Citations de Pascale Leroy (39)
Toi, au nom de la stabilité, tu refuses de bouger. Mais le changement, c’est maintenant.
Hier soir, Papy Ping et Blanche avaient cru malin de cuisiner un bon repas pour nous changer les idées, mais la plupart d’entre nous n’arrivions pas à avaler. Entre la galette et le cuissot, le Ténébreux s’est soudain déplié, renversant au passage un godet plein de bouillon brûlant qui est allé se répandre aux pieds de Brandon. Debout au milieu de nous tous, comme encombré de son large corps et gêné de se faire remarquer, il est resté quelques instants à se dandiner avant de prendre une grande inspiration.
- On ne peut plus rester sans réagir, sinon les Zigues vont se croire tout permis. Même si ça ne nous plait pas, nous devons nous manifester. Montrer qui nous sommes, Marquer notre territoire.
- Qu’est-ce que ça veut dire ? Tu veux qu’on plante des pieux dans le sol, et puis après ? On se retrouvera comme des mammouths ou des bisons, pris au piège, enfermés entre nos quatre pieux.
C’est tout de même fou cette propension que nous avons à changer de sujet dès que ça nous dérange. J’ai volé au secours du Ténébreux insistant sur l’urgence de nous remuer.
NUIT DE REVE.
Ai encore rêvé du grand et beau Zigue. J'étais près de la cascade, seule. C'était la belle saison et je me séchais nue sur les pierres, frissonnant parfois sous les caresses du vent un peu frais. Je n'entendais rien à part le bruit de l'eau et je savourais ce trop rare moment e solitude. il m'a semblé entendre des pas, mais je n'ai pas ouvert les yeux, et pas davantage quand j'ai senti un corps s'allonger contre le mien, une peau nue frôler ma peau nue. La peau exhalait une odeur de sous-bois, de fumée et de sueur - une odeur de mâle comme je les aime.
Tu détestes les photos, tu prétends qu’elles volent un peu d’âme à ceux qui se laissent prendre. Si tu aperçois un objectif, tu te caches ou tu te fâches, menaçant de quitter la pièce séance tenante. Tu es tellement convaincante que certains renoncent - d’autres rusent, « Non non tu n’es pas dans le cadre », mais ils réussissent à voler une image de toi. Ton attitude ne relève ni du caprice ni de la coquetterie, ton regard effaré montrant qu’il s’agit de tout autre chose : une phobie de toi-même.
La vie nous a conduits jusqu'ici vingt-cinq ans plus tôt. Ignorants de ce qui nous attendait, nous lui avons emboîté le pas à contrecœur mais non sans un certain allant, sûrs ne notre capacité de résistance. Et voilà que sans ménagement, la vie nous reprend par la main pour nous ramener au même endroit et cette fois, je n'ai plus envie de la laisser faire, je traîne les pieds, rechigne, me raidis et me cabre, je sais trop ce qui nous attend, tout mon être refuse d'y retourner, mais la vie se moque de ma tentative de rébellion.
Incapable de me concentrer, ça va à toute vitesse dans ma tête. Quelle histoire, c'est à peine croyable! Si nous racontions ça à nos voisins, ils nous prendraient pour des fous. Ces Zigues ne m'ont pas fait un si mauvais effet. ils sont:
-moins effrayants que ce que nous imaginions;
-moins agressifs aussi;
-moins laids que dans mon souvenir (et ce Jorg a même beaucoup de charme).
Mais pas question de s'emballer parce qu'ils sont aussi:
-peu aimables (enfin, pas tous);
-peu chaleureux;
-peux curieux;
-très (séduisants) différents physiquement;
-totalement incompréhensibles.
Aurions-nous dû:
-les inviter à nous rendre visite (sans les Ziguettes) ?
-les inciter à nous suivre pour leur montrer notre grotte ?
-nous baigner avec eux pour créer des liens ?
-les escorter jusqu'à chez eux ?
Aurais-je dû :
-(lécher l'oreille de Jorg);
-(caresser son torse);
-me présenter à ces Zigues ?
Normal, ce n’est pas un programme ! Moi, je veux être une Néandertalienne qui vit avec son temps et qui s’adapte aux changements. Pour une fois qu’il se passe quelque chose, on ne va pas partir sans voir d’un peu plus près ce que ça peut donner.
Tout le monde se replie sur ses petites habitudes, ses petits savoir-faire, et le grand passé de nos ancêtres. C’est ce qu’on appelle avoir du courage et de l’ambition.
Le problème est que l’attaque et le combat ne font pas partie de nos traditions, et malgré ta vaillance, tu l’as prouvé, tu ne sais pas y faire. On ne va quand même pas se renier face à eux, ce serait la meilleure façon de perdre la face et de disparaître. Quelle humiliation.
Les morts n’aiment pas qu’on les délaisse. Il faut s’occuper d’eux, sans quoi ils peuvent revenir et nous pourrir la vie pour manifester leur colère.
La nature est à tout le monde, nous la partageons bien avec nos voisins.
Réveille-toi, la vie n’est pas une vaste steppe tranquille peuplée de sensibles bébêtes qui s’aiment les unes les autres.
L’attente est une forme d’action et non des moindres. Elle fait notre force et notre sagesse.
La peur est mauvaise conseillère et toute décision précipitée pourrait être lourde de conséquences.
La situation est préoccupante mais pas désespérée. Notre route est droite mais la pente est forte – et inversement. Nous devons être unis et joindre nos efforts pour résister.
On ne se rend pas assez compte de la chance qu’on a. Autrefois, certains racontaient que chez de lointains ancêtres ce rituel était très différent. Le garçon devait montrer sa force et son habileté à la chasse, son endurance à la marche, ce qu’ils appelaient sa virilité. Ça avait l’air dur, presque violent, quand chez nous c’est joyeux, festif. Même si la copulation et le plaisir réclament aussi de l’endurance et de l’habileté, mais d’un autre genre.
Holà, du calme les impatients, tout vient à point à qui sait attendre !
Le changement pour le changement est une idiotie ! Et on ne change pas une humanité qui gagne.
Il faut toujours que tout le monde s’en mêle. Je suis pour que chacun s’exprime, pour la démocratie et l’égalité en somme, n’empêche que tout le monde n’est pas obligé de donner son avis tout le temps, d’autant que tout le monde n’a pas un avis passionnant sur tout.
Tout ce qui compte, c’est la chaleur humaine... Jamais couverture, aussi épaisse soit-elle, ne réchauffera mieux qu’un corps, peu importe qu’il soit d’homme ou de femme.