Citations de Richard Zimler (33)
Aux obsèques d'un enfant, le sol s'ouvre sous vos pieds, vous vous écroulez, vous n'essayez pas de résister quand les ténèbres vous tendent des bras accueillants, parce que vous ne pouvez pas imaginer envoyer un petit garçon ou une petite fille seuls, nus dans les entrailles de la terre.
La vie s'écrit au présent avec l'encre que nous lègue le passé.La mort aussi.
Et parmi le flot ininterrompu de nuage, je vis que le meurtre d’Adam avait chassé la terreur que j’avais de la mort ; rien de pire ne pourrait jamais plus m’arriver.
Si tu t'en sors, Heniek, n'oublie jamais ça : méfie-toi des hommes qui ne voient aucun mystère quand ils se regardent dans un miroir.
De l'Inde au Portugal, sous l'inquisition se joue le drame d'une famille juive à la propre histoire compliquée. Sombrement bien documenté et rythmé, Zimmer signe ici un excellent roman
Si vous avez un fils de sept ans, alors vous avez de la chance, parce que, au cours de vos nuits d'insomnie, et elles sont nombreuses, vous pouvez vous glisser tout doucement dans son lit, il se lovera contre vous avec la souplesse d'une créature en caoutchouc faite de confiance et de sommeil paisible, vous sentirez son souffle chaud contre votre joue, et peut-être, rien qu'une fois, le mouvement de va-et-vient de son dos contre votre poitrine effacera toute frontière entre vous, et vous prendrez conscience que cet amour incommensurable que vous éprouvez pour lui pourrait, un jour, vous permettre de ne plus craindre votre propre mort. (p.444)
Les Polonais qui survivront à cette guerre nous haïront éternellement, parce que les pavés tachés de sang de leurs villes et de leurs villages leur rappelleront leur culpabilité.
Et là, je pris conscience que les miracles se produisent réellement, même si - malheureusement - ils ne sont pas toujours les glorieuses manifestations de transcendance auxquelles on a toujours voulu nous faire croire.
Il suffit d'un traumatisme pour mutiler définitivement un être, et quand je vis Adam étendu à l'arrière de la charrette, je sus que ma vie était finie.
Nous regardions passer une procession de flagellants, porteurs de cierges, qui se mortifiaient à coups de discipline. Les lanières de cuir étaient garnies de boules de cire hérissées de limaille d'étain et d'éclats de verre coloré. Venait ensuite une délégation de moines des couvents de Lisbonne qui brandissaient des banderoles jaune et bleu, brodées d'images du Nazaréen mis en crois. Fermant la marche, des membres de confréries à la mine fière, parés de soieries flottantes, levaient haut des litières portant des effigies des saints. Une foule s'était rassemblée pour assister à la procession, formant de part et d'autre de la rue, jusqu'aux abords de la cathédrale, deux haies désordonnées contre le blanc poussiéreux des façades, implorant alternativement la pluie et la miséricorde avec des cris qui sonnaient comme une antienne.
Je grimpai sur la charrette et m’agenouillai auprès de mon petit-neveu… Alors qu’un désir fou de le voir se lever faisait ruisseler les larmes sur mes joues, je lui demandai pardon. Je ne voulais pas qu’il pensât qu’il avait fait quelque chose de mal ; un enfant ne devrait pas affronter la mort la culpabilité au cœur. Je m’apprêtais à prendre le petit dans mes bras pour le porter à l’étage, mais quelle ne fut pas ma stupeur, en soulevant la couverture, de découvrir qu’il était nu et que sa jambe droite avait été coupée en dessous du genou !
Méfie-toi des hommes qui exhibent leur châle de prière en public.
Tuer un homme n'est pas si difficile que ça. C'est ce que m'a appris une Polonaise à la fureur silencieuse.
Le moins que nous puissions faire pour nos morts est de rendre à chacun sa singularité.
Les nazis veulent la mort de nos enfants car ils veulent nous priver de notre avenir.
Si j'avais pensé à notre exil dans le ghetto comme à un rêve et que je l'avais correctement interprété, j'aurais été plus prudent, car j'aurais alors su qu'ils nous avait transportés sur une île pour nous voler plus facilement notre avenir - et pour empêcher le reste du monde de le savoir.
Crois-le ou pas, inspecteur principal, saigner entre les jambes n'est pas la chose la plus rigolote du monde. Si ça arrivait aux hommes, on écrirait des encyclopédies sur le sujet. (p.124)
Vous savez déjà que je ne suis guère vaillant. En tout état de cause, il n'est pas facile de mettre le dernier mot, fût-ce à une histoire où j'ai eu le mauvais rôle.
Nos secondes chances , peut-être les seuls fantômes qu'il nous sera jamais donné de voir apparaitre .
Les hommes n'aiment pas les femmes qui ont le mauvais goût de vieillir. (p.105)