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Critiques de Shaun Tan (244)
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Là où vont nos pères

Sublime!!! Choisi complètement au hasard parce que j'avais aimé le style de dessin sur la couverture, je ne savais absolument rien de ce livre, ni le sujet, ni qu'il s'agissait d'une histoire sans paroles en sépia. Dès la première page j'ai été éblouie par les graphismes et je n'ai pas pu m'empêcher de tourner les pages, savourant chaque détail sur les fresques en double page ou chaque expression, chaque odeur ou chaque son évoqué par les toutes petites vignettes. Certaines images sont complètement fantasmagoriques, d'autres ressemblent à s'y méprendre à des photos d'époque. L'appréciation d'un style de dessin dépend vraiment du goût personnel de chacun mais en ce qui me concerne j'ai été scotchée, littéralement! J'envisage d'ailleurs de faire des copies de certaines pages pour les accrocher sur mes murs, c'est pour dire!

Balançant entre réalisme des figures et des attitudes ou des expressions faciales, et symbolique et onirisme des décors de l'autre, cet ouvrage raconte une histoire assez universelle à laquelle chaque immigré peut s'identifier en partie si ce n'est pour tout. Les décors qui ne ressemblent à rien de ce que l'on connaisse en même temps qu'il contient des références vaguement reconnaissables - historique, moderne, industrielle, futuriste, inventée - aide à cette universalité.



Cette histoire pourrait se passer n'importe où, elle raconte les difficultés rencontrées face à l'inconnu où tout semble bizarre, où on ne comprends pas grand chose, tout est un peu mystérieux et effrayant surtout quand on ne comprend pas très bien la langue. Et puis peu à peu on s'adapte autant qu'on en est capable, on rencontre d'autres personnages ayant vécu un dépaysement similaire avec des histoires très différentes. Jusqu'au moment où la situation s'inverse et on peut tendre la main à de nouveaux exilés perdus.



Des heures plus tard les images n'arrêtent toujours pas de défiler dans ma tête embrumée. Un vrai coup de cœur auquel je ne m'attendais pas, dommage qu'on ne puisse pas mettre plus de cinq étoiles.
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Là où vont nos pères

Une BD sans texte absolument sublime. On va suivre un père de famille qui fuit une contrée envahie par des créatures tentaculaires dans un pays peuplée de petites bêtes fantastiques où il cherche à s'établir pour faire venir sa famille.

Les graphismes aux tons sépia sont absolument saisissants. Le parallèle avec les grandes guerres de l'Histoire est très bien mené comme l'aspect des différents lieux, le lien avec les différents personnages rencontrés. La narration est fluide, les images s'enchaînent et défilent comme un film muet. La tonalité des couleurs donne une réelle douceur à l'histoire et on s'attache à ce personnage qui s'échine à trouver le bonheur pour lui et sa famille.

Un très bel album à découvrir, à lire et relire, à savourer.
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Là où vont nos pères

C’est une BD muette, sans texte, mais qui parle à tous. Des fragments de vie et d’expériences de migrants, dans des contrées sans nom et sans âge. Un homme fuit sa ville en proie à un mal rampant, et laisse sa famille pour partir tenter sa chance dans une mégalopole improbable. Logement, transports, emploi, nourriture, langage, tout est à réapprendre. Mais il peut compter aussi sur l’aide d’autres anciens migrants qui partagent leur propre histoire, leur propre fuite.

Shaun Tan crée une histoire universelle dans un monde fantaisiste d’une poésie et d’une originalité toutes particulières, mises en valeur par un graphisme soigné. Certaines planches donnent le vertige, tant les dessins sont beaux et les paysages urbains grandioses.

Une expérience assez unique de lecture.
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Là où vont nos pères

Une magnifique surprise. J'ai tout de suite été charmé par le graphisme, précis, doux et nouveau. Il n'y a pas de paroles comme dans le cinéma muet, il faut deviner. Le début rappelle les migrants qui s'exilaient aux Etats Unis et puis une fois arrivé à destination, on découvre un monde réel avec des accents oniriques. Les gens élèvent de drôles d'animaux de compagnie. Malgré une menace qui plane en fond, le récit est positif, créatif et magnifiquement dessiné. Cet ouvrage doit avoir sa place dans ma bibliothèque.
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Là où vont nos pères

J'avais souvent vu passer ce livre, mais, et j'ignore pour quelles raisons, je ne suis généralement pas attirée par les BD muettes. Peut-être par crainte de passer à côté, de ne pas arriver à m'intéresser à l'histoire. Je pense que maintenant c'en est fini de ces réticences.

Ce livre est un petit chef d’œuvre, tant au niveau graphique que narratif. Il y a tellement d'émotion, de sensibilité et de justesse qui en émanent qu'il est difficile d'en parler. Mieux vaut se plonger et replonger dedans.
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Là où vont nos pères

Bon, on ne va pas épiloguer des plombes, on ne va pas tortiller du croupion devant un chef d'oeuvre en faisant la moue... Je n'ai pas relevé une seule faute de goût, pas un seul choix éditorial qui me fasse hausser un sourcil, pas une seule pensée qui me titille, un passage, une demi-case où je me serais dit: "oh, j'aurais pas vu ça comme ça"...



J'ai adhéré dès la première case, jusqu'à la dernière. Ellis Island, l'usage du sépia, mais aussi du noir et blanc brutal, les gueules des pages intérieures de couverture, les dessins de guerre, les situations de rejet, le petit côté surréaliste, SF, à la Jérôme Bosch, les doubles pages grandioses, cette page où on a le migrant à gauche qui se décline en 30 case (de mémoire) et les mains du fonctionnaire de l'immigration à droite qui se déclinent en autant de cases... Tout est bien vu.



Que dire de plus. Mettre du texte, cela aurait dénaturé le contenu. Déforcé le propos. Dilué la force des dessins (somptueux). J'ai dévoré. Et je l'ai déjà lu deux fois, et je le relirai et je reviendrai compléter ma critique à chaque lecture. Mieux, je vais aller rendre ce tome à la bibliothèque de mon quartier, et je vais en acheter 10 derechef. Et je vais les offrir. Et j'irai en racheter d'autres... Je connais maintenant ma mission sur terre... Répandre ce magnifique cadeau de Shaun Tan parmi les brebis égarées... Rassurez-vous je ne viendrai pas sonner le dimanche matin en vous disant que la fin du monde est proche... Je serai chez moi à relire Là où vont les Pères...



Ah si, un bémol... adressé à Dargaud... le titre. Pourquoi les pères? Parce que seuls les hommes partent? le titre anglais est "Arrival"... Je préfère largement.



Addendum dans le cadre du Challenge Multi-Défis 2022... une oeuvre que l'on voulait relire... Relire un ouvrage, ce n'est pas anodin. Les madeleines de Proust vont-elles jouer? Ou va-t-on découvrir que cela ne fonctionne plus, et qu'on est devenu un "vieux con"? 2 ans plus tard, l'émotion est intacte. J'ai frémi. J'ai pleuré. J'ai frissonné comme en 2018.



On démarre sur "Là-Bas" de Goldman, on embraie avec Tiken Jah Fakoly et "Où aller, où?". Puis Maxime Leforestier s'invite avec son "Né quelque part". On durcit avec Immigrant Song de Led Zeppelin, et les accents de Gibraltar d'Abd al Malik viennent chatouiller mes tympans. Un peu de Lavilliers aussi. Mais on clôture avec Bob Dylan, et son Blowin' in the Wind... la réponse est dans le vent... accepterons-nous de l'entendre ou resterons-nous sourds aux cris de détresse?



Autant l'avouer, je me suis de nouveau fait cueillir par Shaun Tan et son dessin enchanteur. il arrive à rendre toutes les facettes et toutes les émotions de la migration. En cette époque troublée, entre les migrations climatiques qui vont se faire de plus en plus nombreuses et les déplacements de population fuyant la guerre, cette BD est plus que jamais actuelle.
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Là où vont nos pères

Comment mieux résumer Là où vont nos pères que sa quatrième de couverture : « Pourquoi tant d’hommes et de femmes sont-ils conduits à tout laisser derrière eux pour partir, seuls, vers un pays mystérieux, un endroit sans famille ni amis, où tout est inconnu et l’avenir incertain ? Cette bande-dessinée silencieuse est l’histoire de tous les immigrés, tous les réfugiés, tous les exilés et un hommage à ceux qui ont fait le voyage... ». Australien lui-même issu de l’immigration, Shaun Tan raconte l’histoire de son père mais aussi l’histoire de tous les exilés. Inspiré de récits et d’anecdotes de migrants de nombreux pays sur différentes périodes, le dessinateur décrit avec poésie, le voyage de ces pères qui sont partis vers cet ailleurs dans l’espoir de trouver une vie meilleure. Primé à de multiples reprises, ce superbe album graphique muet vous conduira sur les pas de cet homme qui s’exile vers une contrée inconnue dont il ne connait ni la langue, ni les codes... Un incroyable parcours initiatique semé de découvertes inattendues et de rencontres improbables...



Il aura fallu 4 ans de recherches et de travail à Shaun Tan pour donner vie à cet album. Preuve incontestable que le 9ème art a désormais acquis ses lettres de noblesse, ce magnifique roman graphique entièrement muet, met sublimement en perspective d’authentiques récits d’exils grâce à des illustrations aux évocations presque oniriques : pas de bulles, ni de mots en effet pour raconter l’incroyable odyssée du migrant vers l’inconnu. Juste de belles planches aux couleurs sépia, aux graphismes réalistes... et aux créatures étranges. Un peu comme si l’exil s’apparentait à un voyage fantasmagorique au cours duquel tout devenait (im)possible : trouver un toit, trouver à manger, trouver du travail ou rencontrer des gens bienveillants, lorsque l’on est étranger en terre inconnue, est une entreprise souvent semée d’embûches. Ces lieux où se rendent les pères et ces expériences marquantes qu’ils y vivent, Shaun Tan a souhaité les raconter à sa façon sous la forme d’un vibrant hommage illustré à tous les immigrés, tous les exilés et tous les réfugiés de la planète. Un fabuleux travail artistique qui doit faire écho dans nos esprits au regard des terribles drames qui frappent actuellement de nombreuses populations immigrées...
Lien : http://embuscades-alcapone.b..
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Là où vont nos pères

Très beau roman graphique, au dessin soigné, minutieux, et son cadrage subtil qui véhicule les émotions et les surprises des personnages. C'est une belle réponse au "problème" des migrants, qui relate le pourquoi du départ, le voyage, l'éloignement, l'accueil et l'intégration dans un nouveau pays. Une langue à l'écriture exotique, des animaux familiers étranges mais indissociables à l'homme, des transports, plans, architectures.... déroutante, et une nature surprenante mais belle. Et puis le manque des proches, l'espoir d'une vie meilleure, le découragement, la quête et la découverte, les rencontres et la chaleur des amis, le partage, l'ouverture d'esprit et d'accueil qui se perpétue aux nouveaux arrivants. Tout ça, sans un mot, par la force et la succession des dessins. Un très beau travail, très sensible et humain.
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Là où vont nos pères

Un album absolument magnifique, sur l'exil, l'inconnu, la solitude dans un pays qui n'est pas le sien. Un album sans parole, avec une portée qui n'en est que plus universelle. Les illustrations sont splendides, pleines de poésie, d'intensité.

J'ai plongé, et ai eu du mal à revenir.
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Là où vont nos pères

Dans le catalogue Dargaud existe une magnifique collection, "Long courrier". L'album "Là où vont nos pères", sorti en 2007 en est un des plus beaux one-shot. La couverture avec son ton sépia, son dessin au trait délicat chatouille l'oeil. Et sur les 128 pages intérieures, tout n'est que douceur, onirisme et splendeur. Aucune bulle le long du récit, place au dessin et à l'imagination.

L'histoire : celle d'un homme amené à quitter sa famille pour trouver un meilleur avenir ailleurs, son arrivée dans un pays inconnu, sa nouvelle vie, ses difficultés à s'intégrer. En l'absence de texte, tout n'est pas évident au premier abord, qu'importe, on s'immerge dans les planches, subjugué par les petites vignettes ou fasciné par les pleines pages. C'est trop beau, on se perd dans la contemplation, cet album est autant une oeuvre d'art qu'un récit graphique.
Lien : http://lapetitesteph.blogspo..
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Là où vont nos pères

sans un mot, l'auteur nous plonge dans le tourbillon des émotions communes à tous les exils. Ou comment faire comprendre à n'importe quel réfractaire sur le sujet que l'immigration n'a pas grand chose à voir en vérité avec une volonté de conquête du pays d'accueil... Dessins splendides, magistral !
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Là où vont nos pères

Je ne dirai pas grand chose car il est difficile de mettre des mots sur cette BD qui n'en comporte aucun.

L'histoire est universelle : une guerre, une épidémie...l'exil, la fuite...la redécouverte de la vie dans un ailleurs et surtout retrouver les siens, faire des rencontres, ré-apprendre.

C'est difficile de raconter, c'est juste magnifique et fin, c'est intelligent et beau comme un roman surréaliste.

Le dessin est splendide, fin et expressif, doux et chargé d'émotions intenses.

Un chef d'oeuvre.

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Là où vont nos pères

Un album sans texte à l'ambiance singulière, sur le thème de l'exil.

Les illustrations sont très expressives et soignées mais c'est surtout la mise en page, dynamique et variée, et la colorisation, toute en nuances, qui donnent un ton particulier à cet album.

C'est une histoire universelle qui est contée ici par Shaun Tan, celle de l'exil et des pertes qui y sont associées : perte de repères, perte d'identité, perte de ses proches.

Un joli livre qui se parcourt très vite.
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Là où vont nos pères





Même si les avis sur cette oeuvre visuelle sont unanimement positifs, je ne suis pas du tout rentré dans l'histoire, qui ne m'a pas touché. Sans doute cette déception est-elle liée au fait que j'en attendais trop.



Mais il en faut du talent pour raconter une histoire sans le moindre mot! C'est indéniable.

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Là où vont nos pères

La BD sans bulles.

Avec Là où vont nos pères de Shaun Tan (The Arrival en VO), voilà bien une bande dessinée qui sort de l'ordinaire puisque les cases sont ... muettes.

Une BD sans texte où seul le dessin parle de lui-même et se montre suffisamment expressif pour raconter quand même une (belle) histoire.

Une idée originale mais aussi réussie, puisqu'ici «BD sans bulles» ne signifie pas «BD plate».

On déambule avec plaisir dans le montage des images sépias (alternant zooms, gros plans et vues d'ensemble), genre photos à l'ancienne, d'où se dégage un parfum étrange et un peu nostalgique qui rappelle les films expressionnistes du début du siècle (films ... muets, eux aussi !).

L'agencement des cases sans bulles de cet album fait d'ailleurs penser à un montage de cinéma.

Shaun Tan est australien et son album raconte une histoire d'émigrant parti «là-bas» («là-bas, là où vont nos pères», et pour une fois le titre en VF vaut largement la VO).

Parti «là-bas» pour travailler bien sûr et nourrir sa famille restée au pays, quitter une terre inhospitalière et gagner un eldorado.

On ne sait ni où ni quand situer cet universel «là-bas», même si les premières planches font assurément référence à Ellis Island où débarquaient les émigrants candidats au statut d'américain (et dont la visite aujourd'hui dégage toujours une forte émotion, visite qu'on vous recommande lors d'un passage à NY !).

La suite nous plonge dans un monde un peu fantastique peuplé de fruits et d'animaux étranges.

Le héros y est confronté à une langue et des signes inconnus. Et comme lui, l'absence de dialogues et la présence de signes cabalistiques nous rend nécessairement attentif aux expressions, aux visages et aux gestes.

Un monde d'exil plein de poésie et une BD très «graphique».
Lien : http://bmr-mam.blogspot.fr/2..
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Là où vont nos pères

A travers des dessins d'une très grande beauté visuelle, Shaun Tan nous invite au voyage. Celui que font ces hommes en quête d'une nouvelle vie et d'un espoir plus lumineux. Une oeuvre en hommage à tous ces émigrants qui ont un jour choisi de quitter les leurs pour un avenir plus tendre. Une BD magnifique et muette composée de bulles poétiques où se rencontrent le génie du dessin et l'imaginaire des sens. Une oeuvre étonnante à découvrir.
Lien : http://art-enciel.over-blog...
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Là où vont nos pères

Le silence est la malédiction qui échoit à tout bon migrant qui se respecte. Shaun Tan est le fils de l’un d’entre eux puisque son père n’arriva en Australie Occidentale de Malaisie qu’en 1960. Il connaît donc particulièrement ce mystère silencieux qui entoure les raisons du départ migratoire, et s’il décide toutefois de lever un peu le voile sur ce mouvement des pères qui quittent leur pays pour être ensuite rejoints par leur famille, il ne le fait que partiellement, évoquant les images mais taisant les mots. Ceux-ci, d’ailleurs, retrouveront bien leur caractère dérisoire lorsqu’il faudra apprendre à communiquer d’une nouvelle façon, sur un territoire où la langue maternelle ne signifie plus rien.





A travers le destin singulier d’un homme, Shaun Tan entreprend donc de suivre un de ces pères en cavale et d’élucider le mystère de leur destination. Pris au hasard d’une famille aimante, on le voit faire ses bagages, faire ses adieux, et embarquer vers des territoires qui semblent plus prometteurs. Le voyage est grandiose et pour la part de rêve qu’il divulgue, il mérite à lui seul le déplacement. Mais ensuite, que se passe-t-il ?





Dans les Mohamed de Jérôme Ruillier, la désillusion marquait cruellement les immigrants, mais il s’agissait dans ce cas du contexte précis de l’immigration maghrébine en France dans les années 60. Shaun Tan semble ne vouloir décrire aucune situation particulière et n’embarrasse pas son discours d’évènements à portée politique ou historique. Il cherche plutôt à décrire le mouvement migratoire dans sa forme générale en tant que concept. Cette vision synthétique l’oblige à recourir à des éléments métaphoriques et à mettre en place des allégories poétiques qui accompagnent des dessins sobres et racés. Mais là où la narration gagne en esthétique, en fluidité et en onirisme, elle perd bien sûr en crédibilité, et on pourra peut-être regretter le peu de consistance du chemin finalement très linéaire que suivra ce père migrant en territoire inconnu.





Shaun Taun brille toutefois à nous glisser dans la peau de son personnage en nous faisant perdre tout contact avec le langage. On craint de devoir se glisser dans une histoire qui ne sera guidée par aucun mot, et on comprend d’autant mieux quelle terreur peut être celle de ces hommes obligés de se débrouiller sur une nouvelle terre sans aucun bagage verbal. Notre place de lecteur nous dispense toutefois bien des désagréments, et pour peu que l’on se prête au jeu, on finira par prendre goût à ce silence suggestif, et à faire naître nos propres dialogues en filigrane des images.





Exemple d’une immersion appréhendée et teintée de mélancolie, Là où vont nos pères semble surtout vouloir rendre hommage au courage d’hommes qui ont réussi à s’arracher de leurs origines pour proposer de meilleures conditions de vie à leur famille -mais seulement parce que le territoire accueillant a révélé des potentialités dont ils ont pu faire usage. Le cas contraire ne sera pas envisagé, ce qui confère à cet album son relatif optimisme et sa poésie rassérénante.
Lien : http://colimasson.over-blog...
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Là où vont nos pères

L'homme se prépare. Il choisit de partir, de laisser pour un temps sa famille et sa maison afin de trouver mieux ailleurs. Ailleurs, l'étrange, le merveilleux de la terre rêvée, un pays aux multiples codes ethniques, un monde protecteur, plus riche en travail et nourricier comme pourraient le symboliser les immenses statues égéries (oiseau conservant son œuf, animal aux provisions ou hommes en pleine fraternité).

Il fuit un pays déserté où les gens se calfeutrent à l'intérieur de chez eux par peur de ce monstre tentaculaire, ombre serpent qui s'insinue partout. Et commence l'exil, le voyage d'un individu pris dans la masse des populations en partance. A l'arrivée, il y a les démarches administratives, les formulaires, l'identification et le nouveau départ. Se refaire une identité, une vie dans un autre pays, avec d'autres codes, un autre langage, d'autres us et coutumes. Et rencontrer d'autres immigrés.



Cette bande-dessinée, véritable roman graphique sans parole, est une histoire de l'exil.

Une histoire réglementée par les contrôles de l'immigration: la visite médicale, les nouveaux papiers voire même l'étiquetage des arrivants (qui pourrait rappeler d'autres formes de signes distinctifs moins amicaux). Une histoire de fuite aussi, de tragédies et d'utilisation du malheur des autres avec les passeurs bien cupides.

A travers le héros et ceux qu'ils rencontrent ce sont les destins de ceux qui partent. Ce qu'ils fuient et ce qu'ils recréent ici, sur la terre d'accueil. Tous ces individus sont mêlés à la multitude, juste un élément de cette grande transhumance.



L'auteur choisit une version, non édulcorée, mais positive: que l'immigration soit organisée, volontaire, collective pour le travail ou que ce soit une immigration individuelle de refuge contre une société inégalitaire, une guerre, les immigrés sont accueillis.

L'exil n'est pas une évidence. La fuite, la valise comme seul monde, seul lien avec la famille. Et cette adaptation à la langue, aux écritures, aux coutumes, aux méthodes, aux machines, aux transports, aux mesures du temps, aux aliments étrangers.

L'apprentissage est aussi difficile pour le premier arrivant que pour les suivants, enfants compris. Et puis l'immersion amène l'intégration, une assimilation respectant les ethnies d'origine.



Cette terre d'accueil en elle-même est aussi le rêve de l'ailleurs. Un pays moderne, industriel, où les petits métiers sont aussi mis en avant. Les cultures, les ethnies cohabitent.

Le monde inventé par Shaun TAN est immense, vertical, très architecturé. Mais en plus des machines, des cheminées d'usine, il y a aussi toute une infrastructure (des transports en commun, une poste) et une profusion alimentaire.

En plus, l'homme ne semble pas être de trop, les logements sont là, exigus au départ mais offrant aussi des villages. Des statues gigantesques posent leur regard sur les habitants, non sans rappeler les divinités grecques, égyptiennes, cambodgiennes ou des mégapoles inventées pour les super-héros.

Le monde de l'auteur est aussi très humanisé. La promiscuité humaine ne restreint pas les services rendus. Les ethnies cohabitent et offrent une solidarité et une convivialité apaisante et fondatrice. Chaque habitant semble aussi être accompagné, et non victime d'isolement: un animal fantastique est "offert" et reste en permanence avec les individus.



Cette bande dessinée n'est pas forcément destinée aux enfants, elle faite de subtilité et de références. Les illustrations ont un rendu très peaufiné, elles sont minutieuses et très travaillées. L'usage du temps est là, dans cette double page de nuages, de ciels, d'étendue brumeuses comme des pensées mais aussi dans la patine des objets usuels, du quotidien ou le végétal marquant les saisons.

Les illustration oscillent entre des panoramas et des focus comme dans un film et un reportage photographique, où les récits des autres personnages sont présentés comme des photos jaunies. C'est aussi un livre témoignage où de nombreuses situations peuvent être réelles. Quelques images m'ont marquée particulièrement: ces oiseaux rencontrés en mer après un dur voyage comme la marque de la terre enfin proche ou ces origami comme trace éphémère du père, absence de la famille, présence et offrande.

La découpe des "bulles" est aussi très particulière: double page sur les mondes en vue d'ensemble, oppressants ou accueillant, puis sur la temporalité (les nuages, le temps par le passage du temps sur la plante); enfin l'individu fondu dans la multitude.
Lien : http://1pageluechaquesoir.bl..
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Là où vont nos pères

Cet album est remarquable par son graphisme tout d'abord, se rapprochant du trait réaliste permettant de confronter la fiction à l'histoire de nos sociétés, et aussi par sa couleur, rappelant la sépia des photos de famille mises à l'abri du temps dans une petite boîte en fer posé au fond d'une commode poussiéreuse.

Mais ce récit qui pourrait se comprendre comme un témoignage d'une expérience individuelle dans un espace précis est, au contraire, libéré de toutes restrictions spatiale, temporelle et humaine par l'absence de référence de temps, de lieu et d'identité. Cette tendance au récit universel est accentuée par son cadre qui s'apparente à un décor de science-fiction, expression d'un imaginaire riche et futuriste.

Enfin, cette oeuvre est un véritable exercice de maître pour un auteur de BD puisque le texte y est totalement absent. Ce choix permet au lecteur de s'identifier au protagoniste de l'histoire, un homme contraint de quitter sa famille et son pays, confronté à de nouveaux codes, une nouvelle langue, de nouvelles règles et s'appuyant avant tout sur l'image pour trouver sa place dans ce nouvel environnement.

Bravo au jury du Festival Angoulême 2008!

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Là où vont nos pères

J'ai ouvert cette étonnante BD sans savoir qu'elle était "muette". En tournant les premières pages, je me suis demandé "mais qu'est-ce que c'est que ce truc ?!..."



Et quelle claque ! Quelle parfaite maîtrise de l'utilisation des cases, du choix des dessins, des détails, le tout avec en prime un imaginaire qui "parle" à tout le monde.



Une merveilleuse façon de traiter d'un sujet qui est et restera toujours d'actualité, de la manière la plus universelle qui soit, puisqu'elle abolit la barrière de la langue.



Un exploit ! Une véritable œuvre artistique et humaniste. À feuilleter absolument, et plusieurs fois même.
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