Le vingtième jour, Samuel eut dix-huit ans et pleura pour la première fois, la nuit, quand personne ne pouvait le voir. Il sortit son passeport de sa poche et le jeta dans la mer. Le document flotta doucement à la surface et s’éloigna, éclairé un instant par la lune avant de sombrer dans l’eau noire. Ce n’est qu’une question de temps avant que tout ce qu’il restait de lui suive le même chemin …
Elle n'aurait jamais cru être obligée un jour de cacher à ses parents qu'elle s'informe. ça paraît bizarre, mais c'est vrai. (p.195)
- Alors, comment ça va ? veut savoir son père.
- ça va, dit Emilie par automatisme, comme on répond à de vieilles connaissances. Même si on est au fond du trou et qu'on se rend à son propre enterrement, on dit "ça va".
Personne ne répond : écoute, en fait, je vais me suicider, alors ce serait bien de parler un peu ensemble. Je peux venir m'installer sur ton canapé ? Juste quelques mois ? (p.91)
Ils croisent une fille aux cheveux décolorés, en bottes à hauts talons dans un jean moulant. Emilie la suit des yeux. Qui a cousu ce jean ? Ou la chemise de l'homme qui vient de passer ? D'où vient le coton de tous les vêtements qui les entourent ? Comment s'appellent ceux qui l'ont ramassé ? (p.63)
Des êtres humains au plus bas de l'échelle. Les invisibles.
Des êtres humains qui créent tout ce dont nous aimons nous entourer. Ce sont eux qui cueillent le coton pour nos vêtements. Ce sont eux qui cueillent les fruits dans de gigantesques plantations. Ce sont eux qui cousent, qui construisent des routes et qui extraient le charbon pour alimenter les centrales électriques. Des gens qui sacrifient leur vie et leur santé pour que nous puissions, par une belle journée d'été, exhiber un nouveau tee-shirt ou jouer avec un nouveau téléphone portable.
Notre rôle dans les Sauveurs du monde est de rendre à ces personnes leur visibilité. D'ouvrir les yeux des gens. De leur montrer le vrai visage du monde dans lequel ils vivent. (p.32)
Si tu veux continuer à vivre dans l'ignorance : ne clique pas ICI.
Le mot "ICI" l'attire, c'est plus fort qu'elle. Elle glisse la flèche sur le mot et clique dessus. La page des Sauveurs du monde apparaît. (p.22)
Tous étaient à bout de forces. Les paupières lourdes, les yeux voilés comme s'ils avaient vu quelque chose d'un autre monde.
Ils devaient payer cet homme, bien sûr, mais c'était toujours pareil. On en les aidait pas par charité. C'était un business, un point c'est tout. L'argent épargné de ceux qui rêvaient d'une vie meilleure était remis entre les mains de ceux qui gagnaient de l'argent sur les rêves d'autrui.