Citations de Olivier Descosse (244)
Jean vérifia la profondeur. Quarante-cinq mètres. Ils avaient bientôt accompli la moitié de leur descente et atteindraient l’objectif dans deux minutes, une des conduites d’acier plongeant sous la plateforme et remontant le pétrole à la surface.
Deux jours plus tôt, un raccord du pipe s’était déboîté au niveau du plateau sous-marin. La canalisation, d’un diamètre qui avoisinait la taille d’un homme, balançait son poison dans la mer de Barents depuis quarante-huit heures. Cerise sur le gâteau, elle menaçait maintenant de se rompre.
Les couleurs s’estompaient.
Le bleu limpide du ciel, la brillance dorée du soleil, le rouge vif des scaphandres… Sous l’eau, tout se confondait en une seule teinte grisâtre. Un monde uniforme, sans relief, comme enveloppé à l’intérieur d’un voile de tulle. Dessous, partout, aspirant la lumière tel un quasar géant, s’ouvrait le néant aveugle d’une nuit perpétuelle.
J’aime bien l’idée du papier qui vieillit avec moi. J’ai l’impression de pouvoir y lire mon histoire. Sans parler de la sauvegarde.De mon point de vue, on n’a pas trouvé mieux.
On ne choisit pas son karma. On le subit.
Une pluie violente fit crépiter le pare-brise. Elle unifiait le paysage, gommait les perspectives, réduisait les volumes. L'avocat songea à un chagrin de fées. Leurs larmes dissimulaient la tristesse des banlieues sous un voile de pudeur. Un ciel bleu roi, presque oppressant à force de pureté. Une plage aux reflets soyeux, vaste étendue de miel fuyant vers l'horizon.
De nuit, on avait l'impression de traverser un naufrage. Les vieux se terraient dans les villages, recroquevillés sur leur rancoeur. Les jeunes se tassaient dans les cités-dortoirs ou des pavillons de carton-pâte, abrutis par l'opium cathodique.
Les mots jaillissaient sous sa langue avec facilité, méchants parfois, précis toujours.Ses potes lui trouvèrent vite un surnom "Uzi", en référence au pistolet-mitrailleur israélien. Un débit en rafale,rapide, mordant, aux allures de mitraille. Lorsqu'il tirait, personne n'en ressortait indemne. Ses diatribes percutaient les consciences, ses réparties déstabilisaient les plus retors.
Un terminal pétrolier tel une sauterelle géante.
Ces fantômes semblaient débarquer de nulle part, surgis d'un néant de soleil et de terre tels des icône de glaise.
L'enfant avait poussé sur ce terreau d'aigreur, mal dans sa peau, agressif, comme un chiendent de revanche. Rien ne l'apaisait. Parents, éducateurs, conseillers en tout genre, personne n'avait pu l'infléchir. Violent, hostile, colérique, il semblait jailli d'un hoquet de haine.
On n'a plus rien en Algérie, On est tous nés ici. Dans nos générations, personne ne sait à quoi ressemble le bled. Le terreau des Beurs, c'est ces cages de merde dans lesquelles on a parqué nos rêves.
Des destins fracassés en quelques heures, par pure connerie. Parce que les mômes se maquillaient, portaient des jupes, parce qu'elles marchaient la tête haute, inconscientes, parquées par leurs bourreaux dans une prison de préjugés.
Il avait conjugué ses racines au présent, jugulé la dichotomie de son être par l'acceptation des contraires.
Riad Kellal faisait partie des rares officiers de police originaire du Maghreb. Un parcours exemplaire, un modèle d'intégration. En réalité une situation inconfortable.
Pour la corporation une brebis galeuse.
Pour sa communauté un renégat.
Une foule dans un écrin de velours
Un géant de papier dont la vie ne tenait plus qu’à un fil.
Les meilleures histoires sont toujours celles qui flirtent avec le concret.
Les statistiques, c'est comme les sondages, on leur fait dire ce qu'on veut.
En prison, le principal ennemi n'est pas le manque de confort ni même l'enferment. L'adversaire numéro un, c'est le temps.
Question boulot, les magistrats n’avaient pas de soucis à se faire. Le combustible se renouvelait sans cesse.On le prélevait dans le fumier d’une société de plus en plus violente , une source , qui contrairement au pétrole n'était pas prêt de se tarir.