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Citations de Vinciane Moeschler (78)


Les enfants de la danse vivent dans la solitude.Les enfants de la danse sont tissés de silence.Ils concentrent et rêvent d'un autre monde, poursuivant la même quête que leurs aînés, faire vivre leur corps à travers l'un des arts les plus nobles. Ils se mettent vite à grandir, alors que les autres jouent encore au nounours.

( p.37)
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Nanette était une vraie grand-mère. Une de celles qui tricotent des pulls et qui se cousent elles-mêmes leurs robes, en sirotant une verveine. Une grand-mère qui m'avait raconté des contes de fée lorsque j'étais petite et qui cultivait des bégonias sur son balcon de Carouge.

( p.65)
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En arrondissant l'échine, à terre, en position fœtale, je pris la pose.J'étais à nouveau son modèle. Et désormais sur un piédestal. L'intouchable.La muse sacrifiée sur l'autel de son art.La femme idéalisée et chaste que l'on fait naître amoureusement d'un coup de fusain.

( p.76)
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Et j'ai compris que pour être déserteur, il fallait avoir du courage.

( p.84)
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- Vois-tu,il est plus facile de sculpter que de vivre.Je maîtrise la terre, pas l'existence humaine.

( p.94)
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Pendant le trajet, il parla de Van Gogh, des champs de blé et me raconta " Peter Camenzind".
-..." L'histoire d' un arbre, la vie d'une bête, le voyage d'un nuage avaient assez d'intérêt pour moi, même sans les accessoires humains ", disait-il.Et pour vous Elisa, qu'est-ce que cela symbolise l'histoire d"un arbre ?
- Ce sont les racines, la terre, celle à laquelle je m'agrippais lorsque j'étais enfant.Finalement, c'est moi qui aurais dû être sculpteur.
- Comment étiez-vous lorsque vous étiez petite ?
- Sauvage et absolue. Je pensais que l'existence, c'était ça, de jolis moments où les accessoires humains n'avaient que peu d' importance, parce que je ne voulais pas souffrir. Et puis, j'ai grandi en regardant les grandes personnes. Combien elles étaient terribles avec leur hypocrisie collée sur leur visage.Avec leurs mensonges et leur manière de parler, elles m'auraient sans doute détruite. Alors, j'ai décidé de tricher.
- De tricher ?
- Oui, de vivre pour la danse.De tout lui sacrifier, de ne pas pénétrer dans le monde. Comprenez- vous, une danseuse reste toujours une enfant. On est pris en charge, on travaille pour un idéal, on ne se pose plus de questions.

( p.34)
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-Jean est analphabète. Un brave petit gars. Encore un qui s'est fait avoir ! Il est venu d'un bidonville de Port-au-Prince pour la coupe : seize heures par jour, sept jours sur sept. Un salaire ridicule, payé en fonction du poids de la canne qu'il ramène dans les camions. Parfois, les balances sont truquées, mais à qui se plaindre ?
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- Les femmes se révoltent, elles exigent qu'on rétablisse d'urgence l'électricité dans le quartier. Cela fait douze heures qu'on est privés.
(....) - Je comprends Hortensia, dis-je avec un air de circonstance. C'est terrible, plus de lumière...
-Non, non, la lumière, on s'en fout.
-Mais enfin, Hortensia, quoi ?
Que va-t-il arriver à Betty ?
-Betty?
-Va-t-elle coucher avec Armando ?
Alors que je me demande qui est cette fille, elle enchaîne:
- Betty la fea, tu ne connais pas ?
-Votre soeur ? Une fille, une nièce, une amie ?
- Non, Betty, notre héroine. La panne arrive juste avant l'épisode de ce soir. On devait enfin savoir. Sans électricité, pas de télé. Tia Rosa va faire une crise d'asthme. Madre de Dios !
(...) Je comprends maintenant pourquoi le pays est paralysé tous les jours à 18 heures. On s'entasse devant la télé dans les maisons bourgeoises comme dans celles des quartiers populaires - sauf que, dans celles-ci, pas d'électricité, donc pas de générateur, donc pas de Betty.
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Paris est pollué. On a perdu l'habitude d'humer le parfum des fleurs. Il faut tendre l'oreille pour percevoir, au milieu des klaxons, le piaillement des oiseaux. On presse le pas, allez plus vite, dépêchez- vous. T'es - tu demandé pourquoi on passe notre temps à courir ? Pourquoi tous ces visages fermés ? N'y a-t-il dans cette ville que les fous pour rire dans la rue sans raison ? La pluie est teigneuse et froide. Là-bas, l'hiver n'existe pas. Le ciel est pur, les étoiles scintillent. Les sourires des enfants sont des bouquets de lucioles. Pourtant, certains n'ont presque rien. La nature est puissante, sauvage et brute : à la surface des océans, la lumière papillonne et t'aveugle presque, les ouragans sont comme des ogres qui rappellent que l'homme ne contrôle pas tout. Les mangues se ramassent sur les nervures des arbres, juteuses à souhait. Voilà pourquoi tu dois partir !
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... un douanier qui regarde papa avec un air bizarre lui propose, en échange de dix dollars, de nous laisser passer les contrôles sans ouvrir un seul bagage. Vu l'heure tardive, ça nous arrangerait bien. Mon père hésite, puis lui tend un billet vert que l'homme empoche discrètement. En chuchotant, je lui demande ce qu'il fabrique.
"Ca s'appelle de la corruption, mon chéri !"
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Mes cauchemars sont des pays habités de trous noirs.
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J’ai recommencé à écrire. Mon écriture est écorchée. Je la maltraite, je suis impitoyable, je me défonce avec des mots barbares, des phrases sans queue ni tête, un corps à corps cruel et turbulent. Cela me permet de vivre.
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Crampes aux mollets. Pesée. Contrôler le potassium dans le sang. Ne pas renverser le plateau-repas. Le répugnant plateau-repas. Trop de féculents. Je déteste. Accepter une cuillerée de haricots, de jambon, de yaourt. Mâcher et remâcher. Revoir le psy. Lui dire que je souffre ? Que ma tête est comme séparée de mon corps ? Il doit me prendre pour une folle. C’est plus fort que moi : ranger, ordonner, nettoyer. Ranger, ordonner, nettoyer. Refus de la bouffe. On me dit : « Il faut prendre du poids ». Arrêtez de m’engraisser ! C’est dégoûtant. Pesée. Toujours plus loin. Contrôler. Faites que les chiffres de la balance ne montent pas trop vite. J’ai peur. Sonde gastrique. Gingivite. Perte des cheveux. Stries sur les dents. Prendre le pouls, la tension. Encore tricher.
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Léa avait élevé seule sa fille, conçue par une de ces nuits d’amour fugaces. À Genève, les petits boulots ne manquaient pas dans cette ville prospère des années cinquante. C’est comme ça que sa mère était devenue tour à tour vendeuse dans un supermarché, dans une boutique de fleurs, serveuse la nuit dans une discothèque, puis manucure dans un salon d’esthétique. Une belle femme fière que les hommes ne pouvaient que dévorer des yeux. Ne jamais dépendre d’un homme, tu m’entends, Alex? Répétait-elle. Léa avait fait son choix, être une mère dévouée plutôt qu’une amante sur le qui-vive. p. 196
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Vinciane Moeschler
Elle se hisse sur le Mur.
Ses pieds glissent, elle insiste, poussée par des mains anonymes.
And the shame was on the other side.
Ma mène la photographie dans le mouvement. Elle aime les gros plans. Visualiser les gens, les yeux dans les yeux. Un cadre serré sur son visage la révèle éblouissante et volontaire. Pas de doute en elle, seulement une fulgurante envie de vivre comme jamais. On la retrouvera plus tard, avenue Unter den Linden, où dans l’euphorie elle me tendra un bout de pierre. Un morceau du Mur, carré et rogné, épais et lourd. Éclat de cet instant imprégné de liberté. Fragment emblématique de l'histoire incongrue de ce monde. 
We can be heroes just for one day. p. 163
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Bien que le combat soit un phénomène largement répandu au sein des espèces animales, on ne connaît que quelques cas au sein des espèces vivantes de luttes destructrices intra-espèces entre des groupes organisés. En aucun cas, elles n’impliquent le recours à des outils utilisés comme des armes. Le comportement prédateur s’exerçant à l’égard d’autres espèces, comportement normal, ne peut être considéré comme équivalent de la violence intra-espèces. La guerre est un phénomène spécifiquement humain qui ne se rencontre pas chez d’autres animaux. p. 82
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INCIPIT
ALEXANDRA
Beyrouth, août 1982
Chambre numéro huit, le lit est défait. L’empreinte de son corps y est encore visible lorsqu’elle part au lever du jour, là où la lumière reste délicate. Dans les rues, dédale de gravats qui évoque la mort, elle marchera. Elle ignore si ce soir elle sera encore vivante. Ou si son corps sera réduit à des contours sur des draps.
C’est à l’hôtel Cavalier qu’elle a pris ses repères. À cause des coupures d’eau, elle n’a pas pu se laver. Ni hier, ni aujourd’hui. Il est sale son corps, de terre, de fumée, de poussière, de cendres, du bruit de la guerre et des cris qu’elle connaît par cœur. Ceux des mères et de leurs enfants en écho. Il y a aussi les tirs des mitraillettes des phalanges libanaises qui se glissent dans les angles de la ville dévastée, trouée de partout, égratignée dans sa mémoire. La carcasse mitraillée de l’Holiday Inn témoigne de la destruction du quartier de Hamra.
Alexandra Raskin a trente-quatre ans, des cheveux courts, des sourcils bien dessinés, des pommettes un peu hautes, un sourire doux. De sa mère, elle a hérité des yeux en amande qu’elle ferme légèrement lorsqu’elle colle un œil dans le viseur. Elle possède deux appareils photo, un Canon ainsi qu’un Rolleiflex, qui lui vient d’un grand-père qu’elle n’a pas connu. Si elle l’utilise peu en reportage, c’est pour pouvoir le conserver le plus longtemps possible ; son format de négatif, 5,7”, est unique. Rapidement, elle aspire une bouffée de cigarette, écrase son mégot dans le cendrier. Elle se prépare à sortir.
Dans le cul-de-sac de l’Orient, césure de deux mondes qui se déchirent, tout n’est que désolation. Pour elle qui a connu sa beauté d’autrefois, il est difficile de se confronter à ce champ de ruines. La magnifique avenue Bechara el-Khoury, l’hôtel Marika, la place des Canons, la mosquée d’el-Omari… C’était avant. Avant la ligne verte que ligature désormais la rue Damas, l’est et l’ouest, la chrétienne et la musulmane, ce territoire que l’on ne veut plus partager. Avant les offensives israéliennes, les blindés syriens et les milices palestiniennes. Avant la routine des bombes. La ville ne se raconte plus qu’autour de ce no man’s land boursouflé de détritus et envahi par les colonnes de fumée produites par la combustion des ordures. Beyrouth, carrefour des traités de paix, de la lente et inexorable avancée de la machine à détruire. Beyrouth balafrée, terre éclatée, cité martyre qui ne compte plus ses morts ni ses années de conflit. En regardant ce paysage, Alexandra se demande si le pire n’est pas le face-à-face entre la ville anéantie et ses habitants qui ne se reconnaissent plus dans ce chaos. On n’a plus le droit de penser, plus le droit de rêver. Entre les rafales de kalachnikov, il faut sauver sa peau.
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Choisir d’aller à la guerre. Ça devrait être interdit pour une maman.
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