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Citations de Thomas Ligotti (20)


Tout cela me rappelle le fabliau éculé du philosophe chinois (Chuang Tzu?) qui avait rêvé qu'il était un papillon : s'il était un au réveil, il feignit de croire qu'il ne savait homme rêvant qu'il était papillon ou un papillon en train de rêver... Tu vois où je veux en venir. La question est de savoir si les papillons rêvent. La réponse est un non catégorique, au regard des recherches effectuées dans ces champs, et que tu connais sans doute. L'histoire s'arrête ici, par conséquent.

Rêve d'un mannequin.
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C'était la crainte la plus prégnante que lui donnait leur situation d'habitants d'une ville carcérale : savoir qu'ils vivaient à proximité d'une meute de démons fomentant leur évasion de cellules dont les murs, à ses yeux, tenaient plus du papier que de la brique. Le principal reproche qu'elle faisait au poste de son mari était la nécessité dans laquelle elle se retrouvait d'élever un enfant dans cet environnement.

Petits jeux.
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Dans les ténèbres, au-dessus de lui, se dessine alors un long rectangle, pareil à la guérite d'un guichetier de manège. La partie inférieure est de bois, surmontée d'une vitre. L'intérieur du rectangle est envahi par une lumière vive, d'un rouge huileux. Dans cette cahute, se trouve un mannequin élégamment vêtu, tassé sur la chaise, comme endormi. Il porte une veste et un gilet noirs très seyants, aux boutons d'argents scintillant, une chemise blanche à col dur, des boutons de manchette en argent et une ample cravate ornée de motifs astronomiques, lunes et étoiles. Vu la position de sa tête, la physionomie de ce mannequin est réduite à l'éclat noir de sa chevelure peinte.
Veech s'approche de la guérite d'un pas assez prudent. Il semble s'intéresser de près à la créature qui s'y trouve. Veech glisse la main dans une ouverture semi-circulaire pratiquée dans la vitre: manifestement, il voudrait serrer la main du pantin. Mais avant qu'il ait pu réellement progresser vers ce but, plusieurs événements se succèdent: la créature lève machinalement la tête, ouvre les yeux...elle tend sa main de bois et la pose sur celle vivante de Veech...sa mâchoire inférieure s'ouvre, en sort un rire mécanique - yah-ha-ha-ah-ah, yah-ha-ha-ha-ha.
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La vie des humains n’a rien d’une quête ou d’une odyssée, ni rien de cette bouillie romanesque dont nous sommes gavés du plus jeune âge à notre dernier souffle.
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A : il n'existe aucun grand plan universel.
B : s'il existait un grand plan universel, le fait - le "fait" - que nous ne soyons pas outillés pour le percevoir, tant par des moyens naturels que surnaturels, est une obscénité sans nom.
C : l'idée-même d'un grand plan universel est d'une obscénité sans nom.
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Je ne suis pas en train de mourir en cauchemar.
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Après avoir habité le corps d'un autre [...] il me semblait que l'idée de genre humain, de quoi que ce fût comme "une personne" (ou des personnes inconnues ou connues) n'était jamais qu'un jeu de langage, une illusion réconfortante.
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L'entreprise qui m'employait n'aspirait qu'à proposer les plats les plus bas de gamme que sa clientèle pouvait tolérer, à les torcher en un temps record et à en exiger autant qu'il lui serait permis. Quand elle en aurait le pouvoir, l'entreprise vendrait ce que toutes les affaires dans son genre rêvaient de vendre, en créant ce qu'implicitement tous nos efforts visaient à obtenir, le produit ultime - Rien. Et pour ce produit elles exigeraient le prix ultime - Tout.
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D’une point de vue systémique, a commencé Barry, ce qui lui a valu de perdre aussitôt l’attention de son auditoire. À un moment de son soliloque entaché du jargon des analystes commerciaux, il a utilisé l’expression « cosmétisation de données » dont je crois bien qu’il l’avait inventée lui-même. Evidemment il a fini par se ranger du côté de Richard, en concluant que mon idée, dont Barry a montré qu’elle intégrait a minima deux « facettes », voire deux et demi, n’était pas « bénéficentréee », et ni non plus « clientelligible », toujours d’après Barry.
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À ce que je sais, les contes de fées, les légendes, les mythologies de tous les pays et de tous les temps, ne sont que les vestiges pourrissants d’un monde qui, qu’on le regrette ou non, est mort, mort, mort.
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Le coucher du soleil était inhabituel. Étant resté toute la journée derrière d'opaques tentures, je ne m'étais pas rendu compte que l'orage menaçait; une grande partie du ciel avait revêtu la couleur exacte de vieilles armures que l'on voit dans les musées. Simultanément, des taches éclatantes livraient bataille pour un fragment de ciel avec l'onyx imminent de la tempête. En-dessous, au-dessus, la lumière et l'obscurité se mélangeaient d'étranges façons. Les ombres et les rayons entraient en fusion, éclaboussant le paysage d'un croquis irréel de ténèbres et de brillances. Nuées éclatantes et noires se pénétraient les unes les autres dans un no man's land céleste. Les arbres d'automne avaient pris l'aspect de sculptures fabriquées en rêve, troncs et branches couleur de plomb et feuilles rouges fer prises dans un moment infini, dont le temps était surnaturellement aboli. Le lac gris, lentement, se hérissait et retombait dans un sommeil de mort, lapant, imbécile, sa jetée de pierres engourdies. Une vision contradictoire et ambivalente, une vapeur tragicomique recouvrant toute chose. Une contrée de parfait crépuscule. p.88 L'art perdu du crépuscule.
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Dès que Mr Gray s’attache à décrire ces lieux, un charme soudain anime son écriture – sinistre ensorcellement que génère une présence profondément mauvaise, laquelle se tient à une distance de nous telle que nous ressentons en une seule et unique émotion l’amour et la peur qu’elle nous inspire. Trop proches, et nous nous souviendrions peut-être de l’omniprésence du mal en ce monde des vivants ; le risque serait grand de voir notre sens assoupi de la perdition se réveiller, nous revenir en pleine santé. Trop loin, et nous voilà encore moins curieux, plus complaisants que nous les sommes d’ordinaire ; nous finissons même par nous irriter de ce que le mal imaginaire est si piètrement représenté qu’il échoue à nous transmettre le moindre écho de sa contrepartie du monde réel, bien présent, lui. Naturellement, toutes sortes de lieux peuvent servir de scène à la révélation de vérités menaçantes ; le mal, tant aimé, si dangereux – peut se montrer en tout lieu ; il peut être suscité aussi bien par un éclat de soleil et les fleurs que par l’obscurité et les feuilles mortes. Néanmoins, un caprice du sort foncièrement intime permet parfois à la quintessence de l’horreur de l’existence de n’être excitée qu’en des lieux tels que l’île solitaire de Nethescurial, où le réel et l’irréel tourbillonnent, libres et fous, dans le même brouillard. (« Nethescurial »)
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Oui, je nous ai épargné un épisode délicat avec ce flic. Mais je vous ai bien entendue marmonner « C’est quoi ces âneries » concernant ma conversation avec cet individu ? J’ose espérer que vous faisiez allusion à l’essai que j’ai rédigé à douze ans sur le peintre Cézanne. Ceci est mon dernier avertissement sur votre odieux vocabulaire, Rosie. Maintenant, veuillez baisser la vitre, que ces vilains mots prennent l’air pendant que nous roulons. Est-ce que j’ai menti à ce remarquable agent ? Non, pas vraiment. Exact, je ne suis pas gestionnaire de portefeuille. Lorsque je vous ai expliqué que j’étais dans les produits chimiques, c’était la pure vérité. Même chose lorsque j’ai conseillé à ce patrouilleur à l’œil de taupe d’investir dans les Laboratoires Lochmyer : nous sommes en effet sur le point de commercialiser un nouveau médicament de l’esprit qui devrait mettre nos investisseurs dans l’état où se trouve un drogué aux amphétamines après une nuit dans un café qui ne ferme jamais. Comment savais-je qu’il avait des actions ? C’est curieux, hein ? Ah, je crois que j’ai eu de la chance, c’est tout. C’est ma nuit – et la vôtre aussi. (« Le Chymiste »)
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C’était donc mercredi dernier – si tu t’en souviens, une journée parfaitement catastrophique sur le plan météorologique (splendide détail qui pour moi cependant ne compte pas au nombre des coïncidences qui émaillent mon aventure, toutes orchestrées de ta main). Le matin avait été sombre et lugubre ; en fin d’après-midi, le crépuscule était si prématurément apparu qu’on avait l’impression déjà de voir des étoiles au ciel. L’orage menaçait et l’air était, comme il se doit, électrifié par une sensation pré-diluvienne. Les vitrines luisaient d’un éclat doux ; sur mon passage, une bijouterie a scintillé dans la pénombre menaçante. Mais est-il besoin de décrire plus en détail l’atmosphère de la journée, mon cher amour ? Je voulais simplement te montrer à quel point j’étais sensible à cette sorte bien distincte de prémonition dont je sais que tu es avide – à quel point, de même, j’étais mûr pour la comédie qui allait suivre. (« Rêve d’un mannequin »)
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Il ne se donnait pas corps et âme à la seule chose qui compte vraiment dans nos existences — Le Boulot.
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As we are all aware, people often have seriously discrepant interests and desires. If this were not so, we would all be getting along with one another, which has never been and never will be the rule. Nothing in our history or our nature even hints that we will ever liquidate our differences, which can be anything from a good-natured divergence of opinion to a war-making contentiousness over property rights. Some people would like to have a little peace rather than the ever-sounding disharmony of bloodletting. But for that to happen, our myriad voices would have to dissolve into a single pitch—a unison that would bore to tears anyone who is not a saint or ego-dead.
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Oui, ils pouvaient rester dans la maison. (Faim.)
Oui, je pouvais faire en sorte d'expliquer la disparition de tante T. et des domestiques, car je suis un homme riche et sais ce que l'argent autorise. (Oh, pitié, chère famille. Je meurs de faim.)
Oui, ils pourraient trouver refuge chez moi aussi longtemps qu'ils le voudraient, ce qui sans doute dire longtemps. (Pitié, j'ai faim jusqu'aux tréfonds de mon être.)
Oui, oui, oui. J'opinai à tout. Tout serait arrangé. (Aux tréfonds !)
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En dépit de la banalité des quartiers qui encombrent les confins de ces villes, il émane souvent de certains de leurs recoins, de certaines de leurs bâtisses, une curieuse atmosphère. La plupart du temps, les habitants des lieux ne font pas mention de cette qualité singulière. Par exemple, l’on trouvera une maison qui ne se situe pas le long de l’une de ces voies étroites mais à son extrémité. Il se peut même que cette maison soit plus ou moins différente des autres. Elle peut être plus élevée que les autres ou s’orner d’une girouette qui tourne dans le vent des tempêtes. Sa seule qualité distinctive peut être qu’elle est inhabitée depuis longtemps, la rendant disponible, réceptacle vide dans lequel une bonne partie de cette désolation magique des rues étroites, des maisons en forme de cercueil s’installe et se distille comme une essence des anciens alchimistes. Cela semble faire partie d’un dessein – de quelque immense inévitabilité -, le fait que cette maison doive subsister parmi les autres, toutes groupées aux frontières d’une ville squelette. Et la conscience de ce dessein supérieur, omniprésent, surgit de fait parmi les étiques citoyens de la zone lorsqu’un jour, inopinément, survient un homme roux qui a la clé de cette maison-là. (« Le Tsalal »)
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Veech, qui s’est aventuré dans la pénombre, est soudain stoppé par un bras de métal doté d’une poignée molle et noire. Il recule et poursuit sa progression, broyant sous ses semelles de la sciure, du sable, des étoiles pulvérisées peut-être. Des membres arrachés à des poupées et à des marionnettes sont disséminés alentour. De même, des affiches, des pancartes, des tableaux, des programmes variés, étalés comme des cartes à jouer, leurs mots en lettres vives mélangés jusqu’à l’absurde. Et d’autres objets en grand nombre, des ustensiles, des bricoles diverses sont entassés dans la pièce, trop nombreux pour qu’on les distingue tous. Ils sont semblables, d’une manière ou d’une autre, à ceux que l’on vient de décrire. Par conséquent, on ne peut que se demander comment ils peuvent finir par produire une telle atmosphère de… le mot n’est-il pas repos ? Oui, mais un repos d’une certaine sorte : celui des ruines.
– Bonjour, s’écrie Veech. Docteur, vous êtes là ? (« Dr Voke et Mr Veech »)
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David sentit ses propres paroles flotter dans le salon, souillant la sérénité des lieux. Jusqu’ici, cette demeure avait constitué un havre, une île hors de portée des miasmes de la prison, énorme bâtiment érigé au-delà des limites de la ville. Désormais l’empreinte psychique de la maison d’arrêt faisait fi de l’éloignement matériel. La distance intérieure se rétractait et David avait l’impression que les épaisses murailles de la prison pesaient de toute leur ombre sur les rues paisibles du quartier. (« Petits jeux »)
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