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Critiques de Ota Pavel (58)
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Comment j'ai rencontré les poissons

"Ce livre, je l'ai offert à vingt-quatre personnes.Parmi lesquelles un policier, une femme de ménage, une enseignante......Tous ont été sur le choc."Oui, c'est le bouquin le plus antidépressif du monde " ont-ils déclaré.", écrit Mariusz Szczygiel, écrivain polonais, dans sa préface à ce livre, qui est un de ses préférés. Et j'en dirais autant.



Largement autobiographique, Ota Pavel avec le regard de l'enfance et plus tard, celui du jeune homme qu'il deviendra, se souvient de son père génial ,représentant de commerce ( "capable de vendre un aspirateur dans un village sans courant électrique") et passionné de pêche. "Papa avait bien d'autres préoccupations. Au premier rang se trouvaient le commerce et les poissons ", la passion des poissons devançant souvent celle du commerce.Un père fascinant qui ne s'arrête devant aucune extravagance pour arriver à ses fins. Il achètera même un étang pour avoir ses propres carpes.....À travers divers anecdotes, racontées plus ou moins chronologiquement, où les poissons sont souvent les stars ( et quelles stars ! carpes dorées comme du laiton,avec un ventre jaune de brasseur, repu de drêches / chevaines argentés / barbeaux noirs et argent / perches d'un vert olivacé, rayé de couleur sombre / silure avec des moustaches et de petits yeux mystérieux / truites sorties de l'eau, pareille à des brioches......), il nous relate leur vie d'antan, une vie qui va lentement basculer dans le drame avec l'arrivée de Hitler et de l'Holocauste. La Tchécoslovaquie est envahie par les Allemands, et ils sont juifs........la guerre terminée , l'arrivée du communisme sera loin d'être une bouée de secours.

Pavel adoucit le tragique avec beaucoup d'humour, de tendresse et de poésie. Même dans le désespoir, il nous réchauffe le cœur avec un geste humain, des descriptions grandioses de la nature et un trait d'humour..........jubilatoire ! On rit et on sourit beaucoup, et dire qu'il les a écrit en plein état dépressif grave !





Ce classique de la littérature tchèque publié dans son pays en 1971, vient d'être réédité par une maison d'édition indépendante, réunissant un certain nombre d'histoires de deux recueils différents publiés dans leur langue originale, dont l'ordre a été choisi par la traductrice.Le résultat est superbe, avec un épilogue plus qu'émouvant. Je l'ai découvert par pur hasard, séduite par son titre et sa magnifique couverture. Le vrai coup de cœur est arrivé par la suite. C'est une de mes plus belles rencontres littéraires !

Pour vous faire succomber, une dernière tentative : "Une lecture physiquement contagieuse qui produit des bulles de joie", ce n'est pas moi qui le dit, c'est Erri De Luca sur la quatrième de couverture.

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Comment j'ai rencontré les poissons

« Savoir se réjouir. Se réjouir de tout. Ne pas attendre que l’année nous apporte quelque chose d’essentiel, de vrai. Car il est fort probable que l’essentiel se produit à l’instant présent et que l’avenir ne nous apportera rien de plus beau. »



Dans ce roman (peut-être) autobiographique et en tous cas thérapeutique qu’Ota Pavel écrivit sur les conseils de son médecin alors qu’il était hospitalisé pour dépression sévère, le narrateur se souvient avec infiniment de tendresse de son enfance et de son père, dans la Tchécoslovaquie de l’entre-deux-guerres. C’est un père totalement farfelu, représentant de commerce chez Electrolux, champion du monde officiel des vendeurs de réfrigérateurs et d’aspirateurs. C’est également un homme inculte, presque illettré, tout à la fois naïf et roublard, qui ne doute jamais de rien et surtout pas de sa chance, affronte les situations avec un aplomb sans faille et bouillonne en permanence de projets rocambolesques et inévitablement désastreux.



De l’achat délirant d’un étang à carpes (dans lequel il investit toutes les économies de la famille), d’une voiture hors de prix qu’il ne sait pas conduire, à ses exploits de pêcheur émérite, ses inventions douteuses et les humiliations qu’il aura à subir, en passant par sa passion de collégien, aveugle et déraisonnable, pour la belle épouse blonde de son chef, nous suivons les aventures et les tribulations de ce personnage totalement farfelu et parfois dangereusement inconscient, un « meshuga » de la plus belle eau, insolent de surcroît, et « un voleur de cœurs » auquel personne, jamais, ne résiste.



De ce père tendrement aimé, de cette famille et de cette enfance où la nature – lacs, rivières, campagne et forêts – la pêche et les poissons occupent une place considérable, Ota Pavel fait un portrait cocasse et contrasté qui mêle l’amour et la drôlerie, la douceur et le chagrin. Car en toile de fond de ce tableau burlesque et plein de fantaisie se dessinent, de manière presque allusive et par petites touches, la montée du nazisme en Tchécoslovaquie, les lois anti-juives, la tragédie des camps, de la guerre puis du communisme qui frapperont de plein fouet toute la famille et ce papa charmeur, farfelu – et juif.



« Comment j’ai rencontré les poissons » est l’unique roman d’Ota Pavel, mort à 42 ans, et un grand classique de la littérature tchèque. J’ai beaucoup aimé son humour réjouissant, son écriture drolatique qui en font « une lecture physiquement contagieuse qui produit des bulles de joie sous la peau » (Erri De Luca), ce personnage improbable, irrésistible et profondément attachant et cette famille brouillonne et atypique, mais aussi la tendresse et la belle humanité qui transparaissent dans chaque phrase et cette volonté, pudique et entêtée, de « se réjouir de tout », tout le temps et malgré tout, et de survivre.



Une très belle lecture qui m’a serré le cœur autant qu’elle m’a fait rire, et une belle découverte.



[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]

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Comment j'ai rencontré les poissons

Ce livre est l’hymne à l’amour d’un fils pour son génial papa. Le narrateur est un petit enfant, qui porte un regard admiratif sur son papa, juif tchèque, fanfaron, coureur de jupons, qui va l’initier à la pèche et à la passion des étangs et des poissons : engouement bienvenu en cette période qui voit se profiler la seconde guerre mondiale à l'horizon.



Erri de Luca dit avoir ressenti des « bulles de joie sous la peau » à l’évocation de ces souvenirs simples. Je n’ai pas éprouvé cette joie, j’ai le sentiment d’être restée connectée à la blessure d’Ota Pavel, celle qui a fini par le détruire pour l’emmener en asile psychiatrique d’où il a ressenti le besoin d’écrire ce si joli roman à la gloire de son papa. J'ai souffert pour rédiger mon commentaire qui est donc très personnel et très isolé par rapport aux autres billets. Les lecteurs majoritairement qualifient cette lecture de joyeuse.



La lecture des petites chroniques afférentes à la pèche m’a rappelée le film « Et au milieu coule une rivière » de Robert Redford. Très indifférente à la pèche, j’avais découvert, grâce à la magie du réalisateur Redford, qu’il était possible de faire passer beaucoup d’émotions avec une caméra rien qu’en filmant un simple lancer dans un environnement grandiose du Montana.



J’ai retrouvé avec Ota Pavel cet amour de la nature, cette fusion qui s’installe entre la nature, un papa et ses fils.



J’ai éprouvé la mélancolie, la nostalgie de ses merveilleux moments qu’Ota aime se remémorer et nous faire partager. Son papa est un doux rêveur, toujours à trouver de nouvelles idées, la meilleure idée bien sur - celle qui peut ruiner la famille de préférence - un papa « Mechuga » ou « meschugge » qui signifie en yiddish quelqu'un a mi chemin entre la folie et l’irresponsabilité. Alors, il raconte les facéties de papa, la Buick, le professeur Nechleba, la belle Irma, les rives de la Berounka, le commerce du papier tue-mouche, les poissons attrapés à la main par ses frères, les brochets, les anguilles, les barbeaux, les gentils, les méchants et ce sans jamais usé du pathétique, l’enfant ne semble pas se rendre compte des drames qui se jouent.



Et même si Ota nous raconte les mésaventures de Léo, champion du monde de vente d’aspirateurs Electrolux à domicile, et de sa maman, et si certaines scènes sont particulièrement cocasses, je n’ai pas cessé d’entendre le bruit des bottes en bruit de fond, je n’ai pas cessé de me révolter contre le racisme, l’antisémitisme, comme de confisquer à Léo son étang dès le début de l’occupation qu’il avait été si heureux de s’offrir au prétexte « qu’un juif ne peux faire l’élevage de carpes ».



Je vous incite surtout à vous faire votre propre idée de ce si joli livre surtout si vous aimez la pèche. Vous y trouverez beaucoup d’humour et beaucoup d’amour.

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Comment j'ai rencontré les poissons

Bookycooky, où se trouve ton filon de pépites d'or ? Celui-ci est même un diamant que tu m’as conseillé. Il correspond à tout ce que j’aime et j’y retrouve un peu mes auteurs favoris dans Ota Pavel. Un mélange de Fanté pour la tendresse de l’enfance, de Abbey pour la nature, de Harrison pour la pêche, de Bobin et Frégni pour l’amour de la nature, et bien d’autres encore. Le narrateur est un jeune garçon qui nous conte, par rubriques, son enfance et surtout les péripéties de son père, pêcheur amoureux des carpes et de ... Il est même capable de vendre des aspirateurs dans des lieux sans électricité, trop fort le papa ! Voir la critique de Bookycooky, qui a tellement tout bien dit. Qu’ajouter ? A lire, à faire lire, à offrir, à dérober. Comme le dit Mariusz Szczygiel : « Le livre le plus antidépressif du monde. »
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Comment j'ai rencontré les poissons

« Tandis que je mourais là-bas à petit feu, je voyais surtout cette rivière qui comptait plus que tout dans ma vie et que je chérissais. Je l'aimais tellement, qu'avant de me mettre à pêcher je ramassais son eau dans mes mains en coquille et je l'embrassais comme on embrasse une femme. »



Je referme ce livre, Comment j'ai rencontré les poissons, et j'entends encore couler dans l'âme de son écrivain Ota Pavel, le chant merveilleux et nostalgique d'une rivière qui a compté plus que tout dans sa vie.

Ce livre rassemble de joyeuses et poignantes histoires qui tournent souvent autour de la pêche à la carpe, à la truite, à l'anguille... Mais toutes ces histoires truculentes et touchantes forment un beau prétexte pour l'auteur de nous parler de son père pour lequel il a toujours éprouvé une profonde admiration. Ah ! Parlons de son père, ce représentant de commerce d'une célèbre marque d'aspirateur, homme volage par nature qui aspirait sans cesse à un désir de liberté, que son épouse et mère de trois enfants n'a jamais cessé de rechercher à chacune de ses impossibles escapades amoureuses...

La légende familiale dit qu'il aurait même vendu des aspirateurs dans un village tchécoslovaque non relié à l'électricité.

La légende familiale dit que sa femme qui l'aimait, - et qu'il aimait, ne cessait de lui pardonner ses échappées amoureuses, peut-être parce qu'elle savait consciemment ou inconsciemment qu'elles étaient vaines...

En apparence, nous sommes invités à de fameuses parties de pêche à la hauteur d'un enfant avec toute la tendresse et la gouaille que cela convoque, mais si l'on regarde un peu plus loin le paysage en toile de fond en cette veille de seconde guerre mondiale, on entend déjà le bruit de la barbarie à visage humain, l'antisémitisme qui grimpe dans cette Europe centrale, ici à Prague ou ailleurs... Oui, il faut le dire, les Popper, - c'était le vrai nom de la famille de l'auteur, sont juifs et les chroniques qui nous sont ici partagées par Ota Pavel ne manquent pas d'évoquer ce contexte douloureux.

Cette tragédie traverse ces chroniques puisque le père et les deux frères de l'écrivain seront déportés au camp de concentration de Terezín, d'où ils reviendront vivants, les parties de pêche pourront enfin recommencer. J'ironise, mais je pense sincèrement que cette passion partagée dans la famille, en particulier entre un père et son fils, fut un bel antidote à la barbarie nazie qui avait tenté d'anéantir l'humanité.

Une des histoires qui m'a le plus touché est peut-être celle qui invite un gardien de pêche un peu bancal mais fin limier, sorte de Quasimodo des rivières... Elle convie toute l'espérance inattendue qui surgit au dernier moment, celui qu'on n'attend plus...

Une autre barbarie les attendait au lendemain de la guerre, plus pernicieuse, celle du communisme qui avait la volonté d'apporter le bien à tout un peuple. Plus tard les Juifs seront de nouveau des boucs émissaires désignés par le régime totalitaire en place.

Mais ce régime tout aussi intrusif qu'il est, - qui continue de l'être sous une autre bannière, non plus sur ce territoire vaste de l'Union Soviétique mais désormais cantonné à la seule Russie de Poutine, n'aura jamais de prise sur la jubilation folle d'une partie de pêche ni sur la nature enchanteresse qui accueille ce bonheur. Non, ils n'ont jamais réussi à voler cela. Ils ne le voleront jamais.

Ota Pavel a un sens inouï de la narration, il sait nous raconter des histoires, j'avais l'impression à chaque instant d'être à ses côtés au bord de cette rivière, à l'intérieur des forêts, à la lisière d'un rêve protégé du reste du monde.

Je vous avoue avoir pleuré à la fin de ma lecture, je ne saurais dire pourquoi, ne me le demandez pas, je déteste pourtant la pêche... Peut-être que je pense tout simplement à mon Papa ce soir, qui sait...?



♫ Si l'on ne voit pas pleurer les poissons

Qui sont dans l'eau profonde ♪

C'est que jamais quand ils sont polissons

♫ Leur maman ne les gronde

Quand ils s'oublient à faire pipi au lit

Ou bien sur leurs chaussettes ♪

Ou à cracher comme des pas polis ♪

Elle reste muette

♫ La maman des poissons elle est bien gentille

Elle ne leur fait jamais la vie ♪

♫ Ne leur fait jamais de tartine

Ils mangent quand ils ont envie ♪

♫ Et quand ça a dîné ça redîne
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Comment j'ai rencontré les poissons

Classique de la littérature tchèque, ce livre est rempli d'histoires poignantes, drôles aussi, avec toute la sensibilité et la tendresse qui caractérisent cette famille.

Ces courtes histoires retracent la vie d'un homme qui se souvient de son père. Aux yeux de l'enfant, il est héroïque, avec des idées parfois loufoques. Ce père est très fort car il réussit même à vendre des aspirateurs dans des villages où le courant électrique n'est pas encore installé. Son fils l'admire beaucoup.

A travers ses histoires, il y a également la réalité qui apparaît en toile de fond. Ainsi, nous suivons les événements majeurs qui ont marqués l'histoire de l'Europe centrale au XXe siècle. Mais même dans les moments les plus difficiles, il y a une solidarité, une union entre eux et ceux qui les entourent.



Récit autobiographique où se mêle des parties de pêche mémorables, la vie quotidienne d'une famille, les aléas de la vie et les événements tragiques de l'histoire.

J'ai littéralement adoré ce livre découvert par hasard sur un rayonnage d'une médiathèque. La couverture m'a séduite, le titre m'a intrigué. Il ne m'en fallait pas plus. En choisissant ce livre, je me suis engagée dans une partie de pêche qui m'a entraînée dans un moment de sérénité.



Excellente découverte, je ne peux que vous le conseiller. Allez-y les yeux fermés et laissez vous guider par le courant de la rivière où les poissons nagent.
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Comment j'ai rencontré les poissons

"Oui, c'est le bouquin le plus antidépressif du monde" écrit Mariusz Szczygiel dans sa postface intitulée de la vie comme une fête.

"- Excusez-moi, madame, pourquoi m'avez-vous dit bonjour ?

- C'est parce que je ne suis pas d'ici, répondit-elle.

- Vraiment ? fis-je, décontenancé.

- Je suis arrivée ce matin de Prague pour rendre visite à ma fille et à mon gendre, m'explique-t-elle avec précision.

- Mais puisque vous n'êtes pas d'ici, repris-je, pourquoi alors dire bonjour aux gens ?

- Eh bien, justement, parce que j'aimerais être d'ici."



Le lecteur aussi, une fois sa lecture terminée, alors que des larmes coulent sur ses joues, de bonheur et de tristesse à la fois, aimerait habiter dans le pays d'Ota Pavel et pécher le brocher en appâtant avec des perches, dans la rivière Berounka, aux côtés de son père.




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Comment j'ai rencontré les poissons

De poissons, ce livre n'en manque pas. Des brochets gros comme des crocodiles, des vairons aux corps marbrés, des ablettes argentées, des carpes dorées comme du laiton, des chevaines des anguilles, et autres barbeaux musculeux. Ils sont le fil rouge de ces mémoires, comme une toile de fond, chaque récit de pêche ainsi rattaché à un souvenir.



Je dois vous avouer un truc : la pêche ne fait pas partie de mes loisirs habituels, même pas de mes loisirs occasionnels, et pourtant, jamais je ne me suis ennuyée…

Il y a un charme fou dans la plume d'Ota Pavel, mélange parfait de nostalgie parfois cruelle et d'envolées poétiques, de tendresse infinie et de fantaisie galopante , capable dans la même phrase de vous arracher un sourire et de vous serrer le coeur.





À chaque chapitre, une anecdote. Certaines joyeuses et légères, celles remontant à la prime enfance. D'autres cruelles et touchantes, celles où la guerre a fait irruption dans l'enfance où bien celles qui retracent les désillusions post-révolution communiste…

Ce n'est pas juste une histoire, c'est la vie que nous conte Ota Pavel, une ode à la nature et à la vie dans tout ce qu'elle peut avoir de magnifique et d'absurde, de flamboyant et de trivial.



Challenge Multi-défis 2017
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Comment j'ai rencontré les poissons

Après avoir plongé à corps perdu dans le monde de la tragédie grecque, j'avais vraiment envie de d'assouplir mes muscles zygomatiques... Un titre m'est venu à l'esprit : Comment j'ai rencontré les poissons de Ota Pavel, chaudement plébiscité par certaines amies babeliotes qui se reconnaîtront au passage.

Mais ce roman m'a offert ce à quoi je ne m'attendais pas vraiment...

Ota Pavel retrace, dans de courts épisodes largement autobiographiques, sa vie familiale sur trois périodes : les années trente, l'avènement d'Hitler et le régime nazi et enfin l'instauration du régime communiste en Tchécoslovaquie. Une structure donc globalement chronologique qui va permettre de suive le narrateur de l'enfance à l'âge adulte.

L'auteur nous fait entendre trois voix. Une première qui va jouer avec la voix de l'enfant avec des expressions comme "mon génial papa" ou "mon farceur de papa" et qui va nous conter avec un émerveillement hyperbolique les exploits de son père Leo Popper, commis voyageur au talent l'illusionniste, ce qui nous vaut des épisodes croustillants, où nous allons voir, par exemple, le père du narrateur partir à la conquête de l'Europe centrale via la vente de papiers tue-mouches, tel un chevalier de la Table Ronde en route vers le Graal. C'est jubilatoire !

Mais ce père hors du commun n'est pas seulement commis voyageur, il a une passion exclusive, obsessionnelle : la pêche. Ce qui le pousse dans ses pires moments à oublier le reste du monde à commencer par sa famille.

Que dire de cet épisode où il va mettre en danger son fils (le narrateur) en l'obligeant à se dévêtir et à plonger dans une rivière déchaînée pour appâter des anguilles ?

Ce passage est glaçant. J'ai vraiment entendu cette fois le cri de l'enfant qui se sent abandonné par son père et qui est littéralement submergé par la terreur de se noyer. C'est le seul moment où cette voix de l'enfant est tragique. Elle laisse plus souvent place à l'évocation des moments de vrai bonheur que le narrateur a connu au contact avec la nature ; passages empreints d'une poésie bucolique et naïve, à hauteur du regard de l'enfant qu'il était.

Une dernière voix fait écho ou se situe en contrepoint des deux autres : celle du narrateur adulte. Lorsqu'il évoque la chute de son père, vaincu par l'antisémitisme dont il a été victime non seulement sous le nazisme mais aussi sous le régime communiste. Passages empreints de compassion et de tristesse sans être larmoyants ni tomber dans le pathos. Fort contraste avec ceux où il évoque d'une plume féroce la période nazie ou plus insidieusement le régime communiste.

La lecture de ce livre a donc été pour moi en tout cas, plus souvent émouvante et poignante que drôle. Mais j'ai vraiment aimé cette diversité de tons et de voix, ce vrai talent de conteur dont fait preuve Ota Pavel. Une belle découverte de la littérature tchèque que je ne connaissais pas du tout.

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Comment j'ai rencontré les poissons

Envie de poursuivre mes lectures estivales avec un roman proche de la nature. Mon choix s'est immédiatement fixé sur ce joli petit livre du tchèque Ota Pavel, attirée par son titre poétique et la magnifique couverture bleutée, graphiquement sobre et élégante.



L'auteur réunit dans un petit recueil de nouvelles ses plus beaux souvenirs d'enfance, la présence constante des poissons d'eau douce servant de fil conducteur. Ainsi, truites, carpes, barbeaux et anguilles accompagnent le lecteur tout au long de ces petites histoires tendres, drôles, émouvantes ou tragiques, nous rappelant que la vie est belle, mais aussi éphémère et cruelle.



« Cent fois j'ai voulu me tuer quand je n'en pouvais plus, mais je ne l'ai jamais fait. Dans mon subconscient, je voulais peut-être embrasser une fois encore la rivière sur la bouche et pêcher les poissons d'argent. La pêche m'avait appris la patience et les souvenirs m'aidaient à survivre. »



*

Ce n'est pas très courant de commencer une critique par l'épilogue, mais la lecture de ce petit livre apparaît sous un autre jour lorsque l'on apprend qu'Ota Pavel a écrit ses livres durant son internement pour des troubles bipolaires. Alors qu'il a l'intime conviction que le meilleur de sa vie est derrière lui, il écrit de courts textes sur sa jeunesse et son bonheur passé, retraçant une vie simple et heureuse dans une famille aimante, jusqu'à ce que la guerre éclate et que son pays soit envahi par l'armée allemande.



« Savoir se réjouir. Se réjouir de tout. Ne pas attendre que l'avenir nous apporte quelque chose d'essentiel, de vrai. Car il est fort probable que l'essentiel se produit à l'instant présent et que l'avenir ne nous apportera rien de plus beau. »



L'épilogue m'a particulièrement émue de part son honnêteté et son authenticité. Toutes ces petites tranches de vie confèrent une saveur bien différente, lumineuse, joyeuse, mais également intense, émouvante et douce-amère.



« Près de la rivière, j'ôte mes habits et je nage pour me purifier, comme les pêcheurs dans ce fleuve indien, le Gange. Je ne pense plus à rien. Parce que la rivière, ce n'est pas un ruisseau. La rivière, c'est le puits profond de l'oubli. »



*

Le lecteur découvre l'histoire de la famille Popper et à travers elle, celle de la Tchécoslovaquie qui endurera le nazisme, la violence et la haine envers les juifs, puis le communisme avec ses espoirs et ses désillusions.

Le narrateur nous présente sa famille, et en particulier son père, un juif extravagant, doux rêveur, tenace et sa mère, pleine de bon sens, aimante, bienveillante, gentiment ironique envers son mari.



« Notre maman déclara que seul papa pouvait inventer une connerie pareille, mais papa n'en tint aucun compte. Lorsque j'y repense aujourd'hui, je dois donner raison à papa, ce fut spécial et magnifique. »



Le récit, raconté à hauteur d'enfant, gagne en maturité à mesure que l'enfant grandit et prend conscience du monde qui l'entoure, mais le style faussement naïf et enjoué de l'auteur, teinté d'humour noir, révèle subtilement l'effondrement de son monde d'enfant au moment de l'envahissement de son pays par les nazis.

Certaines anecdotes prêtent à sourire, se concentrant sur ce père charmeur, un peu fou et vendeur d'exception. Mais notre regard amusé se voile aussi de tristesse. Les non-dits et les phrases imagées donnent une autre vision, plus douloureuse lorsque l'enfant comprend que le bonheur s'en est allé, que « son statut de juif » stigmatise et expose sa famille aux humiliations, aux persécutions.

La pêche revêt alors une importance vitale.



« Les anguilles seront donc comme un poème de nos meilleurs poètes tchèques. Elles engloberont la mer, la lune, la rivière, la mort. Et le soleil qu'elles détestent. »



*

Ota Pavel porte un regard salvateur et émerveillé sur la beauté de la nature. L'eau a ce pouvoir apaisant et réconfortant.

Le récit est ponctué de magnifiques descriptions des cours d'eau et des étangs que l'auteur aime par dessus tout.



« Ce ruisseau est beau comme un collier de perles ou une tiare de diamants. Il gargouille et court sans se presser en descendant une petite colline, par des forêts de sapins et des prairies multicolores où volent des abeilles rondelettes et sautent des sauterelles dodues. Son eau est celle d'une source cristalline et aux endroits où elle est basse, on voit les galets du fond, un sable blanc pur, les rochers et les racines des arbres. Des aulnes et des saules se penchent au-dessus des trous profonds. Et là, dans ces trous d'eau, entre les pierres et les racines, il y a les truites. »



« Je l'aimais tellement, qu'avant de me mettre à pêcher je ramassais son eau dans mes mains en coquille et je l'embrassais comme on embrasse une femme. »



Même si ces histoires ont pour toile de fond la nature, la pêche et la passion pour les poissons, il n'en demeure pas moins qu'elles touchent à la vie, la survie, la mort, la guerre, le devoir de mémoire, et la compassion.



« Parfois, assis près de la fenêtre à barreaux, je pêchais ainsi en souvenir et c'en était presque douloureux. Pour cesser d'aspirer à la liberté, il me fallait renoncer à la beauté et me dire que le monde était aussi plein de saleté, de dégoût et d'eau trouble. »



*

Ce roman m'a rappelé également de merveilleux souvenirs d'enfance.

Ce que je retiens, c'est l'amour de cet enfant pour son père un peu fantasque. Ce « génial papa » à l'imagination infinie va lui transmettre sa passion pour la pêche.



« L'homme voit le ciel, il jette un regard dans la forêt, mais il ne voit jamais au coeur d'une vraie rivière. Pour voir ce qui se passe dans une vraie rivière, il lui faut une canne à pêche. »



Je n'ai aucune connaissance de la pêche en eau douce, mais c'est avec mélancolie que j'ai suivi ce jeune enfant en admiration devant son père, tout comme moi lorsque petite, je suivais mon père à la pêche. Lui aussi posait des cordeaux à la nuit tombée et venait les relever au matin.

Enfant, je me rappelle avoir été partagée entre l'excitation de la prise, l'émerveillement de la robe des poissons et la tristesse de la mort de l'animal.



« Puis je lui transperçai vite la tête avec un couteau parce que même les êtres courageux paient parfois leurs erreurs de leur vie. Je le tuai parce que j'avais vu l'oncle Prosek et papa le faire, et eux l'avaient vu chez leurs aînés. Les nageoires puissantes retombèrent et le corps argenté aux allures de merveilleux long-courrier céleste perdit tout son éclat. »



Ce roman m'a rappelé le goût des anguilles que ma mère nous préparait avec une petite persillade.

Aujourd'hui, mon père ne pêche plus, ma mère n'est plus là.

Les rivières sont vides et comme le dit si bien l'auteur, il y a « beaucoup plus de pierres que de poissons ».



*

Pour conclure, j'ai été émue par l'écriture de l'auteur, poétique, légère, tendre, lumineuse, passionnée et si poignante et tragique à la fois, dans laquelle transparaissent malgré l'inhumanité de la guerre, l'empathie, une profonde humanité, le bonheur d'une vie de famille simple et les joies innocentes de l'enfance.

Ainsi les émotions du lecteur fluctuent entre l'amusement, la tristesse, le doute, la sérénité, la mélancolie.



Un beau roman, très court, qui se laisse savourer, au gré des parties de pêche. Sombre, triste, et l'instant d'après, lumineux.

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Comment j'ai rencontré les poissons

Ota PAVEL se réfugie dans son enfance pour échapper à la grave dépression qui l’étreint, après avoir été insulté. Son frère Hugo a raconté ce qui s’était passé : « En 1964, Ota était reporter sportif. À Innsbruck, il y a eu un cafouillage et l’équipe tchèque de hockey sur glace a terminé avec la médaille de bronze. Ota a rejoint les joueurs dans les vestiaires et quand il a dit que la troisième place, ce n’était pas si mal, un des joueurs a hurlé “Toi, le Juif, va te faire gazer !” Cela a vraiment touché Ota, qui a commencé à voir Hitler, Eichmann et Kaltenbrunner. Les horreurs de son enfance sont remontées à la surface. Ota a quitté les vestiaires et il a eu sa première attaque. Parti dans les collines, il a mis le feu à une grange en sauvant tous les animaux. Les Autrichiens l’ont trouvé et l’ont transporté dans un établissement psychiatrique. »



Jusqu’à sa mort par crise cardiaque, neuf ans plus tard, le 31 mars 1973, Ota Pavel sera hospitalisé seize fois pour sa dépression.



Lors de ses hospitalisations, de manière joyeuse et humoristique, il se met à écrire, il raconte son enfance, son amour pour ses parents, notamment son père qui était, dans un premier temps, commercial. Et surtout les parties joyeuses de pêche, les étangs, les rivières, les poissons. Il y trouvera un exutoire.



Ota PAVEL évoque, en filigrane, les bouleversements dû à l’époque, la guerre, le nazisme, les camps où seront internés dans un premier temps, ses deux frères et ensuite son père, la faim, la peur, la survie.



Un très beau témoignage où la haine est écartée.



Un petit mot pour saluer la maison d’édition « do » qui s’est spécialisée dans la traduction d’œuvres étrangères et que je découvre à travers ce livre.



Merci Bookycooky pour cette belle découverte.

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Comment j'ai rencontré les poissons

Après quelques lectures un peu moribondes, enfin un livre bien !

Un livre "sine qua non", si vous voulez passer votre bac en République Tchèque - on commence à lire par obligation et on finit par pur plaisir.

Je l'ai acheté (en valeur sûre) comme cadeau de Noël, et je n'ai pas résisté à la tentation de la relecture....toujours aussi bien, même avec des lunettes, maintenant !





La version française est, en fait, un mélange de deux livres autobiographiques d'Ota Pavel - "Comment j'ai rencontré les poissons" et "La mort des beaux chevreuils"; mais, je dois l'avouer, un mélange plutôt habile.



le livre retrace l'enfance de notre narrateur, le petit Otto Popper, qui grandit avec ses deux frères, sa jolie maman, Hermina, et son excellent papa d'origine juive, Leo.

Ah, ce papa ! Un homme qui croit tellement à la vie que rien ne le décourage; ni les boulots ingrats, ni la guerre, ni l'avènement du communisme. Et tout ça, parce qu'il a sa rivière, ses étangs, ses poissons.

Et Ota Pavel a un don de décrire cette passion avec des mots qui vous donnent envie d'enfiler vos bottes et courir à la pêche... même si vous savez que parfois ça ne mords pas et l'étang peut être vide ! Les forêts autour du château de Krivoklat, les ruisseaux, les troquets en plein milieu de la forêt pour les citadins qui font leur "tramping" le dimanche. La cabane de l'oncle Prosek. Holan, le chien qui braconne. Les étangs, la vieille carpe "qui sait"....



Une de mes parties préférées reste l'histoire du peintre qui "ne veut pas faire le portrait de madame Irma" - c'est surtout par rapport au vieux film tchèque (Smrt krasnych srncu) où ledit peintre est juste excellent...

Et "Des carpes pour la Wehrmacht" ! Cette histoire d'un petit garçon réveillé au milieu de la nuit glaciale par son papa, pour aller vider toutes les carpes de l'étang (qui appartient désormais aux nazis) est tellement....irréelle, aventureuse ? Aucun souci pour les revendre ensuite; la carpe, avec cette fameuse salade de pommes de terre est un plat de Noël traditionnel tchèque depuis le moyen-âge quand la pisciculture est devenue, en quelque sorte, un sport national... Achetée, si possible, vivante, votre carpe passe deux, trois jours au fond de la baignoire (pour le plus grand bonheur des enfants) pour être tuée (oh, les souvenirs - "...je ne peux pas, va chercher mémé !") le matin de Noël.



La guerre finie Otto est témoin de l'enthousiasme de son père pour le communisme - et de sa déception. Les années passent, Otto devient un rédacteur sportif, toujours en train de s'échapper vers sa rivière et ses poissons. Jusqu'au moment où sa maladie, une psychose maniaco-dépressive, arrive.

Difficile à croire que ses deux livres sont écrits dans un asile psychiatrique.

Ota Pavel ne s'en est jamais remis. Mort en 1973, il est l'auteur d'une dizaine de livres pleins d'optimisme et d'amour pour la nature.

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Comment j'ai rencontré les poissons

« Le livre le plus antidépressif du monde. »

C’est comme cela que ce livre est qualifié dans la préface de Mariusz Szczygiel, auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la République tchèque !

Et Erri De Luca de surenchérir en disant que c’est « Une lecture physiquement contagieuse qui produit des bulles de joie sous la peau. »

Vous comprendrez que je ne voulais pas manquer ça ! De plus, aimant beaucoup l’écriture d’Erri De Luca et de plusieurs auteurs tchèques, ça tombait bien !



Pourquoi ce titre « comment j’ai rencontré les poissons » ? Parce que le père de l’auteur adorait l’eau, la pêche, les poissons. « Il nourrissait ses carpes comme il l’aurait fait pour des poules »,

Les carpes sont ses « soeurettes aux yeux dorés ».

« L’apogée de son amour des poissons fut sa décision de nous acheter un étang à carpes. »



Ce sont les souvenirs d’enfance de l’auteur, Ota Pavel, qui nous sont contés dans ce livre.

D’emblée, on comprend qu’il a une grande admiration pour son père, qui, bien que peu cultivé, réussit dans la vie avec son bagout et ses qualités de bon communicant.

En effet, son père excelle dans la vente d’aspirateurs et de réfrigérateurs de la grande marque suédoise Electrolux ! Papa était « né pour vendre, comme il y a mille ans un guerrier était né pour tuer ». C’est un vrai champion de la vente !

Mais il est attiré par les jolies femmes, et cela lui jouera parfois de mauvais tours, en particulier quand il s’agit de la femme de son propre directeur !



Néanmoins, très débrouillard, il arrivera à plusieurs reprises à se sortir de galères, et à rebondir, car il ne manque ni de volonté, ni de courage ! Il vendra même des attrape-mouches, pensant qu’il deviendra riche comme Crésus ! Il faut dire qu’il met souvent la charrue avant les bœufs, et réagit comme un gamin !



C’est un braconnier, Prosek, qui va l’initier à la pêche ! Très doué, il a le don de savoir attraper toutes sortes de poissons. « Prosek, le rustre était du goût de papa, qui avait passé sa vie à dire que les gens raffinés ne valaient pas un pet. »

Ota Pavel sait décrire et se moquer des personnes riches et superficielles.

C’est ce même Prosek qui confectionnera de façon rudimentaire, de ses mains, la 1re canne à pêche du jeune Ota avec laquelle il attrapera son 1er poisson !

Et ce Prosek appelle le jeune Ota, du nom de « cucul » ! Autant vous dire que ces souvenirs d’enfance sont délicieusement contés de façon bien truculente parfois.

Et donc, le père et le fils auront en commun le virus de la pêche !



On nage dans le bonheur en s’immergeant avec le narrateur dans cette nature paisible où il fait bon vivre et respirer les bonnes odeurs du terroir, « cette vieille ferme où ça sentait bon le pain cuit au four et où on barattait le beurre à la maison ».

On y déguste des poissons confis au vinaigre et aux oignons, de la viande de chevreuil marinée, de la soupe de tripes… j’en passe et des meilleurs ! Bref, on s’en lèche les babines !

Ce que la cuisine tchèque donne envie !



Certaines parties sont plus graves, et ramènent à la triste réalité historique.

L’auteur se souvient de la 2e guerre mondiale… Un garde-champêtre annonce le Protectorat de Bohème et Moravie. Le danger et la surveillance nazies s’installent… peurs, perquisitions, délations du voisinage… Etant juif, le père d’Ota n’a plus le droit de quitter sa résidence sans autorisation !

Il se trouve alors privé de la pêche, de cette passion addictive qui le démange !

Il est humilié, mais ne baisse pas les bras. Il est courageux et rusé… Il faut bien quand même qu’il nourrisse sa famille ! Il trouvera de l’aide de la part de personnes inattendues…



Ce livre est comme les tiroirs d’une commode que l’on ouvre tour à tour, et où l’on découvre petit à petit les différents souvenirs d’enfance de l’auteur … Chaque partie est écrite comme une fable avec une morale et une conclusion parfois inattendue…

Selon les différents récits, le ton est nostalgique et poétique, mais aussi amusant et enjoué.



Vous en sortirez enrichi de pleins de connaissances.

Vous apprendrez qui sont les « Patzoufracks », et ce que signifie « Pumprdentlich », et la liste est loin d’être exhaustive !



Tout cela est écrit avec les mots et la naïveté de l’enfant qui porte un regard ébloui et admiratif sur les adultes qui l’entourent.

C’est un bel hommage rendu aux êtres aimés, et aux liens familiaux.



Bon, excusez-moi, j’arrête là, je m’en vais marcher sur les pas d’Ota Pavel en Tchéquie aux alentours de Krivoklat !

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Comment j'ai rencontré les poissons

Né en 1930, Ota Pavel a surtout travaillé et écrit comme journaliste sportif. Après un épisode psychiatrique qui se déclenche en 1964 en Autriche, il sera diagnostiqué comme bipolaire et ferra un certain nombre de séjours dans des hôpitaux psychiatriques. Cela l’incitera à écrire, en particulier pour raconter son histoire et celle de sa famille, comme dans ce livre Comment j’ai rencontré les poissons .Composé de 20-30 chapitres, la plupart assez courts, il part de l’enfance de l’auteur, entre les deux guerres, et va jusqu’à sa maladie, et le besoin de raconter qu’elle a éveillée en lui. Ces différents chapitres ne sont pas forcément reliés les uns aux autres, même si dans l’ensemble, les textes suivent un ordre chronologiques, mais il s’agit plutôt de capter un instant, une anecdote, un personnage, une ambiance, avec souvent une chute qui fait que ces textes pourraient presque être lus séparément.



Le père de l’auteur occupe une grande place dans les différents récits. Représentant de commerce de génie, capable de vendre presque n’importe quoi à n’importe qui, dépensant son argent encore plus vite qu’il ne le gagne, il a ses caprices, ses obsessions. Et les poissons en font partie. C’est ainsi qu’il ferra découvrir la pêche à ses trois fils dès leur plus jeune âge. L’amour de la pêche, de la nature, occupera une grande place dans la vie d’Ota Pavel. Mais les magnifiques souvenirs de l’enfance de l’auteur prendront fin avec la deuxième guerre mondiale. L’arrivée des Allemands, la déportations du père juif et des deux frères aînés, les manques et privations, la confiscation des biens, seront des moments douloureux. L’arrivée du communisme avec ses absurdités donnera l’occasion à des scènes cocasses, même si en arrière fond on devine des aspects plus noirs.



Mais l’auteur a choisi le parti pris de l’humour malgré tout, dans toute noirceur, il y a toujours moyen de rire, même si c’est parfois un rire un peu désespéré. Cela donne un ton unique au livre, entre scènes drôlatiques et une sorte de poésie aussi, liée à l’enfance, à la nature, à une puissante envie de vivre et d’être heureux.



Un très beau livre, à découvrir absolument.
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Comment j'ai rencontré les poissons

Très belle découverte que la lecture de Comment j'ai rencontré Les poissons d'Ota Pavel.

Un passage à la Fête du livre de Bron (69) et un arrêt

devant les livres de la Librairie Lucioles de Vienne me met en présence du livre d'Ota Pavel.

Le libraire me parle de ce livre et de son pouvoir positif et joyeux.

Allons-y !

Et bien merci Monsieur le libraire pour votre conseil.

Quel plaisir que la lecture de cette autobiographie.

Je ne dirais pas comme Erri de Luca et Mariusz Szczygiel que ce livre est le plus antidépressif du monde ou encore qu'il produit des bulles de joie sous la peau.

Ota Pavel est un journaliste et écrivian tchèque mort en 1973.

Il a commencé à écrire n 1964 , suite à l'apparition de ses troubles bi-polaires. L'écriture comme thérapie

Et c'est vrai que la joie de vivre , le bonheur simple d'Ota Pavel auprès des rivières et des poissons contraste fortement avec ses troubles bi-polaires .

De même que les événements historiques qui sous-tendent le récit d'Ota Pavel ( La Tchécoslovaquie entre 1936 et 1960 ) apportent un climat pas toujours propice à la joie et au bonheur.

Avoir 9 ans , dans une famille juive en 1940 ne prédispose pas naturellement au bonheur surtout sis le Papa et les frères sont déportés.

Avoir 15 ans à la fin de la guerre et voir s'installer le communisme dans son pays n'engendre pas obligatoirement la joie de vivre.

Hors le contexte historique , j'ai trouvé beaucoup de similitudes entre le livre d'Ota Pavel et les les livres de Marcel Pagnol : Souvenirs d'Enfance - La Gloire de mon père ou encore Le Château de ma mère.

Dans les deux cas une nature omniprésente au contact des animaux. Pour Pägnol la Provence , Le Garlaban et la chasse aux bartavelles. Pour Ota Pavel les étangs de Bustehrad prés de Prague ,la pêche , les carpes argentées et les anguilles d'or.

Dans les deux cas la figure du père , la relation père fils.

Dans les deux cas de l'empathie , de la tendresse , de l'humour et le bonheur simple de la vie.

La différence entre Pavel et Pagnol : le contexte politique .Autant avec Pagnol on peut reprendre les termes de Eric de Lucca et Mariusz Szczygiel - bulles de joie, anti-dépressif, autant il est difficile avec Pavel de faire abstraction du contexte . Le texte , le style sont anti dépressif et peuvent produire des bulles sous la peau; mais ce style léger cache des réalités plus dures, que ce soit le contexte historique ou la maladie mentale de Ota Pavel.

Ce mélange de légèreté et de gravité donne une grande profondeur à cette autobiographie et je reprendrais les dernières phrases d'Ota Pavel dans son épilogue :

"Parfois, assis près de la fenêtre à barreaux, je pêchais ainsi en souvenir et c'en était presque douloureux. Pour cesser d'aspirer à la liberté, il me fallait renoncer à la beauté et me dire que le monde était aussi plein de saleté, de dégoût et d'eau trouble."

"Tandis que je mourrais là-bas à petit feu, je voyais surtout cette rivière qui comptait plus que tout dans ma vie et que je chérissais. je l'aimais tellement, qu'avant de de mettre à pêcher je ramassais son eau dans mes mains en coquille et je l'embrassais comme on embrasse une femme."



Ota Pavel est mort en 1973 à 43ans .








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Comment j'ai rencontré les poissons

La dédicace donne le ton de ce petit roman, en forme de souvenirs d’enfance : « A maman qui avait papa pour mari ». L’auteur, Ota Pavel, avec beaucoup de tendresse et de fantaisie, raconte l’histoire de sa famille et surtout celle de la folle passion que son père et lui ont nourri pour la pêche en rivière. Carpes, truites, anguilles, autant de poissons qui, au fil des années, sont venus occuper leurs pensées, nourrir leurs rêves, déterminer leurs actes et panser leurs blessures.

Leo, le père, est un séducteur né, fantasque, beau parleur et excellent commercial : meilleur vendeur du monde (!) de frigidaire et d’aspirateur, il permet à sa famille de vivre très bien dans une Tchécoslovaquie d’avant-guerre. Toujours à l’affût du meilleur coin de pêche, il entraine sa femme – admirable de patience et d’amour – et ses trois fils dans de folles équipées, dont ils reviennent soit bredouilles, soit en héros 😊.

A la description d’une nature généreuse, verdoyante, au murmure apaisant des ruisseaux, rivières et autres étangs, se superpose la tragédie de l’Histoire, la famille Popper est juive et seuls Herma, la mère et Ota échapperont à Auschwitz. Même si père et fils reviennent, et Ota reste discret sur les horreurs endurées, la vie ne reprend pas son cours aisément. Leo pense que le communisme sonne la fin de l’antisémitisme et se donne corps et âme au parti dans les années 50. Nouvelle déception, on partage la tristesse et le désespoir de Leo.

Une chronique originale, touchante, dont les dernières pages et la postface mettent à jour les souffrances endurées par la famille mais que le talent de l’auteur, et son plaisir à partager avec nous des moments de bonheur, de grâce – qui eut pensé que pêcher des anguilles pouvait être aussi magique ?? – parviennent à atténuer. Très joli moment de lecture.



Challenge ABC – 2020/2021

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Comment j'ai rencontré les poissons

C’est d’abord la couverture qui a attiré mon œil : inhabituelle et intrigante. Comment j’ai rencontré les poissons est une compilation de chroniques douces amères sur l’enfance, puis l’adolescence et enfin le passage à l’âge adulte d’un jeune garçon ayant dû faire face à la guerre. Ces mémoires ont quelque chose d’intemporel. Même sans avoir de souvenirs liés à la pêche, ni une enfance marquée par la guerre, Ota Pavel a fait résonner en moi des sensations enfouies. Avec une dernière chronique vraiment marquante.

Ce livre mérite vraiment le détour et, plus qu’un classique de la littérature tchèque, mériterait de devenir un classique de la littérature tout court.

Une bien belle découverte.

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Comment j'ai rencontré les poissons

Sur près d'un peu plus de 85 livres lus cette année, Ôta Pavel avec son roman : Comment j'ai rencontré les poissons sera mon coup de cœur ainsi que Le fantôme de TRIESTE d'Enzo Bettiza.

Un enfant, au seuil de l'adolescence nous raconte dans la Tchécoslovaquie d'avant guerre ses souvenirs dédiés à l'amour et l'admiration qu'il portait à son père lié très intimement au monde des poissons.

Même pour une non pêcheuse que je suis, cet univers chatoyant et sa description des poissons est fabuleuse.

"C'était une perche, de la grosseur d'une casquette rouge à carreaux... Elle déployait ses nageoires rouges, comme les drapeaux dans une bataille, elle avait un dos de taureau. À la place des yeux, des piécettes d'or vif. Des lances hérissées se dressaient sur son dos. Ce n'était pas un poisson, c'était un dragon, un chevalier en cuirasse avec un casque au plumet rouge"

Ôta Pavel qui était juif, nous raconte aussi la tragédie des hommes de sa famille qui seront internés dans des camps de concentration. Lui y échappera ainsi que sa mère non juive.

Plus tard, son père reviendra et adhéra au communisme vu comme un salut jusqu'au jour ou:

" Papa croyait aussi que les Bons( les communistes) avaient enfin pris le pouvoir, ceux qui n'allaient pas répartir les gens en Juifs et non juifs."

Scène poignante où il découvre son père en pleurs dans la cuisine, lisant le journal du Parti mentionnant l'origine juive des noms.

À de multiples égards, ce livre est émouvant, encore plus quand on sait que Pavel l'écrira alors qu'il sera interné, reconnu maniaco- dépressif.

Je voudrais finir sur les propos lumineux d'Ota Pavel qui font tellement sens aujourd'hui à l'heure où le plaisir du quotidien se fond dans cette épidémie du Coronavirus.

"Savoir se réjouir,. Se réjouir de tout. Ne pas attendre que l'avenir nous apporte quelque chose d'essentiel, de vrai.

Car il est fort probable que l'essentiel se produit à l'instant et que l'avenir ne nous apportera rien de plus beau"



Chapeau bas Monsieur Pavel pour votre plume
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Comment j'ai rencontré les poissons

C'est un roman tendre et drôle.



À travers le récit d'Ota Pavel, c'est une radiographie de la Republique Tchèque sur une trentaine d'années qui est effectuée. L'auteur nous raconte son enfance, dans une famille qui s'en sortait grâce aux revenus du père, une famille aimante. Une enfance à dormir dans l'herbe, à pêcher et à découvrir la nature. Puis son pays est envahi par les Allemands et là, il assiste à la déchéance de son père, juif. Il fait face à un père impuissant. Il voit sa mère épuisée tentant de survivre et il est sorti de l'enfance brusquement pour aider sa famille à surmonter cette épreuve.

Enfin, le communisme gagne son pays, avec lui tous les espoirs et les plans du père renaissent. Mais c'est de nouveau le désenchantement...



Il est très touchant de voir ce père farfelu et battant, devenir impuissant et désenchanté face aux coups que lui inflige l'Histoire. Toute sa vie il ne sera que juif, il est réduit à cette condition par les autres. C'est un véritable déchirement pour Ota de voir son père perdre espoir.



L'auteur nous fait découvrir sa ville. Les descriptions de la nature sont magnifiques, on a l'impression de sentir la brise sur notre nuque, d'avoir nos doigts de pieds chatouillés par les brins d'herbe...



Ota Pavel a souffert d'une dizaine de crises maniaco-dépressives, il a été interné plusieurs fois en institut psychiatrique. Il est très touchant de le voir narrer son histoire, son enfance. Ce roman est une ode à ses parents, une véritable déclaration d'amour, il est rempli de tendresse. Amour pour sa mère qui a toujours été présente et n'a jamais abandonné. La figure du père est très présente, on sent toute l'admiration de l'auteur pour son père. Un père farfelu qui une fois qu'il avait une idée en tête, n'abandonnait jamais, sa volonté de ne devoir rien à personne, son amour et respect pour la Nature.



Comment j'ai rencontré les poissons aurait pu s'appeler Comment j'ai rencontré mon père. C'est à travers cette nature et cet amour pour les poissons que Ota découvre et admire son père.



Un très beau roman !
Lien : https://labullederealita.wor..
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Comment j'ai rencontré les poissons

Merci à Stéphanie, libraire, qui m'a fait découvrir ce livre anti-dépresseur; écrit en 1971, il est redécouvert grâce aux prix Mémorables et celui des libraires en partenariat avec Télérama. Sorti en Folio en février 2020.

Cela se passe en Tchécoslovaquie, avant, pendant et après la seconde guerre mondiale. L'histoire est largement autobiographique: un homme revisite son enfance et nous livre une chronique familiale, drôle et tendre. Les courts récits ne sont pas chronologiques, ils arrivent peu à peu à la mémoire du narrateur, qui écrit au "je".

Un père juif et fantasque, toujours optimiste malgré ses nombreux échecs, une mère catholique, aimante, lucide mais patiente et deux frères plus âgés.

Le livre parle surtout du père, assez extravagant et de sa passion pour la pêche qu'il a transmise à son fils: les poissons sont au centre du livre et les différentes espèces sont décrites avec art; perches, truites, silures etc. et surtout carpes et anguilles. Longtemps braconniers, ils fuient garde-pêche et garde-chasse; avec le temps leurs pratiques deviendront plus licites.

L'Histoire est présente avec l'occupation allemande, les camps puis le communisme mais ce n'est pas pesant, car l'humour, la tendresse et la beauté de la nature adoucissent les moments tragiques et les désillusions.

L'auteur Ota Pavel est mort à 43 ans. Il souffrait d'une grave dépression: c'est à l'hôpital que son psychiatre lui offrit un cahier et un stylo...grâce à l'écriture, il redevenait un petit garçon auprès de son père.

Seul un grand dépressif pouvait écrire le livre le plus antidépressif du monde, commente un auteur.

Un coup de coeur.
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