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Critiques de Édith de La Héronnière (22)
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La ballade des pèlerins

Chemin de Compostelle, chemin initiatique, chemin de métamorphoses que l’auteur a divisé en 7 parties : Détachement, Déroutement, Délires, Désenchantement, Défrichement, Strette (Dans la musique classique, la strette désigne une section d'une fugue ou autre pièce contrapuntique, au cours de laquelle les différentes voix entrent de manière rapprochée. Il est fréquent qu'une strette soit présente à la fin de la pièce musicale.) et Dénouement ;

mais aussi découvertes avec des yeux neufs de la beauté de la nature qui accompagne avec rudesse et douceur les pas du pèlerin, comme la nuit envahie de multiples bruits furtifs qui viennent froisser le silence dont on la croyait pleine.



L’auteure fait également au fil du chemin, selon les circonstances, des retours historiques vivants et passionnants qu’elle confronte avec son expérience présente et qui permettent de l’approfondir. Elle lance des ponts vers d’autres formes de pèlerinages ou de croyances en Inde, au Tibet, sur les terres d’Islam ou du bouddhisme zen. 


« Au portail du monastère d’Irache, un arc sculpté de coquilles Saint Jacques se conclut à chacune de ses extrémités par une tête de mort. Tancred suit la voussure du bout de son bâton. Voyez : la « petite mort » — en Inde, elle désigne le pèlerinage. C’est extraordinaire qu’elle soit là aussi, qu’elle enserre le chemin. »



Si la décision de se mettre en route vers Compostelle est difficile, elle se prolonge d’une « mise en doute » et est faite d’abandons successifs où la carapace ancienne se craquèle et s’ouvre. Cela n’ira pas sans heurts entre les compagnons de voyage :



« Nous voici quatre, d’une rigoureuse diversité d’horizons, de tailles, d’âges, de langues, et pourtant soudés par un même projet que chacun pétrit à sa manière, ce qui donne une pâte extraordinairement bizarre.

Entre Zabel l’informelle( 20 ans de New York les a rejoint au Mayet-de-Montagne), Roland le sage, Tancred l’ardent et moi la frondeuse bien trop française, se déploie un tissu de contradictions détonantes où nos mondes (l’Ancien et le Nouveau) s’enchantent et se heurtent à vive allure.

(…) Chaque pas sera la résultante de nos mouvements contraires. p 47-48



L’expression des luttes intérieures de chacun, les vieilles souffrances qui remontent en surface au gré des difficultés qui se présentent sur la route va se traduire par des pugilats entre les deux hommes qui en viennent aux mains ou des échanges verbaux violents. Le corps lui-aussi s’exprime par la souffrance. Le chemin est un abrasif qui polit peau et coeur, qui desquame pour que meurent et se régénèrent les cellules anciennes,

« une marche sacramentelle qui ramène les êtres à leur épure » p 262



Edith de La Héronnière exprime tout cette métamorphose en elle et autour d’elle sans fards souvent avec poésie et retenue :

"La source chuinte légèrement. L’eau et la pierre se marient. Leur rapport est beau parce qu’il est contradictoire. Ils résistent l’un à l’autre . L’eau dit non au granit ; le granit dit non à l’eau. Ses grains rugueux se rebellent devant le temps et les décompositions. Les bises les plus rudes le caressent mais ne l’entament point. Et l’eau claire, pure, y trouve naturellement son lit, ne risquant ni de s’y infiltrer, ni de se perdre, ni d’affouiller la pierre." p101-102



Un livre à garder près de soi, que l’on peut lire et relire sans qu’il cesse d’enrichir, que l’on se soit élancé ou non sur la route de Compostelle.

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Chemins de traverse

Commandé à la Librairie Périple2- Boulogne-Billancourt- 15 juin 2023



Une nouvelle pépite que nous offre Édith de la Héronnière, avec ces éblouissants " chemins de traverse", trésors de chemins buissonniers , entre ses voyages italiens( avec un amour tout particulierpour la Sicile), sa double passion pour Dame Nature et Dame Culture...servis avec bonheur par un style élégant et poétique...



Un de ces livres-amis qui deviennent naturellement des " livres de chevet" que l'on a , à portée de main...que l'on lit, relit, que l'on reprend au hasard, selon l'envie, l'humeur du jour ou du soir !



Je vais débuter par un extrait de circonstance: la rentrée des classes !



"De la plume à la feuille



Souvenons- nous de la griserie qu'étaient les premiers jours de la rentrée des classes.Ni les nouveaux professeurs, ni les nouvelles matières n'exerçaient un attrait si grand que celui des livres et des cahiers neufs : ces livres dont les feuilles avaient encore du mal à se détacher les unes des autres, dont on découvrait avev une curiosité assez vite rassasiée les images qui allaient nous accompagner une année entière, et parfois toute la vie, comme les Lagarde et Michard; et surtout ces cahiers neufs, ces grands cahiers à spirale avec leurs pages réglées, quadrillées ou entièrement vierges, fascinants parce qu'ils invitaient à se lancer dans le travail, la réflexion et l'écriture soignée. Ils donnaient l'élan. "



14 textes en prose, accompagnés de délicieuses illustrations de Xavier Carteret....



14 récits dont 3 ont été publiés à l'origine dans des revues, entre 1989 et 2012...dont deux parmi mes préférés :

- " de la Plume à la feuille" ( édité en 2012 dans la Revue des Deux- Mondes)

-" du verre à l'eau" ( édité en mars 1989 dans la Revue Traverses)



Tout le recueil est délectable , mais comme tout lecteur, des préférences se détachent très nettement !

Dont je crois , la prose préférée de préférée , qui exprime excellemment la magie unique , et l'état d'esprit vagabond ressenti lors des voyages en train...ce qui sont des moments incroyables que j'adore personnellement.



Cette prose subtile s'intitule: " Ferroviaphilie"



"Ferroviaphilie

(...)

Un matin d'octobre 1995, gare de Lyon.Le Cévenol de 8h44 est à quai.

Sa couleur indique qu'il s'agit d'un train "corail" .(...) Il devrait arriver à Marseille à 19h10 si tout va bien.(...)

Une journée entière à regarder par la fenêtre, à se laisser aller au songe!

Ni contemplation, ni ce type de méditation dont les gourous occidentaux font aujourd'hui leur beurre.Nulle passivité non plus: l'esprit travaille, la bride sur le coup, comme parfois l'écriture, l'enchaînement des pensées courant en des sens que l'on ne maîtrise pas mais qui s'ouvrent sur des territoires inconnus."



Viennent ensuite " Nous irons tous au pilonnage", sur ce "crève- coeur" du " Pilon" et de la vie de plus raccourcie d'un livre, tout en rappelant le côté " sacré " de " l' objet - livre "...



" du verre à l'eau", aux thèmes faussement minimalistes rehorge de références culturelles et philosophiques : de la fabrication du " Verre" de l'art des maîtres- verriers, de Murano...des audaces des sculpteurs et architectes, sans omettre l'Eau , grand vecteur et symbole de l'Existence, de transparence, d'élément fondateur de la Vie qu'elle permet...aux Hommes comme à la Nature !



Voici un très modeste apercu des fabuleux

" Chemins de traverse" qu'Édith de la Héronnière nous fait partager, nous emportant parfois bien loin dans des directions inédites, singulières, imprévues... avec sa musique toute personnelle....Un style plein d'harmonie et de musicalité...Comme des paysages de dentelle !



Difficile de me freiner dans les citations; toutefois je vais en ajouter deux: une sur cette poésie unique des " voyages en chemin de fer" et une dernière en conclusion, pour nous tous et toutes, qui "hantons" et participons à ce lieu de BABELIO, espace d'échanges de passionnés des LIVRES, de Littérature et sur l'INFINI de ceux-ci... leur côté "sacré "....



"Nous irons tous au pilonnage



Réceptacle, clé du monde du savoir et des rêves, fenêtre ouverte sur toutes les aventures issues de la fabuleuse imagination humaine, le livre démultiplie l'espace dans lequel nous vivons et respirons. Il rapproche les consciences les unes des autres.Il est " le plus court chemin d'un homme jusqu'à un autre" disait Paul Valéry.Il nous donne mille vies en une seule.Le livre est une piste d'envol pour ceux qui aiment voler, un champ de course pour ceux qui aiment courir, il est une chambre d'amour pour ceux qui aiment aimer; il est un puits de science pour ceux qui aiment apprendre; il contient toutes les émotions et toutes les passions possibles et imaginables, et même inimaginables ; il contient la vie pour ceux qui ne savent pas trop comment vivre.(...)"



Avec, pour conclure, de vifs remerciements aux éditions Klincksieck, pour cette collection atypique et magnifique: " de Natura rerum", tant par les auteurs textes choisis , que par la beauté esthétique de ces petits livres " à l'ancienne"....

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Mais la mer dit non

Commande - Librairie Périple2- - Boulogne-Billancourt

- mi-juin 2022



Petite pépite nous illuminant un très , très long moment !...



Mes boulimies exponentielles...m'ont fait prendre du retard dans la rédaction de mes " billets "!



Ainsi, cela fait déjà presque deux mois que j'ai lu ce très beau livre mettant en avant 10 personnages romanesques, personnages " rebelles" et contestataires, qui sont devenus des archétypes " universels" , qui ont nourri, nourrissent toujours l'imagination de générations de lecteurs...et continueront à nourrir les générations suivantes, à les faire rêver, espérer , se questionner !



Parmi ces dix personnages: Antigone, Bartleby le scribe, Cyrano de Bergerac, le Baron perché, Oblomov, Ana Non, etc.



"Certains personnages inventés par les écrivains ont le don particulier de se glisser dans nos vies et d'y occuper une place d'importance sans qu'on y prenne garde.(...)

Ce sont des amis de choix, d'exquises et discrètes présences dont l'accompagnement procure à l'existence quotidienne une ligne de fuite du côté de l'attention et de la réflexion. Il est bon d'avoir de ces échappées, dispensées par les livres, qui sont des fissures utiles dans nos murailles, grâce auxquelles pénètre un courant d'air ou s'entrevoit un bout de ciel."(p.13)



Une Ode extraordinaire à la Littérature, à sa puissance de liberté et de résistance...



Je remercie, en passant, Jacques Lèbre qui , par son très intéressant texte" le Poète est sous l'escalier" m' a fait rencontrer ce texte captivant...de cette écrivaine- philosophe que j'avais déjà eu le bonheur de lire !





Une auteure que j'apprécie immensément, découverte la toute première fois avec un recueil d'essais: " Promenade parmi les tons voisins " qui relatait avec poésie la trajectoire d'artistes ayant subi de lourdes épreuves et handicaps...et par une biographie palpitante de l'écrivain- poète, Joë Bousquet...



Ces grands personnages fictifs qui par leur singularité, leur désobéissance, leurs idéaux ou philosophie de vie , leur fantaisie, leurs conviction nous transportent, nous font rêver et nous questionner durablement.



Avec cette lecture vivifiante, des envies de RELECTURES et

de découverte première comme "La Faculté de l'inutile " de Iouri Dombrovski et "La Soirée d'Elseneur in Sept contes gothiques" de Karen Blixen. du côté " relectures" celle d' "Ana Non" de Gomez-Arcos !!



"Qui sont en réalité ces personnages que nous chérissons de générations en générations ? Sont-ils des " renonçants" ? Des résistants ? Des idiots ? Ou seulement des sages ? Ils ouvrent en tout cas dans la conscience le chemin d'une question.Le simple fait qu'ils existent, même de façon imaginaire, signale que rien n'est acquis, ni le pouvoir, ni la routine du travail, ni les certitudes, ni même le destin, qu'une alternative est toujours possible.Les évidences affectives et sociales cessent de fonctionner comme des machines (...)(p.15)



Un livre à savourer, à méditer , à lire et relire...sur la Force incroyable que représentent l'Imaginaire et la Littérature !







***en complément, lien suivant :



https://www.babelio.com/livres/La-Heronniere-Promenade-parmi-les-Tons-Voisins/571784/critiques/529273

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Mais la mer dit non

Dix personnages de roman qui disent non, chacun à leur manière. Edith de la Héronnière partage avec le lecteur son trouble et son admiration pour ces êtres fragiles et déterminés qui dérangent, réveillent. En rompant les habitudes, ils nous obligent à remettre en question notre façon de voir et sentir le monde qui nous entoure, et souvent nous contraint.



Ces « Trois lettres accolées et le cours des choses s’enraye, les arguments se mettent à bégayer et les discours à bafouiller, les plus belles constructions politiques, idéologiques ou sociales retombent sur elles-mêmes comme un soufflet raté. »



Les cinq premiers non sont ceux de :

L’ Antigone de Sophocle qui refuse le décret de Créon ordonnant de laisser son frère Polynice sans sépulture. Elle désobéit, se dresse face au Pouvoir, « Elle agit selon son coeur »…



Bartleby le scribe de Melville qui à chaque demande de son patron, dans « une résistance passive » objecte son « I would prefer not to » « Je préfèrerais pas »…



Le panache de Cyrano et les « Non, merci ! » qui « rythment sa tirade »

« Ne le plaignez pas trop : il a vécu sans pactes,

Libre dans sa pensée autant que dans ses actes » (Duc de Grammont



Ilia Ilitch Oblomov de Gontcharov dont « le bonheur le plus pur est de rester allongé sur son lit » pour dit-il « donner libre cours à ses sentiments et à son imagination »



Dans « Le silence de la mer » on ne saura pas le nom de l’oncle et de sa nièce qui voit une partie de leur demeure réquisitionnée par les allemands pour un officier Werner von Ebrennac. Le non dans ce texte est « tissé d’un silence extraordinaire » même si des « gestes, des mouvements imperceptibles » montrent qu’un amour passionné « se fraye un chemin dans cette épaisseur basaltique » …



Les cinq non suivants viennent

du beau Morten de Coninck dans « La soirée d’Elseneur » conte tiré des Sept contes gothiques de Karen Blixen

de Montag le pompier dans Fahrenheit 451 de Ray Bradbury

de Zybine dans « La faculté de l’inutile » de Iouri Dombrovski

de Côme le baron perché de Italo Calvino

et enfin d’Ana Non de Agustin Gomez-Arcos



J’ai adoré revisiter des livres que j’avais lu et en découvrir d’autres grâce à l’éclairage et les belles analyses qu’en fait Edith de la Héronnière. « Mais la mer dit non », même si l’on ne lit pas les romans qui ont donné vie à tous ces « désobéissants, rebelles, véritables têtes de mules » qui les habitent et peuvent devenir des amis, peut aussi être simplement un livre de "sagesse", tragique et jubilatoire, offrant de bouleversantes leçons de vie.

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Promenade parmi les Tons Voisins

Une très belle lecture faite par le plus grand des hasards... en fouinant dans ma librairie parisienne préférée... La librairie Tschann, bd du Montparnasse. J’ai découvert dans le fond « littérature », ce recueil d’essais qui met en scène des destins d’artistes, aux parcours empêchés par un handicap, la maladie, la souffrance. Des artistes qui ont eu la capacité, la force mentale de dépasser leurs failles ; tels Joe Bousquet, Lafcadio Hearn, Cristina Campo, le peintre Nicolas de Staël, le sculpteur, Etienne Hajdu…

Une partie de ces essais est parue auparavant dans différentes revues : La N.R.F, La Revue des deux Mondes, Critique…



A ces parcours créatifs, s’intègre un très bel hommage d’Edith de la Héronnière à son professeur de philosophie, Jankélévitch…



Tous les textes sont de qualité…dans la forme comme dans le contenu.J’ai été plus frappée par celui consacré à un écrivain injustement peu lu, aujourd’hui, Lafcadio Hearn. Ecrivain au parcours de vie tumultueux, parsemé d’épreuves…En dépit d’une myopie très handicapante… cet auteur a un regard plus perçant et affiné que les « bien-voyants »…Il se passionnera pour le Japon…s’y installera…et écrira de très beaux textes à partir des légendes, et des éléments de la civilisation de ce pays…



« La divine beauté du monde que contemple Hearn n’est jamais exempte de souffrance et d’agonie.

Son départ définitif pour le japon se préparait. Lafcadio Hearn allait y trouver à la fois un lieu d’ancrage dans son existence de nomade et une sorte d’unification entre l’Orient et l’Occident qui l’habitaient et se contredisaient en lui depuis l’enfance par sa double ascendance grecque et irlandaise. Au Japon, ce perpétuel errant se marie, devient père de famille, enseigne et adopte la culture avec un émerveillement que l’on peut qualifier de religieux tant il comprend de mystère et de ferveur, voire de désespoir lucide quant à la possibilité de trouver un jour une place en ce monde. « (p.47)



Des portraits saisissants de créateurs : peintre, sculpteur ou écrivains, à travers leurs souffrances et leurs exigences artistiques… Edith de La héronnière associe de façon légitime la création littéraire, artistique… à une exigence spirituelle élevée. J’avais été frappée par cette dimension supplémentaire, en lisant il y a quelques années son excellente biographie du poète de Carcassonne, Joe Bousquet…

Un recueil captivant qui dit avec infiniment de sensibilité et de poésie…les difficultés multiples de l’acte créateur… qui dans ces destins individuels, peuvent sublimer la souffrance physique, comme une douleur de vivre…

« L’amour de l’art n’a rien de bénin. C’est au contraire une affaire à haut risque , donnant lieu à des manifestations et à des comportements extrêmes… » (p.119)





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Contes des sages pélerins

Edith de la Héronnière a rassemblé dans ce petit livre de toute beauté 40 contes ou poèmes tirés non seulement de la légende compostellane mais aussi issus des traditions des moines d’orient, de l’orthodoxie russe, du bouddhisme chinois et japonais, tibétain, du soufisme, du shintoïsme, de l’hindouisme et autres… Richesse et universalité des textes auxquelles viennent s’ajouter, pour le plaisir des yeux, celles des illustrations, reproductions d’enluminures, d’estampes, de miniatures et de tableaux.

Ce livre est un parfait complément à « La ballade des pèlerins » du même auteur, qu'il vient illuminer et élargir .

Livre d’art et compagnon de voyage dont la taille permet d’être glissé dans un sac



« Soyez passant » Evangile de Thomas



« Jeune je jetai mon pinceau et ma pierre à encre

En secret j’enviais les hommes en dehors de ce monde

Une gourde et un bol,

Je partis en pèlerinage, je ne sais combien de printemps. » Ryôkan



« Des pèlerins montent au temple

prendre congé de leur Seigneur.

Au jour choisi pour le départ

un dernier bol de lait béni.

Ah, leur gorge se noue de sanglots !

partir déchire leurs entrailles.

Ils s’embrassent, ils se souhaitent bonne route, ils se donnent courage.

Ah, souffrance intolérable du départ !

ils ne cessent de se retourner, dit Toukâ

pour regarder encore la flèche du temple. » Toukârâm, Psaumes du pèlerin
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Joë Bousquet : Une vie à corps perdu

Une très belle biographie du poète, Joe Bousquet.... que je re-découvre... alors que je l'ai lue avec grand intérêt , en 2006....Une amnésie partielle que je viens réparer ce jour…14 février 2014 !

Le plus grand des hasards de mes flâneries...vient de me faire lire un recueil de textes fulgurants de ce même auteur, "Promenades parmi les tons voisins"... où un éclair subit est survenu... en découvrant parmi les essais dédiés à des artistes, le chapitre consacré au poète "Tout ce qui en moi n'était pas....ou l'"autre vie" de Joe Bousquet" ...et en lisant ce passage...le souvenir de la biographie qu'Edith de La Héronnière lui a dédiée m'est revenue à l'esprit



" [Joe Bousquet] ira bien plus loin dans l'analyse de sa nouvelle situation pour en sonder l'abîme et c'est cela qui nous intéresse, nous qui le lisons aujourd'hui et cherchons à comprendre comment un homme dont l'existence a été si profondément brisée, dont le malheur paraît si évident, a pu transmuer cette pâte, accomplissant sur lui-même, corps et esprit étroitement imbriqués, une métamorphose apte à distiller de la vie-de la vie acérée, éclatante, triomphant de tout ce qui s’y oppose, et cette ivresse de l’intelligence et de la perception, allant de concert avec elle.

Son corps à moitié mort, fardeau dont l’autre moitié est percluse de douleurs, déjà travaillée par les maux de toutes sortes qui l’emporteront trente ans plus tard, il va l’accompagner dans l’aventure qui le fera habiter le monde par le langage. (p.75)

Cet essai biographique est très dense, enrichi de nombreuses analyses des textes de Joe Bousquet… de citations et de cette dimension spirituelle que l’on ressent très fort dans cet ensemble d’essais « Promenades parmi les tons voisins ». En fin de volume, une bibliographie des œuvres du poète vient compléter l’ensemble.

En regardant par curiosité sur la partie droite de l’écran « Babelio »… on peut remarquer les propositions de « proximité d’écrivains » avec celui, dont on est entrain de « parler »… Pour Edith de La Héronnière… plusieurs auteurs sont cités, comme proches ,par l’état d’esprit et le ton… Je retiens très justement un nom : « Christian Bobin »…. Une similitude quant à la dimension spirituelle de la littérature et de l’écriture… ainsi qu’une volonté du « mot juste », dans la simplicité et l’épure.

Cette biographie est foisonnante…par l’admiration vouée à ce poète hors du commun, mais aussi par une profusion d’informations…j’achèverai cette critique modeste…par une anecdote qui m’avait enchantée au moment de sa découverte et encore au présent… car elle décèle chez cet artiste, un amour de la vie, de l’art, des artistes et une curiosité boulimique…en dépit d’un corps malmené et « souffrant »… Cette biographie est à l’image de cette anecdote significative : « Chaque soir, il demande que l’on dresse sur une chaise devant son lit les tableaux avec lesquels il désire passer la nuit »…. (p.100)

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Chemins de traverse

14 textes à l’expression raffinée rassemblés autour de quelques thèmes : le voyage d’abord à travers divers chemins de marches proches ou lointains , (Vezelay, la Vézère, en Italie,auxEtats-unis ) , de chemins de fer (le cévenol « Ferroviaphilie »)) mais aussi le chemin de la plume sur le papier (« De la plume à la feuille ») jusqu’à la fin du livre (« Nous irons tous au pilonnage » ) ou encore la dialectique du verre et de l’eau (« Du verre à l’eau ») . L’ensemble à l’écriture très soignée montre une très grande sensibilité à la nature et à l’universelle impermanence.
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Chemins de traverse

Ensorcelante invitation au voyage, ce recueil de promenades d’Edith de la Héronnière est publié dans la précieuse (autant par la valeur des textes que l’on y trouve que par la facture des livres eux-mêmes, le format et la douceur du papier, la séduction des illustrations) collection De Natura Rerum chez Klincksieck, « Chemins de traverse », où elle raconte ses tours et détours sur les traces de Jarry, Raffadali ou Lampedusa, ou au gré de sa propre fantaisie. L’auteure sait décrire avec le plus grand charme les pierres et les plantes, tout ce qui habite puissamment les paysages traversés, à pied ou en train (un des plus beaux chapitres évoque ainsi une traversée ferroviaire de l’Auvergne, dévoilant les mille facettes de ses montagnes). Ailleurs, aussi, elle narre avec talent la folle entreprise d’un autre grand promeneur, le cinéaste Werner Herzog, qui ayant appris, à l’automne 1974, l’agonie de son amie Lotte Eisner, décida de quitter Munich pour rejoindre Paris à pied, gageant qu’elle continuerait à vivre au moins jusqu’à son arrivée s’il menait cette longue marche à son terme… Un pari qu’il gagna, au terme d’une véritable épreuve d’endurance, et, avec un tel succès, que Lotte Eisner vécut encore neuf ans après cette aventure ! Et l’une des multiples balades savoureuses que nous propose Edith de la Héronnière dans ce texte, tout en dérives lui-même, nous rappelant que la vie n’est pas forcément la mieux vécue par les chemins les plus courts, mais souvent, justement, sur les voies de l’errance, sur ces « chemins de traverse » du désir et de l’aventure. Ah, cheminer, cheminer encore avec le délicieux viatique de ses mots…
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Joë Bousquet : Une vie à corps perdu

Si la poésie est un dérivatif pour certains. D'autres, comme Joe Bousquet, elle fut pour lui comme un moyen d'exister.



Ecrivain, mais poète avant tout : il exerça un grand rayonnement par sa conversation, par sa correspondance ( Lettres à Poisson d'or, 1967 ), par ses cahiers ( traduit du silence, 1939 ) et par ses proses poétiques.



Curieux de lui même, il fut un poète du désir, du songe, et des métamorphoses qui abolissent les frontières entre le rêve et la vie.



Toute son oeuvre est un chant poétique ( voire proche de l'expérience mystique ) , fulgurant et translucide.

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Sicile aquarelles

Passionné de dessin depuis toujours (j’en ai fait mon métier), je suis toujours comblé quand j’ai la chance de feuilleter un de ces beaux livres qui illustrent des voyages ou des découvertes. Celui-ci est l’exemple parfait de ces voyages immobiles qui vous donnent l’impression d’avoir visité un pays, une région, ici la Sicile, sans bouger de votre fauteuil.



Découpée par zones géographiques, la visite s’appuie sur l’histoire, très riche, de cette région d’Italie, peuplée par les Sicanes originellement, puis colonisée successivement par les Phéniciens, Grecs, Romains, Arabes, Normands... De ces différentes influences est née une architecture particulièrement variée dont il subsiste encore de nombreuse traces jusqu’à des temples grecs en remarquable état, malgré leur âge et les nombreux tremblements de terre d’origine volcanique dont cette île, la plus vaste de la Méditerranée, a souffert au cours des siècles passés. Tout ceci est très bien raconté dans les différents chapitres écrits par Édith de La Héronnière.



Et le dessin ? Que dire si c’est une pure merveille, et un plaisir à chaque fois renouvelé de tourner les pages et découvrir un nouveau paysage, un port, une ville multicolore greffée sur le flanc de la montagne, des temples antiques aux châteaux normands en passant par les églises, multiples, de différentes influences dont les plus baroques ne sont pas les moins nombreuses. Alternant des pages entières pour un dessin, ou plusieurs sur une même page, les aquarelles sont d’une sensibilité et d’une fraîcheur étonnantes. Quand par hasard un simple dessin à la mine noire vient se glisser entre deux aquarelles, c’est d’une précision diabolique dont fait preuve Fabrice Moireau passé maître dans ce genre d’exercice. C’est même au compte-fils que j’ai scruté le moindre détail de nombreuses illustrations, fasciné que j’étais par la justesse des perspectives, la rigueur des proportions et la souplesse de la couleur.



Rarement un livre m’a autant emporté par sa qualité ; vous aimez les voyages, les beaux livres, les beaux dessins, celui-ci ou un autre de la même collection vous procurera sans doute autant d’émotions.
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Du volcan au chaos

Edith de la Héronnière nous rapporte ici ses notes et souvenirs de plusieurs voyages en Sicile, dans un style extrêmement poétique. L'introversion est de mise et les parallèles entre esprit et paysage sont riches et nombreux. Bercé de rencontre avec de vieux amis siciliens, de chaleur rassérénante, de solitude, de déception parfois, de vide tout autant que d'ouverture au monde, d'ambiances italiennes grouillantes de vie ou méditatives, Edith de la Héronnière nous dresse un tableau personnel et spirituel de la Sicile.
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Chemins de traverse

Nulle aventures ,ni mésaventures extraordinaires dans ce livre, mais des récits de chemins pris : chemins de bourgs, de campagnes, en France, Italie,Nevada, chemins de fer, chemins de la plume sur une feuille de papier, chemins de vie, d'enfances, chemin des livres vers le pilon; avec ses digressions personnelles ou plus historiques.

Ceci ,écrit avec une élégance infinie et simple.

Parfois,peut-être, trop de mots mais....( la nostalgie , mienne, n'apprécie pas toujours le trop).

Beaucoup de sérénité tranquille bien recommandée en ces temps.

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Du volcan au chaos

Magnifique ouvrage, à l'écriture poétique et envoûtante. Deux voyages dans cette Sicile qui se refuse, l'un au printemps, l'un en automne. L'auteure nous entraine de Palerme au Caos (lieu de naissance de Pirandello), de lieux hérités de la riche histoire de cette île, la civilisation grecque, les Byzantins puis les Normands ayant laissé derrière eux des merveilles. Mais la Sicile, c'est aussi la terre, la lumière, les couleurs, la mafia et l'occasion pour Edith de le Héronnière de parler des oeuvres de Nicolas de Staël, du "Guépard" de Lampedusa, des nouvelles de Pirandello, des écrits de Léonardo Sciascia tout en mêlant ses propres amis, dont le regretté Arturo, photographe et ses propres démons.

J'ai hâte de découvrir d'autres textes de cette auteure.
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La sagesse vient de l'ombre

Les masses critiques m'ont envoyé ce livre que j'aurai éventuellement choisi dans la liste. Je ne devais pas être bien réveillée ce jour là. Bon, tant pis, j'ai commencé la lecture: un voyage à travers la Sicile, une terre riche de culture et de secrets. L'auteur s'est inspirée tout d'abord de ses plus fameux écrivains (Sciascia, Pirandello etc) pour nous plonger dans l'atmosphère envoutante de l'île. Le style est très agréable, souvent poétique, on ressent tout le respect et l'amour de l'auteur pour la Sicile. Après, même si je suis sensible à la nature, ses descriptions de lieux qui mélangent nature et histoire sont agréables à parcourir, mais quand la description devient plus ciblée, les jardins et toute la flore qui y cohabite, alors là je décroche. Très peu pour moi, mais c'est une question de goût, peut-être un jour...

A tous les passionnés de botanique, ce livre est pour vous, et je l'avoue mes tentatives pour terminer l'ouvrage se sont révélées infructueuses, désolée ce sera pour une autre fois.
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La ballade des pèlerins

Le grand intérêt de ce récit est qu'il s'appuie sur des connaissances vastes et profondes sur l'histoire du pélerinage, l'histoire tout court, l'architecture, l'église et la spirualité du moyen-âge. Les passages sont nombreux qui resituent l'aventure actuelle dans ses racines premières, sans jamais dissimuler l'âpreté du quotidien, les paysages tour à tour magnifiques ou menaçants, le temps qui dicte sa loi et la fragilité humaine.




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Le labyrinthe de jardin ou l'art de l'égarement

Pourquoi un peu partout en Europe avoir construit depuis le moyen-âge des labyrinthes, « ces lieux d’inquiétude », dans les églises et les jardins ? C’est ce qu’Edith de la Héronnière s’emploie ici à expliquer à travers les âges, nous aidant à mieux comprendre en quoi le promeneur s’y perd pour mieux se retrouver … Testé par Hugues (Bibliothèque de Viroflay)
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La sagesse vient de l'ombre

Un livre facile à tenir en main, agrémenté de jolies illustrations, parlant d'endroits magnifiques, presque magiques, mais qui ne m'a pas autant emballé que j'aurais pû l'espérer. Je crois avoir plus besoin d'aventures et de dépaisements, de rebondissements et c'est peut-être ce qui m'a manqué, mais il reste une reférence pour découvrir les paysages de siciles. Ce n'est pas un roman mais une oeuvre de documentations et de culture.

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La sagesse vient de l'ombre

Si vous voulez savoir quelle est l'origine de la rose que l'on voit dans le film "Le guépard", qu'est ce qu'on surnomme "une cuisse de nymphe émue", quelles avancées ont apportés les musulmans, les normands, les anglais dans les jardins de Sicile, vous saurez tout en lisant ce livre remarquable d'érudition et de poésie.



C'est une véritable invitation au voyage à travers l'histoire des jardins qui suit l'Histoire tout court. La sagesse vient de l'ombre est un enchantement pour toute personne amoureuse des plantes et curieuse de leurs origines.
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Teilhard de Chardin

Je pense qu'il s'agit du livre pour lequel j'ai eu le plus de mal à rédiger une critique. Non sur l'écriture de l'auteur mais sur son contenu. Et il est loin l'époque (collège et lycée) où j'avais l'habitude de commenter mes lectures.

Ici, il s'agit d'un essai sur Teilhard de Chardin. Comment j'en suis venue à découvrir cet homme ? Au départ, je recherchais un essai sur St Ignace de Loyola fondateur de la Compagnie de Jésus. Précédemment, j'avais lu un essai sur St François d'Assises, lui-même fondateur de l'Ordre franciscain. Me voilà donc avec ce petit volume de 270 pages dont la quatrième de couverture ma séduite. J'ai senti une sympathie pour ce prête jésuite qui semble avoir réussi à concilier pensée, foi et recherche durant 70 ans d'une vie d'aventures, de souffrance physique et psychologique, de solitude et d'amour.

Il est né en Auvergne en 1881 d'une famille aristocratique. Son enfance, déjà, transparaît son goût de la nature et la présence de Dieu. Tout au long de sa vie, il restera toujours nourri d'une vision englobant tout les aspects de sa vie inclut dans le réel.

Ce réel, il le découvre brutalement lors de la première guerre mondiale où il est brancardier. Il connaîtra les tranchées, la barbarie mais aussi la générosité. C'est au cours d'une permission en mai 1918, que Teilhard de Chardin prononce ses vœux solennels et entre dans le sein de l'église. Cette église ankylosée par des dogmes résistant à la modernité du monde. Cette église qui exilera Teilhard de Chardin refusant de publier ses écrits qui menacent son autorité. Son anticonformisme déplaît en haut lieu. Il faut se rappeler que la loi de séparation de l'Etat et des Eglises est adopté en 1905. Soit, Teilhard de Chardin, géologue et paléontologue part pour la Chine. Il voyagera en Asie, en Afrique, fera de fréquents séjours aux Etats-Unis. Ses visites en France seront brèves. Au défaut de s'intégrer dans l'église, il évoluera au sein de la communauté scientifique où il récoltera les fruits d'un travail colossal et minutieux. Il est directeur du Laboratoire de géologie appliquée aux origines de l'homme - un poste dépendant de l'Ecole pratique des Hautes Etudes ; il est directeur de recherche au CNRS Il recevra la médaille Gregor-Mendel et sera promu au grade d'officier de la Légion d'honneur. Il me reste à évoquer les femmes, son affection, son amour sans jamais franchir le Rubicon.
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