AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Peter Cameron (52)


J'aimerais qu'on me sorte de moi-même. Et qu'on me range quelque part dans un tiroir. Un tiroir qu'on ouvre dans un rêve où on fait précipitamment ses bagages à la fin du monde.
Ah, ce rêve-là ! s'exclama la femme. Ce tiroir-là ! Eh bien, je ne peux que vous sortir de vous-même. À vous de voir où vous allez ensuite.
Pour le moment, je vais aller me coucher, dit l'homme. (p. 45)
Commenter  J’apprécie          260
Il scruta son reflet dans le miroir mural derrière les régiments de bouteilles alignées sur les rayons, au-delà du comptoir, qui le fixait en retour avec une intensité qu'il jugea plus forte que la sienne, si bien que, pendant une seconde, il perdit sa propre perception physique et se demanda de quel côté du miroir il se trouvait réellement. Pour s'efforcer de réintégrer son enveloppe corporelle, il tapota du bout des doigts le cuivre du comptoir et le contact du métal frais sous ses phalanges remit subitement le monde dans le bon sens, mais le barman, interprétant ce geste comme un appel, déploya son corps affalé contre le mur, s'approcha et posa une serviette en papier devant l'homme à l'endroit précis que ses doigts avaient touché, comme s'il mettait un pansement sur une plaie. (p.33)
Commenter  J’apprécie          212
Je veux dire ses mots, ses pensées, ses idées. Si on ne les exprime pas, à quoi servent-ils ? Ils meurent avec nous. Alors que quand on exprime quelque chose, c'est mis au monde. Qui sait ce qu'il advient des sons? On pense qu'ils disparaissent, mais il est tout aussi vraisemblable qu'ils continuent à vibrer et naviguent dans l'univers, et peut-être quelqu'un ou quelque chose perecevra-t-il cette vibration dans cent millions d'années et peut-être qu'il ou elle entendra exactement ce que je suis en train de vous dire en ce moment. (P.313)
Commenter  J’apprécie          210
L'homme descendit sur le quai, piétinant la perfection de la couche de neige. Il se fit l'effet d'un barbare. Mais une fois ce sacrilège perpétré, il comprit qu'il devait continuer, car on s'afflige davantage de voir une fine craquelure sur une belle porcelaine que cette même porcelaine par terre en miettes. Il décrivit donc en courant des cercles de plus en plus grands, soulevant la neige à grandes enjambées brouillonnes, et arriva assez près du bâtiment qui bordait le quai pour voir, tel un souvenir de peinture fanée, le nom de la ville qui était leur destination. Il se sentit soudain ridicule et cessa ses cavalcades. A la faveur de l'immobilité qui s'ensuivit, il perçut une sorte d'ébranlement monstrueux dans l'obscurité derrière lui. Le train. Il se retourna et le vit avancer lentement, si lentement que l'espace d'un instant il pensa que ce devait être l'obscurité qui se déplaçait à l'arrière-plan, mais il comprit que c'était le train car il voyait sa femme, penchée en avant, regarder par la portière restée ouverte, son visage blanc empreint d'une stupeur muette et, pendant une seconde, il eut une impression de mort, comme lorsqu'on doit laisser l'être aimé quitter ce monde, s'éloigner en silence, les traits défaits, et sombrer dans les ténèbres enneigées. (p. 16-17)
Commenter  J’apprécie          160
Oh, je voudrais des tas de choses.
[...]
Eh bien, j'aimerais une pêche mûre à point, une orchidée, un peu d'encens au sapin baumier et un petit chat. Je crois que je pourrais être vraiment heureuse si j'avais tout ça. Avec moi dans la baignoire. Enfin, peut-être pas le petit chat.

Donc tu m'envoies faire une chasse au trésor. Est-ce qu'il faut aussi que je te rapporte une poule aux œufs d'or ?
Ça me ferait très plaisir, dit-elle. Tu imagines comme ce serait bien ? Des œufs en or. Tout chauds. Je ne les vendrais pas. Non, je les mettrais à l'intérieur de moi, en moi, là où c'est vide en ce moment. (P.177)
Commenter  J’apprécie          160
J'aimerais qu'on me sorte de moi-même. Et qu'on me range quelque part dans un tiroir. Un tiroir qu'on ouvre dans un rêve où on fait précipitamment ses bagages à la fin du monde.
Ah, ce rêve-là! s'exclama la femme. Ce tiroir -là! (P.45)
Commenter  J’apprécie          150
Il est très difficile de garder la mémoire des morts. Un souvenir qui ne soit pas marqué par la complaisance envers son propre chagrin est presque impossible. Et on ne les retrouvera jamais indemnes de son deuil à soi, on ne pourra jamais penser à eux, ni les revoir avec un élan de sentiment pur, il y aura toujours cette affliction, cette douleur, cette impression égoïste d'abandon, où l'on passe avant eux. Marianne s'en voulait de pleurer sur elle-même parce qu'elle avait perdu Tony.
Commenter  J’apprécie          130
Un vrai soir survenait à présent, l'obscurité résultant de l'absence du soleil et non de son oblitération. Ils regardèrent la nuit se faire derrière la vitre. La femme effleura son reflet que l'obscurité du dehors venait de révéler.
Commenter  J’apprécie          110
Le soir tomba avec une déroutante soudaineté, comme un rideau baissé en hâte sur la débâcle effarante d’une pièce de théâtre amateur. Puis l’homme s’aperçut que l’obscurité n’était pas due au coucher du soleil mais au fait que le train entrait dans une épaisse forêt, laissant derrière lui les vastes champs de neige traversés tout l’après-midi. Les sapins, hauts et denses, se massaient le long de la voie comme des enfants se pressant contre la fenêtre d’une classe pour mieux voir quelque horrible accident survenu dans la rue.
(incipit)
Commenter  J’apprécie          110
"La violence se concentre en un lieu restreint: une chambre, un lit , un gant."
Commenter  J’apprécie          112
C'est comme ça que j'ai échoué ici, au bout du monde. Evidemment, la Terre étant ronde, le monde n'a pas vraiment de bout, mais vous qui êtes venu jusqu'ici, vous comprenez ce que je veux dire.
Commenter  J’apprécie          90
Cette idée le frappa d'une inertie extraordinaire, comme si le but que l'on poursuivait dans la vie consistait simplement à occuper un repère précis dans l'espace, comme si le monde entier était une toile en cours d'élaboration et que ceux qui avaient trouvé leur place ne devaient plus en bouger jusqu'à ce qu'il soit terminé.
Commenter  J’apprécie          90
Quand on a été seul dans la vie comme je l'ai été, on peut éprouver de la tristesse et un sentiment de solitude, mais on est le maître de son existence, puisqu'elle n'appartient qu'à soi. Et ensuite, quand on rencontre quelqu'un, on sent cette maîtrise qui s'en va. Et ça me fait peur.
Commenter  J’apprécie          90
La dame à l’imprimé bleu abaissa son magazine et les regarda s’installer. Les gens voient toujours d’un mauvais œil qu’on se mette à côté d’eux, songea Lyle, et pourtant ils sont offensés si l’on s’en va ailleurs.
Commenter  J’apprécie          70
La misère du monde vient en grande partie du fait que les gens s'imaginent qu'un enfant est à eux, qu'ils possèdent leurs enfants, alors que tout ce qu'ils font c'est s'occuper d'eux jusqu'à ce qu'ils puissent prendre leur autonomie. (page 265)
Commenter  J’apprécie          50
- Peut-être que si on regarde n’importe quoi de près, ça devient laid.
- Ce n’est pas vrai.
- Les choses laides deviennent plus laides, j’imagine, et ce qui est beau devient plus beau. Mais je parie qu’il existe des choses laides qui deviennent belles, et vice versa. Qu’existe-t-il de laid qui devient plus beau à mesure qu’on le regarde mieux ?
- Je n’en sais rien, dit Lyle, avant de se résoudre à lever les yeux. Les insectes, peut-être.
- Oui, approuva Tony. Exactement : les insectes. En fait, j’aime bien tes pieds. Ils sont authentiques. Ils ont un côté Vieux Monde, quelque chose de biblique.
Commenter  J’apprécie          40
Je l'ai suivi dans le long couloir que bordent d'un côté de grands bureaux avec fenêtres, et de l'autre de petits bureaux sans fenêtres. Je ne pourrais à aucun prix, je crois, travailler dans un cadre si outrageusement hiérarchisé. Je sais que nous ne sommes pas tous égaux en ce monde, mais j'ai du mal à supporter un environnement où cette vérité est à ce point flagrante. Situé à l'angle de la tour, le bureau de mon père a une vue fabuleuse, un Diebenkorn (grâce à John Webster), une table Knoll vintage, un canapé en cuir (signé Le Corbusier, bien entendu) et un aquarium d'eau salée, tandis que Myron Axel occupe un placard éclairé au néon de l'autre côté du couloir.
Commenter  J’apprécie          30
Mais d’après mon expérience, les relations familiales n’ont qu’un rapport lointain avec l’idéal. Autant que je puisse en juger, elles ressemblent beaucoup aux autres relations entre les êtres humains.
Commenter  J’apprécie          30
- Je crois que la maladie me fait plus peur que la mort. C'est bizarre, hein? En fait, la mort ne me fait pas peur. parce que c'est abstrait, probablement. Je suis incapable de l'imaginer. je suis bien trop terre à terre. Mais la maladie, je me l'imagine très bien. je ne veux pas être malade.
Commenter  J’apprécie          30
Chaque individu était comme une pièce de monnaie, à deux faces, ou un dé, à six.
Commenter  J’apprécie          30



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Peter Cameron (182)Voir plus


{* *}