j’aimerais lui expliquer
mais mes mots ne sont jamais suffisants
et j’ai constamment peur
de tout avoir inventé
comment pourrait-elle me comprendre
si moi-même je ne crois pas
quand je tente de raconter
les crises d’horreur que je subis
j’ai parfois la sensation
de trahir
celle que j’ai été
en écoutant
celle que je suis
aujourd’hui
comme une dette infinie
envers la petite fille
que j’étais
je me suis toujours sentie de trop même lorsque j’étais seule
ressentir tout si fort,
si puissamment,
c’est trop,
ça me déchire tellement.
tout m’écorche,
tout m’égorge,
et je n’arrive plus à parler,
je n’arrive même plus à penser clairement.
je ne sais plus où donner de la tête,
je me sens dépassée,
je suis à bout,
j’en peux plus
[…] c’est à peine si certains jours
j’ai le courage de me lever
il m’arrive de me sentir si proche, et si
loin
à la fois,
des gens qui m’entourent :
semblable jusqu’à un certain point,
mais parfois si différente,
comme la Lune au milieu des étoiles
Tes larmes
Tu les caches comme si elles étaient le pire des crimes
Alors qu’elles sont la plus belle preuve de ton humanité
mes vêtements
ne justifieront
jamais
le regard des autres
sur mon corps
— s’il ne s’agit que d’un regard
sexualité
identité
intimité
— pourquoi rendre tabou la normalité ?
qui êtes-vous
pour me dire
qui je dois être ?
je ne sais pas si c’est de ton absence,
ou bien à l’idée de ne jamais plus connaître ta
présence, que je souffre le plus
en partant, le bonheur m’a dit
« au revoir ».
j’aurais tant aimé qu’il me dise
« tiens bon »
ils me voient tous joviale,
le sourire aux lèvres,
alors que j’ai parfois tellement mal,
que je pourrais en mourir
elle était si belle
elle souriait tant
et elle riait fort
qui aurait deviné qu’en elle
se cachait ce mal-être ?
—trompeuse apparence
ses yeux étaient ce qu’il y avait de plus dévasté en elle
frapper par la foudre, on aurait dit qu’ils
n’habitaient plus la vie
vestiges d’un passé qui l’avait entièrement
détruite
tu étais un tsunami
et tu m’as dévastée
je chancelle souvent
mon corps fatigue
ne tient plus debout
et moi
je n’ai plus la force
de le porter
alors que fait-on dans ce cas
lorsque tout en nous lâche ?
j’emprunte au chaos
juste ce qu’il me faut
de force
d’endurance
et de résilience
pour réussir à surmonter
mes déséquilibres constants
les monstres chez moi
ils n’étaient pas seulement
sous mon lit
ils étaient aussi
dans mon esprit
j’aimerais tant
que tu cesses
d’être
ce sujet sensible
qui me fait monter
les larmes
aux yeux
si facilement