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Critiques de Philippe Sands (114)
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Retour à Lemberg

Je termine en bout de confinement un livre que j'ai mis du temps à lire. C'est d'ailleurs amusant de constater que cette période de vie où nous avons été forcés de demeurer à domicile, covid oblige, m'a éloigné de la lecture alors que je l'apprécie tant dans ma vie bousculée où le temps semble se dérober tant il coule vite, comme si ce moment de repli sur soi me semblait trop calme pour me plonger dans les heures douces d'un ouvrage à découvrir.



L'auteur de l'ouvrage, Philippe Sands, mène un double récit, il revient sur les traces de sa famille, juive, et décimée en Ukraine en début de guerre lorsque l'ogre hideux du nazisme commettait ses innommables atrocités dont je m'interroge toujours sur le comment du possible. A côté de cela, il nous conte l'histoire de deux imminents juristes, Hersch Lauterpacht et Raphaël Lemkin qui développèrent des concepts nouveaux en droit international, ceux-là même de crime contre l'humanité et de génocide. Ces concepts nous explique l'auteur s'opposent contrairement à ce que notre intuition pourrait nous suggérer mais furent déterminants au procès de Nuremberg. En effet, il a fallu cet épisode pour qu'enfin le droit international puisse accuser un individu de crime d'horreurs sans que celui-ci se retranche derrière une factice impunité due à son obéissance au droit souverain de son pays.



Il y a des passages vraiment érudits et passionnants , le développement intellectuel est rigoureux et enrichissant. Il y a aussi des longueurs où je ne vous cache pas me perdre un peu dans les détails de sa famille; Certes , ce jeu de piste pour recomposer une famille anéantie dont quelques pièces de vie d'un puzzle éparse subsistent à travers le monde mais certains chapitres sont malheureusement un peu ennuyeux tandis que d'autres passionnent , en particulier ce qui concerne Hans Frank , gouverneur général de la Pologne, responsable de la mort de millions de juifs et pourtant éminent juriste dont l'aberrante cécité face à sa responsabilité nous plonge dans la plus totale incompréhension.
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La filière

Après ma lecture de Retour à Lemberg, j'ai souhaité lire La filière, qui retrace la fuite et la vie d'un des dignitaires nazis responsable de la solution finale envers les Juifs, l'Autrichien Otto von Wächter. L'auteur, l'avocat international Philippe Sands, est un enquêteur hors pair (avec une équipe de chercheur.e.s de choc) pour reconstituer les intrigues du régime nazi lors de la 2nde Guerre mondiale. Chez l'avocat international, pas de jugement (et pourtant des membres de sa famille sont morts dans les camps...). Notamment envers Hans Wächter, l'un des fils d'Otto, qui relit les informations documentées par l'auteur, à charge pour son père, comme des éléments qui le disculpent... Et sa mère, Charlotte. Philippe Sands relate. Et la lectrice que je suis est plongée dans l'incompréhension: comment peut-on s'engager dans cette oeuvre de destruction humaine massive, sans affect, sans remords? Les circonstances de la mort d'Otto von Wächter posent question: celui qui fuyait la justice des hommes n'a-t-il pas succombé sous une justice qui nous dépasse ?

Curieuse, j'ai aussi écouté le podcast France Culture réalisé par Philippe Sands, qui a rajouté des touches sonores informatives passionnantes

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-filiere

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La filière

Quand il travaillait sur Retour à Lemberg, Philippe Sands a fait la connaissance de Horst Wächter, fils de Otto von Wächter, et il a commencé à enquêter sur ce dernier. Autrichien, Otto von Wächter (1901-1949) a adhéré au parti nazi dès 1923. Après l'Anschluss il monte rapidement en grade et occupe différents postes de commandement, à Vienne, à Cracovie puis à Lemberg où il est chaque fois chargé des politiques anti-juives et s'en acquitte avec efficacité. Après la défaite des nazis Otto von Wächter se cache dans les Alpes autrichiennes pendant près de trois ans. Il est à cette époque l'un des chefs nazis les plus recherchés par les Alliés. En 1949 il passe en Italie grâce à des faux papiers fournis par sa femme. A Rome il bénéficie de complicités et prépare son départ pour l'Amérique du Sud mais meurt avant de pouvoir réaliser ce projet.



Pour écrire la biographie d'Otto von Wächter Philippe Sands a eu accès aux archives personnelles de Charlotte, la femme d'Otto. Journaux intimes, courriers entre les époux, bandes enregistrées, tous ces précieux documents ont été confiés à l'auteur par Horst Wächter avec qui Philippe Sands a noué une relation de confiance. Charlotte von Wächter apparaît comme une parfaite femme de nazi, parfaite nazie elle-même. Elle est tellement représentative que j'ai cru un moment la reconnaître comme une des protagonistes de Femmes de nazis. Mais non. Elle me fait aussi penser à Josée Laval, seulement intéressée par la vie mondaine qu'elle mène grâce à la position de son mari (son père dans le cas de la fille Laval) : "Les déjeuners de vingt personnes étaient parfois suivis de thés où se retrouvaient quarante invités. Dans la mesure où la ville [Lemberg] était sur la route du front russe, les gens pouvaient faire une halte chez eux : la guerre devenait ainsi un catalyseur d'événements mondains".

Charlotte est par ailleurs très amoureuse de son mari ce qui contribue aussi à la rendre totalement aveugle aux crimes auxquels il participe.



Philippe Sands a mené l'enquête à Rome sur les filières d'exfiltration de nazis. Il y met à jour le rôle actif de l'Eglise catholique, notamment en la personne de l'évêque nazi Aloïs Hudal. Après la guerre cet Autrichien a fourni gîte, argent et faux papiers aux nazis réfugiés à Rome, il en a aidé à passer en Amérique du Sud comme par exemple Franz Stangl, le commandant de Treblinka. Je découvre qu'à la fin des années 1940, dans le contexte des débuts de la guerre froide, des nazis sont aussi recrutés par les services du contre-espionnage américain. Dans l'optique de lutter contre le communisme ("Les ennemis de mes ennemis sont mes amis") on ferme les yeux sur leurs crimes et on leur fourni une nouvelle identité. Les Allemands appellent cela le Persilschein (du nom de la lessive) qui lave plus blanc que blanc. L'auteur prouve que les Américains ont été au courant de la présence d'Otto dès son arrivée à Rome mais qu'ils n'ont rien fait pour arrêter ce criminel de masse, en théorie activement recherché.



Après le père et la mère Philippe Sands côtoie -et lui en chair et en os- un fils de la famille Wächter, Horst. Ce vieux monsieur affable et accueillant avec qui l'auteur a sympathisé a très peu connu son père. Il a été élevé par sa mère et son grand-père -qui a fait office de père de substitution- tous deux convaincus de l'innocence d'Otto. Aussi, tout en affirmant vouloir connaître toute la vérité sur les crimes dont son père est accusé -et sans doute le croit-il vraiment- Horst s'est enfermé dans un déni de plus en plus profond, assez fascinant à observer. Il arrive à trouver une explication édulcorante à toutes les preuves, même les plus incriminantes, que lui présente l'auteur. J'admire ce dernier qui reste très patient -il confesse cependant s'être énervé une fois.



L'enquête menée par Philippe Sands sur plusieurs années a débouché (avant le livre) sur un documentaire -What our fathers did. A nazi legacy- que je n'ai pas vu et un podcast disponible sur Radio France -que j'ai écouté en suivant la lecture du livre. J'ai trouvé l'un et l'autre passionnants et se complétant bien. Ce ne sont pas les mêmes points qui sont détaillés dans le podcast que dans le livre, il n'y a pas de redondance. Si Retour à Lemberg qui traite de points de droit international était parfois un peu technique, La filière est d'une lecture beaucoup plus accessible.
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La filière

Voilà un livre d'Histoire qui se lit comme un polar.

L'auteur mène l'enquête et après nous avoir présenté les faits, la vie et la mort de l'un des SS coupable de Crime contre l'Humanité, il nous explique sa rencontre avec le fils de ce nazi qui défend son père contre toutes les accusations qu'on lui présente. Le reste du livre est la narration d'une enquête rondement menée, avec son lot de rebondissement et de références historiques.

J'ai particulièrement apprécié le style de l'auteur qui nous emmène au travers des chapitres à la découverte du système de la Filière, moyen utilisé par les nazis pour rejoindre l'Amérique du sud sous couvert des services secrets américains, prêts à recruter des nazis pour lutter contre les communistes.

Passionnant, du début à la fin.
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La filière

« La filière » est le fruit du travail colossal – près de 8 ans – de l’auteur, juriste et écrivain, et de son équipe de recherche. Le résultat est assez déroutant et particulièrement dense. Il entrecroise les éléments de biographie d’Otto Wachter et de sa famille avec les éléments qui ont constitué le processus de recherche de l’auteur pour comprendre les circonstances de son parcours et de son décès. Si sur la forme le résultat est par moment un peu indigeste, sur le fond, il est tout à fait fascinant. Plus de 70 ans après les faits, le parcours de cet ancien nazi s’éclaire et les révélations s’enchaînent. Le regard de ses descendants est très intéressant à découvrir, entre volonté de garder une image idéalisée de l’ancêtre, refus de voir les choses en face et difficultés à assumer un héritage non désiré et sur lequel on n’a finalement pas de prise. Une problématique qui ne se limite pas à cette famille en particulier d’ailleurs. Le livre nous éclaire enfin sur les collusions qui ont pu naître après la fin de la seconde guerre mondiale, et même au cours des derniers mois du conflit, sur fond de lutte contre la menace communiste. Elles ont pu permettre à des crminiels de guerre de bénéficier de soutiens et d’appuis de la part de l’Eglise et des pouvoirs politiques, américains notamment, pour fuir grâce à des filières d’exfiltration. Quand ce n’était pas pour bénéficier d’offres de services des ennemis d’hier.



Un livre édifiant porté par un travail de recherche et de documentation colossal !
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La filière

J'ai été emporté par cet opus, après "Retour à Lemberg".

Philippe Sands part à la recherche des traces d'Otto Wächter, criminel de guerre nazi, en fuite après l'effondrement du nazisme et mort en 1949 à Rome, recherche effectuée à la demande d'un de ses fils Horst qui aimerait réhabiliter la mémoire de son père.

Cette recherche avance peu à peu au gré des rencontres, des documents découverts et confirme finalement que Otto Wächter était bien le criminel supposé ; un vrai thriller historique.

Livre d'autant plus passionnant que l'auteur nous présente toutes les étapes de sa quête progressive, passant de la relation historique aux péripéties de sa recherche actuelle, une sorte de "work in progress", de livre en train de se faire.

Peu à peu apparaît également un autre centre d'intérêt, (comme dans "Le grand Meaulnes" le personnage dont tout dépend n'est pas Meaulnes, mais le narrateur François, lequel d'ailleurs épousera Geneviève de Gallais !) : cet autre centre d'intérêt qui est peut-être le coeur de l'ouvrage. En effet, Philippe Sands dresse, à côté de celui d'Otto Wachter, un autre portrait beaucoup plus nuancé et fort intéressant : celui de son fils Horst. Celui-ci semble pris entre son attachement filial, son désir de protéger la réputation de son père, mais ne manque cependant pas d'offrir à Philippe Sands toutes les occasions de détruite l'image de ce père, comme s'il était tout aussi obsédé par la recherche de la vérité et qu'il ne voulait pas se l'avouer. C'est un personnage en définitive d'une grande honnêteté, même s'il faudra attendre la génération suivante pour accepter l'horrible réalité. C'est ce personnage qui m'a, dans ce livre, le plus fasciné.
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La filière

Un livre-enquête passionnant. Philippe Sands s’intéresse à l’ascension et à la chute d’Otto von Wächter, un dignitaire nazi autrichien devenu Obergruppenführer SS, gouverneur de Cracovie, puis gouverneur du district de Galicie en 1942. Un ami de Kaltenbrunner et d’Himmler. Il disparaît de la circulation au printemps 1945. Après la guerre, il sera accusé de « meurtres de masse » par les Polonais : sous son commandement, en tant que gouverneur, 100.000 Polonais ont perdu la vie.

Dans le cadre du travail qui donna lieu à son précédent livre Retour à Lemberg, Philippe Sands est mis sur la piste du fils de Wächter, qui accepte de le rencontrer dans son manoir délabré du nord de l’Autriche. Celui-ci lui ouvre les archives familiales qui vont réserver bien des surprises.

Sands, aidé par ses équipes d’étudiants, d’historiens et de chercheurs, a sollicité de nombreux témoins, des archivistes, des médecins et des bibliothécaires pour reconstituer l’itinéraire de Wächter. Il est allé en Italie, en Grande Bretagne, aux Etats-Unis, en Pologne, en Ukraine pour rencontrer des témoins ou leurs descendants et s’imprégner des lieux où vécut et travailla Wächter. On se pince pour croire que Charlotte, la femme de Wächter, part skier avec ses enfants en janvier 1945, alors que son univers de nazie convaincue s’effondre. On assiste à une scène incroyable en 2014 à Lviv (anciennement Lwõw) en Ukraine, où se tient la célébration annuelle de la division SS de Galicie : des hommes en uniforme SS déambulent dans les rues avec des armes d’époque, échangent des photos, discutent avec des vétérans, arborent fièrement des croix gammées.

Peu à peu Sands retrace l’itinéraire de Wächter, théoriquement recherché par les Polonais et les Américains. Il y a des surprises, des coups de théâtre et des mystères pas toujours résolus. Ce livre se lit comme un roman. Mais c’est bien de l’histoire.

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Retour à Lemberg

Philippe Sands est avant tout un enquêteur. Il partage avec nous les pistes, les photographies, les indices, les frustrations. Les moments où il parvient à la vérité sont lumineux, terrifiants et fascinants. La quête est aussi personnelle qu'historique, juridique. Elle passionnera les férus d'histoire et de Droit. Les histoires de famille toucheront les autres. Une lecture recommandée pour ceux qui s'intéresse à cette ville magnifique souvent négligée, LVIV..
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La filière

J’avais lu l’année dernière Retour à Lemberg, que j’ai beaucoup aimé, surtout pour sa forme très convaincante. Une enquête minutieuse, des preuves, un suspens haletant.

Avec La filière, dont j’avais écouté le podcast sur France Culture, la méthode n’a pas pas changé, Philippe Sands poursuit avec rigueur la piste d’Otto von Wächter, ancien officier SS de haut rang, mort à Rome en 1949.

Le clin d’œil à John Le Carré que j’aime tant m’a ravi, et en effet, l’espionnage alors que la guerre froide est déjà ardente est un des pivots du livre.

J’ai aimé la position à distance de Philippe Sands, dans son travail d’historien, avec pourtant un engagement maximal. Il n’y défend pas une thèse, il mène une enquête jusqu’au terme. L’humain est au cœur du livre, et je crois que Sands à bien conscience de l’empathie que peut susciter complexe, et la place de Charlotte, l’épouse, dans l’enquête.
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La Dernière Colonie

Une lecture que j’ai trouvé très intéressante malgré son côté technique. Elle est intéressante par les faits évoqués et la place prépondérante de l’humain dans cette histoire. Que ce soit avec les souvenirs de Liseby Élysée, déracinée et victime (entre-autres) de l’affaire. Ou bien avec la présentation et l’état d’esprit des juges qui vont statuer sur les différentes requêtes.

L’auteur nous plonge ainsi dans le droit international et les instances qui en sont les garantes : Cour internationale de justice, Organisation des nations unies… Il détaille les différentes phases des questions qui sont soumises. Les décisions et les avis ayant un impact immédiat ou différé sur l’évolution du droit international.

Une très bonne lecture qui ne redore pas le blason des États et des choix qui sont faits au détriment des populations.
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La filière

Passionnante enquête historico-policière. Le récit entrelace les épisodes historiques avec les éléments d’enquête menée au cours de la décennie passée, en compagnie des membres de la famille du “hérosˮ, son fils essentiellement. Le suspens admirablement mené suit le déroulement des investigations dans les archives plus ou moins accessibles de ces épisodes pas toujours très glorieux des débuts de la guerre froide. On y lit la confirmation de la récupération des crapules nazies par les deux camps quand elles présentent une utilité potentielle pour la lutte contre les anciens alliés. A côté de ce volet strictement historique, l’auteur montre le déni de réalité de certains membres de la famille du criminel nazi, son fils en tête. Sans parler de l’épouse du “hérosˮ qui a survolé toute cette époque comme si de rien n’était, d’activités mondaines en élevage de leurs marmots. Le cerveau débranché facilite visiblement la vie et la survie !
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La filière

Philippe SANDS qui a perdu son grand père assassiné pendant la guerre relate de façon très documenté et sans émotion la vie, les amours, l'histoire dans l'Histoire de l'autrichien Otto von Wachter, soutien de la 1ere heure d'Hitler et futur dignitaire nazi. La quete personnelle de vérité amène l'auteur à rencontrer Horst von Wächter, le fils d'Otto. Ce dernier va lui transmettre des documents dont le journal de sa mère, Charlotte, soutien inconditionnel de son mari et du führer également. J'ai trouvé ce livre à la fois passionnant et démoralisant pour les mêmes raisons:

- les réactions des descendants qui supportent le poids de la cruauté de leurs parents: certains ne veulent pas voir la vérité, d'autres les soutiennent ou les rejettent; le fils d'Otto m'a peiné car il ne veut voir que sa vérité et en même temps il m'a exaspéré.

- cette quête de vérité digne d'un essai nécessite une prise de recul de l'auteur qui me parait parfois difficile à comprendre et qui rend la lecture très froide; j'avais eu le même sentiment dans le livre "Nickel Boys" de Whitehead

- montrer Otto, cet homme tel qu'il était, un nazi implacable dans l'application de la politique d'éradication des juifs et un homme avec des sentiments pour sa famille, les femmes, son pays m'a revolté car on a parfois l'impression que l'on cherche à l'humaniser, à minimiser ses responsabilités; je sais que ce n'est pas le cas étant donné l'histoire de l'auteur mais c'est mon ressenti.

Bref, un livre très bien documenté, qui nous projette dans la tête d'un nazi et sa famille mais qui laisse un gout amer sur l'humanité. C'est sans doute une question philosophique: peut on être un monstre, un assassin et avoir des sentiment?

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Retour à Lemberg

C’est une enquête très intéressante et émouvante parce que l’auteur marche dans les pas de son grand-père, Léon Buchholz qui échappa à l’Holocauste. La ville de Lemberg est le point commun à l’étude qu’il mène pour retrouver l’histoire de sa famille mais également pour suivre deux juristes qui apportèrent deux concepts nouveaux dans l’élaboration de la justice internationale, celui de « crime contre l’humanité » avancé par Hersch Lauterpacht et de « génocide » proposé par Raphaël Lemkin , liés eux aussi à la ville de Lemberg, ville dans laquelle Hans Franck, le juriste d’Hitler, proposa la « solutiôn finale ». Cependant je mets un bémol sur le style qui parfois est un lourd: dans son souci de rapporter les faits, l’auteur se perd dans des détails qui l’alourdissent le récit.
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La filière

Enquête intéressante, bien documentée par l'auteur de Retour à Lemberg (superbe livre sur sa propre famille)... Il revient, de temps en temps, à Lemberg qui a croisé (et marqué) Otto Von Wächter également.



Il retrace la vie de ce dignitaire nazi, ses envies, ses aspirations, ses doutes, ses petits arrangements... mais aussi sa vie de famille chaotique avec sa femme, le poids sur ses enfants et notamment celui qui a ouvert les portes des archives familiales...



Bref, un livre prenant, sur l'avant-guerre, la guerre, et l'après-guerre... les aides, les alliances alliées, la chasse à l'homme... la guerre froide, les mystères de la mort, les peu reluisantes conditions d'après-guerre.



Un petit essoufflement vers la fin du livre, mais ce roman se lit comme un roman d'aventure...



Accessible à tous, même sans réelles connaissances...



J'avais beaucoup aimé son Retour à Lemberg sur les traces de son grand-père Léon...



J'ai aimé sa voie vers cet Otto et l'héritage émotionnel et familial sur les enfants qui portent le poids des actes de leurs ascendants, notamment les 2 visions des fils Wätcher et Frank diamétralement éloigné (Niklas celui de Frank n’excuse pas et dénonce les actes de son père, contrairement à Horst von Wätcher) !

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La filière

Otto Wächter fut un nazi autrichien de la première heure puis un administrateur de haut rang dans les territoires occupés de Pologne. Il a envoyé à la mort des dizaines de milliers de juifs, en particulier ceux de Lemberg (Lwow, Lviv) avec la famille de P.Sands, qui en a fait le sujet de son précédent ouvrage.

Dans la continuité Sand décide de suivre le parcours de O.Wächter de l'anschluss à la chute du Reich.



Horst le fils de Wachter est un personnage central de l'ouvrage, c'est un homme déjà âgé qui souhaite faire la lumière sur son père, prêt à accompagner Sands il lui ouvre les archives familiales en particulier les journaux de sa mère. Ce faisant il espère que ça lui apportera les éléments dont il rêve car il ne croit pas à la culpabilité de son père.



La première partie est la biographie d'un couple uni Otto et Charlotte Wachter qui vont traverser la période du IIIème reich comme un rêve : la réussite de Otto est totale, les enfants naissent, la situation matérielle est florissante, les combats quotidiens se limitent à essayer d'avoir une plus belle maison que les autres dignitaires nazis. Dans leur correspondance la shoah n'existe pas, les juifs sont un désagrément administratif dont Otto ne parle même pas. Cette criminalité indifférente est proprement stupéfiante.

Après l'effondrement Wachter se cachera plusieurs années dans les montagnes autrichiennes avant de gagner l'Italie pour mourir mystérieusement dans un hôpital romain. Il bénéficiera de l'aide indéfectible de sa femme, d'autrichiens restés nazis et de religieux catholiques anticommunistes.



Ce remarquable ouvrage de P.Sands est riche des différentes dimensions qu'il aborde. La biographie du nazi n'est pas la plus passionnante, Otto Wachter est un esprit étroit et servile sur lequel les théories nazies n'ont pas eu de mal à imprimer.

La rencontre avec Horst le fils d'un bourreau, trop jeune pour avoir compris le rôle de son père, est riche d'enseignements, malgré les preuves accablantes de Sands, Horst trouvera toujours moyen de dédouaner ce père au risque du ridicule mais aura l'honnêteté d'aller au bout de cette enquête qui le déçoit.

On voit combien la dénazification des esprits fut dure dans les générations de la guerre, car on notera au passage que la famille Wachter au sens large désapprouve Horst et préférerait oublier ce passé qu'elle ne condamne pas.



En dernier lieu Sand interroge l'attitude des vainqueurs, il est évident que Wachter n'a été que très mollement recherché. Comment un homme démuni peut-il se cacher dans les Alpes pendant des années sans se faire repérer ? A Rome les américains connaissaient sa présence sans l'interpeller, occupés qu'ils étaient à recruter les meilleurs nazis pour les aider dans la guerre froide. Sans doute O.Wachter n'était pas assez bon pour eux, ça aura été sa seule punition. Pas cher payé.



Le rythme journalistique et les nombreux dialogues ne grévent pas le sérieux historique du livre mais le rendent abordable pour les lecteurs peu familiers de la période

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Retour à Lemberg

Philippe Sands est un juriste international spécialisé dans la défense des droits humains et qui a travaillé pour le Tribunal Pénal International. En 2010 il est invité à Lviv, en Ukraine, pour y faire une conférence sur ses travaux concernant le génocide et les crimes contre l'humanité. Avant la seconde guerre mondiale la ville s'appelait Lemberg et elle appartenait à la Pologne. C'est à l'université de Lemberg que Hersch Lauterpacht (1897-1960), créateur du concept de crime contre l'humanité, et Raphaël Lemkin (1900-1959), inventeur de la notion -et du mot- de génocide, ont fait leurs études. C'est aussi à Lemberg qu'est né Léon Buchholz (1904-1997), grand-père maternel de l'auteur. La conférence est pour Philippe Sands l'occasion d'enquêter et d'en apprendre plus sur ces trois hommes. Le quatrième personnage important du livre est Hans Frank (1900-1946), Allemand et nazi, gouverneur général de la Pologne occupée et qui fut condamné à mort au procès de Nüremberg.











Léon Buchholz ne parlait pas de sa jeunesse et de sa famille. Sa fille, la mère de l'auteur, était ignorante de beaucoup de choses concernant l'histoire de ses parents et la sienne propre quand elle était toute petite. Léon est né à Lemberg mais, quand il a dix ans, son père meurt et sa mère s'installe alors à Vienne où vit déjà sa fille aînée. Après l'Anschluss, en 1938, Léon quitte l'Autriche pour Paris. Sa fille l'y rejoint en 1939, sa femme en 1941, à la veille de la fermeture des frontières au Juifs. Pourquoi ces départs en ordre dispersé ? En s'appuyant sur des documents de famille conservés par sa mère, en les complétant par des recherches en archives et en faisant appel à une détective privée, l'auteur découvre une nombreuse famille presque entièrement disparue lors de la shoah, un secret de famille et l'existence d'une Miss Elsie Tilney qu'il a fait reconnaître plus tard comme Juste parmi les nations.











L'objet de l'ouvrage est aussi de présenter un aperçu de l'histoire de la défense des droits humains par le droit international. Les prémices en remontent aux traités de la première guerre mondiale mais les choses ont surtout avancé à partir du moment où les Alliés ont eu connaissance des crimes nazis. Je pensais que le génocide était "le crime des crimes" et se situait, en matière de gravité, un cran au-dessus du crime contre l'humanité. En fait ce n'est pas ainsi que l'ont pensé les concepteurs de ces notions. Les juristes juifs Lauterpacht et Lemkin ont cherché tous les deux une réponse à la même question : "comment le droit peut-il faire en sorte de prévenir les assassinats de masse", comment faire pour que les Etats ne puissent plus maltraiter impunément leurs populations ? Pour Lauterpacht il faut placer la protection de l'individu au coeur de l'ordre juridique international en s'appuyant sur une charte ou des conventions des droits de l'homme. Pour Lemkin les Arméniens, les Juifs, ont été assassinés parce qu'ils étaient Arméniens ou Juifs. Il faut donc protéger les groupes. Ces deux conceptions se sont affrontées. Les défenseurs de la notion de crime contre l'humanité pensaient que parler de génocide c'était adopter une pensée biologisante et enfermer les individus dans leur groupe, ainsi que l'avaient fait les bourreaux. Ils craignaient aussi une concurrence entre victimes. L'opposition entre ces deux conceptions est due aussi aux personnalités de leurs auteurs : Lauterpacht était rigoureux tandis que Lemkin était plus expansif, avait tendance à embellir des épisodes de sa vie et parlait parfois à tort et à travers, choses pas toujours appréciées chez les juristes.











Lauterpacht et Lemkin ont chacun tenté de faire prévaloir leur conception lors du procès de Nüremberg qui se déroule de novembre 1945 à octobre 1946. Les principaux chefs nazis encore en vie -et sur lesquels on a pu mettre la main- y sont jugés par les Alliés américains, britanniques, français et soviétiques. Les accusations de crime contre l'humanité et de génocide y apparaissent toutes les deux bien que la seconde ne soit utilisée que de façon très limitée. Ce procès -et auparavant son organisation- apparaît comme un moment clé de la mise en place d'une justice internationale. Les débats d'idées qui ont accompagné la construction de cette justice, la quantité de travail et l'importance du droit sont bien montrés.











Au cours de son enquête Philippe Sands a visité les lieux où les événements dont il parle se sont déroulés et il a tenu à rencontrer des témoins quand ils étaient encore en vie ou des personnes qui les avaient connus. Sa rencontre la plus intéressante est celle avec Niklas Frank, le fils de Hans Frank, avec qui il s'est lié d'amitié. Niklas Frank est un des premiers enfants de dirigeant nazi à avoir écrit un livre très critique sur son père. Il dit : "Je suis contre la peine de mort, sauf pour mon père". L'auteur a aussi beaucoup échangé avec Horst von Wächter, le fils de Otto von Wächter, un autre criminel nazi, mais qui lui cherche à excuser son père. Quels que soient ses interlocuteurs Philippe Sands apparaît comme à l'écoute et capable d'empathie mais sans renoncer à son but. C'est son talent de s'appuyer sur les histoires personnelles de ses personnages, sur l'histoire de sa propre famille, sur les péripéties de son enquête et sur ses rencontres pour rendre vivant et accessible le récit de la construction de la justice internationale. J'ai trouvé cette lecture fort intéressante.
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Retour à Lemberg

Un très précieux travail de mémoire, d’enquête et d'analyse. Un chef d'oeuvre.
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Retour à Lemberg

Philippe Sands, avocat spécialisé dans la défense des droits de l'homme, pointe tout cela dans cet extraordinaire témoignage où s’entrecroisent une enquête palpitante et une réflexion profonde sur le pouvoir de la mémoire.

Le premier versant de ce livre est une enquête familiale autour de Leon Buchholz et son épouse Rita, qui parcoururent la Pologne, l'Empire Austro-hongrois, la France, au gré des guerres et conflits, en fonction, également, des menaces qui pesèrent sur eux et qui terminèrent leur vie à Londres.

Le second est l’enquête sur les deux juristes et leur combat afin de développer le droit international en matière de droits de l'homme.

La troisième, enfin, s’oriente vers Hans Frank, le Gouverneur général de la Pologne occupée. Hans Frank, l'amateur d'art, l'homme qui adorait la musique. On apprend que son fils Niklas, devenu un ami de l'auteur, est d'une sévérité absolue envers son père et sa mère qui joua un rôle intense dans la dérive nazie de son mari.

Ce livre est passionnant, nécessaire aussi pour appréhender certains pans d’Histoire qui ne sont pas les plus appris, expliqués et compréhensibles.

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Retour à Lemberg

L'auteur en partant à la recherche de la famille de son grand-père maternel, se retrouve à étudier et à croiser l'itinéraire de quatre hommes pour lesquels la ville de Lemberg a été déterminante. Son Grand-père, qui y naquit et y vécut comme Raphael Lemkin (1900-1959) qui a forgé le concept de "génocide", et Hersch Lauterpacht qui a introduit la notion juridique de "crime contre l'humanité" et finalement Hans Franck, ami et avocat d'Hitler, gouverneur général de la Pologne basé à Lemberg durant la Seconde guerre mondiale, qui met en place la Solution finale depuis cette ville et connu sous le surnom de "boucher de Varsovie" au procès de Nuremberg.

La différence entre crime contre l'humanité et génocide selon Philippe Sands: Imaginez le meurtre de 100'000 personnes du même groupe. Pour Lauterpacht , le meurtre d'individus, s'il relève d'un plan systématique, est un crime contre l'humanité. Pour Lemkin, le meurtre d'un grand nombre d'individus mais avec l'intention de détruire le groupe auquel ils appartiennent, est un génocide.

Le grand-père et les 2 juristes fréquentèrent les mêmes institutions scolaires et universitaires, ils étaient juifs tous les trois et sont tous les trois les seuls survivants de leur famille respective.

C'est un livre passionnant grâce au talent de conteur de Sands, car fondamentalement c'est un livre juridique, dont chaque assertion est accompagnée de sa référence source en fin de livre. Et pourtant il nous fait partager l'acharnement des deux juristes qui se sont battus toute leur vie adulte,

pour faire reconnaître au Monde que le régime Nazi était entrain d'exterminer systématiquement des populations entières d'Europe. Ils se sont battus pour donner au Tribunal International de Nuremberg les outils juridiques pour condamner ceux des cadres du nazismes qui ne s'étaient pas lâchement suicidés.

Et puis il y a l'histoire de la famille de Philippe Sands, ces grands-parents vivant dans un petit appartement parisien, si tristes et silencieux sur leur "vie d'avant" et la découverte de l'auteur du pourquoi de ce silence et de cette tristesse. Un beau livre qui n'est pas un roman, qui n'est pas totalement et seulement un livre juridique, qui n'est pas totalement historique, qui démarre comme une quête à la Daniel Mendelshon dans "Les Disparus" en 2007, et qui se double d'un livre de référence concret et précieux.

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J'ai eu l'occasion d'écouter Philippe Sands lors de sa venue à " La Grande Librairie ", invité par François Busnel, et la présentation de son ouvrage m'at fortement incité à le lire.

La lecture de son livre m'a captivé, car ainsi que l'a souligné François Busnel, ce livre possède de nombreuses facettes, il tient du récit familial, de l'enquête policière, de l'exposé de droit international, du reportage historique et surtout il fait montre de la très grande sensibilité de son auteur. Philippe Sands, avocat, professeur et juriste de réputation internationale est aussi un grand écrivain, et son livre un ouvrage de référence.
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