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Citations de Véronique Biefnot (117)


Raku… Ce mot rare l’avait toujours fasciné. Sa mère, qui venait d’un milieu modeste où le moindre geste devait être utile, avait mis des années avant d’accepter de faire quelque chose pour le plaisir, jouer du piano, faire de la céramique : elle adorait particulièrement la technique mystérieuse du raku. Il n’a jamais su comment elle créait ces objets. Quelque chose d’étrangement japonais. Comme les amateurs de pigeons… Il regrette de ne lui avoir jamais demandé d’explication. Sur les carreaux de la fenêtre, des gouttes d’eau descendent lentement. La lumière leur donne des reflets bleus.
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Il me semblait parfois que le roulement suggestif des pectoraux, des dorsaux et autres abdominaux au-dessus de la petite jupette en peau de chamois du héros arrachait de langoureux soupirs à la gent féminine autour de la table, le regard perdu vers ce pays de cocagne et de testostérone où Tarzan affrontait mille périls pour les beaux yeux énamourés de sa Jane volontiers défaillante. Moi, les pectoraux, ça ne m’affolait pas tellement. Mon personnage favori, c’était Cheeta, la guenon. Est-ce que tu sais qu’elle a vécu deux fois plus longtemps que les plus vieux chimpanzés ? J’ai lu qu’elle était morte il y a trois ou quatre ans, dans un zoo, à l’âge de quatre-vingts ans ? Je vais les revoir, ces films, papa, promis. Et enfin découvrir entièrement le deuxième, Tarzan et sa compagne ! Comme Tarzan et Jane y nagent nus, Mamy me collait une main sur les yeux, chaque fois… La scène interdite était longue, alors la pression se relâchait au fil des minutes. N’empêche, je me réjouis déjà !
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J’ai écrit beaucoup de poèmes. C’était ma façon d’être… un peu rebelle, peut-être. Je ne les ai montrés qu’à une amie autrefois et, pour tout vous dire, elle m’a regardé d’un air si bizarre que ça m’a aussitôt guéri de toute vaine prétention. Par la suite, j’ai découvert que la musique, si elle ne pouvait nullement remplacer les mots, me permettait quand même de m’exprimer.
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Tous ces objets évoquent de si jolis souvenirs. Mais quand j’étais enfant, seule l’absence de papa occupait mon esprit. Je me rends compte à l’instant que je n’ai pas profité pleinement de ces moments. J’étais souvent heureuse… presque heureuse, et je ne le savais pas…
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Malgré mes jambes maigres, malgré mes genoux osseux, avec ces ballerines aux pieds, j’avais, j’en étais sûre, la grâce d’une danseuse. Je me suis levée, j’ai fait quelques pas. Je savais que plus jamais je ne serais la même. Une voie lumineuse s’ouvrait devant moi, j’avais dix ans et des années d’hésitations délicieuses m’attendaient, entre escarpins et bottillons, stilettos et ballerines, mocassins, salomés, cuissardes ou richelieus…
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Ses mains aux doigts entrecroisés, sagement posées sur les genoux, elle était parfaitement immobile. Seuls ses deux pouces, infatigablement, se caressaient, se contournaient, se mêlaient dans une rotation tranquille qui s’apparentait à une sorte de mouvement perpétuel. Est-ce que c’était une prière ? Une façon de mesurer le temps qui passe en quarts de tour de pouce ? Un moyen de vérifier si la vie s’écoulait toujours à travers ses veines bleues, noueuses, sous la peau si fine ? Sans doute une habitude, une manie, un chapelet intime égrené calmement.
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Kyrielle… Mon père adorait ce mot. Un jour, mon fils lui a demandé ce que ça signifiait. Il lui a raconté que c’était le prénom d’une jeune elfe très jolie qui vivait au fond du jardin, dans le tronc creux d’un vieil arbre, et dont il était amoureux quand il avait son âge… — C’est en effet un beau mot. Rare aujourd’hui, désuet même. Je me demande si beaucoup de gens le comprennent encore. Quoi qu’il en soit, voyons cette kyrielle de plus près.   « Un terrain de 10 ares au bout du chemin des Champs. C’était le potager de mon père, soigneusement entretenu jusque peu avant son décès.
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Je croyais que je n’arriverais pas à vivre de la musique, je m’attendais à tenir quatre ou cinq ans. Finalement, ça a tenu toute une vie. Je n’ai pas fait fortune, comme tu le sais, mais ce n’était pas mon but. Le seul bien que j’ai acquis, et c’est la première chose que j’ai à te léguer, c’est mon vieil appartement bordelais, tu le connais par cœur, inutile de te le décrire. Il a l’avantage, malgré ses défauts, d’être vaste et bien situé. Peut-être auras-tu envie d’y emménager avec Anton. Ça pourrait lui plaire, une très grande chambre avec vue sur les toits. La lumière, le matin, est si belle et on a l’impression qu’en se penchant un peu, on pourrait toucher le bleu du ciel du bout des doigts. Parfois, j’y suis presque arrivé et comme Anton a de plus longs bras que moi, qui sait ?
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Les bonnes histoires supportent la répétition… et c’était un plaisir de l’entendre de votre bouche. D’autant plus que je connaissais l’histoire du disque mais qu’il ne m’avait pas dit qu’avant cet épisode, il s’appelait Théodore.
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Ce qu’elle voudrait, c’est en finir. Elle voudrait se lever, secouer la raideur de ses muscles, toucher ce radiateur et sentir sa chaleur. Tout plutôt que cette humidité qui brouille la vitre et ronge les os. Finalement, ce thé n’est pas une si mauvaise idée. Pourquoi tu ne m’as rien dit, papa ? Quand on s’est vus la dernière fois, tu savais et tu n’as rien dit. Pourquoi ? Pour me protéger ? Parce que tu ne me croyais pas assez forte ? Parce que tu voulais, une fois de plus, la jouer en solo puis t’en aller sur un soupir ? Rien à foutre de cette « délicate attention » comme a dit le médecin, je voulais un au revoir, j’avais besoin d’un adieu… et ton petit-fils aussi !
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Pas d’âge. Le genre de femme qui s’habille avec élégance mais oublie de se coiffer. Ou qui rate son maquillage. Elle a pleuré. Elle ne ressemble pas à ses photos. Plus jolie ? Oui… Elle n’aurait pas dû se mordre la lèvre, elle est gonflée, il faudrait y poser un glaçon quelques instants.
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Elle est triste et furieuse, et rien ne pourrait la détourner de ces sentiments-là, qui lui rongent la poitrine et lui écrasent le cœur. Oui, je t’en veux, je t’en veux, je t’en veux, papa… D’être parti comme ça, sans m’en parler avant. D’être parti tout court. J’avais encore besoin de toi. Je ne te l’ai pas dit. Je m’en veux.
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Se regarder n’a jamais été un moment agréable pour elle. On lui a dit souvent qu’elle était jolie, qu’elle avait du charme. Jamais elle n’en a cru un mot. Maigre, des seins minuscules, des cheveux désespérément raides et d’un châtain sans éclat… Seules ses longues jambes trouvent parfois grâce à ses yeux. Et la seule chose dont elle était certaine en partant, ce matin, c’était de vouloir porter les escarpins noirs ajourés qu’il aimait tellement, même si ce n’étaient pas les chaussures idéales pour conduire si longtemps. Un jeans aurait paru trop décontracté pour la circonstance. Cette petite jupe et son chemisier en soie bleu lavande lui avaient semblé plus adéquats. « C’est le bleu de tes yeux quand tu rêves, ma Nina. » C’est ce que disait Teddy et c’est pour ça qu’elle l’avait choisi pour venir à ce rendez-vous avec lui, ce dernier rendez-vous.
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Inspirer puis laisser lentement l’air s’échapper par la bouche entrouverte. Emprunter une allure sereine, une démarche tranquille. Et espérer donner le change.
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Ma vie, c’était déjà la musique, évidemment, comment aurait-il pu en être autrement ? Mais je n’osais pas toucher un piano ! Pas avec les doigts que j’avais, ces doigts aux ongles rongés jusqu’à l’os… Devine pourquoi je faisais ça. Pourquoi je le fais encore. Un peu moins, j’ai quand même grandi, je l’espère, mais il y a des jours… Pourquoi m’as-tu élevée seul ? Pourquoi ne parlais-tu jamais de ma mère ? Le peu que je sais d’elle, je l’ai appris par Mamy. Ta mère n’aimait pas la mienne, tu le sais, n’est-ce pas ? Elle disait à Papy que c’était elle qui t’avait dégoûté de l’amour et que c’était à cause d’elle que tu ne voulais pas te remarier. J’ai connu des femmes à ton bras, pas une seule assise avec nous à la table du petit déjeuner…
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C’est une chanson de Charles Trenet. Impossible d’en retrouver le titre mais elle sait que c’est de lui. « Il pleut dans ma chambre, il pleut dans mon cœur. Douce pluie de septembre, chante un air moqueur… » Enfant, des chansons de Trenet, elle en connaissait des dizaines. Elles faisaient partie de sa vie comme les chansons de Cole Porter, ou comme les morceaux de Fats Waller, de Duke Ellington ou de Thelonious Monk.
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Elle aurait dû prendre le train, ou l’avion. Près de neuf cents kilomètres en voiture… Comme une façon de fuir, peut-être. De croire qu’on peut à tout moment changer de direction. Rebrousser chemin ? Une manière de dire qu’on n’aime pas aller là-bas, qu’il n’y a pas assez de bons souvenirs… Et le plus récent est le pire. Pendant la cérémonie, pour éviter de pleurer, Nina s’était mise à énumérer lentement, à voix basse, comme il lui avait appris à le faire, les noms des États américains : Alabama, Alaska, Arizona, Arkansas, Californie, Caroline du Nord, Caroline du Sud, Colorado, Connecticut...
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La mélodie fait naître un sourire sur toutes les lèvres. Pas sur celles de Nina. Blême en dépit du maquillage, elle trouve appui sur le dossier d’un siège. Le cœur en panne, elle se demande s’il ne va pas s’arrêter, ce 18 mars, au beau milieu de la fête du Blue Willow. Elle ferme les yeux un instant, respire profondément, réussit à accrocher le regard d’Antoine pour formuler désespérément une question muette : Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi ? Mon Dieu, pourquoi ?
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"Il ne faut pas désespérer, lui dit-elle, la vie est comme les rivières, qui prennent parfois des chemins si inattendus, même sous la terre, pour nous conduire là où nous devons aller. On connaît tous, crois-moi, des moments où on ne voit plus rien, où on ne comprend plus rien, on est dans le brouillard, on est perdu. Et puis, comme par magie, le brouillard se dissipe et on voit loin, on sait où on va, et on peut y aller le cœur en paix, avec confiance."
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Quand il nous accueille, c’est toujours dans le noir. Il est contraint d’emprunter le vaisseau mortel de son corps pour s’adresser à nous, mais seul compte l’esprit. Il est l’unique sur cette terre à nous accueillir dans son amour inconditionnel.
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