René Rémond

Les contemporains étaient plus sensibles à ce qui différencie, et même oppose, le libéralisme à la démocratie, et vers 1830 ou 1850, les deux sont même ennemis irréductibles : la démocratie, c'est le suffrage universel, le gouvernement du peuple, alors que le libéralisme est le gouvernement d'une élite.

La position d’un groupe dans l’hémicycle ne suffit pas à trancher la question de son appartenance à la droite ou à la gauche, car, à moins de siéger à l’extrême gauche, on est toujours à la droite d’un autre.

En d'autres termes nous ne pensons pas que toute la réalité historique se ramène, en dernier ressort, aux rapports de production, ni que tous les conflits dont les sociétés sont le lieu se réduisent à la lutte de classes, ni non plus que l'homme se définisse essentiellement par la place qu'il occupe dans le processus de transformation de la nature et que le travailleur soit en lui plus décisif que l'habitant, le croyant ou le citoyen.

"Avertissement"

Ce siècle peut être, à bon droit, appelé le siècle des révolutions car aucun-jusqu'à présent- n'a été aussi fertile en soulèvements, en insurrections, en guerres civiles, tantôt triomphante et tantôt écrasées.

En d'autres termes nous ne pensons pas que toute la réalité historique se ramène, en dernier ressort, aux rapports de production, ni que tous les conflits dont les sociétés sont le lieu se réduisent à la lutte de classes, ni non plus que l'homme se définisse essentiellement par la place qu'il occupe dans le processus de transformation de la nature et que le travailleur soit en lui plus décisif que l'habitant, le croyant ou le citoyen.

"Avertissement"

Les guerres sont, avec les révolutions, la brèche par laquelle le changement fait irruption dans la société.

Le XIXe siècle, tel que les historiens le délimitent, soit la période comprise entre la fin des guerres napoléoniennes et le début du premier conflit mondial, une centaine d'années qui tiennent entre le congrès de Vienne et la crise de l'été 1914, est un des siècles les plus complexes, les plus foisonnants qui soient.

La Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen prévoyait expressément que la liberté individuelle n'était pas illimitée et qu'il appartenait à la puissance publique d'en tracer les limites. C'est effectivement pour préserver les libertés élémentaires, la sécurité, le droit à la vie, l'intégrité physique, que les premières restrictions ont été adoptées.

L'état aussi a une Histoire.
Nous entendons par là que son rôle et sa place dans la société ne sont pas fixés une fois pour toute : l'évolution de ses fonctions a même été une des données majeure de l'Histoire des deux derniers siècles.
L'idée aussi de ce que devaient être et sa responsabilité et ses modes d'intervention a varié substantiellement depuis un siècle ou un siècle et demi.
Aussi manquerait-il une dimension capitale à notre étude si elle omettait de décrire et d'expliquer cette évolution.
On s'attachera donc à en dégager le sens général - si elle en comporte un.
Car la question se pose.....
(extrait de "l'évolution du rôle de l’État", quatrième chapitre du volume paru dans la collection "Points - Histoire" des éditions du seuil en 1974)

La permanence en profondeur d'un courant fondamentalement critique du régime parlementaire , la constance d'un sentiment d'hostilité aux représentants élus révèlent un trait relativement original de la culture politique française dont on ne trouve pas d'équivalent en d'autrespays qui ont le même type d'institutions politiques .

[...] mais tous les pays dits en voie de développement connaissent ce problème, qu'il s'agisse de l'Afrique ou de l'Amérique latine; ces masses miséreuses, entassées dans les faubourgs, les bidonvilles, les favellas, sont les frères des chemineaux, des errants, de l'Europe occidentale du milieu du XVIIIe siècle.

Les historiens ne forment pas une corporation. Le droit de parler d’histoire n’est pas réservé à ceux qui ont passé des concours ou obtenu des diplômes. Chacun, dès lors qu’il applique les règles du métier et se soumet à ses exigences, est historien. Arno Klarsfeld a raison sur ce point : l’histoire appartient à tous, sa connaissance fait partie de l’identité et de la citoyenneté. Les historiens remplissent une fonction sociale, ils agissent par délégation et ils ont à rendre des comptes. L’histoire appartenant à tous, il leur incombe de transmettre ce qu’ils savent et de partager ce qu’ils ont appris. Toute discipline requiert un minimum de compétence : personne ne se risquera à parler d’astrophysique ou de biologie sans avoir acquis une certaine connaissance.

Comme les nationalismes européens, leurs aînés, les nationalismes coloniaux présentent ainsi deux faces qui ne se rejoignent que sur la commune inspiration à devenir maître de leur destin.

Augustin Ibazizen oblige à réviser la légende noire qui a trop longtemps travesti l'image des Croix-de-Feu et du PSF : il atteste l'absence de racisme, l'ouverture sociale et la fraternité entres les deux communautés [française et arabo-berbère]. Il restera fidèle à la mémoire du colonel de La Rocque par delà la mort. (préface de René Rémond, ''Le testament d'un Berbère: un itinéraire spirituel et politique'', Augustin Ibazizen, éd. Albatros, 1984, p. 10)

L'énormité de la dette des pays qui cherchent à se développer est une autre voie par laquelle on s'est avisé de l'interdépendance des économies : une banqueroute des pays débiteurs entraînerait l'écroulement de l'économie mondiale. Pour prévenir pareille catastrophe, les créanciers sont contraints, dans leur propre intérêt, à consentir des délais et des réductions des taux d'intérêt et même d'annuler une partie de la dette. Ainsi diversification croissante des évolutions et interdépendance de plus en plus étroite de tous les pays définissent l'état présent des relations entre les peuples et les continents, qui a succédé au statut colonial.

Gouvernement républicain, mais non pas démocratique, car la République n'est pas nécessairement démocratique, la démocratie étant même plus souvent associée, dans l'esprit du XVIIIe siècle, à un régime de type autoritaire. Le régime de 1787 est un régime libéral qui réserve le pouvoir à une classe aisée, instruite, de propriétaires riches. Nulle part n'est inscrit le suffrage universel, ce n'est donc pas l'ensemble des citoyens qui désigne les pouvoirs, mais le cadre peut se prêter à une évolution démocratique et l'évolution s'opérera, par degrés, vers une démocratie effective.

De là date la dissymétrie entre la puissante union du Nord, et le morcellement de l'Amérique du Sud. Cette inégalité met l'Amérique latine à la merci du Nord, et fausse, d'emblée, le contenu même du panaméricanisme qui ne peut guère être autre chose qu'un instrument de l'hégémonie politique ou économique américaine.

Chaque génération fait une nouvelle lecture du passé. L’honnêteté intellectuelle, c’est de hiérarchiser les affirmations en fonction de leur degré dans une échelle qui va de la certitude scientifique à l’opinion probable et à l’hypothèse à vérifier.

On ne peut pas dire n’importe quoi ni chaque chose et son contraire. Il y a des vérités objectives et leur négation est mensonge.

Aux premiers jours de cette année 1958 la configuration des forces politiques s'est passablement modifiée depuis la coalition tripartite de 1947 : le nombre de partenaires, leur importance respective, le jeu de leurs relations ont évolué.