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Citations de Natalia García Freire (24)


Toutes les maisons doivent regorger de secrets que personne ne déterrera jamais ; comme les grottes anciennes où la mort s’est couverte de terre et de roches, comme le fleuve qui charrie le sang et le dépose dans ses parties les plus sombres, les maisons dissimulent de si nombreuses disparitions qu’elles se vident de leurs forces et commencent à se morceler.
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Je ne crois pas que mon défunt père m’observe.
Mais son corps est enterré dans ce jardin, ce qui reste du jardin de ma mère, entouré de limaces, d’araignées-chameaux, de lombrics, de fourmis, de coléoptères et de cloportes. Peut-être même qu’un scorpion s’est posé près de son visage à moitié décomposé, et tous les deux évoquent les dessins qui ornent les tombeaux des pharaons égyptiens.
Nous l’avons enterré à proximité de l’endroit où je m’allonge, derrière ces statues de pierre. Si je creuse toute la nuit, je pourrai le trouver, qui sait si j’attraperai en premiers ses mains, ses pieds ou le bas du pantalon de son costume noir. Qui sait comment son cadavre s’est installé pour reposer en paix. Nous l’avons mis en terre sans prendre la peine de changer le vieux complet qu’il portait, car son corps sentait déjà.
Tout est arrivé si vite que ce n’est que maintenant, après tant de jours et de nuits, que je commence à le considérer comme un mort, de ceux condamnés à errer. Et la nuit parfois, je lui parle.
(Incipit)
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Quand les larves de mouche s’apprêtent à éclore, tout se liquéfie à l’intérieur de leur cocon pour former un être complètement différent : une mouche. Des pattes effilées et des ailes géométriquement bien taillées naissent d’une larve blanche et molle.
Il en va de même avec ce que j’éprouve : tout en moi, y compris le sentiment le plus ignoble, se métamorphose et peut devenir une idée prodigieuse selon mon bon vouloir.
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Si j’avais eu un peu plus de chance, j’aurais pu être une mante fleur épineuse, un scarabée Hercule ou une punaise assassine. Si j’étais l’une de ces dernières, je m’échapperais sur le sol, me faufilerais dans ce qui reste de notre demeure et en ferais le tour sans que personne me remarque ; j’occasionnerais çà et là des nuisances, escaladerais les corps de Felisberto et Eloy, appellerais ma bande d’amies pour semer la pagaille. Je leur piquerais les mains, le cou, l’arrière des fesses, les cuisses, leur croquerais tout le corps, et quand je n’en pourrais plus et serais gonflée, obèse, pleine de sang, j’exploserais en toute placidité.
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Nous sommes restés longtemps dans le jardin. Eloy grognait en jouant avec les fourmis. Il en a tué beaucoup, une par une, jusqu’à ce que son index soit couvert d’une pâte noire d’exosquelettes détruits, puis il l’a léché comme s’il était enduit de miel.
Je pleurais comme un idiot en assistant à ce massacre immense et pourtant minuscule.
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Je ne crois pas que mon défunt père m’observe. Mais son corps est enterré dans ce jardin, ce qui reste du jardin de ma mère, entouré de limaces, d’araignées-chameaux, de lombrics, de fourmis, de coléoptères et de cloportes. Peut-être même qu’un scorpion s’est posé près de son visage à moitié décomposé, et tous deux évoquent les dessins qui ornent les tombeaux des pharaons égyptiens.

(incipit)
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Au cas où vous m’observeriez en ce moment, père : je suis rentré à la maison. J’ai pourtant l’impression d’avoir regagné un autre lieu à une autre époque, un autre monde dans lequel nous n’avons jamais existé. Toutes mes excuses si en certaines occasions je me distrais et me concentre sans relâche sur des choses que vous taxiez autrefois d’inutiles. Mais à présent, avec tous ces vers autour de vous, vous devez vous dire qu’en fin de compte ces choses-là avaient leur importance, n’est-ce pas ? Puisque ces asticots s’insinuent dans votre bouche et vos oreilles et, qui sait, peut-être même dans votre cul, et qu’ils vous piquent la nuit ; qu’ils rampent le long de votre corps, de haut en bas, cherchant ce qui reste de vous et qui pourrait leur servir, qu’ils se posent sur vos mains et vos pieds en se tortillant. Vous n’avez pas l’impression qu’à la fin de la vie, à la fin de tout, ils sont plus forts que nous ? Et que, si on y réfléchit un peu, ce monde n’est sans doute pas le nôtre mais celui de ces êtres minuscules qui, groupés, pourraient tous nous recouvrir ?
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Toutes les soirées paraissaient baignées de poussière et les journées étaient pleines d’une lumière laiteuse et de fleurs sèches qui flottaient sur les mares, un temps traînant qui s’enlisait dans ce son purulent, épuisant.
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J’observe derrière la vitre de la fenêtre, les gouttes de pluie font office de loupe mais tout est flou.
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Nous l’avons enterré à proximité de l’endroit où je m’allonge, derrière ces statues de pierre. Si je creuse toute la nuit, je pourrai le trouver, qui sait si j’attraperai en premier ses mains, ses pieds ou le bas du pantalon de son costume noir.
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Un silence absolu s'est abattu sur la maison. C'était la première fois que je le percevais, à moins d'avoir déjà eu affaire à lui en sortant du ventre de ma mère, mais sans l'entendre, car il m'aurait perforé les tympans.
Le silence de la nuit me faisait trembler et s'étendait comme une odeur de pourri, il se collait à mon corps qu'il rendait muet. (28)
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Sarai était la plus jeune des quatre et il lui manquait deux doigts à la main gauche : l’index et la majeur. Quand elle me prenait par la main, elle utilisait ses trois doigts valides en pressant un peu trop, comme une poule en colère. Mais c’était sa seule marque de rudesse. J’avais parfois l’impression que cette mienne n’était pas la sienne, qu’il s’agissait d’une prothèse qu’on lui enlèverait un jour pour qu’apparaisse à sa place une main de nouveau-né que nous verrions grandir au fil des années, jusqu’à ce qu’elle ait la même taille que sa main droite.
J’avais ce genre de pensées quand je me promenais avec elle, raison pour laquelle je trébuchais au moindre dénivelé et tombais, en général sur les fesses, et elle me relevait avec sa patte de poule. Nous étions pareils à une chaîne de vélo mal graissée. Nous avancions par à-coups.
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Accroupi, j'observe à l'intérieur de la maison en tendant à peine la tête vers la fenêtre, comme le diable. "Dieu voit tout, Lucas", disiez-vous toujours. Je ne suis pas d'accord, Dieu est trop prude pour ça. Le diable, en revanche, est sans doute un voyeur. Et moi aussi. (17)
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J’aspire à la résurrection de la chair, que seuls la mort et les immondices rendent possible.
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Je m’évade de ma propre présence, de sorte que les autres cessent de la percevoir. Je me suis vidé de mon être.
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À présent, j’en comprends la raison : tout père abrite un dieu et considère ses enfants comme des figurines d’argile toujours inachevées qu’il cherche sans cesse à recréer à son image pour finir par les condamner : il les accable de fléaux et de déluges, les maudit, puis leur pardonne sa propre vanité. Et nous autres, humains, sommes tous des enfants d’argile timorés et craquelés qui errent de leur vivant, dépourvus de bras, de jambes, ou encore difformes. Bien que personne ne puisse nous voir.
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Au fond, votre attitude était celle d'un lâche, père, d'une grande gueule qui ne comprend pas ses propres agissements, imitant en cela les enfants qui, armés de lance-pierres, tuent des oiseaux ou d'autres petits animaux et partent en courant, les abandonnant par terre parce qu'ils refusent d'être confrontés à leurs actes. Vous n'étiez même pas un vrai méchant, mais un type quelconque devenu important grâce à la piètre autorité que vous exerciez sur ma mère et moi. (82)
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Je ne crois pas que mon défunt père m'observe. Mais son corps est enterré dans ce jardin, ce qui reste du jardin de ma mère, entouré de limaces, d'araignées-chameaux, de lombrics, de fourmis, de coléoptères et de cloportes.
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Personne ne se souvient de la voix des morts.
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La résurrection de notre chair est un miracle. Ce n'est pas l'esprit qui s'élève mais un corps qui se défait et descend en spirales sur la terre pour former une vie plus parfaite et symétrique.
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