sente pierreuse.
Sud disparaît en aboyant. Il s’est enfoncé dans les bosquets sur les bas-côtés. La truffe fébrile. Il descend vers la voiturette garée au pied du chemin.
Son frère ralentit le pas. Ses pattes arrière tremblotent. Il continue lentement. Son arrière-train plombé depuis des semaines.
Sud bondit sur la banquette.

Des branches, des pierres, toutes sortes de détritus, jonchent le sol. Sa principale inquiétude: la chute d’un arbre sur la chaussée qui le contraindrait à un long détour. Quelques-uns sont déracinés, leur tronc étalé ou penché, aucun ne fait obstacle sur la route.
Le moteur de sa tronçonneuse résonnera bientôt
dans l’île.
Un vent violent secoue La Vaurély depuis une
semaine. Habituel en cette saison où air chaud et froid se télescopent et génèrent de violentes rafales. Deux jours durant, il est resté barricadé chez lui. Depuis la veille, des trouées bleues percent les nuages sombres.
Le retour à la normale ne devrait pas tarder.
Pas partout.
Jamais de normale à une quarantaine de milles
marins. La même violence y règne toute l’année. Une colère permanente, à l’affût dans les entrailles de la mer, prête à aspirer tout ce qui se trouve à la surface.
Une ligne de courants et de contre-courants, très puissants, qui rend ingouvernables les bateaux. Rien à faire, si ce n’est espérer ne pas être englouti dans l’anneau constant de remous et tourbillons. Comme une mâchoire mortelle, ouverte jour et nuit autour de La Vaurély.
Très vite, les agences de voyages ont fini par rayer l’île de leurs destinations. Entrer et sortir de l’île équivalait à une roulette russe. Très peu se frottaient à la Mâchoire par voie maritime. Les pilotes d’avions et d’hélicoptères se méfiaient aussi de ce passage. Mais c’était beaucoup moins dangereux que sur l’eau. Désormais, même le ciel est vide.
Cette frontière traversée, la mer redevient calme.
Pour arriver sur un chenal qui dessert le petit port de l’île. Tout autour, des plages de sable fin, quelques-unes de galets, de nombreuses criques, sans réel danger. Quasiment un décor de carte postale.
Bienvenue à La Vaurély le répit, ironisaient les
marins pêcheurs. Les rares qui, pour élargir leur
champ de pêche, mais aussi par bravade, décidaient de franchir la frontière. Malgré leur posture d’immortel – moi, même pas peur –, tous repartaient la trouille au ventre. Et une interrogation identique dans chaque regard.
Ressortir ou non de la Mâchoire?

Arrêt place des Trois Villas. Par habitude, il se gare sur un emplacement réservé aux voiturettes électriques.
Nul autre moyen de déplacement, hormis la marche et le vélo. Il y a environ douze kilomètres de la pointe nord à la pointe sud. Le tour complet de La Vaurély peut s’effectuer à pied en quatre ou cinq heures.
L’île dispose d’une surface totale de trois cents hectares, dont un quart autrefois dédié au maraîchage.
Son point le plus élevé se trouve à soixante-deux
mètres sur la falaise des Roches grises. L’important dénivelé crée une alternance de montées et de descentes. Arrêt place des Trois Villas. Par habitude, il se gare sur un emplacement réservé aux voiturettes électriques.
Nul autre moyen de déplacement, hormis la marche et le vélo. Il y a environ douze kilomètres de la pointe nord à la pointe sud. Le tour complet de La Vaurély peut s’effectuer à pied en quatre ou cinq heures.
L’île dispose d’une surface totale de trois cents hectares, dont un quart autrefois dédié au maraîchage. Son point le plus élevé se trouve à soixante-deux mètres sur la falaise des Roches grises. L’important dénivelé crée une alternance de montées et de descentes. Son enfance à la parcourir dans tous les sens à pied et à vélo, seul ou à plusieurs.
Désormais derrière un volant.
Des cris dans le ciel. Une dizaine de goélands volent en cercles concentriques.
Le régisseur se décolle de son siège en grimaçant.
Il appuie la main sur la portière pour s’aider à sortir.

Les chiens s’agitent sur la banquette arrière. Sud gratte la vitre de ses pattes. Il leur ouvre.
Sud se précipite sur la plage en aboyant. Les charognards s’envolent au fur et à mesure qu’il se rapproche. Plus aucun quand le chien s’assoit près de la noyée. Le ballet avide continue quelques mètres au-dessus. Le chien suit des yeux son maître.
Le régisseur s’approche à pas lents. Il tient un drap roulé en boule. Dans quel état sera le corps?
Son front est légèrement enfoncé dans le sable. Une position qui a protégé sa face de l’attaque des goélands. Ses orbites bouffées par des crabes? Chaque fois, la même appréhension.
Un visage sans regard?
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Chaque réveil plus lourd sur la balance, chaque coucher tissé de nouveaux noeuds. Sa carcasse se vérouillant plus vite que la fissure ne s’élargit. Pas un jour sans que son corps, par des douleurs chroniques ou subites, ne lui rappelle que “tout début porte sa fin”. Enfant, cette phrase d’un vieux pêcheur l’intriguait. Jusqu’à comprendre que le vieillard évoquait “la finitude” de l’humanité et de la terre. Donc celle de l’enfant au début de son histoire.
Mais il refuse de s’économiser.
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J'évitai de croiser le regard de ma cigarette et tirai une longue bouffée. Deux paquets par jour représentaient ma ration journalière. Alors que jusqu'à l'âge de 22 ans, je ne fumais pas et ne buvais pas : époque de ma médaille universitaire en athlétisme.
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Une tasse de café à la main, je sortis sur l'étroit balcon. A part un couple de grimpe-tôt et un vieux mâchouillant une pipe, le village vivait un maigre répit.
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