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Critiques de Serge Doubrovsky (24)
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Corneille et la dialectique du héros

Paru en 1963, toujours disponible, qui plus est en format poche, cité dans les bibliographies des œuvres concernant Corneille, on aboutit un jour ou l’autre à ce livre lorsqu’on s’intéresse à cet auteur.



Serge Doubrovsky aime visiblement beaucoup le dramaturge du XVIIe siècle et semble avoir passé beaucoup de temps dans la compagnie de ses œuvres, y compris les moins prisées actuellement. Il remet en cause un certain nombre (presque toutes) d’approches qui en ont été faites précédemment, et pense que la critique progresse et avance, dépasse les travaux antérieurs. Il récuse une approche qui s’intéresse de trop près au contexte historique et à la vie de l’auteur, car c’est l’oeuvre qu’il s’agit d’analyser, et pour cela la connaître en entier est indispensable, c’est dans la progression, l’évolution, dans la logique interne, que le sens se révèle.



Je suis très sensible à l’idée de reprendre tout Corneille, à partir de la première pièce, et d’essayer de comprendre ce qui se construit à partir de là. Car pour les avoir relu récemment, je leur trouve un grand intérêt. L’idée assez répandue selon lequel le seul « vrai » Corneille serait celui des quelques pièces canoniques du milieu de carrière, avant il ferait ses gammes, et après c’est la décadence, me semble absurde. Corneille est juste quelqu’un qui a toute sa vie essayé des choses, réfléchit à ce que devrait être une pièce de théâtre, et ne s’est pas contenté d’appliquer la même recettes, même s’il y a une cohérence et une logique dans sa démarche qui donnent une unité à l’oeuvre, même si elle est moins facile à saisir que pour d’autres auteurs. C’est pour moi un des grands mérites du livre de Serge Doubrovsky que de défendre ce point de vue.



Après, on peut être plus réservé sur les outils qu’il utilise : la notion existentialiste de liberté et la dialectique du Maître et de l’Esclave inspiré de Hegel. Même si ces notions apportent quelques idées intéressantes, elles ne peuvent êtres les seules clés, et d’autres lectures sont possibles. Cette multiplicité des lectures que permet une grande œuvre est d’ailleurs une idée sur laquelle insiste Doubrovsky lui-même. On peut aussi s’interroger sur « l’oubli » d’un certain nombre de pièces, qui collent sans doute moins bien dans son schéma d’analyse, Médée, sa première tragédie, et les pièces à machines, par exemple.



Mais Doubrovsky pointe la notion de l’Histoire chez Corneille de manière assez intéressante, les vicissitudes et finalement l’impuissance du héros cornélien tel qu’elle semble se dégager pour Doubrovsky de l’ensemble de l’oeuvre, mettent en évidence l’impuissance de l’aristocratie au XVIIe siècle et annonce sa fin. Mais au-delà, elles pointent d’autres impuissances et d’autres fins, d’autres groupes sociaux, dans un aspect universel et intemporel.



Pas toujours simple à lire, sans doute ayant un peu vieilli, et quelque peu systématique dans ses partis pris, c’est toutefois une lecture stimulante pour ceux qui s’intéressent à Corneille.
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Fils

Après "Un père" (de Sibylle Lacan), "Un fils" (de Jo Nesbø), "Où on va papa?" (de JL Fournier), "Un fils obéissant" (de Laurent Seksik), "Un bon fils" (de Pascal Bruckner) et quelques autres romans ou essais traitant de la relation père/fils, j'avais l'intention de terminer l'année par la lecture de "Fils" de Serge Doubrovsky, livre publié en 1977 et premier ouvrage revendiqué par son auteur comme autofiction. Mais le style de l'ouvrage m'en a dissuadé. J'ai cru pendant une cinquantaine de pages que j'allais m'habituer à ce torrent indompté de mots et de phrases amputées, j'ai même cru pendant un moment que c'était peut-être là un des plus beaux textes qu'il m'ait été donné de lire en cette année 2018, mais l'illusion n'a pas duré très longtemps et au bout d'environ 150 pages, je jette l'éponge en ayant quand même le sentiment que, peut-être, un jour, qui sait ?, j'aurai envie d'en reprendre la lecture. Mais en cette fin d'année, j'ai vraiment envie d'une lecture moins "prise de tête". Vous me comprenez, j'espère ?
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Fils

Ce n'est pas le plus facile mais, à mon sens, c'est le meilleur Doubrovsky. Le manuscrit original partiellement reconstitué était énorme (il a depuis été publié sous le titre "Le Monstre") et a été refusé. Il s'agit d'un livre très puissant où on trouvera une vraie-fausse séance de psychanalyse époustouflante. Une écriture très particulière où priment le rythme, les sonorités, le travail du signifiant et où les ressources de la typographie sont exploitées de manière très expressive.



Difficile et inutile de résumer ce livre qui raconte une journée du professeur Doubrovsky depuis son réveil jusqu'à son cours sur le récit de Théramène à l'université de New York (je ne sais plus laquelle…) en passant par rêves, embouteillages, passé d'enfant juif caché, mariage raté, division entre France et États-Unis, vie de campus. Du grand art pour ce livre qui fut le premier auquel Doubrovsky donna le nom d'autofiction dont il est l'inventeur.
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L'après-vivre

A l'image de son livre "Le livre brisé", paru en 1989 et qui obtint le Prix Médicis, Serge Doubrovsky relate pendant 400 pages sa vie vide ou en berne, ses joies, ses humeurs, ses déconvenues,  ses espoirs, ses maux et ses amours. Il aurait pu me lasser en relatant ce qui touche à l'intime or il n'en est rien. Il sait m'embarquer grâce à ses mots, son parler cru, intime. Son écriture est le reflet de ce qu'il vit au plus profond de lui : avalanche de mots, absence de ponctuation parfois, phrases entrecoupées d'espaces blancs leur milieu, des capitales en pleine phrase. Un vocable et un style d'écriture qui transcrivent ce qu'il est et ce qu'il vit. Malgré les tumultes dans sa vie amoureuse, personnelle, familiale, il n' y a rien de trop dans sa façon de le dire. Il y a parfois des passages inutiles (surtout au début) mais comme il prend le parti de tout dire, il ne peut faire abstraction de certains faits. Un récit sans épuration. Parfois envahissant avec la longueur de ses phrases, étouffant avec ses avalanches de mots, mais je l'accepte car j'aime cet homme à travers ce qui le constitue et qu'il raconte même s'il m'épuise parfois. Il n'est d'ailleurs même pas question de défauts et qualités car à aucun moment je ne saurais le découper de la sorte. Je le prends tout entier tel qu'il est. 

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La Dispersion

L'histoire en elle-même est simple : des fragments de mémoire se rapportant à la femme perdue, aux moments disjoints d'une rencontre, l'échec d'un amour mêlé à un échec beaucoup plus terrible : l'infamie d'être enfant juif sous l'occupation. L'étoile jaune est de celle que rien ne peut éteindre. Mais le tout n'est pas raconté; c'est le déroulement, dans la tête d'un homme, d'une quantité d'événements, sans ordre, sans tenir compte du temps ou de la logique classique. Le climat est créé par les voies de l'écriture. Tout le roman n'est que dispersion narrative, mais trouve son unité dans le souffle.
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Le livre brisé

J'ai lu ce livre lorsque je travaillais ma thèse et sa lecture a été un réel plaisir et pas seulement une référence bibliographique nécessaire.
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Le livre brisé

Un livre qui nous brise, littéralement, et qui brise toute envie de lecture autre. Il faut du temps pour s'en remettre et se remettre à lire ensuite. Bouleversant.
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Le livre brisé

En quelques mots, en quelques phrases, sans emphase, Serge Doubrovsky m'a emportée, transportée. Portée par son texte, je me suis laissé prendre. Sans préliminaire, sans préambule, je me suis laissé entrainer dans sa bulle. Bulles de savon, ça explose. Savais pas que cela me ferait ça, comme ça. Avec tous ses jeux de mots, ses nombreux maux, il triturait mon cerveau avec des mots. Démoniaque écrivain qui m'a fascinée. Transporté mon imaginaire. Laissé séduire par son imagination. Imagine le plaisir à chaque page, à chaque phrase. Imagine comme il m'a alpagué pas à pas. Pas la peine de le nier.

Pour tous ses sujets, toutes ses passions, ses thèmes de prédilection, les penseurs, les philosophes, Sartre, le couple, ses femmes, sa femme, la guerre. Guerre le temps de m'y arrêter. Fallait le suivre, tout le temps, dans ses errements, ses réflexions, ses détournements de mots incessants, ces décompositions indécentes. Descentes et remontées. Des sens démontés émerveillent. Des sens qui s'éveillent. L'existence précède l'essence... le sens de la vie. Juste par des mots, le sens et contresens de chaque mot. L'essence de notre amour des lettres. Déchiffre des lettres. Des sourires et du charme. du coeur et de l'âme, j'ai déposé les armes. Pas cherché à résister. Purement irrésistible. Pureté du style, du stylo. Un vrai styliste de la langue. L'oeil et l'esprit. Mais moi j'ai pas la plume, le pinceau ni même de dico sous la main. Mais moi, j'ai pas assez de termes ni d'esprit pour dire combien c'est beau. C'est de l'art. du lourd.

Comme j'ai savouré me plonger dans son monde d'intello, de penseurs. Plongée en apnée. En ape senteur le suivre dans ses pensées. J'pense qu'il me remplit d'intellect, de mots et d'émotion. de raison, déraison et de sensation. Pense qu'il est doué des mots. Il joue avec les langues. Il joue avec la langue. Il manipule les mots comme il jongle avec l'esprit. Pervers, il triture notre cortex. Retord, les mots il les tort et décortique un à un, mot à mot, du tac au tac, comme un tic, comme un toc, tous ses maux, il les dissèque, quel mec. Jamais sec dans ses phrases courtes. Il court toujours, il cherche et se passionne. Passionné, passionnant. Sans concession, il avoue ses imperfections. Sans fard, il poursuit sur ses travers. On le suit vers un ailleurs. On poursuit, on l' poursuit. On en veut encore de sa verve comme une jeune fille happée, harponnée par un beau parleur.

Mais, lui, il nous parle de plus en plus de son histoire avec une autre. Il parle de son amour perdu, de sa jeune femme disparue et là on ne sourit plus on ne respire plus. Passant de phrases courtes en phrases longues sans ponctuation hachées débitées comme on parle on discute on ''débatte'' on halète on suffoque.

Ce roman c'est pas sec. C'est sexy. C'est de la zic. Rock et jazzy. Ça sonne juste, justement. On s'attache comme ça touche. C'est tout chaud. C'est touchant. C'est troublant. Captivant. Bouleversant... Poignant.

De la musique j' vous dis. du jazzy au gospel, des sourires aux larmes en ribambelle. Ça s'emmêle. Ça s'embrume. Comme ma plume.

Ce ton, c'est du rythme. le rythme de sa vie, sa vie de prof, d'auteur, de père, de mari. de New-York à Paris. C'est un hymne d'amoureux fiévreux, malade des mots, malade d'amour, d'amour trépassé. Et de l'esprit éveillé on passe au corps malmené. Ça prend aux tripes ce poème. Ça mouille les yeux comme ça saigne.

Et c'est bien la vie, tout ça, tout ce rythme et ces rimes. Et moi je rame à tenter de m'arrimer à son niveau. Vaux pas grand-chose avec mes jeux de mots faciles que j'répète mais Doubrovsky valait bien que je m'égosille à parler de lui et de ce texte. Et j'en souffre encore de ces dernières pages. Et je me tais, la gorge serrée. Plus de mots. Mise à mal par ce livre brisé. Comme sa vie en éclats.

Et moi j'ai juste tenté de raconter combien j'ai aimé. Mais moi et mes émois tourneboulés (Tais-toi je me tue). C'est tout ce qu'il faut retenir de ce billet. Emoi et le plaisir jouissif de le lire. Et moi et la tristesse tant ressentie à le lire.

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Le livre brisé

Le livre brisé, prix Médicis 1989.

Ce n'est pas un livre de plaisir, mais celui d'une époustouflante construction, d'un jeu, sans qu'il en soit un, entre construction/destruction, actif/passif, fictif/vrai, chacun jalousant le rôle de l'autre, avec un crescendo de suspense que la quatrième de couverture n'arrive pas à diminuer.

Le fil de la diégèse fait des soubresauts, des bonds grisants qu'à moitié annoncés, en va-et-vient entre le passé et le présent, la bio et la fiction, la dernière en conflit accepté avec la première : "Vieillir offre assez d'inconvénients pour présenter de modestes avantages. J'ai ma recette. Je commence à connaître la cuisine. Une vie passée, quand on la débite en tranches, un peu saignantes, blessures de guerre encore ouvertes, crève-cœur toujours à vif, ballade des amours évaporées. Mais où sont les neiges d'antan ? D'un seul coup, elle se transforme. Elle devient un vrai roman. UN ROMAN VRAI. Ça fait coup double. On chatouille l'imagination. On certifie que l'imaginaire est véritable. Jouissance double : le rêve et la réalité."

Roman écriture, roman introspection, condamnation et raison de vivre.

Trou de mémoire, la mémoire passive subit les souvenirs, ne travaille plus le passé, n'adoucit plus les plaies, elle laisse traîner le noir et l'amertume, difficiles à digérer : la guerre, les juifs, les déportations, la peur.

Le style suit de près en électrochocs : coupé, sec, douloureux, abrasif, essoufflé. "Ecrire ne m'a jamais délivré. Je n'ai jamais été libéré. Les mots ne sont pas des actes. Même imprimés, ce sont des paroles en l'air... A l'époque, je n'avait pas voix au chapitre. Maintenant, j'emplis des chapitres de ma voix. Je vocifère en vain, fureurs inutiles. Le passé, on peut le raconter, l'écrire. On ne peut pas le récrire... Pour dormir, il faut avoir la conscience tranquille. Tout le sang que je n'ai pas versé pèse à jamais sur la mienne... Je me replonge dans mes bas-fonds, jusqu'au tréfonds. Désespérément, je sonde, je fouille. Pas un reste, pas une trace. Tout à disparu dans un absolu naufrage. Comme une épave, je suis là, pétrifié, sur le terre-plein de l'Etoile, devant ce désastre. 8 MAI 45 : TROU DE MEMOIRE."

Mélange de souvenirs et d'imaginaire, chacun venant avec sa part de construction et de destruction, et le résultat un fil du rasoir, épreuve à multiples risques, qui n'excluent ni ceux de l'écriture ni ceux de la vie. Serge Doubrovsky possédé par l'écriture, une fièvre qui le consume et le nourrit, c'est sa perte et sa vie.

Autofiction, tension dangereuse entre expérience vécue et expérience littéraire, pas seulement pour l'auteur mais également pour le lecteur pris à témoin, et la mémoire fouille l'enjeu de l'écriture qui contre attaque en imposant la culpabilité. Serge et sa femme Ilse, tendresse et mise en poussière par détonation fracassante.

Serge Doubrovsky, magicien des mots, jongleur habile avec les allégories les métaphores et les multiples sens qu'il prête aux verbes et aux noms, et avec l'ironie qu'il rend mordante sans lui enlever la subtilité, sorcier des rythmes qui passent à une simple tournure de plume du ralenti au galop effréné, pour revenir au ralenti, et des images qui se partagent le passé et le présent, et l'imaginaire.

Construction remarquable, réalité et fiction, psychanalyse, regard en soi-même, cri déchirant, littéraire et humain.

Merci à Victoria pour m'avoir fait découvrir cet auteur d'une force de frappe inouïe.

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Le livre brisé

Le Livre brisé fait partie de ces ouvrages que l'on n'oublie pas de sitôt. Une vraie claque !

Ce roman, de fait une autofiction, commence en 1985. Parler d'autofiction est d'autant plus pertinent que le terme a été inventé par Serge Doubrovsky lui-même à la fin des années 1970 pour son roman Fils.

Dans Le Livre brisé, l'auteur, professeur de philosophie, entame un récit romancé qui entend relater ses amours, "dans une version fin de siècle de La Nausée". Au fur et à mesure de l’écriture chaotique de cette œuvre, sa femme, Ilse, une jeune Autrichienne de vingt ans sa cadette, intervient en tant que lectrice attentive et sévère. Elle met au défi son mari d’écrire la vérité crue de leur couple qui, à l’époque, bat déjà de l’aile. Doubrovsky s’exécute, se refusant à cacher les secrets de ses relations avec Ilse : les femmes qu’il a connues avant elle, leur rencontre, les mésententes au sujet des enfants, les frustrations d’Ilse, la violence ou l’alcool.

Alors que Doubrovsky entame le dernier chapitre de son livre, Ilse meurt subitement. "Un livre comme une vie se brise" écrit-il, en proie à une douleur qui frappe au cœur le lecteur. Comme en écho à cette vie déchirée, la dernière partie de son autofiction, poignante et inoubliable, se déroule pour parler d’un deuil insupportable, de la culpabilité et de son amour indéfectible pour sa femme. Un ouvrage magistral et superbe qui vous glace le sang. Ilse, comme rendue à la vie, nous devient proche et nous bouleverse. Il faut noter aussi le style inimitable de l’auteur : vivant, déstructuré, constitué de phrases courtes, de répétitions, de lapsus et de jeux de mots.

Auteur trop rare, Serge Doubrovsky a frappé un grand coup lors de la sortie du Livre brisé en 1989. Un livre scandaleux qui est aussi le récit d'un auteur pris au piège de son propre livre, "un livre monstre". A l'époque, le très flegmatique Bernard Pivot s'en prend même à l'auteur, dans son émission Apostrophe : "Vous avez poussé votre femme au suicide... [Mais] je ne dis pas que vous l'avez tuée sciemment". Ce à quoi, Doubrovsky rétorque : "Il a fallu me traîner, me sortir de mon lit pour venir jusqu'ici." La réaction cinglante de Pivot ne se fait pas attendre : "Vous voulez que je me mette à pleurer?"
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Le livre brisé

Acheté en 1991 pour le prix Médicis obtenu, ce livre a attendu longtemps dans ma bibliothèque.

Maintenant, je comprends pourquoi.

A l'époque, j'ai découvert l'auteur grâce à Bernard Pivot et ai été en empathie avec lui. Je me suis dit : voilà un homme qui a beaucoup souffert. Soit, né en 1928, il a souffert pendant la guerre, il a dû se cacher en tant que juif français.

Après guerre, il est devenu un professeur respecté et un écrivain. Il a fondé une famille, il a divorcé, rencontré l'amour plusieurs fois.

Ce livre est plutôt une autobiographie. Avec la complicité de sa dernière femme, Ilse, il a décidé de tout raconter.

A ce moment, je me rends compte que cet homme n'est pas celui que je croyais. Il est égocentrique, il rabaisse les femmes, il est violent. Il ne s'occupe pas de ses enfants qui l'ennuient prodigieusement. Il le raconte avec ses mots, ne cherche pas être sympathique.

A notre époque, on dirait qu'il est un manipulateur, un narcissique, son comportement ne passerait plus.

Son style d'écriture est spécial. Des pages entières sont écrites sans ponctuation, ce qui rend la lecture difficile et n'apporte rien . Il y a aussi trop de répétitions. On a l'impression d'avoir déjà lu certains passages.

Je n'ai pas aimé ce livre.
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Le livre brisé

De tous les livres que j'ai lus, incontestablement, le meilleur. Il est de ces livres qui vous scotchent, vous paralysent. Bouleversant.
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Le livre brisé

Dans ce livre Serge Doubrovsky raconte sa vie, au présent : il s'agit d'autofiction (Doubrovsky étant l'inventeur du terme).

Il vient de se marier avec une femme beaucoup plus jeune que lui, Ilse, qui était son étudiante. Celle-ci le met au défi d'écrire sur elle, puisqu'il a déjà écrit sur ses précédentes épouses (Claudia et Rachel) et sur ses filles issues de ses précédents mariages.

L'auteur relève donc le défi. Et l'on assiste médusé au récit sans concession des détails les plus intimes de la vie du couple (ainsi qu'à quelques leçons de Doubrovsky professeur, notamment sur la Nausée de Sartre, les Mots, et des réflexions assez vertigineuses sur l'autobiographie, et sur la Shoah). L'humour est très présent, mais à mesure que l'on avance dans le roman, la tragédie se noue. L'auteur écrit et décrit, comme s'il n'y pouvait rien, la détresse de plus en plus insondable de sa femme, entre son incapacité à trouver un emploi qui lui convienne, les avortements, la fausse couche, le désir d'enfant auquel lui demeure sourd, les disputes, les insultes, les coups même, les scènes de beuverie, l'alcoolisme. La solitude d'Ilse. La veulerie de Doubrovsky. Et le livre se brise. Ilse meurt.

Elle meurt, peut-être, sans doute, à cause du livre en train de s'écrire. Elle meurt pour de vrai, dans la vraie vie, pas seulement dans les pages du livre.

Et le lecteur en sort complètement ébranlé, interdit, balloté comme un caillou dans une mer déchaînée. Un soir de grande marée.

Ilse est morte, le livre est brisé, le lecteur aussi.







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Le livre brisé

J'avais acheté ce livre en bouquinerie attirée par l'aspect autobiographique, récit de soi.

J'ai eu du mal à adhérer d'une part car le narrateur n'est pas forcément sympathique (mais ça m'a fait penser à ce que Michel Leiris expérimentait dans "L'âge d'homme" c'est-à-dire les limites de ce qu'on peut écrire sur soi).

D'autre part, l'écriture est très particulière avec des phrases très longues, pas toujours de ponctuation, des jeux de mot...

Mais c'est certain que la mort (suicide ?) de sa femme est assez terrible.
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Le livre brisé

J'ai lu ce livre à sa sortie il y a une trentaine d'années. J'en garde un souvenir très fort de "bouleversement intérieur". Il me semble qu'aucune ponctuation guide le lecteur , ce qui est déroutant au début devient une respiration partagée au fil de la lecture comme une connivence , une intimité avec le narrateur. Vraiment un des livres qui m'ont laissé une marque.
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Le livre brisé

Dans ce huis clos conjugal, qui fit beaucoup causer dans le bocage littéraire, se reconnaîtront en effet ceux qui, un jour, ont pris leurs cliques et leurs claques pour « sauver leur peau ».
Lien : https://www.nouvelobs.com/cu..
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Le livre brisé

L'autofiction est un concept inventé, mine de rien, par Serge Doubrovsky pour définir sur une quatrième de couverture l'un de ses livres ("Fils" paru en 1977).

L'autofiction fait se superposer et se confondre l'écrivain, le narrateur et le personnage. 

"Le Livre brisé" est une autofiction.

"Le Livre brisé" n'est pas seulement une autofiction.

"Le Livre brisé" est un livre où l'on a toutes les raisons de penser (puisque c'est le narrateur qui nous le dit) que l'un des personnages (ce même narrateur) met en mots et met à mort un autre personnage (sa femme Ilse).

Un livre nourri de trous de mémoires, d'absences, d'espoirs réduits au néant et transformant en poème une femme qui était vivante en début de son écriture.

Un livre monstrueux, déchirant, ravageant, qui te porte jusqu'au bout du gouffre.

Un livre-tombeau.

Un livre qui a fait un certain scandale en 1989 et qui pose, comme aucun autre peut-être, les pires questions : 

L'écriture ou la vie ?

Jusqu'où il faut persister à écrire ?

A quel prix ?

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Parcours critique II

Outre les articles intéressants et pas toujours accessibles au lecteur, l'ouvrage comporte une très importante interview où Isabelle Grell pose des questions pertinentes sur les rapports de Doubrovsky avec les principaux courants de critique littéraire des années 60-80: Sartre, les post-structuralistes et la psychanalyse...
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Pourquoi la nouvelle critique

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Pourquoi la nouvelle critique

Ce que Doubrovsky veut démontrer, c'est que la critique littéraire ne peut qu'être une méthode d'élucidation fondée sur une compréhension profonde de la réalité humaine du fait que le texte littéraire lui même n'a pour d'autre visée ultime que la condensation par le bais du langage de la réalité humaine.

Plus simplement, une critique littéraire ne peut que se fonder sur une philosophie ; une philosophie nécessairement existentielle.



Pour ce faire, Doubrovsky contre-argumente les positions du structuralisme (Picard, ou plus timidement Barthes, car il lui reconnaît une certaine ambiguïté), du structuralisme génétique (Goldmann), et de la psychocritique, du matérialisme objectiviste, positiviste et pseudo-scientifique, etc.



Puis il montre que la seule manière de saisir le sens d'un texte se trouve être de chercher à y lire, en mots, l'équivalent de la réalité humaine. Il existe donc un Cogito de l'auteur et un Cogito du lecteur, mis en commun par le texte. Le critique, à son tour, met en oeuvre son Cogito et soumet son point de vue au lecteur. La critique, en ce qu'elle prétend expliciter la nature de l'expérience existentielle apportée par l'auteur (si nécessaire malgré lui car l'auteur se dépasse lui-même dans son oeuvre et le lecteur recompose l'oeuvre à sa manière) est donc assimilable à une psychanalyse existentielle.



Doubrovsky écrit superbement, avec une grande fluidité et une limpidité de sens tout en restant très précis et très subtil.
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