À l'occasion du Quai du Polar 2019, rencontre avec Chris Offutt autour de son ouvrage "Nuits appalaches" aux éditions Gallmeister.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2303417/chris-offutt-nuits-appalaches
Propos traduits de l'anglais par Fleur Aldebert
Notes de Musique : Bibliothèque Audio Youtube
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La lune était gibbeuse, à peine visible, comme si quelqu’un avait croqué dedans. L’opacité du ciel s’étendait dans toutes les directions. Les nuages bloquaient les étoiles, conférant à l’air une profondeur insondable. La limite des arbres avait disparu et les crêtes des collines se fondaient dans cette noire tapisserie. C’était la nuit Appalaches.
Il voulait mesurer le temps à la croissance des arbres.
C'était un joli coin pour mourir.
A l'armée j'ai accès à tout un tas d'infos. Un jour j'ai regardé notre arbre généalogique. Un singe m'a chié sur la gueule.
Elle riait toujours pareil, un éclat soudain. Ça la déridait, mais après elle se durcissait d'autant plus, comme si la vulnérabilité avait un coût inscrit sur une feuille de comptage invisible.
Le monde lui parut beau pour la première fois, l'air nettoyé par la pluie, la surface de chaque feuille lustrée d'eau. Elle sentait l'odeur de la terre mouillée et des fleurs sauvages, entendait l'assemblée des oiseaux tisser son chant partout aux alentours.
Pour lui, le tonnerre intervenait quand deux nuages se percutaient. La foudre naissait de leur friction, comme les étincelles lorsqu’on frotte deux cailloux, et la pluie était une sorte de sang qui s’écoulait des nuages blessés.
Sous la fenêtre, un chardonneret gisait au sol. Il ramassa délicatement l'oiseau sonné, le recueillit dans le creux de sa main. Le cou du chardonneret pulsait rapidement. Ses yeux étaient ouverts. Mick le tapota, et les ailes émirent un battement faible. Il porta l'oiseau au niveau de sa bouche et souffla trois fois dans son bec ouvert. L'oiseau se dressa sur sa paume. Il inclina la tête pour voir Mick, inspecta les environs comme pour s'orienter, puis il s'envola.
Tous les enfants apprenaient les mots "Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés", un message fort généreux qui ne prévoyait pas de calendrier spécifique. Dans les collines il était plus pratique de pardonner les offenseurs après les avoir tués.
- Y a Gloria, dit Tucker;
- Elle, elle est capable de compter deux fois ses nichons et de ne pas trouver le même résultat.