Interview de Selden Edwards (en anglais)
Quand les gens commencent à penser que le progrès va de soi et que la vie est facile, ils perdent toute croyance en l'héritage culturel de leurs pères et ils s'enlisent.
Il disait que la principale fonction de la musique était d'organiser le réel en harmonies qui nous font oublier que nous sommes entourés de hasard. D'après lui on peut en dire autant des grands livres.
Je commence à m'embrouiller dans les temps verbaux.
Je ne sais plus trop si je dois dire est, était ou sera.
" Il n'y a pas de menteur plus convaincant, conclut Wheeler, que celui qui est certain de dire la vérité."
Seigneur, lâcha Wheeler en un souffle. Je n'y crois pas. Tu es à la recherche d'Adolf Hitler. Et qu'est-ce que tu comptes faire si tu le trouves ?
Si lui même se sentait coupable de flirter avec la mère de son père, Dilly, de son côté, fomentait une intrusion aux conséquences infiniment plus graves.
Moi qui croyais que tu voulais avancer sur la pointe des pieds pour ne rien changer au cours de l'histoire !
J'aimerais juste aller le voir.
Mais au nom du ciel, c'est un petit garçon de 10 ans !
Huit, en fait. Je voudrais juste le voir.
Son ton n'était pas du tout convaincant. Wheeler eut une soudaine révélation.
C'est pour ça que tu es venu ici, n'est-ce pas ?
Les guerres étaient folles, inutiles et absurdes, mais elles étaient surtout atroces et honteuses parce qu'elles tuaient des individus. La mort d'un million d'hommes est une statistique, disait le dicton; la mort d'un seul est une tragédie.
il se leva à l'heure habituelle le lendemain matin et avala une brève collation avant de partir à l'atelier. Une fois sur place, il se précipita vers la table où il était certain de l'avoir laissé. Pas de journal. Les tripes noués de terreur, il se retourna lentement vers la verrière sous laquelle Weezie s'était assise la première fois, tel un personnage de Vermeer. Elle était là, fixant sur lui un regard étrangement dénué d'expression. Toue couleur semblait avoir quitté ses traits. Le journal de Wheeler était sur ses genoux, grand ouvert.
"Tu...tu l'as lu ?"demanda t-il,inutilement.
Elle acquiesça. "En entier ?"
Elle hocha de nouveau la tête, toujours avec ce regard vide.
"De la première à la dernière ligne. cela m'a pris presque toute la nuit.
Voici, grossièrement résumée, la synthèse que [Freud] en fit. L’enfant, un Autrichien maltraité par son père et en situation d’échec scolaire, devient, une fois adulte, dans les années 1930, le chancelier charismatique d’une Allemagne unifiée. Ce pays, qui vient de perdre une guerre contre la France, l’Angleterre et l’Amérique, a lui-même connu l’agression et l’humiliation. Le vieil empire austro-hongrois s’est désintégré. Par l’usage de la peur, de la propagande et de la violence, cet homme d’état maléfique rallie le peuple à sa cause, relance l’activité industrielle et militaire et rend à l’Allemagne son statut de puissance internationale. Une fois bien installé au pouvoir, il lance une campagne de conquête planétaire et, en parallèle, d’extermination du bouc émissaire le plus évident qui soit : les Juifs.
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Ce matin-là, seul à sa table du café Central, Wheeler repensa à une remarque faite par son père lors d'une de leurs conversations initiales. "Nous savons comment tout cela a fini, avait-il dit en parlant des inévitables problèmes posés par leur remontée dans le temps. C'est assez perturbant, mais nous allons devoir nous conformer aux causes et aux effets qui ont d'ores et déjà déterminé nos passés respectifs".
N'a t'il pas la possibilité d'épargner au monde un bain de sang et de souffrance s inutiles en l'eliminant séance tenante ? Cela changera t'il vraiment le cours de l'histoire, ou bien un autre personnage aux motivations similaires, sinon pires, émergera t'il à sa place pour combler le vide ? N'a t'il pas au contraire l'obligation de laisser l'histoire suivre son cours sans intervenir en quoi que ce soit ?