Citations de Yann Martel (135)
Je pleurais parce que Richard Parker m'avait abandonné sans cérémonie. Quelle terrible chose que de bâcler un adieu. Je suis une personne qui croit en la façon de faire, dans l'harmonie de l'ordonnance du monde et des êtres. (...) Je vais vous dire, il y a un aspect du diminutif de mon nom que je déteste vraiment, et c'est la façon dont ce chiffre se poursuit à l'infini. Il est important dans la vie de clore les choses comme il le faut. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'on peut se détacher de quelque chose. Sans cela, il vous reste des mots qu'il aurait fallu dire, mais que vous n'avez jamais prononcés, et votre cœur est lourd de regrets. Cet adieu raté me blesse encore aujourd'hui? J'aimerais tellement lui avoir jeté un dernier regard sur le bateau de sauvetage, l'avoir provoqué un peu pour saisir son attention ; j'aimerais lui avoir dit - oui, je sais, c'était un tigre, mais enfin - puis j'aimerais lui avoir dit : " Richard Parker, c'est terminé. Nous avons survécu. Peux-tu le croire ? Je te dois une plus grande reconnaissance que je ne saurais te l'exprimer. Je n'y serais pas arrivé sans toi. Je tiens à te le dire formellement : Richard Parker, merci. Merci de m'avoir sauvé la vie. Et maintenant, va où tu dois aller. La plus grande partie de ta vie, tu as connu la liberté limitée d'un zoo ; tu vas maintenant connaître les limites de la liberté de la jungle. Je t'y souhaite la meilleure chance du monde. Méfie-toi de l'Homme. Il n'est pas ton ami. Mais j'espère que tu te souviendras de moi comme d'un ami. Je ne vais jamais t'oublier, ça, c'est sûr. Tu seras toujours avec moi, dans mon cœur. Qu'est-ce que ce sifflement ? Ah, notre bateau a touché le sable. Alors adieu, Richard Parker, adieu. Que Dieu t'accompagne. "
* 1 boussole
* 1 cahier de notes de 98 pages lignées
* 1 garçon avec une tenue complète de vêtements légers, sauf pour une chaussure perdue
* 1 hyène tachetée
* 1 tigre du Bengale
* 1 bateau de sauvetage
* 1 océan
* 1 Dieu
Cet adieu raté me blesse encore aujourd’hui.
Alors dites moi, puisqu’il n’y aucune différence quant aux faits, en ce qui vous concerne, et que vous ne pouvez apporter aucune preuve dans un sens ou dans l’autre, quelle histoire préférez vous ? Quelle est la meilleure histoire, l’histoire avec des animaux ou l’histoire sans animaux ?
Il n'y a que la peur qui puisse vaincre la vie. C'est une ennemie habile et perfide, et je le sais bien. Elle n'a aucune décence, ne respecte ni lois ni conventions, ne manifeste aucune clémence. Elle attaque votre point le plus faible, qu'elle trouve avec une facilité déconcertante. Elle naît d'abord et invariablement dans votre esprit. Un moment vous vous sentez calme, en plein contrôle, heureux. Puis la peur, déguisée en léger doute, s'immisce dans votre pensée comme un espion. [...]
Il était contrarié. Sarah avait depuis longtemps perdu tout intérêt pour l'Holocauste, ou en tout état de cause pour son engagement artistique dans l'Holocauste. Et elle avait tort. Ce n'était pas qu'il voyait l'Holocauste dans tout. C'était qu'il voyait tout dans l'Holocauste, non seulement les victimes des camps, mais aussi les capitalistes et bien d'autres, peut-être même les clowns.
VIRGILE : (l'air penaud, les mains de chaque côté du visage)
Comment peut-il y avoir quelque chose de beau après ce que nous avons vécu ? C'est incompréhensible. C'est une insulte.
VIRGILE : Selon moi, la foi, c'est comme être au soleil. Quand tu es au soleil, peux-tu éviter de créer une ombre ? Peux-tu te défaire de cette zone d'obscurité qui s"accroche à toi, qui épouse toujours ta forme, comme pour te rappeler continuellement à toi-même ? Non, tu ne peux pas. Cette ombre, c'est le doute. Et elle t'accompagne partout, pourvu que tu restes au soleil. Et qui ne souhaites pas être au soleil ?
BEATRICE : Mais le soleil est parti, Virgile, il est parti !
(Elle fond en larmes et sanglote bruyamment.)
Être un naufragé, c'est être un point au milieu d'un cercle, perpétuellement.
(L'histoire de Pi, trad. Nicole et Émile Martel, p.230, XYZ, 2003)
« Il fallait que je l’apprivoise. C’est à ce moment que j’en ai découvert la nécessité. Ce n’était plus une question de lui ou moi, c’était une question de lui et moi… Nous étions, littéralement et figurativement, dans le même bateau. Nous allions vivre – ou nous allions mourir – ensemble. » (p. 224)
« J’étais seul, orphelin au milieu du Pacifique, suspendu à une rame, un tigre adulte devant moi, des requins sous moi, au centre d’une violente tempête. » (p. 151)
Je suis resté silencieux. Ce n'était pas par crainte de fâcher M. Kumar. C'était plutôt parce que j'avais peur que, si je ripostais, en quelques mots il détruirait quelque chose que j'aimais.
La nuit passa, une lente minute à la fois.
Il est important dans la vie de clore les choses comme il faut. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'on peut se détacher de quelque chose. Sans cela, il vous reste des mots qu'il aurait fallu dire, mais que vous n'avez jamais prononcés, et votre cœur est lourd de regrets.
Je dois dire un mot sur la peur. C'est le seul adversaire réel de la vie. Il n'y a que la peur qui puisse vaincre la vie. C'est une ennemie habile et perfide, et je le sais bien. Elle n'a aucune décence, ne respecte ni lois ni conventions, ne manifeste aucune clémence. Elle attaque votre point le plus faible, qu'elle trouve avec une facilité déconcertante.
Je connais une histoire qui va vous faire croire en Dieu.
Je ne comptais ni les jours ni les semaines ni les mois. Le temps est une illusion qui nous essouffle, rien d’autres. J’ai survécu parce que j’ai oublié jusqu’à la notion de temps.
le monde n’est pas seulement ce qu’il est.
C’est aussi ce que nous en comprenons, non ?
Ce n'est pas Dieu qui m'a sauvé, c'est la médecine. La raison est mon prophète et elle me dit que comme une montre s'arrête, ainsi on meurt. C'est la fin. Si la montre marche mal, il faut la réparer nous-mêmes, ici et maintenant.
J’ai eu la chance d’avoir dans mon enfance quelques bons professeurs, des hommes et des femmes qui sont entrés dans ma tête obscure et y ont allumé une étincelle.
Par ailleurs, l'histoire du seul survivant, M. Piscine Molitor Patel, citoyen indien, est une étonnante histoire de courage et d'endurance dans des circonstances extraordinairement difficiles et tragiques. D'après l'expérience de cet enquêteur, son histoire est sans pareille dans l'histoire des naufrages. Bien peu de naufragés peuvent prétendre avoir survécu en mer aussi longtemps que M. Patel, et aucun en compagnie d'un tigre du Bengale adulte.