Citations de Zoulfa Katouh (151)
Depuis la nuit des temps, je nais dans le cœur des hommes.On m'a donné bien des noms, dans bien des langues. Dans la tienne, je suis Khawf. En français, Peur. En allemand, Angst. Beaucoup ont écouté mes murmures, suivi mes conseils, éprouvé ma puissance. Je suis partout. Dans le dernier souffle d'un roi mis à mort par son peuple. Dans l'ultime battement de cœur d'un soldat qui se vide de son sang. Dans les larmes d'une femme enceinte agonisant sur le seuil de sa porte.
page 375;
Les survivants portent leurs remords comme une seconde peau.
Il se détourna sans rien dire, car personne ne connaît la réponse à cette question. Le temps est le meilleur remède ; il finira par cicatriser nos blessures. nos corps oublieront le traumatisme, nos yeux réapprendront les couleurs telles qu'elles sont. Mais nos âmes, elles, ne guériront jamais.
Le temps ne nous pardonnera pas nos péchés et ne ramènera pas nos morts.
page 171.
partir ne sera pas facile. Je sèmerai des morceaux de mon cœur brisé derrière moi sur les côtes syriennes, et les cris de mon peuple me hanteront jusqu'à la fin de mes jours.
page 96.
Am traîne à l'hôpital tous les jours en quête de clients prêts à dépenser les économies de toute une vie pour embarquer à bord d'un bateau, en direction d'un continent que nous ne connaissons que par les livres.
(...)
quand on s'entasse sur un bateau délabré, c'est qu'on n'a vraiment plus d'autre solution.
page 37.
Peu importe ce qui arrive, souviens-toi que le monde ne se résume pas à la souffrance. On a droit au bonheur, Salama. Tant pis si on ne nous le sert pas sur un plateau d'argent. On ramassera les morceaux et on le construira nous-mêmes. (p.147-148)
Les yeux rivés sur la bague, je me rends compte que je me moque des incertitudes de l’avenir. Tout ce que je sais, c’est que j’aime ce garçon. Dans les ténèbres qui nous entourent, il est devenu mon rayon de soleil. Au milieu de toutes ces morts, il m’a donné envie de vivre.
J’entends même des rires, comme un fragment d’innocence qui survit envers et contre tout, et que j’attrape au vol pour le graver dans mon cœur.
La mort est un excellent professeur.
Le lendemain matin, j'embrasse Layla sur la joue avant de partir au travail. On ne peut jamais être certaines de se revoir. Chacun de nos au revoir est un adieu.
(Page 31)
Ce n'est pas une guerre, Salama. C'est une révolution.
(Page 15)
Partir ne sera pas facile. Je sèmerai des morceaux de mon cœur brisé derrière moi sur les côtes syriennes, et les cris de mon peuple me hanteront jusqu’à la fin de mes jours.
Quand on s'entasse dans un bateau délabré, c'est qu'on n'a vraiment pas d'autres solutions. p.37
Je crois que c'est le dernier habitant de cette ville qui rêve encore la nuit.
Des enfants courent sur le trottoir et poussent des cris excités. J'entends même des rires comme un fragment d'innocence qui survit envers et contre tout, et que j'attrape au vol pour le graver dans mon cœur.
Ce n'est pas comme ça que j'imaginais mon avenir. Je voulais être pharmacienne. Pas ouvrir le ventre des enfants au milieu de leur salon.
Mes os sont faits d'acier et je dois recoller les morceaux de mon cœur pour pouvoir de nouveau affronter l'enfer demain.
C'est la benjamine de la famille. On était tous tellement heureux quand elle est née... Avec deux garçons, nos parents ne s'ennuyaient pas. Et puis ce petit ange est venu au monde. Je me souviens encore du cri de joie de Baba quand l'infirmière lui a annoncé que c'était une fille. Elle a été pourrie gâtée. Il ne fallait même pas qu'une aile de papillon lui effleure la peau. Avec mon frère, on n'aurait jamais laissé quoi que ce soit lui arriver, on était ses protecteurs. Et aujourd'hui...
la haine l'a eue.
Sa voix vibre de frustration et de colère.
- J'ai échoué. Je n'ai pas su la protéger. Yusuf ne parle plus depuis la mort de nos parents.
Tant que les citronniers fleuriront, l’espoir ne mourra pas.
Les citronniers continuent à pousser, à fleurir, à nourrir la révolution. Je me souviens de la limonade que Mama nous préparait, l’été. Je sens encore son goût sucré et acidulé sur ma langue - rien que d’y penser, j’en ai l’eau à la bouche. Que ne donnerais-je pas pour une gorgée de citron fraîchement pressé, pour revoir le regard aimant de ma mère lorsqu’elle me tendait mon verre…
Et un jour, on reviendra, j’ajoute. Inch’Allah, on rentrera chez nous. On plantera des citronniers. On reconstruira nos villes et on sera enfin libres.
Le soleil est presque couché et le bleu est en train d’engloutir toutes les autres couleurs. La nuit tombe vite, mais elle n’est pas éternelle. Nous ne serons pas toujours confrontés à l’obscurité, au mal. Tant que nous garderons la foi et que l’histoire de la Syrie continuera à couler dans nos veines, il restera une lueur d’espoir.