Spike a un petit pépin avec les Bolger [ …]
Sitôt la phrase prononcée, il se rendit compte qu'elle devait sembler parfaitement ridicule. Un pépin avec les Bolger, ça revenait à dire qu'il s'était pris le bec avec les talibans ou légèrement accroché avec Al-Qaïda. Les Bolger ne faisaient pas dans les "pépins". Ils faisaient dans le chaos.
Qu'est ce que je t'avais dit ? Qu'est ce que je t'avais dit sur ces O' Brien ? Tous pareils, ces O' Brien. Et avant eux, leur père n'était pas mieux. Et tous leurs oncles non plus. ils sont tous pareils, sans exception…
Oh, tais-toi, maman, dit-elle à la voix dans sa tête.
Aux yeux de Mannix, sur la chaine évolutive, peu de créatures se situaient plus bas que les hommes qui battaient leur femme.
C'est une ville honnête. Pas de tromperie sur la marchandise. Des riches et des pauvres. Côte à côte. La porcelaine de Chine y côtoie le Pyrex. Toutes les vies s'entremêlent. C'est bien là tout le mérite. Pourquoi est-ce qu'il faudrait exclure tout un pan de la société comme s'il n'existait pas…?
Vous avez déjà lu un roman policier où le détective n'avait pas de problème d'alcool ?
- (…]. Vous voulez parler d'ivrognes ou d'alcooliques?
Elle eut l'air surprise.
- Euh, peu importe. Quelle différence ?
- Facile, dit Mannix. L'ivrogne, lui, il a pas besoin de se farcir les réunions.
Les invités, c'était comme le poisson. Au bout de trois jours, ça se gâtait.
[Le jour de la parade de Halloween à New York]
Une ambiance de carnaval était en train de s'installer. Plusieurs artistes de rue munis de ghetto-blasters se produisaient. Ils passèrent devant pas moins de trois sosies de Michael Jackson en train d'exécuter une version de "Thriller".
En s'acheminant vers Broadway, ils virent des policiers qui sommaient la foule massée au bord de la rue de reculer. Ils s'y employaient avec la gravité d'une équipe de démineurs.
Mannix leur trouva une place à côté d'un terrain de basket-ball qui, jugea-t-il, leur permettrait de profiter du spectacle. Le coin où ils se trouvaient grouillait de touristes chinois qui se prenaient en photo en train de se prendre en photo. Le bruit et l'excitation montaient et les gens regardaient sans arrêt à gauche en se demandant quand la parade allait commencer.
- Quel délicieux accueil, dit Kate, comparant celui-ci au laconique message de bienvenue qu'elle avait laissé chez elle.
Elle aurait dû se donner davantage de mal.
- Cette femme a l'air tellement chaleureuse. Oh, j'espère vraiment qu'elle va passer un agréable séjour en Irlande.
- Et moi donc...
- Qu'est-ce que vous dites, DuBois ,
Kate se retourna. DuBois tentait d'ôter un cheveu du revers de sa veste. Il avait l'air grave.
- S'il y a bien quelqu'un qui mérite des vacances, c'est Mme Harvey.
Kate glissa à Mannix un regard inquiet. Mais Mannix n'écoutait pas. Avant qu'elle puisse ajouter quoi que ce soit, DuBois avait tourné les talons et pris la direction de la porte, comme s'il regrettait déjà ce qu'il avait dit.
[Journal intime de Hazel, entrouvert et lu par Kate]
17 septembre - Les flashbacks empirent.
Je n'arrive pas à dormir. J'ai peur d'aller me coucher.
L'envie me démange d'en parler à Helen.
Et puis je me ravise.
Elle sait qu'on part en Irlande, mais elle ne sait pas pourquoi.
[Hazel compare l'Irlande d'aujourd'hui à son souvenir, quinze ans auparavant]
Les voitures qui fusaient autour d'eux lui semblaient plus récentes, plus rutilantes et en meilleur état que celles d'il y a quinze ans, telles qu'elle se les rappelait.
Nombre d'entre elles portaient une plaque datant de 2007. L'année où la croissance avait atteint son pic. Où le Tigre celtique était à son zénith. Visiblement, une foule de gens s'était partagé le butin. Dans le pays qu'elle avait quitté, les voitures étaient un article de luxe, et posséder un véhicule flambant neuf était sans conteste le signe d'une véritable réussite.