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Critiques de Sigridur Hagalin Björnsdottir (103)
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L'île

L’Islande est soudainement totalement coupée du monde extérieur. Plus personne ne peut y entrer ni en sortir. Aucune information sur le monde extérieur. Existe-t-il encore d’ailleurs ?

Les familles, les amis sont sans nouvelles de l’étranger.

Face à cette situation inédite, une jeune ministre , Elin, prend les choses en mains et utilise les "bonnes " vieilles recettes qui ont fait leurs preuves pour établir un régime, qui sous des dehors riants, n'est rien moins que fasciste.

Propagande vantant un passé soigneusement toiletté, exaltation du patriotisme, xénophobie, utilisation d'experts dont on évacue certaines affirmations gênantes (il n'y aura pas à manger pour tout le monde), tout ceci entraîne évidemment l'apparition de la violence dont le pouvoir use avec habileté.

Récit polyphonique, L'île nous présente plusieurs points de vue qui permettent d'envisager un panorama suffisamment large de la société. Si la violence est présente, elle est plutôt suggérée mais la tension n'en est que plus intense. Un roman anxiogène qui résonne particulièrement ce moment.
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L'île

« Je les observe, nous sommes plus calmes, nous avons moins peur les uns des autres. Il se passe toujours quelque chose quand des gens s’assoient autour d’une gamelle de soupe chaude, partagent un repas et rompent le pain ensemble, disait toujours Leifur. Le cerveau fabrique une hormone, de l’ocytocine, qu’il fabrique également pendant l’acte sexuel et chez une mère qui allaite son enfant. Un amour de nature chimique. La tendresse pardonne et supporte tout, mais peut-être se résume-t-elle à une hormone, à cette force qui nous soigne en nous unissant. Leifur plaisantait, la science apporte ses réponses, mais après tout, chacun croit ce qu’il veut. »

Parution en poche (collection Kayak chez Gaïa) pour ce roman de 2018 qui avait échappé à mes radars et que j’ai dévoré à pleines dents. Nous y suivons un journaliste, Hjalti, qui, lorsque nous le rencontrons, se sépare tout juste dans la douleur de Maria, violoniste au sein de l’orchestre national. Elle vit en Islande depuis quinze ans, en a acquis la nationalité et est tout à fait intégrée. La question ne se pose même pas, en réalité, dans la société islandaise contemporaine. Elle a deux enfants, nés de deux pères différents, et quitte Hjalti parce qu’il est évident qu’il a du mal à les supporter, à les accepter, à créer une relation avec eux. Une nuit, toute relation avec le reste du monde est coupée. Tout fonctionne encore normalement dans le pays (Internet aussi) mais en interne uniquement. C’est comme si l’Islande était le seul pays restant au monde. Ceux qu’on envoie (en bateau, en avion…) voir ailleurs ne reviennent pas, mais la mer n’est ni polluée ni empoisonnée et la météo est normale. Passés les premiers temps de sidération, une nouvelle société se met en place car il est question de survivre, en autarcie… Écrit en 2016 ce premier roman est terrifiant. Il met en scène l’effondrement d’un société tel qu’on le redoute et le fait avec une douceur infinie, qui tranche fortement avec les événements qui se produisent. On l’espère ardemment non prophétique.
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La lectrice disparue

« Par une douce matinée lumineuse de la fin août, Edda s’enfuit de son domicile en abandonnant son petit garçon âgé de trois jours, endormi dans son berceau. »



D’emblée, Sigridur Hagalin Björnsdottir positionne son récit dans un drame familial : la disparition d’Edda, une jeune femme star des réseaux sociaux, tout juste devenue mère. Son frère Einar se lance à sa recherche, la police n’estimant pas cette disparition inquiétante.

La famille d’Edda et Eidar est plutôt atypique. Nés d’un même père, Örlygur, ils ont été élevés au sein du même foyer par leurs deux mères, Júlía et Ragnheiður. Un arrangement plutôt étrange qui interroge maintenant qu’Edda a disparu.



« Nos mères étaient le nombril du monde, elles étaient le centre de gravité de nos existences, omniscientes et omnipotentes. Nous tournions autour d’elles comme deux satellites et, quelque part à la périphérie se trouvait notre père, ce soleil radieux pesant comme un trou noir, venu d’une autre galaxie. »



Le récit va alterner les points de vue des différents membres de la famille entre passé et présent, une narration assez classique dans les romans mêlant enquête et secrets de famille.

L’autrice y ajoute une dimension supplémentaire et originale en développant son intrigue autour de la lecture et de l’écriture. Edda et Eidar ont quasiment le même âge, ils ont grandi ensemble dans une relation très fusionnelle. Mais si Edda apprend très rapidement à lire et passe ensuite son temps dans les bouquins, négligeant ses relations aux autres, Eidar lui est dyslexique et rencontre de grandes difficultés dans son apprentissage de la lecture. L’enquête d’Eidar va le mener à s’interroger, la rupture brutale de sa sœur avec la lecture quelques années auparavant peut-elle être à l’origine de sa disparition soudaine ?



« Ce sont justement les expéditions vouées à l’échec qui font les meilleurs récits. Le héros doit franchir un certain nombre d’obstacles, se libérer des griffes d’un monstre, il va de Charybde en Scylla. Il apprend au fil des épreuves, mûrit pendant son voyage et guide le lecteur pas à pas derrière lui. »



Ce fil narratif autour de la lecture m’a séduit et donne au récit une impulsion intéressante, très encourageante pour la suite de l’enquête.

Malheureusement arrivée au milieu du roman, plusieurs points m’ont perturbé et m’ont fait décrocher de l’histoire.

Tout d’abord, d’improbables coïncidences et coups de chance permettent à Eidar de progresser rapidement et sans grande difficulté dans une enquête qui perd alors en crédibilité et en souffle.

De plus l’histoire part ensuite sur des thématiques un peu trop tirées par les cheveux et qui semblent quelque peu éloignées de l’objectif initial du récit. Cette complexification de l’intrigue a aussi un effet direct sur les personnages qui perdent en émotion et en intensité.

Dommage que la conclusion ne soit pas à la hauteur de l’intérêt suscité par le début prometteur du roman.
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L'île

L'île...

Je viens de terminer la lecture de cette dystopie très sombre, et j'avoue que mon moral n'est pas au beau fixe.

L'Islande s'est donc retrouvée coupée du monde du jour au lendemain, et rien n'y fait, le contact avec l'extérieur ne sera jamais rétabli. Comment la vie va-t-elle bien pouvoir s'organiser maintenant que l'archipel est condamné à l'autonomie ?

Le regard des protagonistes sur cette société qui s'effondre lentement, fait froid dans le dos, pire même, il blesse profondément et de manière indélébile un humanisme naïf qui sommeille en nous, et que l'on aimerait voir (re)naître : les espoirs sont douchés les uns après les autres, le malheur vient frapper à toutes les portes, l'être humain se montre incapable de bâtir un avenir commun, où la solidarité saurait empêcher la dérive collective. On file à toute allure vers des abîmes dont l'histoire témoigne au gré des événements les plus glauques qui la jalonnent.

Dérives collectives et individuelles, faillite de l'esprit critique, loi du plus fort, dogmatisme et aveuglement politique, racisme, intolérance, égocentrisme, corruption maladive, tous les maux s'amoncellent alors que la famine s'étend, que la misère ronge les vestiges d'un passé heureux finalement pas si lointain.

L'île surnage, les hommes sombrent.

J'ai mal à mon humanité, et ce livre m'a fait beaucoup réfléchir.

Quelque part entre La Route et La Constellation du Chien, voici encore une expérience dont je ne suis pas sorti indemne.
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L'île

Premier roman de cette auteure islandaise, cette dystopie nous met dans un situation inconfortable dans laquelle l'Ile islandaise est coupée du reste du monde. Que s'est-il passé ? En tout cas, les islandais doivent s'organiser, retrouver leur source pour vivre en autarcie.

C'est un roman qui m'a transportée, et qui amène inéluctablement des questionnements sociologiques.

Une auteure à suivre !
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Éruptions, amour et autres cataclysmes

Si comme moi vous rêvez de vous envoler pour l'Islande pour vous rouler avec un islandais bien bâti au nom imprononçable sur une plage de sable noir, alors il se pourrait bien que ce roman vous plaise.



On dit que vivre en Islande, c’est vivre sur un volcan. Heureusement pour les Islandais, Anna est une des meilleures géologues du pays. Et lorsque la terre se met à trembler, elle rejoint le groupe d’experts chargé d’évaluer les risques pour la population. Si tout lui sourit sur le plan professionnel, sa vie personnelle manque un peu de piment. Anna s’emmerde profondément entre un mari trop prévenant et sa belle maison à la décoration couleur crème. Elle tombe amoureuse d’un photographe avec qui elle vit une passion brûlante, sans doute magnifiée par l’activité géologique du moment, annonciatrice d’une catastrophe que tout le monde préfère ignorer...



Ce roman ne fera sans doute pas l’unanimité si vous n’avez aucune accointance particulière pour les volcans. Voici pourtant 3 raisons qui le rendent indispensable à votre PAL :

- Nuée ardente, éruptions effusives, magma, géologie de l'Islande, vous ressortez de ce roman plus cultivé, c'est garanti !

- C'est tellement rare d'avoir pour héroïne une femme scientifique reconnue par ses pairs qu'il faut en profiter et savourer !

- C’est aussi une critique cynique de la gestion de la catastrophe par les autorités (faut-il évacuer la population ? Oui mais être alarmiste fera chuter le tourisme, manne financière inestimable. Et si on construisait plutôt des points d’observation à deux pas des fissures pour régaler les curieux ? Allez, vendu !)



Bref, j’ai beaucoup aimé. Espérons juste que ce roman ne soit pas prophétique…


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L'île

Nous lisons pour voyager dans le temps et dans l'espace.

Ici le temps se révèle être un futur noir, et l'espace : l'Islande bien loin des brochures touristiques.



En effet du jour au lendemain l'Islande devient un île déserte, au sens figuré, coupée du monde telle que l'île déserte apparaît comme le modèle de ce que l’on appelle, dans la philosophie politique des XVIIe et XVIIIe, "état de nature", à savoir l’état d’un être humain en dehors de toute société, dépouillé donc de tout ce que la vie en société nous apporte et nous impose, de tout ce qui est acquis et intégré par nous lorsque nous vivons en groupes : c’est l’idée d’un homme qui n’aurait, en termes de désirs, de règles de conduites et de capacités que ce que sa nature originelle lui procure, sans ajout, sans éducation et sans rien qui supposerait l’interaction avec les autres.

Dans ce livre c'est un état entier qui se retrouve face à lui même.



ET SI un un pays se trouvait coupé du monde extérieur, que se passerait-il ?

"Et si", nous pousse à placer ce texte dans la catégorie des dystopies, mais est-ce le cas ?

Peut-être car elles sont là pour nous rappeler que rien n'est indestructible, que tout système peut changer, que la volonté de puissance fait partie de la nature humaine et que l'enfer est pavé de bonnes intentions...



Afin d'éviter le chaos, les politiciens, menés par le Premier ministre, commencent à introduire des restrictions, à rationner la nourriture et les carburants, et à chercher des solutions alternatives à la crise à venir, notamment en termes de nutrition. Cela conduit à des distorsions et à une propagande médiatique, les rôles sociaux sont inversés, les anciens exclus sont désormais des exclus, les mécanismes de formation des nationalismes et des fascismes sont visibles, et l'aversion pour "l'autre".

Ce qu’il y a de passionnant dans cette phase du texte est l’analyse journalistique presque froide, neutre, d’un processus terrible, celui du basculement d’une démocratie vers le fascisme, sous la pression de certains facteurs et évènements externes, et des liens entre médias et pouvoir.



Très vite ce sont des problèmes bien concrets qui apparaissent, nourrir toute la population, générer du travail, atteindre l’autosuffisance, maintenir le moral de la population pour empêcher troubles et émeutes, que faire des touristes présents sur l'île, quels choix faire.

De prime abord les intentions sont louables, la principale tactique étant de se raccrocher à l’identité islandaise, ses pratiques ancestrales, son histoire qui peuvent servir d'exemple.

On assiste à la mise en place d’une politique nationaliste, véhiculant ardemment un sentiment d’appartenance à un peuple fier et indépendant, qui ne doit son salut qu’à lui-même :

"Nous n’avons pas peur.

Nous n’avons rien à craindre.

Nous vivons sur cette île depuis presque mille deux cents ans et nous nous sommes toujours suffi à nous-mêmes. Nous avons connu des périodes difficiles, il nous est arrivé de souffrir du froid, mais nous avons survécu. Et nous sommes encore ici, avec notre belle langue ancienne, nos sagas et nos poèmes, nos vertes campagnes, notre océan qui regorge de poissons et nos rivières puissantes. Nous avons les hommes les plus forts et les femmes les plus belles, elles mettent au monde les enfants les plus solides de la terre. Nous avons l’espérance de vie la plus longue au monde, hommes et femmes confondus. Nous nous serrons les coudes, nous nous acquittons des tâches nécessaires, nous faisons ce qu’il faut faire. Allez, l’Islande !

Allez, l’Islande ! La foule pousse des cris de joie tandis que le jeune homme va et vient sur la scène, le poing brandi."



Puis interviennent les membres du comité de pilotage qui convoquent l'histoire avec un grand H  :



" L’année 1177 avant Jésus-Christ a vu l’effondrement de la civilisa­tion mondiale. Les grands royaumes de l’âge du bronze ont disparu, de la Mésopotamie à la Grèce. Les grandes villes ­grouillantes de vie, centres commerciaux et culturels ont brûlé ou bien ont été recouverts par le sable des déserts. Leurs habitants jadis vêtus de pourpre et d’or, et qui exerçaient des professions spécialisées comme celles de comptable, d’orfèvre ou de scribe ont fui vers les campagnes où ils se sont habillés de vêtements de grosse toile ou bien de peaux de bête pour devenir ­paysans, ­chasseurs et pêcheurs. Les anciennes langues écrites des Égyptiens, des Sumériens et des Crétois ont été oubliées et effacées sauf dans les tombeaux et les bâtiments où étaient entreposées des tablettes d’argile qui, pour quelques-unes, ont été miraculeusement cuites et durcies par les incendies, ce qui a permis de conserver les caractères. Les peuples fiers de l’Antiquité se sont transformés en une cohorte de paysans illettrés, les armées de chars des généraux et des pharaons ont été remplacées par des hordes de bandits et de pillards qui s’en prenaient à la population. C’était l’avènement des siècles ­obscurs. Cette nuit ne s’est dissipée qu’au VIIIe siècle avant Jésus-­Christ, lorsque les Grecs ont repris le flambeau de la civilisation pour le faire rayonner sur leurs cités. Cette flamme a ensuite engendré ce qui deviendrait le ­puissant Empire romain qui a lui-même jeté les bases de la civilisation mondiale à laquelle nous appartenons. Notre petite nation tout au nord de l’Atlantique est peut-être le dernier vestige de la culture occidentale. Évidemment, nous ne pouvons pas l’affirmer avec certitude, mais nous avons toutes les raisons de le supposer. Et tant que nous ne pouvons pas entrer en contact avec d’autres sociétés, leur existence ne saurait nous être utile"



Et les scientifiques de poursuivre :



"De nombreux scientifiques considèrent que les sociétés et les cultures ne se développent que pour ensuite décliner, de la même manière que l’être humain naît pour mourir. ­L’histoire de ­l’humanité regorge d’exemples de ce type : les Mayas en Amérique centrale, la civilisation de l’Indus, la dynastie des Han en Chine, mais en général, on observe que les univers ­culturels fusionnent ou entrent en sommeil puis se réveillent sous une nouvelle forme, comme l’a fait l’Occident après les siècles sombres du Moyen Âge. Notre société est le fruit des Lumières et de la Renaissance, plonge ses racines à travers le Moyen Âge jusqu’à la Rome antique puis jusqu’à la Grèce des philosophes, de la tragédie, de la ­République et de Pythagore. Notre culture a connu des périodes de déclin et des regains, elle est entrée en sommeil et s’est ­réveillée, régénérée et renforcée. Nous lui avons constamment ouvert de nouvelles voies, nous avons exploré de nouvelles formes d’expression par le biais des œuvres d’art, des écoles, des livres, de l’Église, des parlements, des navires, des armes, des vaisseaux spatiaux et des centrales nucléaires. Il n’est pas impossible qu’une de ces voies ait fini par lui être fatale - mais notre rôle n’est pas d’apporter une réponse. La seule chose qui importe, c’est que la nation islandaise est encore là et que nous sommes en mesure de réfléchir à toutes ces questions.



Puis ce sera au tour de la culture de faire les frais, les départements inutiles des universités seront fermés. Les jeunes livrés à eux-mêmes. La descente est inexorable.



Les intentions louables cèdent la place aux chiffres, aux courbes mathématiques, aux analyses chiffrées, bref au cynisme :



"Comment se décide le destin d’une nation ? Suffit-il de quelques âmes bienveillantes qui proposent un nouveau contrat social, qui déterminent ce qu’on doit produire et comment on doit s’y prendre, qui installent les gens dans les campagnes, envoient les banquiers et les designers en mer et les compositeurs faire les foins ? En a-t-on le droit ? Hjalti ne fait que poser les questions. Elín répond, calme et ­pondérée : Nous faisons ce qu’il faut faire. La nation est avec nous. C’est en son nom que nous travaillons."



Heureusement à côté de cette froideur il y a la chaleur des personnages qui jalonnent le roman.

Hjalti, un journaliste proche des sphères du pouvoir, mais ...

son ex-compagne Maria, d'origine espagnole, violoniste, qui tente de survivre avec ses deux enfants...

Svangi, un ermite vivant avec son troupeau dans un fjord sauvage, plein de nostalgique pour les gens et l'ordre ancien, mais sans tendresse ni sentimentalité, ni peur d'être ici et maintenant.



À ce cynisme l'auteure convoque en nous-même de l'empathie pour ces personnages qui tentent de mener une "vie normale" dans un monde qui ne l’est plus, qui ne savent pas quoi faire d’autre ou comment faire autrement, qui assistent impuissant à l'effondrement de leurs idéaux, et nous lecteurs en sommes spectateurs.



Voilà un livre qui marque, qui laisse une trace, et qui pose énormément de questions, en ces temps actuels, sur la condition humaine, les mécanismes sociaux, l'éthique voire l'absence d'éthique dans les relations avec les autres êtres humains, que signifie cette métaphore de l’isolement ?

La fiction analyse-t-elle la société, la réinvente-t-elle, ou lui impose-t-elle une forme?
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La lectrice disparue







Júlía et Ragneiður se retrouvent enceintes du même homme, un certain Orlygur. C'est dans le "Reykjavik d'avant le tourisme, (...) le Reykjavik d'avant les technologies de l'information" que Julia a rencontré Orlygur, dans ce "Reykjavik des poètes, des fabricants de gnôles de contrebande et des chèques en bois". Orlygur se dit réalisateur, acteur aussi, bref, un artiste, un esthète endimanché un jour de neige et verglas. Vous voyez le genre de loustique ?... Vous croyez qu'Orlygur va finir par lui sauter dessus ? Pourtant, s'ils se fréquentent, c'est Júlía prendra les devants. Mais sera humiliée. Pourtant, un revirement de situation, et Júlía, cette gamine, quitte le domicile familial pour emménager avec cet homme de dix ans son aîné dont elle finit par tomber enceinte. Elle, la fille aux rangers, la dure à cuire qui refuse d'avorter contre l'avis de tous, celle qui se gave de "mauvaise littérature" pour se venger de ce mec, se prend un upercut le jour où elle reçoit l'appel d'une certaine Ragneidur. Celle-ci lui explique qu'elle est enceinte d'Orlygur. "Putain de bordel de merde (...) espèce de salope !" Orlygur ne dément pas la chose, n'étant pas l'homme d'une seule femme. Revirement de situation de nouveau. Ragnheiður et Julia se rencontrent, se plaisent et vont faire face à la situation, emménagent ensemble. Vous pensez qu'elles ont viré lesbiennes ? Non, non !







Un couple de femmes qui n'en est pas un pour élever deux mioches : Edda et Einar. Un petite famille non conventionnelle. Edda est toujours le nez dans les livres alors qu'Einar peine à déchiffrer le moindre écrit. Une petite famille non conventionnelle, avec une gamine qui souffre d'hyperlexie et l'autre de dyslexie ! Edda peine à communiquer avec autrui. Les seuls personnes qu'elles fréquentent sont les êtres de papier qu'elle rencontre dans les livres. Jusqu'au jour où, l'adolescence passant par là, elle décide de devenir une autre. Les réseaux sociaux sont une aubaine. Elle parvient à drainer des milliers de followers à sa suite, une star du web qui ouvre largement la porte sur sa vie privée pour maintenir sa notoriété, gagner du fric. Un vrai boulot à temps plein... Hop, son mariage avec Ragnar est largement diffusé sur Internet. Pourtant, un jour, plus d'Edda ! Elle disparaît, plantant là son mari et leur nouveau né, ses folowers plein d'inquiétude. Dépression post-parthum dirons certains. Est-ce bien le cas ?







Sigríður Hagalin Björnsdóttir amène à réfléchir à notre rapport à l'écrit, de l'Antiquité à nos jours. Elle fait porter à son héroïne disparue un prénom qui aussi une oeuvre majeure de la littérature islandaise médiévale , l'Edda de Snorri. "Edda" a plusieurs significations plus ou moins mystérieuses ("livre d'Oddi", thèse généralement rejetée, mais aussi "arrière-grand mère", entres autres, en passant par "aieule de tout savoir sacré" selon Régis Boyer - voir Wikipedia) . On dit souvent que "nous assistons actuellement à l'agonie du livre (...). La lecture est en recul que ça nous plaise ou non. Nous sommes témoins de la plus importante révolution intellectuelle depuis l'invention de l'imprimerie qui a permis aux gens du commun il y a presque six siècles d'accéder à l'écrit." L'autrice remonte la source jusqu'aux Sumériens, première civilisation à avoir inventé l'écriture et Socrate qui considérait que l'écrit au détriment de l'oralité était fait pour asservir le peuple. Cependant, ne prenez pas peur : ce roman n'est pas un livre indigeste de philo ! Sigridur Hagalin Bjornsdottir amène à réfléchir à notre rapport à l'écrit, de l'Antiquité à nos jours. Elle fait porter à son héroïne disparue un prénom qui aussi une oeuvre majeure de la littérature islandaise médiévale , l'Edda de Snorri. "Edda" a plusieurs significations plus ou moins mystérieuses ("livre d'Oddi", thèse généralement rejetée, mais aussi "arrière-grand mère", entres autres, en passant par "aieule de tout savoir sacré" selon Régis Boyer - voir Wikipedia) . On dit souvent que "nous assistons actuellement à l'agonie du livre (...). La lecture est en recul que ça nous plaise ou non. Nous sommes témoins de la plus importante révolution intellectuelle depuis l'invention de l'imprimerie qui a permis aux gens du commun il y a presque six siècles d'accéder à l'écrit." L'autrice remonte la source jusqu'aux Sumériens, première civilisation à avoir inventé l'écriture et Socrate qui considérait que l'écrit au détriment de l'oralité était fait pour asservir le peuple. Cependant, ne prenez pas peur : ce roman n'est pas un livre indigeste de philo !







Sigríður Hagalin Bjornsdottir offre un roman distrayant, avec une bonne part de thriller : nous suivons Einar à la recherche de sa soeur Edda, qui emmènera à New York, à la rencontre d'un mystérieux professeur. Einar se souvient, nostalgique, de sa soeur lui contant des histoires, lui qui n'arrivait pas à lire. A son tour, il lui racontera, sur un enregistrement, le secret dont il doit soulager son coeur.







Même si l'auteure destructure l'écheveau temporel de son récit en mille brins de laine, le lecteur finit par renouer les liens qui les unit les uns aux autres.















J'ai beaucoup aimé ce roman polymorphe qu'il est vain de vouloir classer dans un genre littéraire bien défini. J'ai aimé le jeu des doubles inversés qui émaillent le roman, l'esprit de sororité qui fait la place belle aux femmes. En revanche, je n'ai pas trop su quoi faire avec Orlygur, le personnage masculin à l'origine de l'histoire et des drames. Paradoxalement. Un petit coup de griffe aux réseaux sociaux et aux "stars" nées d'un nombre de like, ce trompe-l'oeil et cet asservissement des temps modernes.







Un roman singulier où l'on ne s'ennuie pas. Une de mes lectures marquantes de l'année.








Lien : http://milleetunelecturesdem..
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L'île

Terrifiant, bouleversant, ce livre est un cauchemar, nous sommes dans nos rêves les plus fous, de ceux qui nous tiennent éveillés et qui nous laissent épuisés après une nuit de non sommeil.

Tout s'arrête, il n'y a plus rien, nous sommes seuls au milieu de rien ...

Qui n'a jamais envisagé ce scénario catastrophe ?

Qui n'a jamais tremblé en se demandant que faire ?

Cette panique qui monte, monte transformant les individus les plus charmants, les plus intelligents en bêtes absurdes, teigneuses et si dangereuses.

Cette agitation qui perturbe le bon sens habituel, les raisonnements les plus pertinents deviennent des discours lénifiants et dangereux.

Cette fureur qui emplit les cœurs d'amertume, de rancœurs.

Terrifiant et bouleversant, je le répète cette lecture est enivrante, addictive et nous laisse assommé, groggy sur le bord de la route qui ne mène à rien.

Heureusement il y a cette conclusion :

"Mais nous sommes ici. Et nous sommes vivants.

Entendez-le."
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L'île

J’ai fort apprécié la lecture de ce livre fort plaisant.



L’Islande est tout à coup déconnectée du reste du monde : Plus aucune communication, téléphone ou internet, plus d’avions, plus de bateaux. Sont-ils seuls au monde ? Personne ne le sait.



Retour vers l’autarcie – plus facile pour des îliens, je vous l’accorde. Donc : la dictature décide plus vite que la démocratie, et on n’a pas le temps, car on a un gros problème d’autosuffisance alimentaire. La nourriture devient vite le problème numéro un. Le poisson allez-vous me dire ! Mais comment pêcher sans pétrole ?



Tout s’enchaîne : exode vers la campagne, on coupe les budgets non rentables (la culture pour commencer), on a un problème avec les touristes (20.000 bouches à nourrir), des bandes s’organisent, etc.



Point de vue différent sur un thème somme toute fort classique.

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Éruptions, amour et autres cataclysmes



Anna fait partie des meilleurs spécialistes des volcans en Islande. Dès l'enfance, grâce à son père, elle a été imprégnée de leur poésie, de leur imprévisibilité aussi. Membre du conseil de sécurité, elle est amenée à prendre des décisions qui doivent à la fois rassurer le public (et les touristes en particulier car le tourisme est l'une des ressources financières de cette île) et préserver la sécurité de tous.

 Une éruption sous-marine ayant eu lieu, il convient de s'assurer que cette activité volcanique ne va pas s'étendre...

La tâche est rude pour notre héroïne car, la rencontre d'un photographe va l’amener à remettre sa vie amoureuse (un peu trop plan plan) en question, au risque de détruire sa famille.

D'emblée le récit nous plonge au cœur du monde des volcans et de la relation si particulière que l'Islande et les Islandais entretiennent avec eux. L'écriture se fait ample, poétique et on ressent parfaitement la passion d'Anna que l'autrice nous fait partager.

Je reste plus mitigée sur la vie privée de la géologue mais la description d'un accouchement et des pensées de la parturiente liées aux forces telluriques est un morceau de bravoure que je n'oublierai pas de sitôt.  En outre, le récit n'épargne pas le lecteur et joue avec ses nerfs dans la dernière partie du roman. Une réussite et l'on tourne avec bonheur les 336 pages de ce texte surprenant à plus d'un titre.

















Éditions Gaïa 2024, traduction d'Eric Boury.
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La lectrice disparue

Habituée à la littérature Islandaise classique avec notamment les oeuvres de Stefansson, je peux dire que la littérature moderne n'a rien à envier à cette dernière. C'est une belle découverte qu'est « La lectrice disparue », un livre qui traite paradoxalement du drame philosophique et réel qu'a entraîné la naissance de l'écriture, c'est un peu le fil rouge du récit mais pas seulement. A côté de cette thématique, il s'agit aussi de l'histoire d'une jeune mère qui abandonne son enfant et s'en remet à son frère pour découvrir les raisons qui sous-tendent cet abandon, ce qui offre un récit poignant et très bien construit. Le thème de la différence, de l'exclusion, et de la rencontre entre deux mondes culturels différents imagent les ambivalences de notre monde actuel, et nous emmène dans un univers intéressant, dans lequel on se plait à tourner les pages et défiler la narration. 

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La lectrice disparue



J'ai commandé ce livre par hasard, parce que je ne connaissais pas cette auteure islandaise. J'en ai entamé la lecture sans en attendre grand chose, et j'ai reçu un grand coup dans l'estomac. Attention chef d'oeuvre!

La lectrice disparue est un roman riche, facile à lire, à la fois thriller, drame psychologique et essai sur l'écriture. Il analyse avec finesse et délicatesse, les relations au sein d'une famille recomposée, Julia et Ragnheidur, Edda et Einar leurs enfants majeurs, nés du même père. La psychologie des protagonistes y est particulièrement bien décrite.





Edda vient d'accoucher et soudain elle disparait, abandonnant son bébé. On apprend qu'elle a pris l'avion pour New York. Son demi frère, Einar part à sa recherche. Mais est-elle toujours vivante? Pourquoi est-elle partie à New York? Comment pourra-t-il la retrouver au milieu des 25 millions d'habitants de la grosse pomme? Alors commence un étrange jeu de piste dirigé par Edda à l'intention de son demi frère. On y découvre aussi bien Inanna - déesse sumérienne - que le Phèdre de Platon. Pourquoi ce jeu de piste autour du thème de l'écriture?





Peut être parce que l'écrit et la lecture sont au coeur des relations entre Edda et Einar. Einar est dyslexique. Jeune il a eu beaucoup de mal à apprendre à lire. Edda l'a aidé. Edda, elle, est hyperlexique, à la limite de l'autisme. Ce qui peut être un avantage - facilité de lecture et de mémorisation - peut devenir rapidement un handicap avec une difficulté d'intégration dans la vie sociale. Est ce qu'Edda en a eu assez de ce handicap? Mais que peut-elle faire? Au passage, j'ai découvert ce qu'était l'hyperlexie.





Finalement ce qui m'a le plus intéressé dans ce roman passionnant de bout en bout, c'est la réflexion sur l'impact de l'écrit dans une civilisation. Les Gaulois n'ont laissé quasiment aucun écrit. A l'opposé, les Sumériens, quatre millénaire avant les Gaulois, ont inventé la première langue écrite au monde. Mais l'écrit n'a pas toujours été une bonne chose pour les hommes, et il commence en ce moment à s'effacer au profit de la parole (enceinte connectée) ou du pictogramme (emoji). La thèse soutenue par l'un des personnages de ce roman est que l'écrit disparaitra totalement dans un demi siècle et que ce sera un bienfait, nous rendant plus près des autres et de la nature. Pourquoi pas? En tout cas c'est un thème que je n'avais encore jamais rencontré. Un thriller qui fait réfléchir. Retenez le nom de l'auteure: Sigridur Hagalin Björnsdottir.

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L'île

Fantastique, post-apo ou fable de politique fiction terriblement plausible ? Sigridur Hagalin Björnsdottir, journaliste politique, signe un premier roman flippant, où l'Islande, brusquement coupée du reste du monde, plonge dans la dictature. Une dénonciation du repli identitaire qui menace actuellement une grande partie de l'Europe, à travers l'exemple si particulier de cette île éloignée de tout.
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L'île

Une nation coupée du monde du jour au lendemain, sans aucune explication, qui n'a alors d'autre choix que de revoir son mode de fonctionnement ou se laisser dépérir. Voilà qui est plutôt prometteur et intrigant !

Amoureuse de l'Islande, la quatrième de couverture avait ainsi fortement suscité ma curiosité, j'avais hâte de découvrir comment cette île et ses habitants feraient face à cette situation catastrophique.



L'auteur dresse le portrait inquiétant d'une Islande en pleine déchéance, en proie à des interrogations sans réponse. Craintes, peur, dérives, corruption, manipulations politiques, mais aussi espoir sont les ingrédients de ce roman captivant et bien construit.



Une vision post-apocalyptique effrayante, fascinante, et surtout crédible, ce qui constitue l'un des points forts de ce roman. Après ce genre d'événements, les situations évoquées pourraient effectivement ne pas être éloignées de ce qu'il se passerait réellement. Cet aspect réaliste ne rend l'histoire que plus attrayante.



Les chapitres alternent en nous présentant l'évolution de différents personnages tout au long du remaniement forcé de cette société. La vie de ces survivants est chamboulée, eux aussi sont amenés à changer plus ou moins, à s'adapter, pour le meilleur ou pour le pire.



Une lecture coup de cœur qui nous dépeint habilement une Islande au destin à la fois sombre et fascinant. Un roman passionnant jusqu'à ses dernières pages émouvantes. A lire !
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La lectrice disparue

Islande. Edda a disparu en laissant derrière elle son bébé et son mari. Poussé par sa mère Julia, son frère Einar part à sa recherche jusqu'à New York...



Bien sûr il faut commencer par fouiller l'histoire de cette famille peu banale qui expliquerait qu'Edda, qui vivait par son métier d'influenceuse une existence en apparence lisse et parfaite, ait choisi de partir. À commencer par les mères d'Edda et Einar : toutes deux enceintes du même homme, elles ont décidé de vivre ensemble pour se soutenir mutuellement et élever leurs enfants. Or, si Edda a montré des prédispositions précoces pour la lecture, au point de se couper du monde, son frère beaucoup plus sociable ne parvient pas à déchiffrer la moindre histoire : autant dire qu'ils semblent composer les deux faces d'une même pièce. Einar est à présent persuadé que c'est du côté de cette passion pour les livres qu'il faut chercher sa sœur.



Quel drôle de mélange que ce roman mêlant quête familiale, petite dose de thriller et sur la fin, pas mal d'ésotérisme. Pour autant il se laisse lire de façon très fluide, j'ai vraiment apprécié l'histoire de la relation entre les deux mères, un peu moins compris comment Edda est passée de lectrice fermée au monde extérieur à blogueuse à succès. Avant de prendre la direction d'une réflexion sur l'avenir de l'écriture et de la lecture : va-t-on vers l'agonie du livre ? Vers la fin de l'écrit, après des siècles d'hégémonie ? Une fin déconcertante et prêtant à discussion pour un roman qui se lit malgré tout très agréablement.



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Éruptions, amour et autres cataclysmes



Dès le début on est plongé au coeur d'une éruption sous-marine, en Islande, au large du cap de Reykjanes. L'activité s'arrête à l'aéroport international de Keflavik. Les habitants des villages les plus proches de l'éruption sont évacués. Une pluie de cendres noires s'abat sur Reykjavik. C'est l'Islande. Vivre au rythme des éruptions. Est-ce une grande éruption comme le Katla en 1918 ou l'Hekla en 1947? Est-ce un évènement unique et isolé, ou est-ce le prélude à une nouvelle période d'activité volcanique ininterrompue? Anna, volcanologue, est sur le pied de guerre.

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C'est alors que le roman aborde un sujet passionnant : la manipulation des scientifiques par les politiques et les bureaucrates! Le Conseil scientifique d'Islande sur les catastrophes naturelles est vite remanié : réduire le nombre de scientifiques, mais y inclure le chef de la police, un représentant des professions du tourisme et un fonctionnaire de la Justice. Anna - qui fait partie de ce Conseil - s'insurge, elle comprend vite qu'il s'agit de contrebalancer le poids des décisions prises par des scientifiques - comme un ordre d'évacuation - par des intérêts purement économiques - comme la préservation du tourisme. En un mot : faire éventuellement prendre des risques à la population et aux touristes pour pouvoir faire de l'argent! Sujet brûlant s'il en est, après la manipulation reconnue de nombreux scientifiques lors de la crise du Covid par Big Pharma et les politiques pour, entre autres choses, gagner des milliards.

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Et puis tout d'un coup, nous voici confrontés à une interrogation existentielle : vit-on plus heureux dans une maison qui vous ressemble ou dans une maison de revue de décoration? Après une rencontre avec une architecte d'intérieur, Anna se sent soudain comme une invitée dans sa propre maison, il n'y a que dans son bureau - où sont amassés des souvenirs - qu'elle se sent bien. C'est alors que survient… le coup de foudre d'Anna pour un photographe, sans prévenir, immédiat comme une éruption. D'abord, Anna fuit ce coup de foudre, comme devant une lave en fusion. Mais une nouvelle éruption se prépare, c'est plus une intuition d'Anna que les instruments de mesure qui le disent. Est-ce que nos connaissances scientifiques sont assez avancées pour pouvoir prévoir tous - absolument tous - les phénomènes éruptifs? et les tremblements de terre? Le suspens monte et devient vite insoutenable. L'éruption à venir - peut-être plus dangereuse que la première - d'une part, et les conséquences du coup de foudre, d'autre part. Anna confrontée aux limites de la science et aux soubresauts de son coeur. C'est fort. C'est original. C'est instructif. C'est émouvant. Grand roman.



PS : Ah, j'oubliais. La comparaison d'une éruption volcanique - où l'écorce terrestre s'ouvre pour créer de nouvelles terres - à la naissance d'un enfant - où dans la douleur, le corps s'ouvre pour expulser le nouveau-né, est une image qui m'a totalement subjugué. Dans les deux cas, c'est la création et c'est la vie.
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La lectrice disparue

La lectrice disparue de Sigridur Hagalin Bjornsdottir

Publié chez Gaia.

Premières phrases : « Nous sommes là, ensemble, c’est la première photo qu’on a prise de nous. Nos mères sont assises sur le canapé, Julia, élégante et gracile comme une elfe, Ragnheidur, encore ronde après sa grossesse, le regard débordant de douceur. »



C’est en déambulant dans les allées de la BM de Grenoble, que j’ai eu le plaisir de découvrir ce petit bijou.

Cette histoire surprenante et passionnante, nous vient tout droit de cette terre lointaine et mystérieuse qu’est l’Islande. Le texte traduit par Eric Boury se décompose en plusieurs périodes de vie, ainsi nous pouvons suivre nos personnages au plus profond d’ eux-mêmes.

Et si c’est la couverture qui a guidée ma main, cette petite fille face à l’immensité étoilée et à cette serrure symbolisant la Lune, les mots de l’auteure ont su me captiver sitôt les premières phrases lues. L’écriture fine et sensible distille peu à peu les vérités, vous attache aux personnages et vous transportent.



Laissez moi vous en dire un peu plus mais pas trop car il vous appartient de découvrir le mystère qui entoure la disparition d’Edda, blogueuse Islandaise adulée par ses followers, dont la vie semble si parfaite à travers les filtres des réseaux sociaux. Mais alors comment expliqué que trois jours après être devenue mère, elle quitte son foyer ? Laissant son enfant, son mari derrière elle. Et pourquoi cette lectrice compulsive a-t-elle renoncé à la lecture ? Le seul à pouvoir la retrouver et surtout à la comprendre est Einar son frère dyslexique, lui qui peine à lire le moindre mot, devra faire preuve d’ingéniosité pour retrouver Edda.



Emma aime

-Le dépaysement

-Le pouvoir de la lecture

-Cette couverture


Lien : https://www.instagram.com/le..
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L'île

Je referme avec stupeur L’île, de Sigridur Hagalin Björnsdottir. Je m’attendais à être plongée dans un roman de fin du monde et j’en ressors avec une démonstration de la genèse d’un régime fasciste. J’en ai encore la chair de poule !



L’Islande se retrouve coupée du monde du jour au lendemain de façon inexplicable. Plus de communications à l’international, plus de bateaux, plus d’avions. Ceux qui partent ne reviennent pas et plus personne n’arrive jusqu’à l’île. Les habitants doivent bientôt s’accommoder d’une situation qu’ils pensaient bien évidemment ponctuelle et toute la société en est chamboulée… Bientôt, il n’y aura plus de médicaments pour soigner les malades, plus de pétrole pour remplir les réservoirs des voitures et des camions, plus de produits importés et pire que tout, plus à manger pour tout le monde… comment nourrir 350 000 personnes, alors que l’histoire a prouvé que l’Islande, en autosubsistance, ne pouvait en faire vivre que 50 000 ?



Au cœur de cette société en mutation accélérée Hjalti, journaliste, et Maria, violoniste et mère de deux enfants, se séparent. Le roman suit principalement l’évolution des deux personnages, souvent éloignés l’un de l’autre, parfois rapprochés, dans la grande aventure du retour aux sources de l’Islande ! Car le gouvernement, pour sauver ce qui peut l’être et redonner espoir au peuple se lance dans une propagande à base de chandails tricotés, de cheveux tressés et de champs de patates à cultiver. En façade, le côté bucolique de la transition a de quoi charmer. Cependant, décision gouvernementale après décision gouvernementale, l’état d’Islande grignote petit à petit les libertés des habitants, entretient la mise à l’écart de l’opposition, arme ses sauveteurs, pratique la rétention d’informations, maquille des enquêtes, exacerbe le sentiment d’appartenance nationale et persécute des populations non islandaises « de souche » … toujours sous couvert de la « nécessité nationale ». Lentement mais sûrement, le régime démocratique bascule en un régime liberticide, totalitaire, capable de tout.



Par rapport à tous les livres que j’ai lu sur « la fin du monde » celui-ci diffère des autres en cela que l’autrice maintient les institutions en place, alors que la plupart (enfin, ceux que j’ai lu) font plutôt la part belle à la survie individuelle, en forme de robinsonnade et dans lesquels toute forme d’organisation sociétale a été anéantie. Il est à souligner que le rôle des journalistes comme outils de propagande est bien mis en avant grâce au personnage de Hjalti, qui va devoir subir bien des épreuves avant d’ouvrir les yeux. L’autrice, par ailleurs journaliste à la télévision publique islandaise avait peut-être un message à faire passer à certains confrères et consœurs ?

En tout cas la démonstration est très convaincante, inspirée à la fois de réalités historiques et de problématiques d’actualité, et sonne comme une mise en garde sur l’avenir de nos sociétés.



Le seul petit bémol qui m’empêche de noter cinq étoiles concerne le style pas toujours très recherché et des dialogues insérés dans le texte sans ponctuation particulière pour les signaler, ce qui est assez déstabilisant. Cela n’empêche cependant pas la lecture, le fond l’emportant largement sur la forme !
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L'île

Coupés du monde, lorsqu'il se réveille ce matin-là et apprend la nouvelle, cela semble aberrant : l'Islande est coupée du monde, impossible de communiquer avec l'étranger, ni Internet, ni téléphone, ni radio. Les avions et les bateaux n'arrivent plus ni ne peuvent quitter le pays... Un attentat ? Un coup monté par les pays voisins ? La fin du monde ?

Dans ce roman très perturbant, l'auteur nous raconte l'histoire d'un pays qui se replie sur lui-même dans une terrible situation de crise. Jusqu'où iront les dirigeants pour tenter de maîtriser une situation qui leur échappe ? Mourront-ils tous de fin dans un pays privé de son commerce extérieur ? Autant de questions qui trouveront, ou non, des réponses au fil de pages.

Ce livre m'a quelque peu glacé le sang car la vision du monde et des humains est plutôt terrible. Le suspens m'a tenue en halène de bout en bout et j'aurais vraiment aimé en savoir plus lorsque j'au lu la dernière page !

En bref : impressionnant !
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