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Citations de Nastassja Martin (224)


Les humains ont cette curieuse manie de s'accrocher à la souffrance des autres telles des huîtres à leurs rochers.

Tout ce passe comme si l'événement les révélait enfin à eux-mêmes, comme si le drame faisait resurgir des émotions trop longtemps enfouies sous leurs peaux dans leurs organes, des sentiments si extraordinairement authentiques qu'ils en deviennent trop lourds à porter.
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Les "données", celles que j'avais soigneusement collectées, celles que j'avais commencé à mettre bout à bout pour créer un monde - celui que je voulais partager avec mes contemporains - gisent à présent à mes pieds comme autant de liens brisés qu'il faudra bien, plus tard, réagencer autrement. Pourquoi? Potomou chto nado jit dalché. Parce qu'il faut pouvoir vivre plus loin, comme disent tous ceux qui habitent ici dans la forêt sur la rivière sous le volcan. Il faut pouvoir vivre après avec et face à cela; juste vivre plus loin.
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A-gîtée, j'ai donc rêvé. Hors les murs, hors la famille, hors le quotidien. Comme Daria et Clarence le préconisaient, pour établir un lien avec l'extérieur; un lien efficace, je veux dire.
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Ni nado plakat Nastia. Il ne faut pas pleurer. Vsio boudet khorocho. Tout ira bien. Et encore: Pour continuer à vivre, il ne faut pas penser aux mauvaises choses. Il n'y a que l'amour qu'il faille rappeler à nous.
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C'est comme ça en forêt : on ne part jamais petit à petit, on ne se prépare pas, on fait comme si rien n'allait jamais changer jusqu'à ce que tout bascule d'un coup. C'est précisément cela, le qui-vive. Profiter de l'immobilité du corps jusqu'à ce qu'il faille bondir, toujours lorsqu'on s'y attend le moins.
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Non, rien n’est sa faute. Ce qu’il a fait : il a guidé mes pas pour que j’aille au-devant de mon rêve.
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Dans la chambre de l'hôpital, Andreï se tient à côté de la plante verte près de la fenêtre, assis sur le petit lit qui fait face à celui sur lequel les infirmiers m'aident à m'asseoir. Nous nous regardons en silence, la porte se ferme, nous sommes seuls. Il dit : Nasta, tu as pardonné à l'ours ? Silence à nouveau. Il faut pardonner à l'ours. Je ne réponds pas tout de suite, je sais que je n'ai pas le choix, et pourtant pour une fois je voudrais m'insurger, contre le destin, contre les liens, contre tout ce vers quoi on va et qui est inéluctable, je voudrais lui crier que j'aurais voulu le tuer, l'expulser hors de mon système , que je lui en veux tellement de m'avoir défigurée ainsi . Mais je ne le fais pas, je ne dis rien. Je respire. Oui. J'ai pardonné à l'ours.
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3. « En Alaska, les Gwich'in éclataient de rire lorsque je leur demandais si le corbeau, dont ils narraient régulièrement les histoires, était un animal sacré : "Pourquoi est-ce qu'on l'adorerait ou le prierait ? C'est un bougre sournois et rusé, un vrai tricheur ! Il est impossible de lui faire confiance."
Au Kamtchatka, lorsque je posais le même type de question aux Even, on me répondait laconiquement : "Le corbeau n'a rien d'un dieu, mais il est aussi intelligent que toi ou moi, il faut donc faire attention à lui !" » (p. 114)
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2. « Ces exemples montrent qu'en situation de crise, telle que celle impliquée par le réchauffement climatique et par l'exploitation à outrance des ressources naturelles dans le cas de l'Alaska, les modalités d'être dans lesquelles on a tenté d'ordonner les habitants d'un territoire particulier implosent. Ce que j'appelle provisoirement, sur les traces de Philippe Descola, une pragmatique animiste, resurgit au moment où l'on s'y attendait le moins, parce qu'elle se trouve plus à même de répondre à la destruction des formes stabilisées par et dans le processus colonial. Le renouveau des pratiques de chasse et pêche, doublé des histoires mythiques qui refont surface, s'avérant plus pertinent pour comprendre l'hybridation des êtres et leur fuite hors des cadres d'espèces les confinant dans certaines habitudes et dispositions, en sont les signes majeurs. » (pp. 73-74)
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1. « Les danses, les chants, les performances masquées, c'est-à-dire tous les éléments composant les pratiques rituelles destinées aux autres qu'humains, avec lesquels on se mettait en devoir d'ouvrir la possibilité d'un dialogue, doivent être vidés de leurs relations – qui leur conféraient une raison d'être – pour se convertir en formes pures, dès lors assignables au domaine de la représentation "artistique" desdits rituels. En somme, le fond des pratiques (les relations interspécifiques nouées dans et par les rituels) doit être hypothéqué au profit de la forme (donner à voir un rituel dissocié des effets qu'il devait produire sur le monde). » (p. 57)
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Nastassja Martin
Ce matin au sortir de la nuit et des rêves, Daria m’entraîne dehors. Viens poser un piège avec moi dans la forêt, loin des garçons, elle me dit. OK. Daria est une guerrière, une vraie. À Tvaïan, la vieille idée selon laquelle les hommes chassent et les femmes cuisinent est un leurre absolu, une jolie fiction d’Occidentaux qui peuvent dès lors être fiers de l’évolution de leur société et du dépassement des présumés rôles genrés. Ici, tout le monde sait tout faire. Chasser, pêcher, cuisiner, laver, poser des pièges, chercher de l’eau, cueillir des baies, couper du bois, faire du feu. Pour vivre en forêt au quotidien, l’impératif est la fluidité des rôles ; le mouvement incessant des uns et des autres, leur nomadisme journalier implique qu’il faut pouvoir tout faire à tout moment car la survie concrète dépend des capacités partagées lorsqu’un membre de la famille s’absente.
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P 115 – rêver avec la forêt, ce n’est pas confortable. Je pensais qu’après l’ours ça se calmerait, peut-être même que ça s’arrêterait. J’espérais. Passer des nuits noires et vides, justes le sommeil, ne plus se réveiller en sueur avant l’aube, être envahie d’images incompréhensibles au matin, avoir à en questionner le sens tout au long du jour. Ça continue. Soit. Ce n’est pas que je ne comprends pas ce qui m’arrive ; ce qui m’est arrivé. Neuf ans que je travaille chez ceux qui « partent rêver plus loin », comme dit Clarence. Que fais-tu, avec ta tente sur tes épaules ? Je lui demandais.
Il y a cinq ans lorsqu’il s’éloignait subrepticement hors de Fort Yukon vers la forêt. Je n’entends rien ici. Je ne vois rien non plus. Trop de bavardages, trop de confort, trop de famille et pas assez d’autres. Too much fuss ! Je sors rêver plus loin. Bon, je note. A force de temps, moi aussi j’ai commencé à rêver là-bas, mais juste un peu.
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Jai besoin de retourner auprès de ceux qui connaissent les problèmes d'ours ; qui leur parlent encore dans leurs rêves ; qui savent que rien n'arrive par hasard et que les trajectoires de vies de croisent toujours pour des raisons bien précises.
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Je me dis qu'il n'y a pas d'issue au-dehors.
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Je pense à mon histoire. A mon nom évène, matukha. Au baiser de l'ours sur mon visage, à ses dents qui se ferment sur ma face, à ma mâchoire qui craque, au noir qu'il fait dans sa bouche, à sa chaleur moite et à son haleine chargée, à l'emprise de ses dents qui se relâchent, à mon ours qui brusquement inexplicablement change d'avis, ses dents ne seront pas les instruments de ma mort, il ne m'avalera pas.
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Lorsque je me réveille je suis entièrement nue, seule, attachée au lit. Des lanières m'enserrent les poignets et les chevilles.
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A mesure qu'il s'éloigne et que je rentre en moi-même nous nous ressaisissons de nous-mêmes. Lui sans moi, moi sans lui, arriver à survivre malgré ce qui a été perdu dans le corps de l'autre; arriver à vivre avec ce qui y a été déposé.
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Je me demande un instant si l'ours va revenir pour m'achever, ou pour que je l'achève, moi, ou bien pour que nous mourions tous les deux dans une ultime étreinte.
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Mon esprit part vers l'ours, revient ici, tourne, construit des liens, analyse et décortique, fait des plans de survivant sur la comète.
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Autour de moi, des touffes de poils bruns solidifiés par le sang séché jonchent le sol, rappellent le récent combat.
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