La quête de joie
à A. L. T. P.
Extrait 2
Il dit : « Il faut partir pour conquérir la Joie.
[…]
On les rencontre encor, surgissant du ciel sombre,
Tels des rôdeurs, des fous vagants des grands chemins,
Solitaires, ayant abandonné leurs chiens
De meute, haletants jusqu’à la mort dans l’ombre ;
Ils ont erré dans les déserts de la souffrance,
Dans les âmes les plus hautes et les plus claires,
Dans les plaines encor vierges de l’enfance,
Parmi la pauvreté de l’esprit, volontaire,
Où les bouffées de Dieu montent comme des vagues,
Où les amours de soi rôdent comme des loups…
Dans le choc lumineux et brutal des dégoûts,
Ils ont bien pris cet ange qui partout divague,
« L’Angelus Communis », si triste et si petit
Qu’il se laisse attraper sans déployer les ailes ;
Mais ils n’ont pas couru ce grand ange rebelle
Qui déchaîne à son passage l’âme et l’esprit,
Et bouleverse le corps comme une tempête…
La quête de joie
à A. L. T. P.
Extrait 1
Il dit : « Il faut partir pour conquérir la Joie.
[…]
Alors, ils ont suivi le fil des grandes routes
Pour s’enfoncer profondément dans les déserts,
Et bousculés de-ci, de-là, sans qu’ils sans doutent
Par le vent animal et fou de haute mer ;
Ils ont sonné les débuchés dans la lumière,
D’un bout du monde à l’autre un lancé triomphal,
Quand leurs meutes levaient un ange solitaire
Loin dans l’âme…Jamais le hallali final
Et la mort…
Ils se croisaient en se disant « Liesse ! »
Mais leurs regards déçus démentaient ce bonheur ;
C’était leur mot de passe : il leur tordait le cœur !
Quête de joie ! Quête de joie ! dans leur détresse,
Ils rêvaient de trouver ces philtres enchantés
Où l’on descend aux paradis par lâcheté…
Nous t'annonçons dans les douleurs du monde,
nous parlons avant d'être nés.
Dans l'ombre qui nous couve et où nous t'attendons,
nous chantons déjà ta lumière!
Combien de siècles avant qu'elle éblouisse,
combien de mémoires de Noël?
Devant la mort nous ne savons que toi,
nous prenons souffle à l'espérance.
Là où déjà beaucoup des tiens sont à demeure:
qu'ils accueillent notre ami et l'entourent.
Oublie qu'il t'oubliait, Seigneur,
rappelle-toi qu'il t'appelait.
Reprends son souffle et tiens-le pour ami:
tes amis te le demandent.
Toi qui fus la nuée lumineuse,
montre-toi sous ce signe à ce temps-ci.
Tu es le ciel qui a pris à la terre,
le vent qui nous a menés jusqu'ici.
Mène-nous jusqu'au temps où la nuée fait grâce
avant de tout renouveler,
Où elle fait eau, où elle fait source,
où les puits desséchés sont abreuvés.
Car c'est bientôt la nuit de Pâques,
et tout se prépare à se lever.
Qu'ils prennent patience, ceux qui te cherchent!
est-ce que je ne te cherche pas encore?
Qu'ils veillent , ceux qui assurent ne pas te reconnaître!
est-ce que je te connais?
Oui, je me suis peut-être enfoui trop en moi-même,
mais eux et toi, je vous ai retrouvés là.
Alors que ce testament les ramène à leur grâce:
ce qui m'est vital, c'est toi.
Voici que j'ai rêvé d'écrire la grande prière
de l'Homme de ce temps...
La grandeur me harcèle sans cesse:
jamais je n'aurais droit à cette voix.
J'en prends d'autres bien sûr dans le chœur de mon âme,
celles qui me viennent par le sang ou l'amitié,
Des cris de hasard et des appels à une même grâce,
même des échos avec qui j'ai peine à communier.
Je m'étais retranché dans une île,
mes sens et mon esprit tendus vers un même fruit.
Doit-on nommer orgueil cette ambition de faire un monde, volupté spirituelle, son façonnement ?