A l'occasion du 25ème "Rendez-vous de l'Histoire" à Blois, Olivier Mannoni vous présente son ouvrage "Traduire Hitler" aux éditions Héloïse d'Ormesson.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2656261/olivier-mannoni-traduire-hitler-essai
Note de musique : © mollat
Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
Visitez le site : http://www.mollat.com/
Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux :
Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/
Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts
Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat
Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/
Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat
Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/
Vimeo : https://vimeo.com/mollat
+ Lire la suite
La réalité du nazisme, celle que l’on trouve dans les textes de ses acteurs, c’était aussi cela : celle d’individus sans talent, sans ampleur, sans autre moteur que la haine qui leur servait d’ambition.
La langue allemande est de ce point de vue un enchantement pour le traducteur : tant de mots, de phrases, peuvent, selon qu’on choisit un sens ou un autre, changer sinon sur le fond, du moins dans les détails, le ton, la visée. Pour les nazis, cette richesse était une arme. Elle joua un rôle dans l’installation du régime, dans ses manœuvres expansionnistes, dans le montage de la mécanique de l’assassinat de masse. Quand tout fut terminé, il fallut, littéralement, traduire le langage nazi en allemand courant, puis le transposer dans les langues officielles des procès de Nuremberg pour parvenir à comprendre ce que disaient réellement les documents.
Non, traduire Hitler, Goebbels, Himmler, Rosenberg et les autres, ce n'est pas traduire de l'allemand. C'est traduire une langue forgée pour et par un totalitarisme meurtrier, une langue destinée à faire peur – il suffit pour s'en convaincre de lire par exemple à voix haute les grades de la ss, Rottenführer, Sturmbannführer, Hauptscharführer, qui ronflent comme des tanks, mais dont la traduction serait parfaitement grotesque : le premier signifie par exemple chef de bande ou de harde. Une langue faite pour tromper, mentir et, nous allons le voir, abrutir.
Il y a sur mon bureau deux chiens en porcelaine de Chine qui se moquent de moi, je crois, quand j'écris.
L'usage de l'euphémisme, du détournement de termes courants, de la création de mots polysémiques, tout cela permit de cacher longtemps au monde et à une partie de la population allemande le massacre que perpétrait le pouvoir nazi Europe.
Très concrètement, la langue d’Hitler est extraordinairement chargée, comme un fleuve qui charrierait des débris de tous les côtés, jusqu’à rendre invisible le fleuve lui-même.
II serait bien entendu absurde de ramener à l'histoire des totalitarismes tous les phénomènes que nous voyons apparaître et, pour certains, réapparaître aujourd'hui. Pour autant, la connaissance des événements passés permet aussi, dans une certaine mesure, de se prémunir contre les avenirs désastreux.
[...] les mots que l'on écrit et les haines que l'on répand ne sont jamais sans conséquences.
Nous assistons à la remontée des égouts de l'histoire. Et nous nous y accoutumons.