Robert-Jacques Thibaud

Nous ne pouvons plus lire spontanément l'enseignement illustré par les chapiteaux et sculptures de l'art roman parce que plusieurs générations de mauvais clercs nous ont persuadés que la candeur et l'ingénuité médiévales étaient de l'ignorance.
Ces siècles lointains que quelques-uns n'hésitèrent pas à qualifier de "nuit médiévale" tandis que notre civilisation s'enfonçait dans un matérialisme furieux, furent en réalité une des époques des plus riches et des plus fécondes qu'ait connue notre histoire.
Miraculeusement, subsistent en Bourgogne de nombreux témoignages de ce temps où l'art s'associait étroitement à la foi, où l'on ne distinguait pas le geste du sculpteur des mains se joignant pour la prière.

Fidéisme
Théorie philosophique fondée sur une pensée de Pascal spécifiant que la foi religieuse dépend du sentiment et non de la raison. Cette réflexion affirmait la supériorité de la foi sincère sur le raisonnement intellectuel dans la mesure où la foi peut seule éclairer le chemin menant vers la vérité. (page 111)

Il fut un temps où, sur la Terre, Horus protégeait le lever du Soleil que les ennemis de la Lumière ne parvenait jamais à empêcher. Isis y veillait tandis que dans l'Au-Delà, Osiris donnait une nouvelle vie à ceux que la mort avait emportés sur la barque funèbre. Le monde était toujours en équilibre.
En Égypte, se trouvaient déjà réunis les deux axiomes sur lesquels grecs et chrétiens basèrent leur sagesse et leur foi : "Connais-toi toi-même" et "Aime ton prochain comme toi-même". (page 9)

Figuier
Par la multitude de grains que contient un seul de ses fruits, eux-mêmes nombreux, le figuier, dans toutes les religions méditerranéennes, symbolise la fécondité et l'abondance. L'Ancien et le Nouveau Testament, le Coran utilisent souvent l'image de la fructification du figuier dans les paraboles invitant chacun à produire de bons fruits, c'est-à-dire des bonnes œuvres.
En ce dernier sens, le figuier est l'illustration de la science religieuse et de la nourriture qu'elle peut offrir à ceux qui la recherchent dans le désert du monde.
(page 111)

L'Égypte ne voulut jamais chercher ailleurs que dans ses temples sa conscience du monde.
Elle ne souhaita jamais l'imposer aux autres, c'est pourquoi elle ne reçut qu'avec réticence quelques étudiants grecs à qui elle reprochait leur ignorance et leurs bavardages.
Ils avaient pour nom Homère, Solon, Pythagore, Démocrite, Eudoxe, Hérodote, Jamblique, Platon, Plutarque et Thalès.
(page 10)

... Les symboles, comme l'antique Sphinx, ne répondent jamais aux questions qu'on leur pose : ils interrogent.
Notre "Dictionnaire..." permet de comprendre quelle question pose le symbole, dans quel domaine, dans quelle étape de conscience il se situe plus précisément. Ce sera alors au lecteur visiteur de reconnaître dans quelle phase de sa route personnelle le symbole qu'il contemple lui demande d'être plus vigilant, quel travail il lui serait bénéfique d'accomplir.
Selon cette compréhension, le chemin suivit dans un édifice devient un parcours initiatique, de sorte que de chapiteau en chapiteau, de pilier en pilier, un dialogue s'établisse entre celui qui marche et les vénérables pierres médiévales qui le guident.
Comme l'alchimie de la matière transmute le plomb ténébreux en or étincelant, le symbole et la voie qu'il propose transforment le disciple en fils de la Lumière.
Il le fait héros.

... le texte de Jacques de Voragine se termine en rappelant que tout en étant, individuellement un temple, chaque chrétien est un élément, une pierre (polie ou pierre carrée) appartenant à l'édifice de Dieu.
Inversement, chaque chapiteau ou élément de l'édifice est donc naturellement une partie de l'homme, ou un moment (expérience) particulier de son existence. C'est ainsi que l'autel est le coeur, la partie Est la tête, la partie Ouest les pieds, la crypte, les origines où l'on pourra se reconnaître à une époque ou une autre. Ce sera là un lieu ou un temps de méditation.
...
Temple de Dieu, l'église est nécessairement le Temple de l'Homme puisque dans sa démarche verticale, l'homme manifeste l'activité cosmique et divine. Il en est sa représentation (son image) sur la Terre.

Des courants d'énergie, soit naturels tels que ceux des rivières souterraines, soit aménagés par l'orientation et l'architecture (cryptes, ogives, fondations), concourent à l'harmonisation physique, psychique et spirituelle des visiteurs, afin qu'ils acquièrent un état de quiétude suffisant pour recevoir l'enseignement sacré. Il s'agit d'un ensemble de techniques alliant la connaissance spirituelle aux forces naturelles (telluriques) maîtrisées représentées dans le bestiaire symbolique par les dragons, les vouivres et autres salamandres ailées ou couronnées. C'est cet enseignement que nous transmet, de siècle en siècle, la Tradition.

C'est là le miracle que génèrent les images symboliques : mettre l'individu en harmonie sur les trois plans qui organisent le monde, dont il est lui-même une image. C'est à dire lui faire vivre les trois niveaux de compréhension que comporte tout symbole. Quelle que soit l'image considérée, il s'agit toujours du plan physique, du plan mental et du plan divin.
On peut traduire ces notions par des termes plus profanes tels que "l'émotion esthétique, la recherche intellectuelle et la quête spirituelle", bien que le sens profond et la démarche restent parfaitement similaires.

Alpha et Oméga
Première et dernière lettre de l'alphabet grec, Alpha et Oméga illustrent le commencement et la fin cyclique de toute chose. Ils font référence à la parole du Christ annonçant qu'il est précisément ces deux termes (Apocalypse 21), c'est-à-dire une parfaite totalité. Sur les tympans romans, la mandore ovale dans laquelle apparaît le Christ en majesté du jugement dernier illustre ce symbolisme. (page 11)

Zen
Le but du zen est de parvenir à l'illumination (satori) sans que soit exigé un travail intellectuel ni une recherche spirituelle ou philosophique.
Il suffit de découvrir intuitivement la nature de Bouddha comme le dévoilent les koans, sorte de problèmes insolubles qui démontrent que le raisonnement et l'intelligence ne sont pas nécessaires pour que s'éveille la prajna (sagesse) qui sommeille dans tout être humain. (...)
L'intuition y est jugée supérieure au raisonnement intellectuel, car le zen n'a pour objectif que le développement de l'être et la connaissance de soi selon l'aphorisme Regarde en toi, tu es le Bouddha...
(page 284)

Raphaël
En hébreu, Dieu a guéri. L'un des sept anges qui se tiennent devant la gloire du Seigneur et pénètrent en sa présence. (Tobit 12,15). Le catholicisme considère Raphaël comme l'un des archanges. Il est le patron des voyageurs.

YI King
Le Livre des transformations. Peut-être le plus ancien des livres sacrés chinois, à la fois livre de méditation, de philosophie et manuel de divination fondé sur l'étude de 64 hexagrammes établis sur les principes du yin et du yang et sur les cinq éléments du monde, le bois, l'air, l'eau, le métal et la terre, qui composent l'ensemble des hexagrammes.
(page 280)

Tao Te King
Le Livre de la voie et de la vertu, qui aurait été écrit au Vie siècle avant notre ère par Lao-tseu bien que l'on s'accorde aujourd'hui sur une rédaction plus tardive située vers le IIIe siècle avant notre ère. Le Tao Te King est la base et l'enseignement fondamental du taoïsme et de la sagesse traditionnelle chinoise. (page 256)

Axiome symbolique : on n'interroge pas un symbole, on se laisse questionner par lui car, en nous se trouve la réponse.

On ne peut lire un "livre muet" tel que les quarante-deux chapiteaux de Saint-Andoche sans le considérer dans son contexte naturel : l'église médiévale. Pour cela, il faut connaître les raisons de l'orientation de celle-ci, comprendre comment elle organisait l'espace où les fidèles recevaient la Parole et la Lumière.

"... les images placées dans l'église servent à réveiller le souvenir, la dévotion et l'instruction : ce sont, en quelque sorte, les livres des laïcs."
citation de Jacques de Voragine, La Légende Dorée (Legenda aurea), début du XIII° siècle.

La consécration rituelle de l'autel est faite pour qu'il devienne le lieu collectif commémorant le sacrifice divin. Au plan individuel, il appartient à chacun de comprendre qu'il s'agit d'un passage exigeant une attitude correspondant aux actes que nous venons rapidement de décrire. Le fidèle, ou celui qui a entrepris le parcours, doit devenir lui-même l'officiant et l'autel, le sacrificateur et la victime. Il doit apprendre à mourir pour renaître, comme l'avait préfiguré le baptême rituel au début de son chemin.

Les traditions celtiques restèrent dans les mémoires , et les forêts que les druides honoraient de leur culte. Brocéliande et les plaines sacrées d'Irlande , furent des témoins immobiles nous rappelant combien les dieux ,les héros et les bardes étaient proches de nos actuelles préoccupations.Combien ils nous étaient indispensables.