AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Zsuzsa Bànk (29)


Je me suis souvent demandé si nous pouvons voir les autres tels qu'ils sont réellement, s'il nous arrive jamais de les reconnaître ou si nous ne pouvons discerner en eux que ce qu'eux-mêmes laissent paraître. P.311
Commenter  J’apprécie          474
…..à sept dans cette maison minuscule dans laquelle ma mère a grandi, à sept sur le plus petit espace, ils vivaient en autarcie, parfaitement bio, sans poisons dans le jardin, sans poisons pour les animaux, sans électricité dans la maison, sans voiture, sans voyages en avion, sans portable, sans consommation, on achetait des objets pour la vie, on faisait attention à eux, on ne les remplaçait pas. Ils vivaient à sept dans cette pièce, ils partageaient les lits, les armoires et la table, mais ma mère le dit aujourd’hui encore : Personne n’était plus riche que nous.
Commenter  J’apprécie          404
Après tout, nous remplissons notre vie, nous la composons, nous l’emballons à ras bord, nous nous installons dans ce monde au prix de la plus grande dépense, nous nous charpentons une vie humaine en puisant dans toutes sortes de strates et avec des accessoires considérables – puis, un jour, nous devons la céder, ça doit prendre fin, et nous sommes censés accepter ça simplement ? Si nous voyons les choses comme cela, y a-t-il rien de plus bête, de plus absurde que la mort ?
Commenter  J’apprécie          372
Incurable…..Nous devions commencer par trouver son sens ou son non-sens derrière les lettres, sa signification véritable, ce qu’il y avait en lui de rusé et d’inéluctable – qu’il signifie : incurable, qu’il signifie : sans perspective, qu’il signifie : sans avenir, qu’il signifie : sans lendemain, qu’il signifie : ça ne s’améliore pas, ça n’ira plus jamais bien. La doctoresse l’avait posé sur la table à notre intention, non, elle l’avait jeté avec énergie, sans fil d’émotion, sans même un fil ténu, à peine perceptible, de compassion, elle l’avait jeté devant nous, pour nous. Et elle nous avait ensuite consacré environ six minutes. Peut-être seulement cinq. Après deux semaines d’investigations coûteuses et d’angoisses montantes qui s’étaient transformées en certitude, elle n’avait eu pour nous que ces quelques minutes. Elle n’avait pas dit grand-chose, juste une phrase brève, quoique grammaticalement correcte, à propos de la tumeur, avec sujet, verbe et adverbe déterminant, pas plus de quatre mots : « Elle est comme ça. » Puis son téléphone avait sonné, elle avait fini sa pomme et nous avait lancé un regard qui voulait dire : qu’est-ce qu’il y a, encore ?
Commenter  J’apprécie          371
Autrefois, en Hongrie, les aiguilles des horloges s’arrêtaient lorsque quelque chose de décisif s’était produit. Quand la mort emportait quelqu’un, la foudre tombait à proximité, le vent ouvrait la porte, gonflait les rideaux et refermait violemment la fenêtre, le battant de la pendule s’immobilisait d’un seul coup, son tic-tac s’arrêtait –et chacun savait que quelque chose s’était produit, que quelqu’un était blessé ou accidenté, que l’un de nous était parti. L’histoire de ma famille est pleine de ce genre d’images, toutes les histoires familiales sont peintes comme cela, une note de couleur faite de malheur et d’inéluctabilité se dépose sur cette trame et imbibe ce tissu de superstition et de goût du surnaturel. Les récits de ma grand-mère étaient remplis de ces présages et de ces annonces, de ces nouvelles de l’inquiétant. Ils nouaient des liens entre les générations, associaient les mondes visible et invisible et nous disaient : faites-y attention, reconnaissez-les et comprenez-les. Ne les repoussez pas, ne les négligez pas, ne les laissez pas résonner en vain.
Commenter  J’apprécie          334
Comment un corps peut-il être détruit aussi vite ? m’a souvent demandé mon père au cours des derniers mois, comme s’il en restait ahuri, comme s’il ne pouvait pas croire que son corps, le sien justement, lui faisait cela, ce corps qu’il n’avait jamais maltraité, envers lequel il ne se montrait jamais négligent ou indifférent, pas d’excès, pas de drogues, peu d’alcool, mais du sport, du mouvement, de l’air frais, ce corps envers lequel il avait toujours fait preuve de bonté. Chaque fois que nous discutions, ou presque, il me posait cette question : comment mon corps peut-il se dégrader aussi vite ? Non, il n’y a pas de bonne fin. Oui, toute fin est cruelle. Ma cousine ressent la même chose avec sa mère démente.
Commenter  J’apprécie          286
Bien qu'il fît trop froid, elle me laissa m'asseoir dans la cour, sur un banc humidifié par la dernière pluie. Je passai les doigts sur l'eau, j'attendis la pluie suivante, qui trempa mon manteau, mes collants et mes bottes, et je souhaitai qu'elle passe au travers de moi-même, cette pluie, qu'elle me dissolve, peut-être, et que je puisse partir en glissant avec l'eau - quelque part.
Commenter  J’apprécie          207
Evi disait que lorsqu'elle s'éveillait, elle devait pouvoir ouvrir la porte et poser le pied à l'extérieur, elle disait qu'elle avait besoin du regard sur les champs, il fallait qu'il aille loin, pas seulement jusqu'au mur suivant, mais jusqu'à la petite maison du garde-barrière et plus loin, au printemps jusqu'aux champs jaunes de colza et à l'automne, jusqu'à la forêt de sapins, lorsque les feuillus dénudés laissaient le regard se porter jusque là.
Commenter  J’apprécie          160
(...) je n'aime plus autant aller chercher dans les livres, parce qu'au bout du compte on est toujours à aller chercher des explications entre les lignes, comme si je ne pouvais pas me contenter du fait que beaucoup de choses restent inexplicables.
Commenter  J’apprécie          120
Nous grandîmes tandis que le monde continuait à tourner comme s'il ne se souciait pas de nous et que nos mères mettaient tout en œuvre pour ne pas perdre l'équilibre, trébucher et tomber en ayant du mal à se relever.
Commenter  J’apprécie          121
J'ai toujours pensé que les gens mouraient entre novembre et janvier, une fois que le soleil a pris congé, que les températures tombent et que l'obscurité s'installe. L'hiver, c'est la mort, pas l'été. L'été c'est la vie. Mais ce qui est fou, c'est que les gens meurent même par des journées brûlantes, claires, innocentes, impeccables. La mort est capricieuse, on doit compter avec elle à tout moment.
Commenter  J’apprécie          110
Nous sommes peu avant Noël, le dix-huit, peut-être le dix-neuf décembre, lorsque dans la ville ils commencent à réduire peu à peu les stands de vin cuit et de jouets et que nous disons, ce sont les journées les plus courtes de l'année, lorsque nous nous consolons en nous disant qu'il fera bientôt plus clair, un peu plus clair chaque jour.
Commenter  J’apprécie          110
Une année, Zigi arriva dès l'été, et pendant une bonne période Aja cessa de se jeter sur le pavé de la grande place et sur les marches devant la moustiquaire. Cet été-là, nous l'appelâmes "l'été de Zigi", même des années plus tard, lorsque nous nous en souvenions, nous l'appelions ainsi, cet unique été qui n'avait été fait que de jours clairs.
Commenter  J’apprécie          100
Cet été-là, on avait posé dans l'eau un large ponton au bout duquel nous pouvions nous tenir à quatre ou cinq et plonger dans l'eau vert trouble. Nous passions le temps étendu sur les planches, le menton posé sur le poing, à regarder les vaguelettes lorsqu'une légère brise se levait entre les saules. Mais le plus souvent l'eau était lisse et immobile, et quand nous jetions une feuille dessus elle restait longtemps au même endroit. Nous étions seuls avec nos roues et nos draps de bain, avec nos pas, nos bonds et nos voix dont nous envoyions le son de l'autre côté du lac.
Commenter  J’apprécie          90
Quand elle vivait encore chez nous, ma mère travaillait en usine, dans la ville de Papa. Elle partait tous les matins sur son vélo et fendait le brouillard. Notre chien courait à côté d'elle en glapissant jusqu'à ce qu'elle le sème le long de la grande route. Je me réveillais dès que je l'entendais dans la cuisine. Quand elle laissait la porte se refermer, je me levais pour la suivre des yeux par la fenêtre. J'écartais les rideaux et je secouais la main pour lui faire signe. En secret, je l'appelais la fendeuse de brouillard. Ma mère haïssait notre village. Elle disait : Ici des enfants meurent parce qu'ils tombent dans les fosses à purin. Ils meurent asphyxiés. Où voit-on des choses pareilles ? (page 11)
Commenter  J’apprécie          83
Ma mère n'a jamais contredit mon père. Elle l'a quitté.
Commenter  J’apprécie          60
« Nous grandîmes tandis que le monde continuait à tourner comme s'il ne se souciait pas de nous et que nos mères mettaient tout en oeuvre pour ne pas perdre l'équilibre, trébucher et tomber en ayant du mal à se relever. Pendant longtemps elles avaient marché à longue distance l'une à côté de l'autre, Évi en bottes de caoutchouc vert auxquelles collait toujours de la terre, ma mère en souliers plats dans lesquels elle courait rapidement, comme si elle avait toujours quelque chose à l'esprit et peu de temps pour cela, et la mère de Karl sur de hauts talons que nous entendions claquer sur les dalles branlantes... »
Commenter  J’apprécie          60
Il est une image que je pourrai certainement toujours voir, un mouvement que j'associe à mon père et à lui seul : sa manière d'entrer dans le lac. Quand la lumière de l'après-midi commence à décliner, sa manière d'ôter ses sandales de bain, de préparer sa serviette-éponge sur la rive, d'envoyer son regard au-dessus du Balaton, de le palper des yeux comme s'il cherchait la meilleure voie pour ses mouvements. Faire les premiers pas dans l'eau, se passer les mains humides à travers la barbe et plonger, nager quelques poussées sous l'eau, remonter pour prendre de l'air, s'arrêter un bref instant, regarder encore une fois la surface du lac et appréhender sa grandeur. Puis nager loin au large et disparaître dans le bleu. (page 302)
Commenter  J’apprécie          50
Lorsque prit fin notre premier été au bord du lac, Isti demanda pourquoi les feuilles tremblaient sur les arbres, pourquoi les nuages dissimulaient le soleil et si personne ne pouvait faire en sorte que le lac ne perde pas sa couleur le soir, Mihaly peut-être ?
Commenter  J’apprécie          50
Cet été-là, Isti s'est mi à écouter des choses qui ne produisaient aucun son. Il disait qu'il entendait le ciel, qu'il soit proche ou lointain, nuageux ou immaculé, il entendait les raisins, les rouges mieux que les blancs, et il entendait la poussière qui vole au-dessus du sol lorsqu'une porte s'ouvre, ces gros flocons blancs, il les entendait.
Commenter  J’apprécie          51



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Zsuzsa Bànk (97)Voir plus

Quiz Voir plus

Mon hit-parade !

Un écrivain d’Amérique latine, très cultivé, parlant plusieurs langues, qui a été longtemps bibliothécaire, et dont l’œuvre est partagée entre poésie et nouvelles

Jorge-Luis Borges
Ernesto Sabato
Gabriel Garcia Marquez
Jorge Amado

11 questions
7 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}