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Citations de Émilienne Malfatto (240)


Alvaro est mort avant d’avoir quarante six ans, et c’est là qu’a vraiment commencé cette histoire, la fuite face au danger, ce déplacement si commun en Colombie et qui des années plus tard, te conduira, Maritza, à participer à un projet productif pour victimes du conflit armé, dans la finca El Diviso, où tu seras assassinée le 5 janvier 2019. (p.52)
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Plus la vie est dure, plus on croit en Dieu. Il doit y avoir quelque chose de terriblement rassurant dans l’idée d’une puissance supérieure, bienveillante et cohérente, dans l’idée que tout cela a un sens et fait partie d’un plan divin, même les catastrophes, même le coup de tonnerre dans le ciel serein.
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On le surnommait aussi « el Taladro », la Perceuse, non seulement parce qu’il aimait à utiliser cet outil comme instrument de torture, mais surtout en raison des viols qu’il commettait par dizaines – par centaines – sur des adolescentes et des préadolescentes, de préférence vierges et âgées de moins de quatorze ans. Il arrivait aussi que les parents eux-mêmes vendent la virginité de leur enfant, motivés par la peur et l’argent, car le Patrón, généreux avec l’argent de la drogue, payait largement les hymens. De ces viols systématiques naquirent des dizaines d’enfants. C’était peut-être précisément le but recherché.
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Voilà. La mala hora est arrivée. Dans quelques instants, Marita Quiroz Leiva sera morte.
(Incipit)
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Notre monde n est pas fait pour les rêves
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Ma vie s est déroulée derrière les murs et les voiles, dans la soumission aux hommes …
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Les femmes doivent avoir mal, c est une preuve que leur mari est bien un homme
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Le colonel arrive un matin froid et ce jour-là il commence à pleuvoir. C'est cette époque de l'année où l'univers se fond en monochrome. Gris le ciel bas, gris les hommes, grises la Ville et les ruines, gris le grand fleuve à la course lente. Le colonel arrive un matin et semble émerger de la brume, il est lui-même si gris qu'on croirait un amas de particules décolorées, de cendres, comme s'il avait été enfanté par ce monde privé de soleil.
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L’ordonnance, lui, se tient toujours en dehors du cercle de lumière (qui n’est accessible qu’à partir d’un certain nombre de galons) et il reste donc très concentré sur son étude des couleurs pour ne rien voir d’autre. Surtout pour ne pas voir la chose, l’ordonnance n’imagine pas quel autre mot utiliser, bien sûr il sait qu’il s’agit (qu’il s’agissait) d’un homme, mais vraiment il faudrait un effort pour se rappeler que ce fut un homme alors l’ordonnance, dans ses réflexions à lui-même, parle toujours de chose. 
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1er roman de cette autrice qui connaît bien l'Irak.
Roman très court mais saisissant.
Une jeune fille est enceinte de Mohammed , son ami d'enfance puis son amoureux et est devenu son amant juste un jour et rapidement avant qu'il parte à la guerre. Mais enceinte, elle a déshonoré la famille et dans cette religion, l'honneur passe avant la vie. Cette jeune fille sera tuée par son frère qui a l'autorité paternelle, leur père étant mort. Mohammed mourra à la guerre. Chaque chapitre se fait l'écho du ressenti de chaque membre de la famille. Il n'y a pas de colère, tristesse certes pour certains mais soumission. Cette jeune fille devra être oubliée des siens . Et c'est cela qui fait froid dans le dos : pas de révolte
Quelle horreur, au nom de la religion, de cette culture. Je me dis que j'ai de la chance d'être née dans le pays qui est le mien 😚
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Quelque part après le quarantième jour de pluie, c'était inévitable, un envoyé arrive de La Capitale. Il faut croire que le subalterne zélé n’a pas su être aussi convaincant, aussi confiant, aussi exalté que l'était à l'époque le général, car la Capitale demande des comptes, des rapports, des progrès à matérialiser sur une carte, qu’on voie un peu qu’on puisse se faire une idée, quelque chose à se mettre sous la dent, comme dans toute opération de Reconquête, c’est bien normal, ceux qui gouvernent veulent pouvoir déplacer des pions noirs et rouges sur un plan de ville — ou un planisphère, tout dépend de l'échelle de l'opération. C’est bien normal et ça leur donne la sécurisante sensation de maîtriser la situation. p. 92
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En cette période de reconquête, rares sont ceux qui osent réclamer un changement, protester. Les fous qui s'y risquent ne durent pas longtemps et l'ordonnance est, au fond, un lâche qui tient à la vie. Même si de plus en plus, il a l'impression d'avoir déjà trop vécu. p. 55
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Le colonel n’a pas toujours été un spécialiste, comme on le désigne maintenant dans certains milieux autorisés avec un mélange de respect, d’effroi, et aussi un peu de répugnance. Longtemps il fut un militaire comme les autres, peut-être seulement plus efficace, plus rapide à la réaction, plus malin. Pendant la Longue Guerre, ses chefs l’appréciaient pour ces qualités-là. Lui ne savait pas encore qu’il était pris dans un engrenage qui ne le lâcherait pas, qui le broierait à mesure que lui-même broierait les autres, tous les autres, tous ceux qu’on lui ordonnerait de broyer. C’est cela, peut-être, qui fit vraiment la différence. Demandez à un militaire de tirer sur une cible, il le fait, c’est le métier. Mais certains ont une limite. Pour beaucoup, pendant Longue Guerre, ce furent les Hommes-poissons. Les soldats reculaient devant cette tâche-là avec de grands yeux effarés. Le colonel a lui aussi eu les yeux effarés. Mais il n’a jamais reculé. p. 38
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(Les premières pages du livre)
Ô vous tous
puisqu’il faut que je m’adresse à vous
que je ne peux plus vous ignorer
puisque vous êtes devenus les sombres seigneurs
de mes nuits
puisque vos ombres et vos cris
résonnent dans mes ténèbres
puisque les Hommes-poissons
ont pris possession de mes rêves
vous tous je m’adresse à vous
mes victimes mes bourreaux
je vous ai tués tous
chacun de vous il y a dix ans ou

dix jours

ou ce matin

et depuis je suis condamné à continuer
de vous tuer
chaque fois à chaque nouveau mort
j’augmente ma peine ma

condamnation sans appel

perpétuité
perpétuité
comme vous les Hommes-poissons
je vous revois flotter
dans l’eau grisâtre
flotter
vous revenez depuis peupler mes cauchemars
vous avancez en écartant les roseaux
vous tendez vers moi vos membres décharnés
gonflés par les eaux
vous tendez vos mains et c’est toujours alors
toujours que
je vous tue

à nouveau

tuer les morts vous tuer encore vous mes victimes
puisque c’est la seule voie puisque je vous ai déjà
tués
puisque bientôt vous me tuerez

Le colonel arrive un matin froid et ce jour-là il commence à pleuvoir. C’est cette époque de l’année où l’univers se fond en monochrome. Gris le ciel bas, gris les hommes, grises la Ville et les ruines, gris le grand fleuve à la course lente. Le colonel arrive un matin et semble émerger de la brume, il est lui-même si gris qu’on croirait un amas de particules décolorées, de cendres, comme s’il avait été enfanté par ce monde privé de soleil. On dirait un fantôme, pense le planton de garde en le voyant descendre de la jeep. Et l’ordonnance se met au garde-à-vous et se dit que le colonel ressemble à ces hommes qui n’ont plus de lumière au fond des yeux et qu’il croise parfois depuis qu’il est à la guerre. Seul son béret rouge rappelle que les couleurs n’ont pas disparu.

La grande maison réquisitionnée qui sert désormais de centre de commandement et d’habitation pour les gradés se dresse en haut de la colline. C’est un ancien palais, du temps de l’ancien dictateur, sous l’ancien régime. On y reconnaît le goût pour ce qui brille du plafond au sol, le marbre les dorures les colonnes qui se voudraient ioniques des sièges immenses au capitonnage dur comme du béton utilisés pour des réceptions où ils assurent un inconfort durable aux invités qui, selon l’étiquette, ne doivent rien en laisser paraître. Et dans une niche du hall d’entrée, le buste décapité – puisqu’on ne pouvait pas le déplacer et qu’il était à l’effigie de l’ancien dictateur, celui-là même qu’à l’époque du buste personne n’appelait dictateur.

Le colonel hésite sur le seuil du Palais. Est-il déjà venu ici? Il a servi loyalement l’ancien régime, il a connu d’éphémères honneurs dans des lieux semblables, à l’époque où les bustes étaient intacts dans toutes les niches de tous les palais du pays. Il hésite, comme s’il répugnait à souiller le marbre de ses chaussures gorgées de boue liquide, presque crémeuse, cette boue glissante et claire dans laquelle patauge le monde, dehors. Peut-être un reste de timidité (de déférence?) à l’égard de l’ancien dictateur auquel il fut loyal en son temps, comme beaucoup ici, même si tous font mine de l’ignorer et s’emploient à ne jamais parler de cette époque. Puis il carre les épaules, reprends-toi!, et suit l’ordonnance jusque dans le grand bureau où siège le général en charge des troupes du nord et de la Reconquête.

Trônant derrière sa large table d’acajou, le général est occupé à se couper les poils du nez à l’aide de petits ciseaux argentés et d’un miroir à main, et le colonel pense furtivement que ce miroir de dame provient peut-être d’une chambre à coucher de ce même Palais, une relique des puissants de l’ancien régime.
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Il en va des histoires de famille comme des souvenirs d'enfance. Chacun possède sa propre vérité, sa propre légende, dont il refuse de douter.
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On murmure derrière moi que je ne suis qu'une ombre grise
c'est vrai
mais je m'en accomode
j'ai renoncé au monde des vivants
je n'appartiens pas encore à celui des morts
je suis du monde des ombres
mes visiteurs du soir
mon peuple depuis si longtemps
c'était après la longue guerre
je suis passé à l'ombre
déjà vous les Hommes-poissons et toi
mon premier mort
à la renverse
et vous autres tous ceux qui avez suivi
dans cette guerre abominable
déjà vous étiez mon peuple caché
même si à l'époque il m'arrivait parfois encore
de dormir
de vous échapper
quelques heures
c'est déjà ça de pris
quelques heures de liberté
d'oubli
loin de vous de vos yeux vides de vos visages de cendre
loin de mes souvenirs
il y a bien longtemps que j'ai renoncé à l'oubli
vous êtes devenus mon peuple et chaque jour
dans la pièce du sous-sol

ou

dans d'autres lieux

au fond peu importe le lieu
je grossis vos rangs
je vous croîs et vous multiplie
vous le peuple des caves
vous mon armée d'ombres qui me dévore chaque nuit

c'est un peu comme
une forme de torture très lente
et très raffinée
le tortionnaire torturé
de sa propre main
le persécuteur persécuté
chaque jour dans la pièce du sous-sol
je regarde l'homme dans le cercle de lumière
dans cette lumière trop crue qui me brûle les yeux
à moi qui n'ai plus droit à
la lumière
je regarde cet homme
cette nouvelle recrue
cet homme qui va devenir mon ombre
qui va alourdir mon ombre sur mes pas
c'est fou ce que c'est lourd une ombre
on ne le croirait pas
avez vous déjà remarqué
quand le soleil tombe à l'horizon
cette ombre longue et lourde le long des murs
accrochée à vos pas
ce qu'elle est lourde à traîner
et quand vous vous retournez
vous ne la reconnaissez pas
c'est qu'elle vous montre la part que vous ne voulez pas voir

la part d'ombre

mais moi je la regarde je la cherche
je la connais
et chaque jour inlassablement je l'accrois
je la nourris
si bien que
désormais
quand je longe les murs
on dirait que l'ombre a englouti la ville
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Depuis qu'il est arrivé dans la Ville, il pleut sans discontinuer. L’eau n'arrête pas les opérations de la Reconquête, mais elle les ralentit. Heureusement, elle ralentit aussi l'Ennemi, désormais terré sur la rive droite, cette rive qui vue du Palais ne ressemble plus à rien, comme si un architecte fou était passé par là. Il faudrait inventer un nouveau vocabulaire pour la destruction de la matière, pense le colonel. De nouveaux mots qui rendent la destruction absolue d'une ville, d'un quartier, d'une maison, d'un homme. Comment appelle-t-on une rue que l'on ne reconnaît plus comme rue (c'est un peu comme un corps qui ne ressemble plus à un corps, mais cela le colonel n’y songe étonnamment pas).La grande rue, par exemple, cette artère de la rive gauche que la jeep emprunte chaque jour et qui semble un sillon tracé maladroitement, ouvert par une charrue de mort dans un mélange de béton, de métal, d'asphalte et de chair humaine, quelque chose d'éventré, les entrailles de la ville à l'air, la terre violée, dévastée, ici rien ne poussera plus, terre sans blé, sans moissons. Quand la jeep remonte la rue-sillon en cahotant, le colonel cherche dans sa tête des termes pour décrire ce qu'il voit et chaque fois s'irrite de ne rien trouver qui semble correspondre. (p.36)
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tuer les morts vous tuer encore vous mes victimes puisque c'est la seule voie puisque je vous ai déjà
tués
puisque bientôt vous me tuerez
(p.14)
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Quand il fait un effort et regarde en arrière (mais cela lui est de plus en plus difficile) il se souvient de son enfance, de sa jeunesse, de ces sommeils foudroyants qui n'étaient pas un combat et qui le saisissaient, l'emportaient, le défaisaient de son corps, oui c'est cela, cette sensation d'échapper quelques heures à son corps à sa vie ,à soi, et l'emportaient au loin puis le ramenaient quelques heures plus tard sur la rive comme déposé par une vague et il se souvient encore de cette sensation de coton qu’il éprouvait au réveil et qu'il n'a plus ressenti depuis de longues années.
Au début, le sommeil s'est seulement fait lent à venir, comme l'ennemi qu'on attend dans la plaine et qui n'apparaît pas, comme l'ami absent au rendez-vous. Mais cette époque -le colonel date ça vers la fin de l'ancien régime- il finissait par s'assoupir, souvent à l'aube, il se tournait et se retournait dans le lit devenu trop tiède poisseux jusqu'à apercevoir l'est, par la fenêtre, la première lueur de l’aurore et alors il avait la sensation qu'un poids dans sa poitrine se relâchait, comme si le lynx féroce lynx de métal et de velours assis sur son cœur et ses poumons se relevait et s'en allait de ses pattes feutrées, et les yeux fixés sur la lumière rosée, il finissait par fermer les yeux et pour quelques heures, parfois seulement quelques minutes, il s'échappait de son corps, il accédait à l'oubli bienheureux du dormeur. (p.27)
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J'ai renoncé au monde des vivants
je n'appartiens pas encore à celui des morts
je suis du monde des ombres
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