- C'est ici ! Tu verras, Aliène. Ces sports d'hiver vont nous faire le plus grand bien.
- Pfff ! « Sport » et « hiver ». Les deux choses que je déteste le plus !
Les oiseaux essayent de l'apercevoir.
Mais la forêt est grande,
et elle cache bien ses habitants.
Avec difficulté, elle s'assoit sur le rebord de la fenêtre.(...)
Le sol, un mètre plus bas, lui paraît aussi éloigné que si elle était en train de scruter un profond ravin.
Violette voit défiler ses souvenirs d'enfant, des souvenirs plus vivants que tous ceux de l'âge adulte. D'une voix émue dont elle s'efforce d'ignorer le tremblotement, elle prononce les mots familiers :
- J'étais une héroïne. Et j'allais retrouver le Jardin Sauvage !
Elle se rappela les souvenirs de ses exploits passés, quand elle avait tenu tête aux Trolls de pierre, aux arbres de la Horde Verte, aux loups du clan de Sendak, et à son jury de professeurs à l’université de Berlin.
Et si c'était cela sa vraie mission? Non pas d'arrêter la Tempête, mais de donner à tous la force d'y survivre?
Elle savait que le Jardin Sauvage existait depuis bien longtemps ; au cours des siècles, il s’était développé, avait trouvé son équilibre… D’autres gens qu’elle y avaient déjà vécu des aventures, l’avaient parcouru, exploré et modifié. A chaque changement de visiteur, son histoire évoluait, comme un spectacle qui évolue avec l’arrivée de nouveaux spectateurs. Non, pas des spectateurs : des comédiens. Elle était la Protectrice, et son rôle, c’était de faire que le spectacle ne tourne pas à la catastrophe.
— Pour le moment, c’est plutôt mal parti, soupira t-elle.
Le jardin était figé. Oublié depuis bien longtemps. Dans les arbres, aucun chant d’oiseau. Autour des fleurs, nulle abeille ne bourdonnait. Pas un papillon, pas une coccinelle ni même un moucheron. Quelque tulipes, au garde à vous, semblaient attendre une inspection qui ne viendrait jamais. Par endroits, une épaisse couche de poussière s’était accumulée sur les plantes, les arbres et les rochers. Même l’eau des mares et des ruisseaux paraissait immobile ! Et dans les ombres, là où le soleil ne posait jamais ses rayons, la neige s’étendait, lisse et monotone.
- Dites, les saucisses... vous les faites avec quoi, au juste ?
[...]
- On n'les fait pas, enfin : on les pêche ! On est les Jardineux du Lac Chipolata. Tout l'monde sait ça.
- C'est comment, d'être un loup ?