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Citations de Sergio Aquindo (12)


Ou encore, des héros des guerres lointaines : ils n’ont pas l’air vaillants sur leurs béquilles, mais ils reviennent vainqueurs de cet Orient lointain, très lointain, par-delà les sept mers et les sept montagnes, là où le désert est si fin qu’il pénètre les yeux à travers les paupières (là-bas, faute d’ombre, on ne distingue aucun ennemi, on ne voit pas venir les hordes, on se fait trancher la jambe de la même manière qu’on marche sur un scorpion : par inadvertance). Le Sarrasin, le Seljukide, le Perse, le descendant des Hittites, si du moins il en reste un, le Mahométan, et même, encore un peu plus loin, le Chinois, le Tatare : ils les ont combattus, victorieusement, sans perdre beaucoup au change. Les chroniques se souviendront longtemps (et se transmettront d’une génération à l’autre) de ces coups d’épée donnés d’un seul geste de chrétien à travers la gorge d’un Bédouin : l’épée à travers le Bédouin était capable d’atteindre un hérétique, et à travers l’hérétique un homme de la tribu de Gog et de Magog – et nos héros, alors, pouvaient ramener au camp leur admirable brochette. (La gloire ne va pas sans sacrifice : leur renom se retrouve ici, en terre chrétienne, leurs pieds ont été inhumés sous le sable coriace de la Mésopotamie, en compagnie d’autres fragments de chevaliers, parfois aussi de tonsures de moines soldats. Ce sont les risques du métier – mais les vainqueurs, même réduits à la taille d’un tabouret à traire, pourraient faire des entrechats pour donner à l’art de la guerre son prolongement chorégraphique, un petit peu music-hall, un petit peu Lac des cygnes – les passants leur lancent des piécettes, les appelant Gloire de l’Occident chrétien).
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Ce livre très peu connu d'illustrations représentant des jouets très poétiques est unique en son genre. Chaque jouet est dessiné avec des indications et un commentaire sur son utilisation. Seule une imagination exceptionnelle pouvait concevoir "Robin Hood", "Funambulo" ou encore "Naviganto"... Sergio Aquindo réalise un petit chef d'oeuvre.
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SERGIO AQUINDO : Ma rencontre avec le tableau pourrait se résumer en deux mots : fuir et se perdre. C’est en me perdant au Louvre, à la recherche d’un tableau de Vermeer, et en fuyant les attroupements de touristes, que j’ai atterri à la section « Écoles du Nord » au deuxième étage du musée. Cette salle, ou région plutôt, est devenue mon refuge : je la quittais rarement et je l’ai explorée en détails. Parmi Bosch, Holbein, Memling et Van Dalem, j’ai découvert il y a des années ce petit Bruegel intime, modeste, étrange, féérique. Par pur jeu, je me suis mis à le copier, à en extraire des détails (chapeaux, prothèses, mains, etc.) À chaque fois que j’allais au Louvre ensuite, et donc du côté des Écoles du Nord, je me sentais obligé d’aller me mettre face au petit Bruegel. Et d’en dessiner une partie, un détail, quelque chose. J’ai un faible pour les choses modestes, pour les petites oeuvres. Dans celle-ci, il n’y a que des mendiants, apparemment seuls survivants d’une société disparue. L’infirmité m’attire aussi, et les hybrides… J’ai une fascination pour la technique, de manière générale : sur les premiers croquis que j’en ai faits, j’ai reproduit les béquilles et les prothèses des mendiants du tableau. C’est de là aussi que vient l’utilisation du noir et blanc. Enfin, l’ambiance du tableau m’a magnétisé, cette nuit étrange, ces couleurs féériques, et ce décor, qu’on n’identifie pas, et qui s’ouvre vers un parc ou une campagne. Une scène de théâtre, presque…
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A Boskoop, de 1407 à 1411, un cochon, toujours le même, a servi la messe chaque troisième dimanche d’avril, secondé par des nymphes – cinq années de sacerdoce et de bonne volonté, en tant que prêtre, ne l’ont pas empêché de finir sa carrière sous les espèces de la saucisse, distribuée au fidèles.
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Pendant ce temps, la caravane se déplace, sans répit pour les êtres incertains : l'antipape Sylvestre et ses cardinaux aux chapeaux larges comme des ombrelles, les secrétaires, les enfants de chœur, deux sur un seul âne, suivis par Philippe de France, l'épée au flanc, les bottes de cuir, entouré des siens, à la fois sa troupe et sa cour, y compris quelques dames assises en amazone, qui n'ont pas peur de se salir sur le chemin de la reconquête. Ils ont connu des terrains secs, des chemins de sable et de poussière, les hauts plateaux, les routes en plein soleil sur des paysages plats ; ils ont aussi connu l'automne et l'hiver, la boue jusqu'aux genoux, les ânes réticents, la pluie quarante jours de suite, les gouttières, les campements mal dressés, des sommeils imparfaits sous des poches d'eau, une goutte puis une autre goutte et ainsi de suite jusqu'au matin ; ils ont éprouvé au printemps la fonte des neiges, les rivières en crue, les détours pendant des semaines pour pouvoir franchir un cours d'eau devenu plantureux. Sous la pluie toujours, au nom de la Légitimité et de la Justice bientôt rétablies, tout ce bel équipage dort, se ratatine, se fripe, célèbre la messe, mange froid, et par miracle trouve l'énergie pour recommencer le lendemain.
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Celui-là est un Ottoman, le représentant de l’Empire depuis la Sublime Porte jusqu’au Péloponnèse, fils de Murad, petit-fils de Mehmed, futur héritier de la dignité, des charges, des principes abscons, des protocoles de cour, des eunuques et des fruits confits. On l’appelle Allaeddin, il a vu dès son plus jeune âge les domestiques se courber à son passage : une vie entièrement bordée à droite comme à gauche de ces courbes passagères, ces courbes opportunes, si bien accomplies, faisant croire à la plasticité naturelle des hommes, à un peuple de danseurs qui aurait appris à s’assouplir et faire coïncider l’idée de beauté avec celle de cambrure. Alaeddin se tenait un peu raidi au milieu de ces courbes, il se prenait pour un tuteur au milieu des glycines ; il entrevoyait aussi, mais négligemment, son avenir de prince ottoman à jamais escorté d’inclinaisons de serviteurs.
À quinze ans, que voulez-vous que fasse un fils de prince qui fait se pencher les têtes des vieux ministres ? lui le Dessin, lui le Chiffre, lui la Clef du Ciel et l’Étape bienheureuse de la Destinée, lui que le destin fixe à la branche de l’arbre de sa généalogie, il désire une chose, une seule : prendre l’air. (Pour fuguer, il a fugué : pas loin de huit cents ans plus tôt, le calife Haroun al Rachid, dans sa version historique ou fabuleuse, retirait de sa tête, certaines nuits, l’énormité de son turban (pas de turban plus gigantesque, sinon celui de l’idiot Nasr Eddin Hodja), le confiait au porte-turban, retirait aussi ses babouches à rubis, se défaisait ensuite de tout ce qui pouvait être soie, satin, froufrous luisants, ceintures, petites choses micacées, des pierres dont le nom ne nous est pas parvenu, puis demandait au valet de pied qu’il sorte du placard sa panoplie de cordonnier – après quoi, il était minuit passé, il s’en allait dans les rues de sa ville, incognito jusqu’aux tavernes, là où il croyait encore pouvoir aller à la rencontre du peuple : le peuple, un banc de poissons insaisissable à qui on demande des oracles avant de les lui délivrer.)
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Pendant de longs mois et au moins deux hivers, Sylvestre a vécu dignement sa carrière d’antipape : il a nommé des évêques, béni des paysans, publié des encycliques, un catéchisme et des bulles écrites parfois à dos d’écorce ; il a canonisé Sylvestre II, son prédécesseur (Sylvestre II, le maître des horloges et le complice du Diable – c’est du moins ce qu’on disait à son époque) ; il a rassemblé des fonds, puis les a perdus, il a rencontré des petits seigneurs, connu le bois des portes, prêché dans le vide, réinterprété la parabole du fils prodigue et maudit un bon millier de fois l’usurpateur – l’usurpateur à chair d’encornet.
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Il a suffi d’une voix pour commettre l’erreur d’élire au trône suprême (on l’appellera ainsi) un parfait idiot à tête de poire au lieu de ce candidat éclairé : quelqu’un dans la pénombre a confondu Salvatore Plombo le juste avec Silvano Piombo le niais ; les bulletins étaient confus, trois traits de plume mal disposés sur une feuille ont conduit l’un vers le pouvoir, l’autre du côté de l’échec. À ce qu’en disent les livres d’histoire, ce n’est pas l’unique exemple d’injustice à cause d’une seule lettre de l’alphabet : on a connu des schismes pour moins que ça, des guerres civiles, des hommes persécutés, la gratuité de leur persécution, des plaines sanglantes, aucun pardon nulle part, aucun sentiment de culpabilité, y compris chez le secrétaire responsable de la faute de frappe, qui aurait pu au moins venir sur les charniers, y semer quelques fleurs.
Salvatore Piombo a vu cet imbécile de Silvano devenir pape à sa place sous le nom de Célestin VI, sourire comme un nourrisson sous sa tiare, de ce sourire qui agaçait déjà avant son élection, au temps où il semblait être encore un capucin amateur de carillon et chantait le Ego sum pauper d’une voix perchée au-dessus des autres (pas angélique, acidulée). Salvatore l’a vu revêtir les habits, s’asseoir sur le trône, tâter le porphyre, bénir déjà à tout bout de champ, ou bien se défendre d’un moustique, décider la béatification de sinistres inconnus et tripoter l’anneau avec insistance – ça en devenait gênant.
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À Dendermonde, dans la Flandre, au matin de la fête des Fous, on a coutume de coiffer l’un de ces petits singes à queue en point d’interrogation, imprévisibles quand ils accompagnent des joueurs d’orgue, mais précis au moment de tendre le gobelet de la quête – le coiffer d’une mitre, lui coudre une chasuble à sa taille, le poser sur un âne et là, en grande pompe, dans le froid de l’hiver, l’accompagner sept heures durant pour un tour de la ville. Les passants saluent, lancent des fruits ou des fleurs, ou des légumes de saison, mélangent le latin au flamand, mais accordent au singe les honneurs réservés tous les autres jours de l’année à l’archevêque – d’ailleurs, lui aussi, les deux cornes blanches, et l’air de vouloir pardonner tous les péchés à tout le monde, sans distinction. (Le plus difficile, c’est encore d’attraper un singe ; les chroniques nous rapportent des histoires de chasses périlleuses : un singe, même à queue, singe des joueurs d’orgue – ne se trouve pas si facilement – des chiens et des ânes, ça oui, on en a même un peu trop, mais le singe, c’était comme une mangue, de l’exotisme hors de prix.)
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...et quand on traîne avec soi sur cette place du village un pucelage à peine altéré, il y a longtemps, par une rencontre, dans les foins, plus ou moins caprine
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Salvatore Plombo a vu cet imbécile de Silvano devenir pape à sa place sous le nom de Célestin VI, sourire comme un nourrisson sous sa tiare, de ce sourire qui agaçait déjà avant son élection, au temps où il semblait être encore un capucin amateur de carillon et chantait « Ego sum pauper » d’une voix perchée au-dessus des autres (pas angélique, acidulée).
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Exercice périlleux mais exaltant que celui auquel nous nous prêtons aujourd’hui. Périlleux parce que prendre le risque d’écrire sur un sujet qui a passionné des dizaines de milliers de chercheurs de trésor, la sacro-sainte Chouette d’Or, nous expose forcément aux critiques de certains de nos amis Chouetteurs pour qui ce livre risque d’être trop ou pas assez… Mais surtout exaltant, car c’est avec un immense plaisir que nous nous sommes mis dans la peau d’un chercheur du futur qui, en 2113, mettrait la main sur ce livre et se demanderait légitimement si cette histoire est réelle ou pas, car la Chouette est bel et bien devenue au fil du temps un trésor mythique. On imagine alors qu’il s’attellerait sans attendre à la tâche et serait peut-être celui qui aurait le déclic qui a manqué à tous les Chouetteurs jusqu’ici, libérant enfin l’oiseau de sa prison souterraine.
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