Triste, douloureux mais réconfortant. J’ai souffert en lisant ce roman parce que j’ai moi aussi fait « l’expérience » du cancer et de son monde. C’est mon père, décédé au mois d’avril, qui a été touché. C’est lui que j’ai vu souffrir, partir « doucement » (la mort est lente quand il y a douleurs). Il était jeune, 55 ans. Le cancer l’a emporté en dix mois seulement. En lisant Pascale Leroy, je me suis donc retrouvée dans ce passé pas si lointain, très proche même. Je me suis rappelée, sans grande difficulté. Les attentes interminables en hôpital de jour, les discussions avec les internes – jamais les mêmes – incapables de répondre aux questions posées, toujours la mort dans la bouche, répétant inlassablement « votre père va mourir », « vous allez mourir », les recherches sur internet pour comprendre les termes médicaux, la maladie, ses signes, son évolution… Je nous ai vu, ma famille, mon père et moi; mon père que j’attends et que je pleure chaque jour; mon père que j’aime plus que tout et que j’aurais voulu sauver en lui donnant ma propre vie. Mais c’est impossible, n’est-ce pas. Impossible de faire quoi que ce soit quand on vous dit « c’est fini, il n’y a plus rien à faire, votre père va mourir ». C’est le réveil brutal, la fin du monde. C’est l’invraisemblable, l’absurdité. C’est une impossibilité. « Mon père ne peut pas mourir ! ». Bien sûre que si, dans la « lutte » contre le cancer, nous avons perdu. Nous n’avons pas réussi à le sauver.
S’il m’a profondément attristée, le livre de Pascale Leroy m’a réconfortée parce que je me suis retrouvée, parce que je me suis sentie beaucoup moins seule. Elle a perdu sa sœur une vingtaine d’année après la mort de sa mère, victime du même cancer (son père est lui aussi mort du cancer), elle a vécu ce que moi aussi j’ai connu. Je me suis posée les mêmes questions: qu’est-ce? pourquoi? comment? Aurions-nous pu faire quelque chose pour éviter la maladie? Qu’est-ce que mon père a fait ou pas fait pour attraper cette saloperie? Comment y remédier? Comment l’aider, le soulager? Lui donner de l’espoir ou l’aider à accepter? En parler ou se taire? Pleurer ou sourire? Quand allait-il mourir? Pourquoi les médecins, les gens, le monde ne pleurent-ils pas avec nous? Pourquoi le cancer? Pourquoi lui? Pourquoi ne guérit-il pas malgré les soins et les conseils? Pourquoi? Est-il faible? Se laisse-t-il aller? Pourquoi ne lutte-t-il pas? Pourquoi? Pourquoi? Pourquoi? Des questions et jamais de réponse. Pascale Leroy a tant raison: on essaye de rationaliser, on veut trouver un coupable, un responsable pour se faire justice, on veut comprendre ce qui est, pour l’instant en tout cas, incompréhensible. Le cancer arrive, souvent sans crier gare, et s’impose, parfois doucement, parfois rapidement. Il ronge le malade et sa famille, il annonce la mort et ce qui va avec: le désespoir. On a beau dire: l’amour, le moral, le rire ne suffisent pas. Le cancer, quand il est agressif, tue. Point. Merci à Pascale Leroy pour ce livre qui est, pour moi, comme une thérapie en cette triste période de deuil.
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