Citations de Vassilis Alexakis (190)
Pourquoi étions-nous si rebutés par les cours de grec ? Les convictions religieuses de mes professeurs les empêchaient de porter sur l'Antiquité un regard libre. Seuls les mythes qui avaient un caractère moral les intéressaient. J'ai été très surpris lors de mon arrivée en France en constatant que la mythologie grecque avait dans ce pays de nombreux supporters. Je ne l'aimais pas beaucoup pour ma part car je ne la connaissais pas.
Le lendemain soir je me suis couché avec l'espoir que la verrais à nouveau. Je me suis réveillé à six heures du matin sans avoir fait de rêve. J'ai tenté de dormir encore un peu, sans y parvenir. Je ne l'ai revue ni cette nuit-là ni aucune autre. J'ai bien peur que ma mère ne se soit définitivement retirée de mes rêves.
Il m'appelle très souvent, sans grande raison la plupart du temps, pour bavarder ou pour me raconter un rêve qu'il a fait. Je suis assez surpris que mon père continue à rêver. Je croyais qu'on cessait de faire des rêves au-delà d'un certain âge, comme on cesse de faire des projets. Je pensais que les nuits des vieillards étaient muettes. Mon père a quatre-vingt-trois ans.
Tu avais la capacité d'aimer et d'écrire en même temps : tu t'inspirais de ta vie et tu vivais tes rêves.
Je dois admettre toutefois que même dans mes modestes récits, les gens que je fais intervenir prennent de plus en plus de place au fur et à mesure que l'histoire avance et qu'ils finissent par effacer mon ombre sur le papier. L'auteur est une sorte de secrétaire de mairie qui enregistre les naissances, les mariages, les décès, et qui ménage par une série de rendez-vous le roulement de ses fantômes.(...).
J'ai découvert de bonne heure que la vie n'avait rien de plus beau à m'offrir que des mensonges. Je l'ai su grâce aux lectures que me faisait ma mère le soir. Je ne rêvais pas encore d'écrire, pour la bonne raison que je ne savais même pas lire, j'envisageais cependant de devenir un grand menteur. Je m'appliquais d'ailleurs à mentir le plus possible, ce qui me valait un certain succès. j'ai su très tôt en somme que la meilleure façon de raconter un événement était de l'inventer.
L’écriture est une solitude.
Les feuilletons de télévision grecs décrivent invariablement un conflit, entre le père et la mère,le fils et la fille, le père et le fils, la fille et son fiancé, la mère et une voisine, l employé et son patron, le patron et sa secrétaire.
"Je n aime pas qu on me parle sur ce ton !" : telle est la phrase clé des séries grecques.
Elle n'a pas de bouche. Sa bouche est un silence qui nous écoute
A travers la langue que nous parlons résonnent les voix des peuples qui se sont éteints il y a des milliers d’années
Le roman historique ne me paraît acceptable que lorsqu'il ne prétend pas à l'érudition, quand il met l'histoire au service du roman, comme le fait si bien Alexandre Dumas.
J'ai trop tardé à revenir. Quand on tarde tant, c'est un peu comme si l'on ne revenait pas.
J'ai pensé que les lettres d'amour les plus sincères sont forcément un peu trompeuses, puisque la passion se réduit au fur et à mesure qu'elle s'exprime. Les lettres d'amour sont préjudiciables aux sentiments.
Il faut croire que je n'ai pas suffisamment pleuré au cours de ma vie, que je n'ai pas pleuré quand il le fallait et que j'extériorise maintenant des émotions oubliées. Les larmes qui coulent sont des larmes anciennes.
Les mots étrangers connaissent des histoires surprenantes. C'est un agrément de les fréquenter. J’étais probablement un peu las de toujours interroger les mêmes mots grecs ou français. J’avais besoin d’entendre autre chose que ce que je savais déjà. Le dictionnaire de sango ne m’a pas moins fasciné que les aventures de Tarzan quand je les lisais adolescent.
La nuit donne parfois de bien mauvais conseils. Il peut se passer des tas de choses la nuit.
Notre société voit le mal partout. Elle craint son ombre. As-tu remarqué que les gens se retournent souvent dans la rue ? L'écho du moindre bruit nocturne rebondit sur tous les objets et finit par prendre des proportions fantastiques. Nous avons peur des chats.
La colère déforme les langues, elle les rend méconnaissables.
Il est difficile de résister à la langue du lieu où on habite.
Il est difficile d’expliquer pourquoi on a choisi une langue quand on n’a aucune raison de l’apprendre.
Je ne me sens plus aussi libre que lorsque j'ai commencé ce texte. Il a établi peu à peu sa propre règle, qui m'impose certains sujets et m'en interdit d'autres, qui me recommande un ordre plutôt qu'un autre. Le trajet parcouru m'indique le chemin à suivre. J'écris en quelque sorte sous la dictée de mon texte