Pierre Pellissier

Karl Epting connaît Paris, les cercles artistiques et littéraires depuis longtemps. Il a dirigé, avant la guerre, la maison des étudiants allemands ; il a organisé des rencontres, des concerts. Henry de Montherlant, en octobre 1941, lui dédicacera le Solstice de juin : Au Dr Karl Epting, cité dans ce livre qui lui doit peut-être l'existence...

Cela, c'est déjà la tâche de l'épuration.
Cette dernière a commencé vite et tôt. Il y a eu, dans l'ivresse de la liberté retrouvée, des parodies de justice, des milliers d'exécutions sommaires. Des tribunaux improvisés ont déjà pris la relève, pour sanctionner sans nuance criminels et trafiquants, pétainistes et collaborateurs. Dans l'Administration, dans les entreprises aussi, il est considéré comme urgent d'éliminer tous ceux qui sont resté trop longtemps fidèles à Vichy.
Tout cela, puis l'inévitable lot de dénonciations calomnieuses, de basses vengeances et de règlements de comptes, parfois sur fond de trafic ou d'adultère, explique pourquoi, dès la fin 1944, avant que le pays soit libéré, il y a déjà 20.000 instructions en cours, 50.000 enquêtes lancées et 30 condamnés à mort exécutés, légalement si l'on peut dire, c'est-à-dire après un semblant de jugement.

Après Foch, mécontent de cet "armistice de vingt ans", Jacques Bainville est l'un des tout premiers à expliquer que la paix n'en sera pas une : "On peut dire que le traité de Versailles organise la guerre éternelle. "

Nous sommes tellement conditionnés à construire des digues, … Il faut du temps pour désapprendre ! C'est à l'évidence le troisième enseignement que tu es venu chercher. Souviens-t-en : lorsque quelqu'un te refuse quelque chose, commence par lui demander les raisons de son refus.

Nous sommes tellement tentés d'expliquer aux autres pourquoi ils ont tort. Alors que de nous intéresser à eux serait tellement plus pertinent et servirait tellement mieux nos propres intérêts ! Om, sois égoïste : intéresse-toi sincèrement aux autres !

Les victoires obtenues par la force ne durent pas. Tôt ou tard, le vaincu aura sa revanche. L'histoire de l'humanité est remplie de ces victoires qui virent, à plus ou moins long terme, en de cuisants désastres. Ce qui est obtenu par la force contient en soi la graine d'une future défaite. Ce n'est qu'une question de temps.

Les critiques et les insultes ne marchent pas pour obtenir ce que l'on veut. Elles n'ont comme effet que de susciter des critiques ou des insultes en retour. Si tu veux qu'on t'insulte, insulte en premier, ça marche à chaque fois.

Les menaces ne fonctionnent jamais. Sauf pour susciter des menaces en retour. Si tu veux que l'on te menace, menace en premier, c'est irrésistible !

Souviens-toi de ce premier enseignement, Om, qui n'est pas agréable à entendre : les arguments ne servent pas à obtenir un accord. Au contraire, ils aggravent les choses.

Il n'empêche que Karl Epting attirera, à l'Institut allemand, pratiquement tous les écrivains français et qu'il aidera à la parution d'ouvrage dont les auteurs se sont parfaitement accommodés de ce patronage : Choix de poèmes, d'Eluard, Crève-cœur, de Louis Aragon, Mille regrets et Cheval blanc d'Elsa Triolet...

Je dois dire, à la vérité, que certains sont curieux ; il nous faut souvent les recaler, ce qui nous attire quelques inimitiés. C’est amusant de constater combien les gens aiment retrouver leur nom dans un journal !

Il est de règle, pour les militaires des troupes coloniales, après deux ou trois années passées outre-mer, que le retour en métropole engendre des congés de longue durée. Il convient d’épuiser les temps de permission qui se sont additionnés, d’effacer les fatigues corporelles, parfois d’effectuer la cure qui rétablira les équilibres physiques ou psychiques malmenés par les tropiques…

Un jeune lieutenant a encore le droit d’ignorer que l’action politique n’est qu’une longue suite d’improvisations et que les traités sont faits pour être au mieux oubliés, au pire violés !

On peut dire que le traité de Versailles organise la guerre éternelle. Il ne nous a même pas mis dans de très bonnes conditions pour la soutenir. La frontière qu’il nous rend est celle de 1870. C’est une frontière d’invasion, dessinée en 1815 contre la France

« Mais à quoi bon se tourner avec rancune vers le passé, puisque le présent n’est pas meilleur et l’avenir nous menace ? »

Curzio MALAPARTE.

En toutes circonstances je serai l’homme de la liberté, jamais l’homme d’un parti ; quand la liberté sera menacée par un parti, je serai toujours du parti qui la défendra. Je suis comme le passager d’un navire, quand le navire penche à gauche, je me jette à droite, quand il penche à droite, je me jette à gauche.

Le plus de bonheur possible pour le plus grand nombre possible.

- Pourquoi l’as-tu jeté en prison ? demande-t-elle au ministre Cavaignac.
- Parce qu’il conspirait.
- Conspirer, Girardin ? Impossible, il est toujours seul de son avis.