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Citations de Pierre de Marivaux (579)


(...) il y a bien de la différence entre la véritable piété et ce qu'on appelle communément dévotion.
Les dévots fâchent le monde, et les gens pieux l'édifient; les premiers n'ont que les lèvres de dévotes, c'est le coeur qui l'est dans les autres; les dévots vont à l'église simplement pour y aller, pour avoir le plaisir de s'y trouver, et les pieux pour y prier Dieu; ces derniers ont de l'humilité, les dévots n'en veulent que dans les autres. Les uns sont de vrais serviteurs de Dieu, les autres n'en ont que la contenance. Faire oraison pour se dire : Je la fais; porter des livres de dévotion pour les manier, les ouvrir et les lire; se retirer dans un coin, s'y tapir pour y jouir superbement d'une posture de méditatifs, s'exciter à des transports pieux, afin de croire qu'on a une âme bien distinguée, si on en attrape; en sentir en effet quelques-uns que l'ardente vanité d'en avoir a fait naître, et que le diable, qui ne les laisse manquer de rien pour les tromper, leur donne. Revenir de là tout gonflé de respect de soi-même, et d'une orgueilleuse pitié pour les âmes ordinaires. S'imaginer ensuite qu'on a acquis le droit de se délasser de ses saints exercices par mille petites mollesses qui soutiennent une santé délicate.
Tels sont ceux que j'appelle des dévots, de la dévotion desquels le malin esprit a tout le profit, comme on le voit bien.
A l'égard des personnes véritablement pieuses, elles sont aimables pour les méchants mêmes, qui s'en accommodent bien mieux que de leurs pareils; car le plus grand ennemi du méchant, c'est celui qui lui ressemble.
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Rien ne rend si aimable que de se croire aimé; et comme j'étais naturellement vif, que d'ailleurs ma vivacité m'emportait, et que j'ignorais l'art des détours, qu'enfin je ne mettais pas d'autre frein à mes pensées qu'un peu de retenue maladroite, que l'impunité diminuait à tout moment, je laissais échapper des tendresses étonnantes, et cela avec un courage, avec une ardeur qui persuadaient du moins que je disais vrai, et ce vrai-là plaît toujours, même de la part de ceux qu'on n'aime point.
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Le titre que je donne à mes Mémoires annonce ma naissance; je ne l'ai jamais dissimulée à qui me l'a demandée, et il semble qu'en tout temps Dieu ait récompensé ma franchise là-dessus; car je n'ai pas remarqué qu'en aucune occasion on en ait eu moins d'égard et moins d'estime pour moi.
J'ai pourtant vu nombre de sots sui n'avaient et ne connaissaient point d'autre mérite dans le monde, que celui d'être nés nobles, ou dans un rang distingué. Je les entendais mépriser beaucoup de gens qui valaient mieux qu'eux, et cela seulement parce qu'ils n'étaient pas gentilhommes; mais c'est que ces gens qu'ils méprisaient, respectables d'ailleurs par mille bonnes qualités, avaient la faiblesse de rougir eux-mêmes de leur naissance, de la cacher, et de tâcher de s'en donner une qui embrouillât la véritable, et qui les mît à couvert du dédain du monde.
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J’avais entendu dire que les scrupules nuisaient à la fortune, je fis trêve avec les miens, pour n’avoir rien à me reprocher. Était-il question d’avoir de l’honneur, j’en avais ; fallait-il être fourbe, j’en soupirais, mais j’allais mon train. Je me suis vu quelquefois à mon aise ; mais le moyen d’y rester avec le jeu, le vin et les femmes ? Comment se mettre à l’abri de ces fléaux-là ?
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Moi, j'ai l'air d'un innocent ; vous, vous avez l'air d'un homme d'esprit ; eh bien ! à cause de cela faut-il s'en fier à notre air ? (Arlequin)
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ARAMINTE -Vous donner mon portrait ! Songez-vous que ce serait avouer que je vous aime ?
DORANTE -Que vous m’aimez , Madame ! Quelle idée ! qui pourrait se l’imaginer ?
ARAMINTE (d’un ton vif et naïf) -Et voilà pourtant ce qui m’arrive
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ARTHÉNICE Monsieur, je n’ai plus qu’un mot à dire, profitez-en ; il n’y a point de nation qui ne se plaigne des défauts de son gouvernement ; d’où viennent-ils, ces défauts ? C’est que notre esprit manque à la terre dans l’institution de ses lois, c’est que vous ne faites rien de la moitié de l’esprit humain que nous avons, et que vous n’employez jamais que la vôtre, qui est la plus faible.
MADAME SORBIN Voilà ce que c’est, faute d’étoffe l’habit est trop court.
ARTHÉNICE C’est que le mariage qui se fait entre les hommes et nous devrait aussi se faire entre leurs pensées et les nôtres ; c’était l’intention des dieux, elle n’est pas remplie, et voilà la source de l’imperfection des lois ; l’univers en est la victime et nous le servons en vous résistant. J’ai dit ; il serait inutile de me répondre, prenez votre parti, nous vous donnons encore une heure, après quoi la séparation est sans retour, si vous ne vous rendez pas ; suivez-moi, Madame Sorbin, sortons.
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On va te faire esclave à ton tour ; on te dira aussi que cela est juste, et nous verrons ce que tu penseras de cette justice-là.
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Le Spectateur français, VIIe feuille – 21 août 1722


Extrait 4
  
Est-ce là l'esprit, après cela ? Non, nous ne voyons point là ce qu'il est ; mais bien ce que des égards pour des sentiments inconsidérés, le font devenir.
Combien croit-on, par exemple, qu'il y ait d'écrivains qui, de peur de mériter le reproche de n'être pas naturels, font justement tout ce qu'il faut pour ne pas l’être ? D'autres, qui se rendent fades de crainte qu'on ne leur dise qu'ils courent après l'esprit, car courir après l'esprit, et n'être point naturel, voilà les reproches à la mode.
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Le Spectateur français, VIIe feuille – 21 août 1722


Extrait 3
  
Cependant, le jugement qu'on a porté, va son train, sert de règle à je ne sais combien de génies naissants, qui s'y conformeront, qui souffrent pour s'y conformer, et qui ne font rien qui vaille.
Je crois pour moi, qu'à l'exception de quelques génies supérieurs, qui n'ont pu être maîtrisés, et que leur propre force a préservés de toute mauvaise dépendance, je crois, dis-je, qu'en tout siècle, la plupart des auteurs nous ont moins laissé leur propre façon d'imaginer que la pure imitation de certain goût d'esprit que quelques critiques de leurs amis avaient décidé le meilleur. Ainsi, nous avons très rarement le portrait de l'esprit humain dans sa figure naturelle : on ne nous le peint que dans un état de contorsion ; il ne va point son pas, pour ainsi dire ; il a toujours une marche d'emprunt qui le détourne de ses voies, et qui le jette dans des routes stériles, à tout moment coupées, où il ne trouve de quoi se fournir qu'avec un travail pénible. S'il allait son droit chemin, il n'aurait d'autre soin à prendre que de développer ses pensées ; au lieu qu'en se détournant, il faut qu'il les compose, les assujettisse à un certain ordre incompatible avec son feu, et qui écarte l'arrangement naturel qu'amènerait une vive attention sur elles.
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Le Spectateur français, VIIe feuille – 21 août 1722


Extrait 2
 
Après cela, on porte son jugement, parce qu'il faut qu'un homme d'esprit juge ; ne fût-ce que pour mettre son orgueil en possession du respect que ses amis auront pour ce qu'il pense ; et qu'enfin il est comptable à l'attente où ils sont d'une décision quelconque.
On lui fera peut-être des objections de bon sens quand il aura prononcé ; mais voilà qui est fait, il a jugé. Dût son sentiment pervertir le goût de tout le genre humain ; se doutât-il, malgré lui, qu'il s'est trompé ; plutôt que de se dédire, il armera son esprit contre son esprit même ; il confondra ses lumières par ses lumières mêmes ; il s'irritera de voir clair après coup, et parviendra à se persuader qu'il ne voit rien ; tout cela, pour se conserver de bon droit l'honneur d'avoir tout vu d'abord ; car notre amour-propre est inconcevable [...].
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Le Spectateur français, VIIe feuille – 21 août 1722


Extrait 1
  
[...] Ah ! que nous irions loin ! qu'il naîtrait de beaux ouvrages, si la plupart des gens d'esprit, qui en sont les juges, tâtonnaient un peu avant que de dire, cela est mauvais, ou cela est bon ; mais ils lisent, et en premier lieu, l'auteur est-il de leurs amis ? n'en est-il pas ? Est-il de leur opinion en général sur la façon dont il faut avoir de l'esprit ? Est-ce un Ancien ? Est-ce un Moderne ? Quels gens hante-t-il ? Sa société croit-elle les Anciens des dieux, ne les croit-elle que des hommes ?
Voilà où l'on débute pour lire un livre. On lit après ; et que lit-on ? Sont-ce les idées positives de l'auteur ? Non, il n'y a plus moyen ; son nom, son âge et sa secte les ont métamorphosées, toutes gâtées d'avance, ou toutes embellies.
On ne saurait s'imaginer le droit que ces bagatelles-là ont sur l'esprit humain, ni toute la corruption de goût dont elles le pénètrent, ni toute l'industrie machinale, qu'elles lui donnent, pour se falsifier à lui-même ce qui lui passera devant les yeux, pour diminuer, augmenter, arrêter, détourner le plaisir ou le dégoût des sentiments qu'il reçoit.
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Eh ! Qui est-ce qui te prie d’avoir de l’amour pour elle ? Est-il besoin d’aimer sa femme ? Si tu ne l’aimes pas, tant pis pour elle, ce sont ses affaires, et non pas les tiennes.
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L'amour, qui est tendre et galant, se plaît d'honorer ce qu'il aime.
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LUCIDOR.
Non, il n'a pas encore été question du mot d'amour entre elle et moi ; je ne lui ai jamais dit que je l'aime ; mais toutes mes façons n'ont signifié que cela ; toutes les siennes n'ont été que des expressions du penchant le plus tendre et le plus ingénu.
Acte I, scène 1.
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DORANTE: Elle est si aimable qu'on aurait de la peine à ne lui pas parler d'amour.
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SILVIA: (...) Savez-vous bien que, si je vous aimais, tout ce qu'il y a de plus grand dans le monde ne me toucherait plus ?
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SILVIA: (...) Tu peux te passer de me parler d'amour, je pense.
DORANTE: Tu pourrais bien te passer de m'en faire sentir, toi.
SILVIA: Ah ! Je me fâcherai; tu m'impatientes. Encore une fois, laisse là ton amour.
DORANTE: Quitte donc ta figure.
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Nous disions qu'un mari porte un masque avec le monde, et une grimace avec sa femme.
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DORANTE: Tu te fais tort de dire je veux, belle Lisette ; tu n'as besoin d'ordonner pour être servie.
MARIO: Mons Bourguignon, vous avez pillé cette galanterie-là quelque part.
DORANTE: Vous avez raison, Monsieur ; c'est dans ses yeux que je l'ai prise.
MARIO: Tais-toi, c'est encore pis ; je te défends d'avoir tant d'esprit.
SYLVIA: Il ne l'a pas à vos dépens ; et, s'il en trouve dans mes yeux, il n'a qu'à prendre.
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