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Citations de Sarah Jollien-Fardel (207)


Je ne suis pas n'importe qui. Je suis la fille de ce monstre, je suis la femme qui trompe, je suis la femme qui a frappé, je suis la femme sèche de l'intérieur, je suis la femme aux entrailles pourries, je suis la fille qui n'a sauvé ni sa mère ni sa sœur, je suis la fille d'un meurtrier, je suis la fille vide qui regarde son père mourir, je suis la femme qui n'écoute pas sa compagne lui dore:"fais la paix."
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Elle était résignée. Obéissante aux lois maritales et plus encore aux jugements villageois. Dit à la valaisanne, c'était : "Tu la fermes et tu serres les dents." Si je reconnaissais des qualités au caractère tenace des habitants de la région, je pouvais probablement le ressentir chez moi, ce tempérament dur, forgé par mon père, mais aussi par les lieux, par la géographie et les éléments impitoyables, les montagnes qui nous refermaient sur nous-mêmes, les parois verticales noires ou grises. Je pouvais désormais comprendre et chérir ce versant attachant de mes origines. Mais je ne parvenais pas à admettre le sacrifice jusqu'au-boutiste de ma mère.
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Tu sais qu'il y a des abricotiers, mais pas partout, et que les agriculteurs les chouchoutent lors de leur floraison, la peur au ventre de perdre leur gagne-pain à cause du gel ? Les nuits trop froides, ils déposent au pied de leurs troncs des chaufferettes. C'est d'une beauté à faire pleurer, ces scintillements au petit matin.
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J'ai entendu le hoquet de Marine, derrière mon dos, qui ravalait ses sanglots. Filmé, ça aurait filé la chiale à n'importe qui. Je ne suis pas n'importe qui. Je suis la fille de ce monstre, je suis la femme qui trompe, je suis la femme qui a frappé, je suis la femme sèche de l'intérieur, je suis la femme aux entrailles pourries, je suis la fille qui n'a sauvé ni sa mère ni sa soeur, je suis la fille d'un meurtrier, je suis la fille vide qui regarde son père mourir, je suis la femme qui n'écoute pas sa compagne lui dire :"Fais la paix."
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Dans ce bled, réputé loin à la ronde pour son manque solidarité et son inclination à la méchanceté, ils étaient venus en masse se repaître de notre misère publique. Ma colère, compagne éternelle, éventrait mon estomac. J'aurais dû ne pas faillir en public. Je n’ai pas pu. Sitôt sur le parvis de l’église, endolorie, j’explose. C’est laid, ça entache la solennité du moment Ma mémoire, pourtant intransigeante et impeccable, a effacé le monologue que j'ai vomi au visage de mon père. Une tante que je connais à peine, sœur de ma mère, m'entraîne alors que je hurle, ça je me le rappelle: «Tu l’as violée, tu l’as tuée.»
Mes adieux à ma sœur se sont terminés au sommet de ces marches en pierre. On m’a emmenée de force à l’internat. Je sautais comme un cabri, j’éructais, je bavais, le mari de ma tante m'a giflée: «Elle fait une crise de nerfs, appelle un docteur.» Une cousine m’a chaperonnée pour la nuit. J'émergeais, me rendormais, me réveillais en pleurant. Des cauchemars sombres, mon père qui m’étrangle. Je manque d’air, j'entends des cris, des «J’appelle la police» de la surveillante de l'internat Il est là, complètement ivre: «Je vais te tuer, sale garce!» Je ne réagis pas, sonnée par les médicaments. p. 54
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J'observe à la dérobée la spécieuse Charlotte. Avec les années de recul, je comprends ce qui ébahit les autres dans cette bulle hypocrite des apparats: son allure, ses grands airs, ses moues étudiées, sa façon de laisser penser à l'autre qu'il est unique.
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J'étais la fille bizarre.
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Moi qui, si longtemps, étais demeurée en marge, de ma famille, de l'école, des gens. Moi qui pensais, prétentieusement, être différente, je réalisais que, dans la solitude de ma chambre, grâce à mes lectures hasardeuses et vagabondes, des liens s'étaient tissés malgré moi. Que, dans le fond, je n'étais pas totalement en dehors du monde. Que ma peur, quotidienne, lancinante, n'avait pas tout dévoré.
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Ces mots connus de tous, arrangés à ma sauce, accolés à un adjectif plutôt qu'à un autre, formaient ce truc qui n'existerait pas sans moi.
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Ma faiblesse à moi, c'était l'orgueil. Un orgueil qui m'a tenue vaillante et debout. Il m'a perdu aussi. J'étais une enfant. Je comprenais sans savoir.
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Tout va trop vite dans ma tête. Laisser éclater là, sur la table, entre nous, ce qui m’habite et dédouble virtuellement ma vie. Oser dire, avouer, vomir cet amour silencieux, expurger mes sentiments. On sait tous que les paroles ne sont pas forcément la vérité, mais qu’elles peuvent modifier la réalité. Définitivement. Radicalement. L’avant et l’après. L’avant, rassurant. L’après, vertigineux. Alors on verrouille l’estomac, on clôt les lèvres qui veulent articuler, on pince avec les dents, pour être bien certain qu’elles se tairont, ces insensées.
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Les jours suivants, le corps, mécaniquement, se plie aux obligations. La mort fige tout. Des instants qui, sur le moment, ne sont que les bribes d'une scène banale demeurent imprimés pour toujours. Des tableaux de la vie arrêtée net dans son élan, qui forment des images. Le nouveau deuil se superpose aux morts précédents.
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C'étaient invariablement les mêmes scènes . ll rentrait aprés sa journée sur les routes. Il empestait l'alcool. S'il s'asseyait au salon dans le canapé en cuir décrépit, s'il s'endormait, on savait alors que nous serions, toutes les trois, en paix pour quelques heures. S'il posait son corps massif sur une chaise de la cuisine, s'il prenait un couteau pour ouvrir des noix ou pour trancher un morceau de ces fromages qu'il faisait vieillir dans la cave au sol terreux, on n'y couperait pas. C'était d'une banalité désolante. Un scénario usé jusqu'à la corde, où chacun jouait le rôle qui lui était prédestiné. Personne n'avait le recul du spectateur. Nous étions tous les quatre embarqués dans la même valse, où chacun posait les pieds au bon endroit. Nous n'avions ni la conscience, ni l'imprudence de risquer un autre pas.
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Sarah Jollien-Fardel
Les gens qui sont empêchés ont aussi des mains tendues mais ils n’arrivent pas à les attraper, ou pas assez fort.
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Nous étions tous les quatre embarqués dans la même valse, où chacun posait les pieds au bon endroit.
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Alors je sais. Je sais que je n’ai jamais trouvé de sens. Je n’ai pas fait semblant, j’ai vécu un jour derrière l’autre sans qu’aucun ait pu effacer la peur et la rage de mon enfance. Ce n’est pas grand-chose pourtant une enfance. Mais c’est tout ce qui subsiste pour moi. Je ne sais pas me réfugier ailleurs.
Je sais que rien ne m’émeut jusqu’au bouleversement, jusqu’à déliter ma colère. Que les fondations de mon enfance ne sont pas assez solides pour que je tienne debout. Je pense à la terre des jardins qu’on retourne au printemps, à ce que disaient les vieux du village : Y a pas moyen, t’as beau rajouter du fumier, ça prend pas. La terre n’est pas bonne. »
Je ne suis pas bonne. Ça prend pas. Mauvaise terre, mauvaise graine.
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J’étais incapable d’arracher toutes ces couches qui m’agrippaient comme des ronces. La colère s’insinuait partout dans ma peau.
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Dieu pardonne. Pas moi.
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Comme tous les autres, elle nous évitait. Ne pas voir ni regarder notre maltraitance, la rendre invisible, c’était la rendre inexistante. Le docteur n’était pas l’unique lâche du village.
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Mon instinct d’animal reprend le dessus : décamper.
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