Citations de Valérie Valère (163)
Je suis restée là bas dans la chambre 27, avec mes refus,avec ce mal de vivre.Et je crois bien que je n'arriverai pas à m'en sortir.
Une quatrième anorexique était arrivée, on ne pouvait jamais la voir, l'infirmière l'emmenait se laver par la main, après avoir dégagé le couloir de l'isolement. C'était torturant de passer devant cette porte fermée, silencieuse, de songer que quelqu'un y pleurait, que quelqu'un y mourait par l'âme, la plus terrible mort.
(...) Mes souvenirs sont trop précis, les rapprochements sont toujours possibles : je prends le bus et en passant devant ces murs d'hôpital, ils m'écorchent la peau, je vais dans un jardin public et les grilles me sautent au visage. Je m'acharne à écrire et je retrouve la solitude. Cette volonté de continuer malgré la fatigue, malgré mes doutes et leur menace rejoint l'autre prison. Je suis restée là-bas, dans la chambre vingt-sept, avec mes refus, avec ce mal de vivre. Et je crois bien que je n'arriverai jamais à en sortir.
Ce ne sont pas les enfants que l’on devrait enfermer pour crime de folie, eux ne savent pas se défendre.
“ Valérie vomit. On veut la remplir, elle se vide puisque c'est ainsi qu'elle se sent exister : vide.
" ... Le corps comme un bambou creux est dépourvu de substance. L'esprit est comme l'essence de l'espace sans place pour les pensées..."
Ils disent que l'amour est la plus merveilleuse des choses, ils disent que c'est le but de la vie, mais ils disent tant de choses stupides... Je ne crois pas à leur optimisme ni à leur joie de vivre, mais je ne crois à rien...
[Les gens] me prouvent leur amitié, moi la mienne, et puis pour un regard, un geste, une parole, je perds ma confiance, je sens un doute insupportable m'envahir : "Et s'il n'avait pas envie de me voir ? C'est moi qui le rends triste ? Si ce n'était pas moi, il m'en dirait la raison..." Si les autres ne me montrent pas à chaque instant qu'ils sont heureux que je sois là, que je ne les gêne pas, je me sens aussitôt ridicule, déplacée et je les quitte.
Je ne comprends pas comment l'on peut se décider à "mettre au monde un enfant", les mots miracle, les mots félicitations, les mots remède… Réfléchissent-ils que leur enfant à une chance sur mille d'être anormal, handicapé, taré ? Et s'il n'est rien de tout cela, vous qui l'avez fait vous allez le traumatiser, l'élever mal, votre manière le rendra malheureux plus tard… D'ailleurs qu'est-ce que vous attendez ? Qu'il réussisse à être heureux dans un monde où vous n'avez pas pu l'être ?
J'en ai assez d'être amoureuse de ces choses insaisissables du soleil et de la nuit, de la solitude et de la mort. Ils sont là pour le monde entier, et ils vous parlent à travers un voile d'insignifiance dont vous ne pouvez pas avoir conscience. L'amour pur, cela n'existe pas il ne devrait pas être égoïste et pourtant il ne tourne qu'autour de vos désirs. Ne soyez jamais amoureux, c'est la pire des choses. On reconnaît bien là la voix de quelqu'un qui n'a pas encore vécu, c'est bien ce que vous pensez? ils disent que l'amour est la plus merveilleuse des choses, ils disent que c'est le but de la vie, mais ils disent tant de choses stupides... Je ne crois pas à leur optimisme ni à leur joie de vivre, mais je ne crois à rien...
C'était torturant de passer devant cette porte fermée, silencieuse, de songer que quelqu'un y pleurait, que quelqu'un y mourait par l'âme, la plus terrible mort.
Être comédien...
Coulisses et loges, costumes extravagants et scènes de ténèbres, maquillages de pantomime, fards et paillettes... Où est le visage ? Sous ce blanc, sous ce rouge, sous ce brillant ? Pourtant, ces yeux, gris et perçants, fendus comme des gouttes de pluie, ces sortes de larmes, ce sont les tiennes ? Et ces autres yeux, sur la scène, ce regard vert qui voudrait tant appartenir au monde, au flot du monde, et qui ne sont réservés qu'aux personnages d'emprunts, aux voix, aux déguisements infinis.
Inès a le sentiment d'avoir perdu sans avoir vraiment joué. Elle s'imagine sur ce fauteuil de théâtre, un peu râpeux, un peu piquant au dos, comme une grande Inès adulte, avec son armure d'adulte et un sac à la main, une Inès un peu ivre, un peu ivre de tristesse...
Une anorexie représentait un suicide long et douloureux, peut-être une sorte d'appel au secours, un temps mort pendant lequel on réfléchit à ses propres raisons en les imprégnant de lucidité et en les parant de faux compliments.
Nous avons repris la route. Vers Saint-Malo. Qu'importe qu'ils sachent que nous suivons la côté, désormais nous n'avons plus peur. Peu-être même espérons-nous qu'ils nous coincent le plus vite possible car leur présence tacite pose entre nous un obstacle, un malaise ou une une tendresse d'une seconde profondeur, une tendresse douloureuse.
Si j'avais eu un canif, j'aurais été me couper les veines dans les toilettes à cafards qu'on ne peut même pas fermer...
Je me suis perdue dans cet immense labyrinthe sans même penser à retrouver mon chemin, car je n'en ai pas et je n'en aurai jamais. J'ai tout enterré et recouvert d'un voile de tristesse opaque qui me cache une partie du monde.
J'aurais pu (..) me retrouver face à un choix décisif, à une complète responsabilité envers moi-même. Au lieu de cela, j'adoptai la fuite, me réfugiai dans les rêves sans penser à l'infantilisme de cette solution assurément trop facile. On m'avait fait mal, pour le dissimuler, j'essayais de jouer, mais je jouais mal, comme une débutante à laquelle on n'a pas appris les règles.
Vous me prenez pour une machine à emmagasiner de la bouffe?
Non, je ne serai même pas condamnée à mort, ma peine sera plus pénible:une mort lente... mais inévitable qui vous fait supporter votre incessante souffrance.
Je voudrais être tout le monde, mais pas moi.
J'ai crié en silence pendant deux ans.
En violence pendant trois semaines ; le temps de déverser toute ma haine sur les touches d'une machine à écrire.